Intervention de Gilbert Barbier

Réunion du 26 novembre 2015 à 10h30
Financement de la sécurité sociale pour 2016 — Rejet d'un projet de loi en nouvelle lecture

Photo de Gilbert BarbierGilbert Barbier :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, nous arrivons en nouvelle lecture de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, après un échec de la commission mixte paritaire et une seconde délibération, lundi dernier, à l’Assemblée nationale.

À l’aune des débats, on ne peut que constater le peu de cas accordé à nos travaux en première lecture par la majorité des députés - pas toute la majorité, d’ailleurs - et le peu de cas porté surtout par vous, madame la ministre, à nos propositions, même si vous venez d’essayer de minimiser cette attitude.

En première lecture, notre assemblée avait cherché à améliorer ce texte, au regard de ses insuffisances, par quelques mesures certes emblématiques, mais reflétant la réalité. Grâce à un travail minutieux des rapporteurs et à une discussion approfondie en séance publique, un certain nombre de propositions en faveur de nos concitoyens avaient été votées.

Nous avions reconnu les quelques avancées de ce texte, comme la protection universelle maladie, la garantie des impayés de pension alimentaire, ou encore quelques mesures intéressantes concernant la prévention, notamment sur la PREP, ou prophylaxie préexposition.

Bien sûr, nous avions dénoncé les procédures financières tendant à faire croire que les déficits étaient définitivement derrière nous et dont le bilan a été détaillé par le rapporteur général voilà quelques instants : un déficit réduit, certes, mais avec 17 milliards d’euros de prélèvements supplémentaires depuis trois ans.

Cette fragilité budgétaire est d’ailleurs implicitement reconnue par le transfert de 23 milliards d’euros de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, à la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, sans qu’aucune mesure soit proposée pour consolider cette dette.

En deuxième lecture, l’Assemblée nationale a repris la plupart du temps la rédaction qu’elle avait adoptée en première lecture, avec votre consentement, madame la ministre, y compris pour les dispositions qui auraient pu faire consensus.

Cette attitude systématique de retour à la case départ confirme l’impression de dédain que nous avons ressenti dans cet hémicycle, un dédain que vous avez affiché tout au long de la discussion de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale comme au moment de l’examen du projet de loi relatif à la santé.

Cette attitude va à contre-courant du discours prononcé il y a une semaine par le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement, qui a déclaré ceci : « Le bicamérisme place le dialogue parlementaire au cœur du fonctionnement de notre démocratie. Ce dialogue entre le Gouvernement et les deux assemblées et entre l’Assemblée nationale et le Sénat participe de la qualité de la loi. Il permet à chacun d’affiner ses positions dans le débat, dans l’échange et dans la contradiction. Il donne à la loi plus de force et de cohérence. »

Pour en revenir au texte qui nous préoccupe, vous gardez vos cibles privilégiées : la médecine libérale, l’industrie du médicament et surtout la famille, sans vouloir un seul instant aborder les réformes structurelles et la principale d’entre elles, la restructuration hospitalière évoquée par le rapporteur général.

Est-il utile de rappeler que nous avons deux fois plus de lits d’hospitalisation qu’un pays comme l’Allemagne ? Nous ne pouvons garder une organisation datant de 40 ou 50 ans, dont la plus importante date de 1970, ne serait-ce qu’en fonction de l’évolution des pratiques et des progrès de la médecine. Il faudrait du courage et de l’abnégation pour conduire cette réforme, j’en conviens.

Pas de grande réforme, donc, mais pas non plus de petites, quand vous rejetez des mesures comme la généralisation de la déduction forfaitaire à 1, 50 euro pour les particuliers employeurs, l’allègement des charges sociales des jeunes agriculteurs, qui a été repoussé d’un an, la suppression de l’article 12 concernant le recouvrement des cotisations de sécurité sociale des professions libérales, et d’autres propositions sans impact majeur.

Tout en comprenant que la majorité des députés accepte difficilement le report de l’âge de départ à la retraite à 63 ans, pourquoi se précipiter à réformer la tarification des soins de suite et de réadaptation sans étude d’impact, ce qui pose un véritable problème ?

De tout cela, vous ne souhaitez pas discuter. Vous vous réfugiez derrière une prétendue nécessité d’économie, alors que le Haut Conseil des finances publiques considère que « les mesures nouvelles pour 2016 seront votées sans que les économies prévues pour les financer aient été portées dans leur intégralité à notre connaissance ni dûment documentées ».

Votre attitude à l’égard de notre assemblée est similaire. Aussi, est-il bien nécessaire de discuter de ce texte à nouveau ? Je ne le pense pas.

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