Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, puisqu’il est ici question d’une motion qui s’apparente à un acte d’accusation, je vais me faire l’avocate de la coupable – ou plutôt des coupables –, coupable de la réduction de 40 % en trois ans du déficit des comptes sociaux !
Mesdames, messieurs les membres de la majorité sénatoriale, force est de constater que, au cours de nos échanges lors des réunions de commission et des débats dans l’hémicycle, vous avez été les premiers tantôt à réclamer des économies de 100 milliards d’euros à 150 milliards d’euros sur le budget de l’État, tantôt à le déséquilibrer, par un mécanisme simple consistant à augmenter les dépenses et à diminuer les recettes.
Surtout, vous ne donnez aucune explication du déséquilibre financier que vous imprimez à ce budget et ne proposez aucune solution de recettes pour le rééquilibrer. Je ne sais que dire, à part que vous n’en êtes pas à une contradiction près – avec tout le respect que je vous dois.
Reprenons point par point les motifs invoqués par votre motion, qui ne manque pas de mettre en exergue griefs et chefs d’accusation.
Tout d’abord, vous dites que, en dépit d’un « niveau record » des prélèvements obligatoires, « les déficits, en particulier ceux de la branche maladie et du Fonds de solidarité vieillesse, se stabilisent à des niveaux très élevés ». Cette affirmation mérite que l’on s’y attarde.
L’idée que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale soit le plus équilibré de ces dix dernières années ne vous a pas plu dès le départ. Vous avez précisément supprimé les articles 26 à 28, puis les articles 30, 34, 36 et 38 et les articles 54 à 56 relatifs aux objectifs de recettes et de dépenses pour les années 2015 et 2016. Avouez que cela n’avait aucun sens, du moins pour nous. Séance après séance, vous avez dénaturé et « détricoté » ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.
En fait, c’est la dette qui se stabilise depuis trois ans, puisque le déficit global se réduit d’année en année : en 2013, il s’élevait à 15, 4 milliards d’euros ; en 2014, à 13, 2 milliards d’euros et, en 2015, à 12, 8 milliards d’euros. Pour 2016, le déficit est prévu à 9, 7 milliards d’euros. Il me semble que ces chiffres vous ont été rappelés à plusieurs reprises, lors de la première lecture, par le chef de file de notre groupe, Yves Daudigny et, pour le Gouvernement, par la ministre Marisol Touraine.
En 2016, le solde cumulé du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse retrouvera son niveau d’avant 2008. Je le dis : c’est grâce à l’actuel gouvernement et pas à un autre ! En fait, il s’agit d’une réduction du déficit de 40 % en trois ans.
Plus spécifiquement, en 2016, contrairement à ce que laisse penser le texte de votre motion, la branche maladie retrouvera sa tendance baissière engagée en 2013, avec un déficit de 6, 2 milliards d’euros, quand le déficit du FSV entamera son inflexion vers la baisse, avec un montant de 3, 5 milliards d’euros.
Les réformes entreprises depuis 2012 permettent donc à ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 d’être plus équilibré que les précédents. Comme vous le savez, depuis deux ans, les résultats sont souvent meilleurs que les prévisions.
Je ne sais si je dois vous remercier, monsieur le rapporteur général, d’avoir noté le retour à l’équilibre des branches famille, vieillesse, accidents du travail et maladies professionnelles. En effet, d’une certaine manière, vous mettez en exergue le courage dont a fait preuve le Gouvernement en adoptant des mesures difficiles, qui demandent notamment des efforts aux assurés – mais tout le monde sait que le laisser-faire serait encore plus dramatique !
Vous évoquez des perspectives pluriannuelles « insuffisamment renseignées » et ne comportant, pour l’ONDAM, « aucune information après 2016 ». Or l’actuel plan pour la maîtrise de l’ONDAM prévoit des économies de 2015 à 2017 et il me semble que nous étudions aujourd’hui le plan de financement de la sécurité sociale pour 2016.
Évoquer la non-tenue de l’ONDAM dans cette motion, à l’heure où sa progression est historiquement basse, car maîtrisée, alors même que de nouveaux droits sont ouverts, n’est pas au niveau du débat que nous devrions avoir dans cet hémicycle. Vous comprenez bien, mes chers collègues, que la majorité gouvernementale ne fait pas tous ces efforts pour relâcher ensuite son attention les années suivantes : c’est une question de pragmatisme et, surtout, de bon sens.
Vous affirmez que « la loi de 2014 ne suffira pas à garantir la pérennité du système de retraites à moyen terme et qu’il est nécessaire de prendre rapidement des mesures d’adaptation à l’évolution de l’espérance de vie ».
Vous le savez, en l’état, le système de retraites sera à l’équilibre jusqu’en 2030. Il nous faudra, bien sûr, rester vigilants et, éventuellement, nous adapter, mais rien ne justifie aujourd’hui un départ à la retraite à taux plein à l’âge de 63 ans. La question du prolongement de la vie est un sujet dont nous devrons débattre, et nous en débattrons sans doute, mais la question essentielle est celle de la vie en bonne santé pendant ce prolongement de la vie, plutôt que celle de l’âge du départ à la retraite. Sur ce terrain, nous avançons, avec le compte personnel de prévention de la pénibilité que nous avons proposé.
En ce qui concerne la ponction de 0, 15 point de cotisation effectuée sur la branche accidents du travail et maladies professionnelles au profit de l’assurance maladie, tout le monde constate, mes chers collègues, que les différentes branches se portent mieux, notamment la branche AT-MP, excédentaire chaque année depuis 2013. Cette ponction est inscrite dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 et il sera important que nous veillions tous à ce que cette aide ponctuelle permette à la branche maladie de rattraper son retard vis-à-vis des autres branches.
Très ponctuellement, la solidarité entre les branches doit pouvoir être envisagée. Vous le savez, cette ponction temporaire n’empêchera pas ces deux branches d’être fortement excédentaires en 2016.
Pour la première fois depuis sept ans, le budget de la sécurité sociale présente un déficit de moins de 10 milliards d’euros ; pour la première fois depuis 2004, la branche vieillesse sera à l’équilibre et le restera jusqu’en 2030 ; pour la première fois depuis 2002, la dette sociale va baisser en valeur.
Que reprochez-vous à ce budget ?