Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le budget proposé pour la mission « Recherche et enseignement supérieur » dans le projet de loi de finances pour 2016 était initialement stable. À l’issue de l’examen du projet de loi par l’Assemblée nationale, l’enveloppe a finalement été réduite de 19 millions d’euros à périmètre constant, avec à la fois une hausse de 100 millions d’euros sur le programme 150, « Formations supérieures et recherche universitaire », et une diminution de 119 millions d’euros sur les programmes dédiés à la recherche.
Cette baisse des moyens accordés à la recherche est contraire à l’engagement du Président de la République de garantir la sanctuarisation des crédits de la recherche. C’est un signal négatif envoyé au monde de la recherche, et nous le regrettons.
Concernant plus spécifiquement les crédits consacrés à l’enseignement supérieur, ils sont préservés pour 2016, malgré la contrainte budgétaire forte. Je m’en félicite.
L’enveloppe supplémentaire de 100 millions d’euros est présentée comme permettant de couvrir les besoins des établissements d’enseignement supérieur, compte tenu de la dynamique du nombre d’étudiants. En réalité, elle correspond surtout au montant du prélèvement opéré par le Gouvernement, en 2015, sur le fonds de roulement de plusieurs établissements et constitue ainsi un rattrapage bienvenu, même s’il faut bien avoir conscience que ce ne sont pas nécessairement les établissements ponctionnés qui bénéficieront de ce retour…
Les subventions pour charges de service public versées aux établissements augmentent, sous l’effet notamment de la création de 1 000 emplois. Je m’interroge toutefois sur la réalité du nombre de postes effectivement pourvus et sur les incidences concrètes de ces créations d’emplois sur l’encadrement des étudiants. Vous savez très bien, mes chers collègues, que l’équilibre budgétaire d’un certain nombre d’universités est construit à partir d’un gel de postes !
Si l’enveloppe contractualisée au titre des contrats de plan État-région, les CPER, pour la période 2014-2020 est modeste, il est surtout à espérer que les collectivités territoriales disposeront des moyens nécessaires pour participer à la hauteur des attentes, alors que leurs dotations sont en baisse.
Le nombre d’étudiants ne cesse d’augmenter, comme le montrent les quelque 40 000 étudiants supplémentaires inscrits à la rentrée 2015. La question de l’orientation de tous ces jeunes devra être posée. En effet, on sait très bien qu’un certain nombre entre eux choisissent davantage un statut qu’un avenir !
Au-delà des crédits budgétaires, dont la hausse est nécessairement contrainte, il est également indispensable de maintenir et de développer les autres ressources.
Parmi les ressources qui diminuent de façon très inquiétante et pour lesquelles une solution pérenne devra être trouvée figure la taxe d’apprentissage. Des études annoncent des baisses moyennes de 37 % des recettes issues de la part « barème » de cette taxe par rapport à 2015.
Monsieur le secrétaire d'État, selon la presse, vous auriez vous-même reconnu avoir été « surpris par la violence de l’impact de la réforme ». Nous vous écouterons donc avec intérêt sur ce sujet.
Ensuite, je le réaffirme, selon moi, les frais d’inscription universitaires devraient être augmentés. Avoir gelé les droits d’inscription à la rentrée 2015 est une erreur. Les frais d’inscription en licence s’élèvent à 184 euros : autant dire que s’inscrire à l’université coûte moins cher que s’inscrire à la plupart des clubs de sport ! Cette augmentation se justifierait encore davantage pour les étudiants étrangers, les montants actuels conduisant même à dévaloriser certaines formations aux yeux d’étudiants, qui, habitués à des frais autrement plus élevés dans leur pays, peuvent douter de la valeur de nos formations.
Les contrats de recherche doivent également être développés. À cet effet, je présenterai, lors de l’examen des articles non rattachés de la seconde partie du projet de loi de finances, un amendement visant à ce qu’au moins 10 % des dépenses de recherche ouvrant droit au bénéfice du crédit d’impôt recherche – le CIR – réalisées par les plus grosses entreprises le soient dans le cadre de laboratoires universitaires. Actuellement, moins de 5 % de l’assiette du CIR concerne la recherche effectuée par des organismes publics. C’est dommage, car une augmentation de cette part améliorerait considérablement l’efficacité du dispositif, tout en donnant des moyens supplémentaires à l’université, à partir de l’argent de l’État, sans déséquilibrer le budget. Nous y reviendrons tout à l'heure.
Les universités ont amélioré leur gestion et mis à profit l’autonomie qu’elles ont acquise depuis l’adoption de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, ou « loi LRU ». Elles connaissent une situation financière stable, satisfaisante. Toutefois, certaines maintiennent leur équilibre au prix d’arbitrages lourds et engageants pour l’avenir. Je pense à la non-réalisation de certaines opérations d’entretien, ou encore aux gels de postes que j’ai évoqués tout à l'heure. Ce ne sont pas là des solutions d’avenir !
Il est indispensable que l’autonomie soit poursuivie, en particulier dans les domaines des ressources humaines et du patrimoine immobilier. Certes, l’expérimentation de la dévolution du patrimoine ne peut être généralisée, du moins pas dans les conditions actuelles, car la pérennisation de cette charge, dont le coût s’élève aujourd'hui à 850 millions d’euros par an, serait, bien évidemment, très difficile à supporter pour l’État.
Pour autant, monsieur le secrétaire d'État, vous avez indiqué que ce sujet constituait l’une de vos priorités. Nous suivrons donc avec attention les différentes propositions que vous formulerez.
Par ailleurs, la réforme du système de répartition des moyens à la performance et à l’activité, ou SYMPA, est au point mort. Depuis le début de l’année, rien n’a été proposé. La conférence des présidents d’université a fait savoir qu’elle ne souhaitait pas pour l’instant que lui soit appliqué le modèle de répartition des crédits concernant les établissements formant les ingénieurs. Je pense que l’on ne pourra pas en rester là.
Mes chers collègues, je veux également insister auprès de vous tous sur la situation de l’enseignement supérieur privé, aujourd'hui sacrifié, alors qu’il rend un service énorme à notre nation, en formant 80 000 jeunes – c’est tout de même extrêmement important –, sans coûter cher à l’État. C'est la raison pour laquelle je vous proposerai d’adopter, de nouveau, un amendement tendant à réévaluer la dotation des établissements concernés, comme nous l’avons déjà fait depuis plusieurs années dans cette enceinte.
S’agissant des crédits du programme 231, « Vie étudiante », l’effort budgétaire en faveur des aides sociales directement versées aux étudiants reste élevé – je rappelle que le nombre d’étudiants boursiers a augmenté de plus de 12 % entre 2010 et 2015.
Je regrette vivement que le Gouvernement, après avoir voulu les supprimer, décide, cette année, de réduire de moitié le montant des aides au mérite des nouveaux entrants…