Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaiterais rappeler que la mission « Régimes sociaux et de retraite » recouvre des régimes en déséquilibre démographique, du fait de l’écart entre le nombre de cotisants et de pensionnés, comme cela a été souligné.
À ce titre, l’État est sollicité non pas pour subventionner les régimes, mais pour contribuer à l’équilibre des régimes sociaux et de retraite des transports terrestres, des marins, des mines et de la SEITA notamment.
Si le nombre de pensionnés a encore diminué en 2015, les crédits de la mission ont aussi décru. Cette diminution s’explique certes par la baisse du nombre de pensionnés, mais surtout par la très faible revalorisation des prestations et le report de la revalorisation pour 2015.
Je voudrais insister sur deux éléments précis : d’une part, les conséquences de la reconnaissance des mineurs licenciés lors des grèves de 1948, d’autre part, la négociation de la future convention d’objectifs et de gestion, la COG.
Le régime des mines représente 20 % des crédits de la mission en 2016 et occupe donc une part non négligeable dans notre discussion. Il possède une histoire intimement liée au mouvement ouvrier et à l’action syndicale. Ainsi, lorsque les mineurs ont entamé, le 4 octobre 1948, une grève en réaction à un projet du Gouvernement de démantèlement de leur statut et de baisse de leur rémunération, leur action fut violemment réprimée.
En plus des milliers de blessés et des dizaines de morts, plusieurs centaines de mineurs furent condamnés et emprisonnés pour « atteinte à la liberté de l’industrie et du travail » et de nombreux mineurs grévistes furent par ailleurs licenciés par la société des Houillères du Nord et du Pas-de-Calais, là où la grève débuta.
Depuis des années, les anciens mineurs ont fait de la reconnaissance de cette répression et du préjudice subi un combat pour l’honneur, appuyés par des élus locaux, des parlementaires, dont notre collègue Dominique Watrin, qui a fait entendre, au sein de cet hémicycle, leur voix.
Lors du projet de loi de finances pour 2015, la garde des sceaux a répondu à cette demande de justice. Aussi, alors que l’on ne connaissait l’an dernier qu’une trentaine de dossiers, cette reconnaissance a permis qu’une centaine de nouveaux cas se fassent connaître. Malheureusement, l’examen de ces dossiers est directement menacé par le cadre restrictif de la loi. À ce projet de loi de finances, nous avons donc déposé un amendement visant à garantir que tous les mineurs ou ayants droit concernés puissent accéder à cette reconnaissance, et ce indépendamment des contraintes administratives.
Devant l’engagement du ministère de la justice d’organiser une concertation avec les représentants syndicaux et Dominique Watrin, nous avons retiré cet amendement, que nous redéposerons si nécessaire dans le cadre du projet de loi de finances rectificative. Cette reconnaissance illustre en tout cas que des modifications remettant en cause cette logique de diminution inexorable des crédits peuvent avoir lieu, même si les régimes spéciaux sont fermés et que le nombre de pensionnés est en diminution.
Je voudrais également insister sur la négociation de la future convention d’objectifs et de gestion 2016-2020 avec ces régimes spéciaux. En effet, cet outil de gestion pluriannuel ne doit pas se transformer en simple outil pour organiser le remplacement des départs à la retraite par des logiciels informatiques. Nous avons vu encore récemment que l’absence de réflexion globale sur le non-remplacement des départs à la retraite à la CNAV a entraîné des cafouillages administratifs regrettables – c’est le moins que l’on puisse dire.
Selon la CGT, quelque 8 000 pensions auraient été versées en retard cette année. Mes chers collègues, je vous laisse imaginer le nombre de personnes qui ont dû connaître des difficultés. Il est donc indispensable que, lors de la négociation de la future COG, ces dysfonctionnements soient pris en considération, afin de mettre fin aux fermetures des accueils et de maintenir une présence physique dans les territoires, en parallèle des procédures informatiques.
Je voudrais, enfin, souligner que le décret pris par la ministre de la santé pour mettre en place un « droit opposable à la retraite » ne vise que le régime général et ne concerne donc pas les régimes spéciaux, ni les pensions de réversion. C’est lourd de conséquences pour les femmes concernées, qui se trouvent dans des situations inextricables. Je n’ai pas le temps de développer ce point, mais je souhaitais attirer votre attention, monsieur le ministre, ainsi que celle de mes collègues.
Pour l’ensemble de ces raisons, et devant la baisse des crédits affectés à la mission « Régimes sociaux et de retraite », le groupe CRC votera contre ce budget.