La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de Mme Françoise Cartron.
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Défense ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’actualisation de la programmation militaire intervenue l’été dernier a revu à la hausse les moyens humains et financiers de la défense pour la période 2015-2019. Cette actualisation a fait l’objet d’un consensus entre l’Assemblée nationale et le Sénat, lequel a été à l’initiative de l’introduction de plusieurs garanties supplémentaires pour les ressources de la défense.
Le projet de budget pour 2016 est conforme à la nouvelle programmation.
Ainsi, les recettes exceptionnelles, initialement de 1, 6 milliard d’euros, se limitent dorénavant aux seuls produits de cession, pour 250 millions d’euros. Notre position sur ce point a donc été entendue. Je m’en félicite, tout comme de la décision du Sénat de maintenir le plafonnement de la décote « Duflot », que l’Assemblée nationale voulait supprimer, au mépris du respect de la loi de programmation militaire. Aujourd’hui comme hier, notre souci est d’assurer des recettes certaines à la défense, dans le cadre d’un budget sincère.
Les ressources de la mission « Défense » augmentent de 600 millions d’euros par rapport à la programmation initiale et vous allez nous présenter tout à l’heure, monsieur le ministre, un amendement dont l’adoption portera cette augmentation à 700 millions d’euros. Par conséquent, les crédits de la mission s’établiront à 32, 1 milliards d’euros.
Après l’annulation des déflations d’effectifs prévues en 2015, ce sont 2 300 postes qui seront créés en 2016. Pour la période allant de 2017 à 2019, le Président de la République a indiqué que les déflations d’effectifs prévues n’auraient pas lieu. J’espère que M. le ministre pourra nous en dire plus tout à l’heure.
La conformité du projet de budget pour 2016 à la loi de programmation militaire actualisée justifie l’avis favorable de la commission des finances, qui s’est prononcée avant les événements du 13 novembre.
Pour autant, et indépendamment des nécessaires ajustements qui devront intervenir pour tenir compte de la situation nouvelle, je souhaite relever quelques points qui devront faire l’objet d’une vigilance particulière de notre part, concernant les conditions d’exécution de l’exercice 2015 et de la loi de programmation militaire elle-même.
En effet, le budget pour 2016 ne permettra de respecter la programmation que si l’exécution de l’année 2015 est elle-même conforme, sinon le report de charges enflera et la soutenabilité de la programmation sera compromise.
Pour cela, il faut bien sûr que les crédits budgétaires de 2 milliards d’euros remplaçant les recettes exceptionnelles prévues en 2015 soient ouverts. Il faut également que le dépassement de la provision pour les opérations extérieures, les OPEX, soit bien pris en charge dans le cadre de la solidarité interministérielle. Ce principe vaut d’ailleurs aussi pour le surcoût lié à l’opération Sentinelle. Il faut ensuite que soient restitués à la mission « Défense » les 56, 7 millions d’euros réglés à la Russie cet été, à la suite de l’annulation de la vente des Mistral.
Il faut enfin que la contribution du ministère de la défense à la solidarité interministérielle soit aussi réduite que possible.
Le projet de loi de finances rectificative et le décret d’avance sont plutôt rassurants sur ces points, même si, une fois encore, le ministère de la défense participe à la réserve de solidarité interministérielle, qui ne finance pas que les OPEX, mais aussi des dépenses qui n’ont pas de lien direct avec les besoins de nos armées. De ce point de vue, on ne peut pas dire que le budget de la défense soit totalement sanctuarisé.
Nous devrons veiller à ce que les bonnes intentions soient maintenues jusqu’à l’adoption du collectif. Il conviendra de voir – et je vous pose la question, monsieur le ministre – si le renforcement de Sentinelle et l’intensification des frappes en Syrie n’imposent pas de réévaluer le surcoût des OPEX et des opérations intérieures, les OPINT. Nous aurons l’occasion d’en parler à la faveur de l’examen de l’amendement que vous avez déposé.
La vigilance s’impose également parce que la loi de programmation militaire actualisée, et donc le projet de budget pour 2016, comporte des insuffisances. Je pense aux besoins d’infrastructures, liés notamment à l’opération Sentinelle ou à la sécurisation des sites de stockage de munitions, aux financements des OPEX et des OPINT.
Pour conclure, je souhaite m’interroger avec vous, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur deux points liés à la situation nouvelle.
Le Président de la République comme le Premier ministre ont déclaré que nous étions en situation de guerre, ce qui change la nature et l’importance des OPEX et des OPINT et, partant, leur financement. Peut-on encore parler de surcoûts et de provisions pour n’en fixer le montant qu’à un tiers de la dépense réelle ? Je ne pense pas que la réponse au besoin de financement puisse consister à choisir entre un pacte de sécurité et un pacte de stabilité. Nous avons besoin des deux et les deux sont complémentaires et indissociables, car la souveraineté d’un pays ne se divise pas : elle est militaire, diplomatique, mais aussi financière.
Dans le même temps, il n’y a pas de raison que la France supporte seule une dépense qui contribue à la sécurité de l’Europe entière.
Nous sommes sensibles aux manifestations de solidarité de nos partenaires et amis. Cependant, je forme le vœu que l’expression de cette solidarité ne se limite pas à se donner bonne conscience en nous accordant des facilités pour atteindre les objectifs de convergence, mais qu’elle se traduise également sous une forme concrète et financière.
Les OPEX représentent 1, 2 milliard d’euros en 2015, soit une somme relativement modeste ramenée à l’échelle des vingt-huit pays de l’Union européenne et de ses plus de 500 millions d’habitants. Au-delà de la dimension purement financière, une telle manifestation de solidarité serait aussi l’occasion d’envoyer un message politique et diplomatique au monde entier et de relancer la construction européenne.
Plus globalement, je pose la question de la signification d’une loi de programmation pluriannuelle dans un état de guerre où les maîtres mots sont « adaptation » et « réactivité ». Sans doute une programmation et des perspectives sont-elles souhaitables, mais, en cet instant, nous sommes dans l’urgence et devons en permanence adapter nos moyens et nos objectifs à la situation, comme vous le faites en nous soumettant un amendement, monsieur le ministre.
Le Président de la République lui-même en convient, quand il annonce, devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles, l’abandon de la suppression de 9 218 postes programmée entre 2017 et 2019. Nous approuvons cette décision, mais celle-ci constitue, en soi, une modification des objectifs et des moyens de la loi de programmation militaire, qui vient d’être révisée.
À défaut d’une nouvelle actualisation de la loi de programmation, se pose la question de la manière dont le Parlement sera saisi des nécessaires inflexions et de leur financement. La loi sur l’état d’urgence que nous venons de voter prévoit un rendez-vous régulier avec le Parlement : il me semble souhaitable que ce rendez-vous, même s’il porte par essence sur la situation intérieure, puisse être l’occasion pour le Gouvernement de faire un point sur nos engagements extérieurs et d’informer le Parlement des besoins de nos armées.
Je ne saurais terminer mon propos sans rendre hommage à travers vous, monsieur le ministre, à nos militaires qui assurent ici, sur notre territoire, aux côtés des forces de l’ordre, la sécurité des Français, et à ceux qui, à l’extérieur de nos frontières, traquent l’État islamique sous toutes ses formes.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI -UC. – M. Daniel Reiner applaudit également.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens avant tout à rendre hommage au sergent-chef Alexis Guarato, des forces spéciales, dont le véhicule avait sauté sur une mine, le 13 octobre dernier, au nord du Mali, et qui est mort dans la nuit de mercredi à jeudi des suites de ses blessures. J’ai une pensée pour sa famille et ses deux camarades toujours hospitalisés. Nous savons que c’est au péril de leur vie que nos militaires sont engagés pour la défense de la France.
Je formulerai quelques constats, monsieur le ministre.
Premièrement, le budget de la défense prévu pour l’année prochaine est conforme à la programmation militaire actualisée en juillet dernier. En particulier, la priorité est donnée à l’équipement, et je salue le dépôt par le Gouvernement d’un amendement visant notamment à abonder les crédits de munitions, mesure que j’avais demandée il y a un an.
Actuellement, les programmes 146 et 178 connaissent de fortes tensions de trésorerie, mais les mesures du projet de collectif budgétaire en cours d’examen à l’Assemblée nationale lèvent a priori les difficultés de fin de gestion de l’exercice 2015, et donc les hypothèques qu’elles représentaient pour le budget de 2016. Je signale que le report de charges, quoiqu’il demeure important, diminue.
C’est bien sûr avec satisfaction que je relève ces éléments, alors que l’année qui s’achève aura été marquée, de façon si tragique, par l’évidence des menaces et, par conséquent, la nécessité de sanctuariser, puis de renforcer, les moyens de notre défense.
À cet égard, comme Dominique de Legge, je me félicite que le Sénat ait adopté, lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances, les amendements de nos deux commissions qui visent à maintenir le plafonnement de la décote dite « Duflot » pour les cessions immobilières du ministère de la défense.
Deuxièmement, les annonces du Président de la République devant le Congrès, le 16 novembre dernier, n’ont pas d’incidence sur le projet de loi de finances pour 2016, puisque l’abandon de la déflation de 6 915 postes concerne les exercices 2017, 2018 et 2019. Les candidats à l’élection présidentielle de 2017 devront intégrer dans leur réflexion économique que les engagements pris en matière d’équipements et d’effectifs les obligeront à augmenter de plus de 1 milliard d’euros au minimum, chaque année, les crédits de la mission « Défense » à partir de 2017.
Troisièmement, une dizaine de programmes d’armement doivent être lancés avant la fin de 2015 et la Délégation générale de l’armement, la DGA, devra dépenser 2, 2 milliards d’euros en quelques heures à la fin de l’année calendaire, entre la publication de la loi de finances rectificative pour 2015 et la clôture de l’exercice. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous rassurer sur ces deux sujets ?
En ce qui concerne les équipements, je souhaiterais vous poser trois questions.
Tout d’abord, vous avez exigé d’Airbus, pour la fin de 2016, la mise à disposition de six avions A400M au standard 1.5, premier standard militaire pour un appareil qui reste, pour le moment, essentiellement logistique. Êtes-vous confiant dans le respect de cette échéance ?
Ensuite, nous avons largement évoqué la nécessité d’acheter des avions de transport tactique d’occasion –C130H – ou neufs – C130J. Il semble que l’offre américaine soit d’un montant supérieur aux crédits prévus pour cette acquisition. Allez-vous réduire la cible ou procéderez-vous par réaffectation de crédits ?
Enfin, nous savons que les ravitaillements en vol des hélicoptères sont indispensables en opérations extérieures. Il apparaît que seuls les Caracal ont été conçus avec une perche de ravitaillement et que les autres appareils, y compris le NH90, n’ont pas été configurés en ce sens. Comment comptez-vous répondre à cette problématique ?
En conclusion, je vous confirme que la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis favorable sur les crédits du programme 146.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Yves Pozzo di Borgo et Yvon Collin applaudissent également.
Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, je m’associe naturellement à l’hommage que vient de rendre Jacques Gautier au sous-officier tombé très récemment au Mali et à ses camarades blessés.
Vous le savez, monsieur le ministre, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est particulièrement vigilante quant au respect de la programmation militaire, en particulier de sa trajectoire financière.
Nous considérons que cette vigilance se trouve aujourd’hui récompensée : le projet de loi de finances rectificative qui a été déposé à l’Assemblée nationale règle les questions que soulevait la fin de gestion de l’exercice 2015 et permet donc d’asseoir sur des bases saines le budget pour 2016. Cela a évidemment contribué à l’avis favorable émis par notre commission sur ce projet de budget.
Tous les besoins qui devaient être financés le sont au travers de ce collectif budgétaire, qu’il s’agisse de la conversion en crédits budgétaires des recettes initialement attendues de la cession des fréquences hertziennes, de la couverture du surcoût des OPEX et de l’opération Sentinelle, du remboursement au programme 146 du coût net de l’annulation de la vente du bâtiment de projection et de combat Mistral à la Russie, qui avait été imputé sur ce programme, et, enfin, de la prise en charge des besoins de masse salariale résultant de l’actualisation de la manœuvre « RH » et des dysfonctionnements du logiciel Louvois.
Certes, par le jeu des annulations de crédits, ces besoins de masse salariale ont été laissés à l’autofinancement du ministère de la défense. Cependant, je signale que, sur une annulation globale de près de 300 millions d’euros, seuls les deux tiers relèvent du périmètre financier de la programmation militaire et, pour ce qui concerne ce périmètre, l’essentiel des annulations sont compensées par les intérêts rapportés par les versements français en dépôt à l’Organisation conjointe de coopération en matière d’armement, l’OCCAR.
Le programme d’équipement militaire est ainsi parfaitement sanctuarisé. Le Gouvernement et vous-même, monsieur le ministre, devez être félicités pour cette décision de bon sens.
Bien sûr, nous suivrons avec intérêt, au long de l’exécution de ce budget pour 2016, comment se concrétiseront les annonces faites par le Président de la République devant le Congrès, le 16 novembre, au-delà de l’amendement du Gouvernement visant à augmenter les crédits de la mission que nous allons examiner tout à l’heure.
Parmi les motifs de satisfaction de l’année, je voudrais évoquer la levée de l’hypothèque budgétaire liée au « pari » de l’exportation du Rafale, grâce aux marchés conclus au profit de l’Égypte et du Qatar, sans parler de la commande indienne, dont on attend toujours la confirmation, ni de l’aboutissement d’autres négociations que l’on peut espérer prochainement. Ces contrats sont autant de succès de notre « équipe de France » de la défense.
Je terminerai par deux questions, monsieur le ministre.
Dans l’attente de la disponibilité des crédits que va ouvrir la loi de finances rectificative pour 2015, pouvez-vous nous dire quelles mesures vous avez prises pour que la trésorerie des PME ne subisse pas de conséquences dommageables ?
Par ailleurs, en complément des indications de Jacques Gautier, je rappelle notre souhait que les améliorations techniques qui sont en train d’être apportées par l’industriel au système de filtre des moteurs des hélicoptères Caracal destinés à l’exportation profitent également aux appareils en service dans les armées françaises. Monsieur le ministre, cela est très important pour nos militaires en opération dans la bande sahélo-saharienne. Pouvez-vous y veiller ?
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
La parole est à M. Jacques Gautier, en remplacement de M. Xavier Pintat, rapporteur pour avis.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous prie d’excuser Xavier Pintat, qui n’a pu se libérer d’un engagement de dernière minute.
En trois minutes de temps de parole, j’aborderai trois thèmes : la dissuasion, l’espace, les drones.
La dissuasion nucléaire fait la crédibilité de la France sur la scène internationale. Elle légitime la détention par notre pays d’un siège permanent au Conseil de sécurité des Nations unies. À ce sujet, Xavier Pintat se félicite de l’essai réussi, le 30 septembre dernier, du missile balistique stratégique M51.
Fort heureusement, l’actualisation de la programmation militaire, tout en renforçant les moyens de notre défense, n’a pas remis en cause l’effort budgétaire en la matière. J’espère, comme Xavier Pintat, qu’il en ira de même pour les futurs ajustements financiers qu’impliquent les annonces du Président de la République.
Cet effort, en effet, permettra, le moment venu, de moderniser les deux composantes de notre dissuasion : la composante aéroportée et la composante océanique. D’importantes décisions sont à venir à cet égard. Sont-elles anticipées comme il se doit, monsieur le ministre ?
Le soutien accordé au secteur spatial est également important. C’est à la fois un enjeu de souveraineté et un enjeu scientifique, technologique et industriel majeur. Les programmes MUSIS, pour l’imagerie optique et radar, CERES, pour le renseignement électromagnétique, et COMSAT-NG, pour les communications par satellite, montent en puissance, ce qui est une bonne chose.
En particulier, il faut se féliciter de la coopération, décidée cette année, entre le système allemand d’observation radar par satellite SARah et la composante spatiale optique du programme MUSIS, réalisé sous responsabilité française. L’Allemagne financera ainsi aux deux tiers un troisième satellite MUSIS-CSO. Cette coopération a-t-elle réellement démarré, monsieur le ministre ?
Xavier Pintat souhaite saluer une autre coopération européenne, en matière de drones. Le lancement de la recherche pour la mise en place d’une nouvelle génération de drones MALE, à l’horizon de 2025, s’est concrétisé cette année par une lettre d’intention de l’Allemagne, de l’Italie et de la France, rejointes par l’Espagne, concernant la réalisation d’une étude, sur deux ans, et l’élaboration d’un prototype. Le contrat est de 60 millions d’euros au total, mais on parle d’un développement supérieur à 1 milliard d’euros. Monsieur le ministre, à quelle échéance envisagez-vous la notification de ce contrat ? Croyez-vous possible de produire un jour un drone européen qui conjugue satisfaction d’un besoin militaire partagé, compétitivité du coût et profitabilité pour nos industriels ?
En tout cas, nous savons que nos forces ne peuvent plus se passer de drones MALE : dans la bande sahélo-saharienne, les Reaper offrent aujourd’hui une capacité déterminante, qui doit être encore renforcée.
Je dirai un mot, pour finir, du programme SDT, qui vise à doter l’armée de terre d’un système de drones tactiques pérenne. L’appel d’offres a été ouvert en 2014, comme nous l’avions demandé, et deux propositions sont aujourd’hui en lice. Au vu des performances des équipements proposés, plus proches de celles d’un drone MALE que de celles d’un drone tactique, nous recommandons que soit très rigoureusement vérifiée l’adéquation de ces offres aux besoins exprimés par l’armée de terre. Il faut en effet que le programme SDT apporte une véritable plus-value.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Daniel Reiner applaudit également.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense » ne représente que 3 % du budget de la défense, mais il constitue le cœur d’une fonction de connaissance et d’anticipation qui, plus que jamais, est essentielle pour notre dispositif de défense. Les priorités, dans ce domaine, sont conformes au Livre blanc de 2013 et à la loi de programmation militaire actualisée : réaffirmer le rôle central du renseignement, dont parlera tout à l’heure M. Lorgeoux, consolider les efforts de recherche de défense, maintenir la capacité d’influence de notre pays.
En ce qui concerne la recherche de défense, je note que les études amont font l’objet d’une prévision de 706 millions d’euros de crédits de paiement, pour 2016, en diminution par rapport à 2015. Monsieur le ministre, vous nous confirmerez sans aucun doute que cette évolution d’une année sur l’autre ne remet pas en cause l’objectif fixé en matière d’études amont par la programmation militaire, soit 730 millions d’euros en moyenne annuelle. Nous resterons bien sûr vigilants quant au respect de cet objectif.
L’analyse stratégique, de son côté, doit bénéficier d’un montant d’autorisations d’engagement en forte hausse. Il s’agit d’une conséquence de la réforme mise en œuvre par le ministère de la défense : pour donner plus de prévisibilité et donc améliorer le pilotage des études, des contrats-cadres sont mis en place et le nombre des études de type « observatoire » est accru. Nous considérons ces évolutions comme positives, monsieur le ministre.
Notre satisfaction tient également à l’effort de recherche et développement de défense : tous programmes confondus, le budget en la matière doit s’élever, l’an prochain, à 3, 8 milliards d’euros, ce qui correspond à une augmentation de 10 % en deux ans et de 25 % en trois ans. Ce niveau n’avait pas été atteint depuis 2009. Ainsi, malgré les contraintes financières, la France reste le pays d’Europe qui consacre le plus gros effort à ce secteur.
Dans ce contexte, nous sommes préoccupés, monsieur le ministre, par les difficultés de l’ONERA, l’Office national d’études et de recherches aérospatiales ; nous y reviendrons tout à l’heure lors de la discussion d’un amendement.
S’agissant de la capacité d’influence internationale de la France, cette année a été marquée par la création, en janvier, de la direction générale des relations internationales et de la stratégie, la DGRIS, qui tend à rationaliser la fonction « relations internationales » du ministère de la défense. Cette direction générale est née de la fusion entre l’ancienne délégation aux affaires stratégiques et d’éléments de l’état-major des armées et de la direction générale de l’armement. Avec ses 213 agents, elle permet l’économie de 57 équivalents temps plein. Sa mise en place s’est bien déroulée, ce dont nous nous réjouissons.
En revanche, j’observe que l’aide versée à la République de Djibouti au titre de l’implantation des forces françaises requiert une dotation budgétaire de plus en plus importante, en application du traité international entre nos deux pays. Est-il envisageable, monsieur le ministre, d’infléchir légèrement la courbe de cette progression ?
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Yves Pozzo di Borgo applaudit également.
Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, mon propos se résumera à quelques observations concernant les services de renseignement, dont une partie des crédits, destinés à la direction de la protection et de la sécurité de la défense, la DPSD, et à la direction générale de la sécurité extérieure, la DGSE, sont inscrits au programme 144.
Premièrement, on observe une diminution stricto sensu de 12, 7 % des crédits de paiement, prévus à hauteur de 234, 7 millions d’euros, ainsi qu’une baisse du même ordre des autorisations d’engagement.
En réalité, cette diminution, largement « optique », résulte de la baisse des crédits de fonctionnement en raison d’une mesure de périmètre, ce qui n’affecte pas les capacités des services, et de la baisse des investissements, conséquence de l’entrée dans le creux du cycle des programmes d’équipement de la DGSE, les années 2014 et 2015 ayant marqué un pic.
Cette évolution, que je qualifierai de mécanique et qui est atténuée par l’amendement bienvenu venant d’être déposé par le Gouvernement, est largement compensée par les renforcements d’effectifs, qui feront l’objet de ma deuxième observation.
La DGSE bénéficiera, sur la période 2014-2019, de 605 créations d’emplois, 169 ayant déjà été réalisées et 122 étant prévues en 2016. Les effectifs de la DPSD, qui étaient tombés à 1 053 personnels à la fin de 2013, connaissent un renforcement significatif, accéléré et amplifié. Ils devraient atteindre 1 200 personnels d’ici à la fin de 2016.
La difficulté de recrutement et de maintien des personnes dans les services tient à la spécificité de certains profils recherchés et à la faiblesse des viviers. Elle est surmontée, mais, pour certaines compétences, il faudrait peut-être, monsieur le ministre, développer des filières de formation initiale et donner de la souplesse en matière de rémunération et de statut.
Le Premier ministre a annoncé un gel des suppressions d’emplois au sein du ministère de la défense : êtes-vous en mesure de nous indiquer si, dans le cadre du redéploiement qui s’ensuivra, des emplois seront créés dans les services de renseignement au-delà des 1 200 postes prévus par la loi de programmation militaire actualisée ?
C’est parfait !
Au-delà des annonces, il faut recruter, former et gérer. Quelles mesures seront prises pour adapter l’appareil de formation et renforcer les structures de management des ressources humaines des services ?
Enfin, dernière observation, la responsabilité de la DPSD consiste à inspecter les sites sensibles pour identifier leur vulnérabilité, mais encore faut-il que ses préconisations soient mises en œuvre. À la suite de l’incident de Miramas, en juillet dernier, nous vous donnons acte des travaux que vous avez engagés sous la conduite de la DPID, la direction de la protection des installations de défense.
Au-delà du recensement des sites, il y a probablement une question de gouvernance et de moyens. Mettre en place un indicateur de performance en matière de suivi des recommandations des rapports d’inspection serait pertinent.
En conclusion, monsieur le ministre, je voudrais saluer l’effort engagé pour renforcer les services de renseignement de la défense, dont on mesure l’importance capitale non seulement pour nos opérations extérieures, mais aussi pour la protection de nos concitoyens sur le territoire national. Je salue leur engagement.
Notre vote favorable est aussi une marque de confiance envers nos services de renseignement, dans un contexte particulièrement difficile, qui exige de leur part une vigilance permanente.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – MM. Jacques Gautier et André Trillard applaudissent également.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits du programme 178 progressent conformément à l’actualisation de la loi de programmation militaire du 28 juillet 2015.
Il s’agit d’un réel effort en période budgétaire contrainte, mais, à l’aune des récents événements qui ont frappé notre pays, nous devons nous demander si cette évolution est suffisante.
Monsieur le ministre, l’amendement que vous avez déposé, visant à augmenter de 152 millions d’euros les autorisations d’engagement et de 85, 5 millions d’euros les crédits de paiement du programme 178, me semble indispensable. Je précise que cette appréciation est portée à titre personnel, la commission n’ayant pu se prononcer. Il faut augmenter les dépenses de munitions en même temps que notre engagement, et il est fondamental d’adapter la disponibilité des parcs à la montée en puissance de la force opérationnelle terrestre.
Sur ce dernier point, toutefois, je me demande si les crédits inscrits seront suffisants, et pourquoi ils n’avaient pas été prévus lors de l’actualisation de la loi de programmation militaire.
Nos armées sont engagées sur le territoire national et sur une vingtaine de théâtres extérieurs. Le coût en ressources humaines et en matériels des opérations extérieures est sous-évalué.
En outre, les modèles théoriques de maintien en condition opérationnelle s’avèrent sous-dimensionnés de 20 % à 25 %. À cela s’ajoutent la suractivité et la surintensité de l’utilisation des matériels en opérations extérieures. Ainsi, le Caracal a dépassé les prévisions d’activité de 15 % en 2015.
Nos actions sur tous les théâtres d’opérations le prouvent, les acteurs ont su s’adapter, mais il me semble que nous approchons des limites du raisonnable. Comme le dit le chef d’état-major des armées, le général de Villiers, nous sommes « au taquet » !
Je voudrais insister sur un point, monsieur le ministre.
Le montant des commandes annuelles d’armement français est passé de 5, 1 milliards d’euros en 2010 à 15 milliards d’euros en 2015. Vous y êtes peut-être un peu pour quelque chose…
Sourires.
Peut-être serions-nous en droit d’attendre un meilleur retour pour le budget de la défense, car si nos entreprises vendent des matériels, c’est bien parce que nos armées se battent et gagnent. Quel retour permet le dispositif de soutien à l’exportation SOUTEX ?
À nos yeux, il importerait de prendre en compte certains coûts induits, qui, d’après nous, ne le sont pas pour l’heure. Ainsi, les dépenses remboursées à nos armées lorsqu’elles soutiennent les exportations d’armement ne comprennent pas les frais supplémentaires de maintien en condition opérationnelle des matériels vieillissants, utilisés plus longtemps pour permettre à l’industriel de prendre à nos armées les frégates ou les Rafale qu’il n’a pas encore produits et qu’il exporte ainsi.
Par ailleurs, le coût complet de possession de matériels de substitution permettant les exportations, la réduction des frais fixes de la chaîne de production, mais aussi des frais de maintien en condition opérationnelle que supportent nos armées doivent être évalués et, pour ces derniers, compensés.
Tout cela n’est pas normal, et je souhaite, monsieur le ministre, que vos services et l’Inspection générale des finances se penchent sur le sujet et y consacrent une étude approfondie.
Les crédits du programme 578 doivent être votés. Monsieur le ministre, je tiens à vous féliciter. En cette période troublée, le budget de l’armée est un budget d’unité nationale.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’actualisation de la loi de programmation militaire, cet été, a renforcé la force opérationnelle terrestre de 11 000 hommes et a prévu 500 millions d’euros supplémentaires pour l’entretien programmé des matériels.
Cette évolution, louable, ne portera toutefois ses fruits qu’à moyen terme, les retards étant longs à rattraper !
C’est la raison pour laquelle il faut absolument que les autorisations d’engagement et les crédits de paiement nécessaires soient inscrits en temps et en heure, projet de loi de finances après projet de loi de finances, afin que le redressement soit réel.
Dès 2017, il faudra que les autorisations d’engagement soient au rendez-vous ! Vous pourrez compter sur notre soutien en ce sens, monsieur le ministre.
Cette année, nous avons porté une attention particulière au maintien en condition opérationnelle des équipements aéronautiques. Le constat que je dresse est triple.
Tout d’abord, les efforts ont porté. La disponibilité des matériels en OPEX atteint aujourd’hui 80 %. Des actions résolues ont permis de redresser la barre : la réorganisation de la logistique en retour des théâtres d’opérations a réduit les délais de réparation. Ainsi, un moteur revient en dix-huit jours en 2015, contre soixante-dix jours en 2013.
Citons aussi la mise en place du « plateau d’amélioration de la disponibilité rapportée aux hélicoptères », le PADRHé, qui a permis d’éviter l’indisponibilité chronique de ces appareils. Le service industriel aéronautique a joué un rôle-clé dans ce redressement. Nous pouvons nous en féliciter, mais son avenir est incertain.
Monsieur le ministre, avez-vous obtenu les arbitrages interministériels permettant de compenser les nombreux départs qui vont affecter le service industriel de l’aéronautique à moyen terme ?
Ces personnels civils font preuve d’un dévouement et d’un engagement sans faille, eux aussi, tout comme nos militaires, que je veux saluer ici.
Cet hommage rendu aux personnels n’est pas anodin. Outre de mon profond respect à leur égard, il témoigne de la conscience que j’ai des efforts extrêmes qui leur sont demandés. Cette situation me donne à penser que nous arrivons peut-être au bout du modèle.
L’âge et l’usure de certains équipements, leur surutilisation en opérations extérieures, la multiplication des engagements : tout cela concourt à un déficit organique croissant. Ainsi, les militaires moins expérimentés ne parviennent plus à se qualifier, faute de parvenir à accumuler le nombre d’heures de vol nécessaires ; les équipages les plus rôdés repartent en OPEX, ce qui les empêche de former les jeunes.
Comment allez-vous remédier à cette situation, monsieur le ministre, sachant que les conditions d’emploi de nos forces vont encore se tendre, en raison du renforcement de nos engagements, tant sur les théâtres extérieurs que sur le territoire national ? Pouvons-nous réduire le nombre de théâtres d’opérations ? Faudra-t-il, encore une fois, actualiser la loi de programmation militaire ? Pour faire plus, il faudra des moyens, comme l’a dit le chef d’état-major des armées devant notre commission. C’est un point de vue que je partage.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC, ainsi que sur quelques travées du groupe socialiste et républicain.
La parole est à M. Jacques Gautier, en remplacement de M. Robert del Picchia, rapporteur pour avis.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous prie d’excuser Robert del Picchia, corapporteur du programme 212, qui n’a pu être présent aujourd’hui compte tenu du changement de la date de la discussion des crédits de la mission « Défense ».
Monsieur le ministre, l’année dernière, lors de l’examen des crédits de cette mission, la commission évoquait les déflations d’effectifs et la baisse de la masse salariale.
Depuis, le contexte a changé. Les dramatiques attentats qui ont frappé la France ont justifié un changement d’orientation. Désormais, la priorité est de donner à nos armées les moyens, notamment humains, leur permettant d’assurer la protection du territoire national et d’accomplir leurs missions extérieures.
Ainsi, pour 2016, les crédits de personnel inscrits au programme 212 s’établissent à 19, 13 milliards d’euros, en hausse de 2, 17 %. Cette hausse traduit l’augmentation nette des effectifs décidée en 2016 au travers de l’actualisation de la LPM votée le 28 juillet dernier, en vue de permettre la remontée en puissance de la force opérationnelle terrestre. Ce renforcement porte sur 11 000 hommes. Il était indispensable pour que l’armée de terre puisse, dans des conditions satisfaisantes, c’est-à-dire sans renoncer à l’entraînement ni à la récupération, poursuivre les opérations extérieures et assurer une mission Sentinelle appelée à perdurer.
Pour l’armée de terre, il s’agit d’un tournant important, car, après des années de baisse, elle regagne enfin des effectifs, et va même pouvoir reconstituer deux régiments. Ces renforts profiteront aussi au renseignement, à la cyberdéfense, au soutien à l’exportation, ainsi qu’à d’autres composantes de la protection du territoire.
Les récentes annonces du Président du République concernant la renonciation aux diminutions d’effectifs dans la défense jusqu’en 2019 n’auront, a priori, pas d’incidence sur l’annuité budgétaire 2016. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous le confirmer ?
S’agissant des années 2017 à 2019, la trajectoire sera revue, mais dans quelle mesure ? Faut-il considérer les déflations d’effectifs nettes ou le total des déflations ? Les conséquences ne sont en effet pas les mêmes pour nos armées. Il est évident que la commission de la défense est favorable au renforcement des effectifs. La défense doit devenir un ministère prioritaire quand la France est en guerre !
Notre collègue del Picchia se félicite, à cet égard, de l’effort consenti en matière de réserves, effort qui devrait être amplifié par l’adoption de l’amendement déposé par le Gouvernement tendant à leur consacrer 8 millions d'euros supplémentaires.
Le desserrement de la contrainte en matière de déflations d’effectifs ne signifie pas la fin de la manœuvre « RH ». Celle-ci se poursuit dans ses différents volets, car les armées continuent de se transformer. Le principal défi pour 2016 est celui du recrutement, qui concerne principalement l’armée de terre. Celle-ci doit procéder à 11 000 recrutements supplémentaires : cela signifie 9 000 recrutements en 2015 et 16 000 en 2016, ce qui est considérable.
L’évolution du contexte sécuritaire joue heureusement de manière positive sur le nombre des vocations, les armées ayant enregistré une forte progression des candidatures tout au long de l’année 2015, avec des pics très nets au lendemain des attentats. Cet élan démontre la réalité de la cohésion nationale et un attachement réconfortant à la nation.
Pour conclure, notre collègue del Picchia indique que la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis positif sur le programme 212.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur certaines travées de l'UDI -UC.
Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, je commencerai par me féliciter que ce projet de budget soit fondé sur des crédits budgétaires, et non sur des recettes exceptionnelles.
Ma première observation portera sur la politique immobilière du ministère de la défense. Dotée de 1, 2 milliard d’euros, cette politique devra répondre, en 2016, à de multiples priorités.
La politique immobilière doit, d’abord, permettre la poursuite des investissements en infrastructures pour l’accueil des grands programmes d’armement.
Elle doit, ensuite, accompagner le tournant de la remontée en puissance de nos forces armées. L’opération Sentinelle nécessite des adaptations pour améliorer les conditions d’hébergement des militaires déployés sur le territoire national. La réflexion actuellement menée sur le rôle et la place de l’armée sur le territoire suppose d’anticiper les conséquences, en termes d’infrastructures, des évolutions envisagées, mais aussi de réparer les effets de la révision générale des politiques publiques, la RGPP.
En parallèle, l’effort de rénovation des logements et de réhabilitation des bâtiments de vie les plus dégradés doit être poursuivi.
Enfin, s’agissant de la politique immobilière, il nous semble que l’effort à réaliser pour la protection des sites de défense devrait être supérieur à ce que prévoit le projet de loi de finances pour 2016, à savoir 60 millions d’euros destinés au renforcement de la sécurité des seuls dépôts de munitions. Un plan plus vaste doit être engagé ; nous y serons attentifs.
Ma deuxième observation concernera le déménagement des états-majors et services centraux sur le site de Balard, mis à disposition du ministère au début de l’année 2015. Il n’est pas étonnant qu’un déménagement d’une telle ampleur donne lieu à quelques difficultés.
Plus généralement, toutefois, il nous semble qu’un bilan global de l’opération devrait être effectué, afin d’en évaluer les coûts et les avantages et d’en vérifier la neutralité financière. Rappelons que le montant total du contrat a été évalué à 3, 5 milliards d’euros constants hors taxes et la redevance annuelle moyenne à 130 millions d’euros hors taxes. Les ressources nécessaires au financement de cette redevance doivent être assurées sans abondement, par redéploiement de crédits budgétaires.
Ma troisième et dernière observation portera sur les coûteux dysfonctionnements du logiciel Louvois de gestion de la solde. Certes, les indus sont progressivement reversés, et le système a été amélioré.
Un nouveau logiciel est en cours d’élaboration. Ce projet est conduit par la Direction générale de l’armement, la DGA, avec la volonté de le mener « comme un programme d’armement ». Ce logiciel doit être testé en 2016, pour une mise en service au cours des années ultérieures. Nous continuerons à suivre attentivement l’évolution de ce dossier. Le remplacement du logiciel Louvois doit s’accompagner d’une réflexion sur la simplification du dispositif indemnitaire des militaires, dont la complexité est, pour partie, à l’origine des problèmes.
Au-delà de ces quelques remarques, je m’associe pleinement à l’appréciation positive émise sur les crédits de la mission « Défense », qui correspondent à ce que prévoit la loi de programmation militaire actualisée.
MM. Daniel Reiner et Yves Pozzo di Borgo applaudissent.
Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Leila Aïchi.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à saluer le ralliement, certes tardif, du Gouvernement aux positions pertinentes du ministère de la défense et de l’état-major sur la question syrienne.
Avant toute autre chose, je tiens à exprimer la reconnaissance de l’ensemble des membres du groupe écologiste du Sénat aux forces armées pour l’engagement, le professionnalisme et le courage dont elles font preuve.
Aujourd’hui, plus qu’hier, la promotion du lien entre l’armée et la nation est une priorité. Les initiatives que vous promouvez, monsieur le ministre, concernant par exemple la réserve citoyenne ou le service national volontaire, doivent être accompagnées et s’inscrire dans le cadre d’une réflexion collective visant à soutenir nos armées.
Ces dernières sont, en effet, particulièrement sollicitées depuis quelques mois, que ce soit dans le cadre de l’opération Sentinelle ou à l’étranger. C’est pourquoi le projet de budget que nous examinons aujourd’hui est éminemment important.
L’annulation annoncée par le Président de la République devant le Congrès de toutes les déflations d’effectifs qui étaient encore prévues d’ici à 2019 était attendue.
Si le projet de loi de finances prévoyait déjà une pause dans la déflation, les écologistes saluent cette annonce, puisque, comme nous l’avons toujours dit, les soldats doivent être la priorité. Je sais, monsieur le ministre, que c’est également votre position, et je connais votre engagement en la matière.
Devant la multiplication des engagements de la France à l’étranger, la question des effectifs est devenue centrale. Toutefois, avons-nous les moyens d’être le gendarme du monde ? Avons-nous toujours aujourd’hui les moyens d’intervenir à la fois en Afrique et au Moyen-Orient ?
Nous l’avons dit lors du débat sur notre engagement en Syrie, la multiplication des OPEX aboutit à une incapacité pour la France de s’engager davantage aujourd’hui, à quelque niveau que ce soit, y compris dans le domaine humanitaire et celui de la prévention.
Si nous reconnaissons, bien évidemment, que la menace terroriste a pris une dimension sans précédent dans ces régions, nous posons néanmoins la question de la soutenabilité de notre engagement sur le plan international.
En effet, les écologistes mettent en garde contre le risque de nous enfermer dans une vision de court terme. Le contexte particulièrement difficile que nous connaissons aujourd’hui et la tentation de recourir à des réponses hâtives pour y faire face ne doivent pas nous exonérer d’une préparation du temps long.
Vous connaissez l’approche qui est la mienne sur ce sujet, monsieur le ministre : dans notre voisinage proche ou éloigné, les risques engendrés par le stress environnemental seront les déclencheurs et les signes avant-coureurs des crises de demain. Les principaux enjeux stratégiques sont intimement liés à l’accès aux ressources naturelles, aux matières premières et à l’énergie, ainsi qu’à la démographie.
Monsieur le ministre, nous savons tous que les conflits de demain se nourrissent des ruptures d’aujourd’hui. Alors, comment nous adapter face à ces risques ?
Je ne reviendrai pas sur la question de la dissuasion. Vous connaissez en effet très bien, monsieur le ministre, notre position sur le renouvellement automatique des programmes, qui empêche une réflexion, pourtant nécessaire, sur le dimensionnement, la posture et l’efficacité de la dissuasion pour faire face aux menaces présentes et à venir.
L’armée doit se préparer dès aujourd’hui aux missions de demain ; l’absence criante d’une défense européenne est un frein à la fois budgétaire et stratégique.
Ce besoin d’anticiper les risques se fait particulièrement ressentir dans le milieu maritime. En effet, de l’aveu même de l’amiral Rogel, le monde connaît une « bascule environnementale », avec un accroissement des populations côtières et une augmentation des trafics maritimes illégaux. Face à cela, la marine voit ses missions se multiplier : assistance en mer, lutte contre la surpêche, la pollution ou encore la piraterie.
Nous avons du retard dans le développement de notre marine et dans l’appréhension de la sécurité au sens large. Disposant de la deuxième zone économique exclusive au monde, nous devons renforcer le contrôle de notre espace maritime afin de lutter contre les activités qui déstabilisent nos marchés locaux et contribuent à la dégradation de l’environnement.
Mes collègues Éliane Giraud, Cédric Perrin et moi-même avons présenté un rapport allant dans ce sens, qui, tout en prenant l’Arctique comme sujet d’une étude de cas, explicite le rôle de la défense, lequel nous paraît aujourd’hui majeur, dans la prévention des risques liés à la montée du niveau de la mer.
Enfin, si le budget de la défense est en hausse, avec des ressources s’établissant à 32 milliards d’euros pour 2016, les surcoûts des opérations intérieures et extérieures prévisibles et la faiblesse de la provision destinée à les couvrir nous interpellent. Il serait regrettable que ces surcoûts aient une incidence sur les crédits consacrés à la régénération des équipements ou sur les moyens alloués à la formation et à la préparation des forces.
En outre, si l’évolution favorable des indices économiques est une bonne nouvelle d’un point de vue budgétaire, nous devons rester vigilants quant à la réalité des économies réalisées. Ces projections, aussi encourageantes soient-elles, ne sauraient nous dispenser de trouver des marges d’ajustement budgétaire par ailleurs.
Plus généralement, se pose la question du budget de la défense dans son ensemble, de sa stabilité mais surtout de sa transparence, notamment en ce qui concerne les contrats passés entre l’État et les grands groupes de défense.
À l’image de ce qui se fait aux États-Unis avec le Government Accountability Office, ne serait-il pas pertinent, monsieur le ministre, de centraliser et de mettre en cohérence les multiples audits auxquels est aujourd’hui soumis le budget de la défense, s’agissant notamment des contrats passés dans le cadre du maintien en condition opérationnelle des matériels, ou MCO ?
Plus précisément, monsieur le ministre, pourquoi avoir supprimé le Comité des prix de revient des fabrications d'armement, seul organisme ouvert à la représentation nationale ? Compte tenu de l’importance du budget de votre ministère, de son évolution ces dernières années et de la nécessité de renforcer le lien entre l’armée et la nation, l’existence d’un tel organisme représentait un signal fort au regard des prérogatives du Parlement.
Pour conclure, monsieur le ministre, quoique nous réaffirmions notre soutien plein et entier à nos forces armées, les désaccords de fond que vous connaissez nous conduiront à nous abstenir sur les crédits de la mission « Défense ».
Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, mercredi dernier, le débat sur la demande d’autorisation de prolongation de l’engagement des forces aériennes au-dessus du territoire syrien a permis de rappeler combien notre sécurité intérieure se jouait aussi au-delà de nos frontières. Les deux derniers Livres blancs sur la défense et la sécurité nationale avaient intégré ce paradigme dont la pertinence a, malheureusement, trouvé une tragique illustration vendredi 13 novembre, à Paris et au Stade de France, à Saint-Denis.
Dans ces conditions, comme j’ai eu l’occasion de le dire lors de l’examen de la première partie du présent projet de loi de finances, le pacte de sécurité peut effectivement occulter, pour un temps, le pacte de stabilité. Oui, l’urgence de la situation – pour ne pas dire l’état d’urgence dans lequel se trouve la France – appelle un effort budgétaire exceptionnel.
D’ailleurs, le traité sur l’Union européenne le permet et j’observe que le Premier ministre britannique vient tout juste d’annoncer un « plan de défense » prévoyant 17 milliards d’euros de dépenses supplémentaires sur dix ans. Cela tend à prouver que nous ne sommes pas seuls à avoir pris la mesure des menaces.
Le RDSE, comme vous le savez, monsieur le ministre, soutient la décision du Gouvernement d’octroyer rapidement des moyens supplémentaires à la justice, à la police et à la défense, domaine qui nous intéresse directement aujourd’hui. Nous le devons à tous nos concitoyens, qui attendent des décisions concrètes. Nous le devons avant tout, bien sûr, à toutes les victimes des attentats terroristes. À ce propos, je m’associe à mon tour à l’hommage national particulièrement émouvant qui leur a été rendu ce matin aux Invalides. Je salue le dévouement de tous nos militaires, policiers et secouristes, qui sont actuellement plus que jamais sollicités.
En conséquence, nous ne pouvons que nous satisfaire des 2 300 créations de postes annoncées pour 2016, ainsi que de la stabilisation des effectifs du ministère de la défense jusqu’en 2019, qui va également dans le bon sens.
Cet effort, monsieur le ministre, s’ajoutera à celui déjà entrepris dans le cadre de l’actualisation de la loi de programmation militaire pour la période 2014-2019. Je rappellerai notamment que nous avions voté, avant l’été, la sécurisation des ressources du ministère de la défense. Il en résulte que le montant des recettes exceptionnelles est de l’ordre de 250 millions d’euros dans le projet de budget pour 2016, contre 1, 9 milliard d’euros initialement prévus. Les recettes exceptionnelles se voient ainsi ramenées à moins de 0, 8 % des ressources totales de la mission.
La trajectoire globale du budget est renforcée au-delà des prescriptions de la loi de programmation militaire. En effet, les crédits ont été fixés à 32 milliards d’euros ; il faut y ajouter 100 millions d’euros de crédits supplémentaires prévus par un amendement du Gouvernement que la commission des finances unanime a accueilli favorablement.
Il s’agit d’un budget responsable et je salue, monsieur le ministre, l’énergie que vous avez toujours déployée pour qu’il en soit ainsi. Il me faut aussi souligner que la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat exerce une vigilance très utile. Nos collègues sont en effet souvent à l’initiative de clauses de revoyure ou de mesures de sécurisation budgétaire qui tracent la voie à suivre.
Une nouvelle fois, d’ailleurs, la commission pointe la sous-évaluation récurrente du coût des OPEX. S’y ajoutent les incertitudes liées aux modalités de financement des opérations intérieures, elles aussi insuffisamment provisionnées.
En ce qui concerne les priorités définies au sein de ce projet de budget – effort sur les programmes d’armement, renforcement de la préparation opérationnelle et hausse des moyens dédiés au renseignement et à la cyberdéfense –, sachez, monsieur le ministre, que le RDSE partage ces choix, qui sont de nature à assurer la prise en compte des nouvelles menaces, en particulier celles liées au terrorisme.
Permettez-moi de revenir, pour conclure, sur les conséquences des attentats sur le débat public. Devant la gravité des événements, l’idée d’un retour du service national obligatoire ressurgit. Pour ma part, comme vous le savez, je suis à l’initiative, avec mon groupe, de la création du service civique, que je souhaitais obligatoire. D’une façon générale, tout ce qui concourt à la cohésion nationale est évidemment positif. De fait, au-delà de la mission de défense, le service national répondait à cet objectif.
C’est donc un débat que nous pouvons avoir, même s’il faut garder à l’esprit que nous sommes confrontés à des conflits asymétriques, qui exigent avant tout qu’une armée professionnelle soit aux avant-postes. Le modèle de guerre clausewitzien est derrière nous. La nation en armes n’est par conséquent pas la solution, même si, en ces temps difficiles, nous cherchons à trouver les moyens de la puissance.
C’est pourquoi, afin de définir la meilleure formule pour un service national adapté aux enjeux contemporains, qui soit un véritable creuset des valeurs républicaines, il convient de prendre le temps de la réflexion, une fois passé celui de la légitime émotion.
M. Daniel Reiner applaudit.
Je voudrais tout d’abord, au nom de mon groupe, délivrer un satisfecit à M. le ministre et au Gouvernement.
La vigilance de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat quant à l’exécution du budget est connue. Nous saluons tout particulièrement la fin de gestion de l’exercice 2015, conduite au mieux des intérêts de la défense.
Je soulignerai que la solidarité interministérielle a pleinement joué, au point que, cette année, le ministère de la défense a été moins mis à contribution – c’est une première –, eu égard aux charges qui pèsent sur lui.
Par ailleurs, tous les engagements ont été respectés, ce qui constitue évidemment une entrée en matière tout à fait satisfaisante pour le projet de budget pour 2016, qui traduit la volonté de l’exécutif de doter notre pays des moyens nécessaires pour permettre à notre défense d’assurer ses missions, et tout particulièrement, en ce moment, de lutter contre la menace du terrorisme djihadiste.
Je voudrais rappeler que, pendant toute la première partie du quinquennat, avant les drames de janvier, le Président de la République avait maintes fois exprimé la volonté de sanctuariser le budget de la défense. Il s’agissait alors, en dépit d’un contexte économique et financier très dégradé, de conserver un modèle de défense à la hauteur de nos ambitions, de poursuivre l’équipement des forces, d’alimenter – déjà – la montée en puissance des services de renseignement et de mettre en œuvre une cyberdéfense plus efficace.
Bien évidemment, les événements dramatiques du mois de janvier dernier ont conforté cette impérieuse nécessité de protéger nos concitoyens. Tel est le sens de l’opération Sentinelle, qu’il nous faut aujourd’hui pérenniser, ce qui implique de revoir le format de nos armées, essentiellement celui de l’armée de terre. C’est chose faite avec l’actualisation de la loi de programmation militaire, qui permet notamment à la force opérationnelle terrestre de passer de 66 000 à 77 000 personnels, de poursuivre l’amélioration de nos équipements, de budgétiser la quasi-totalité des crédits de la défense, en mettant ainsi un terme aux doutes et à l’inquiétude suscités par les ressources exceptionnelles, et enfin de tracer une nouvelle trajectoire financière. Il faut noter que c’est la première fois qu’une loi de programmation militaire fait l’objet d’une réévaluation en cours d’exécution.
Le drame du 13 novembre dernier impose plus encore de consolider certaines de ces tendances, notamment en matière d’effectifs. Ce format devra, dans un avenir très proche, prendre en compte la décision annoncée de geler les suppressions de postes pour les années 2017, 2018 et 2019. Nos forces armées pourront ainsi assurer l’ensemble des engagements et des opérations que nécessite la lutte contre le terrorisme.
Ce projet de budget est totalement conforme à la loi de programmation militaire et à son actualisation. La nouvelle trajectoire budgétaire accordera à la défense un surcroît de ressources de 3, 8 milliards d’euros sur la période 2015-2019, ce qui permettra d’inverser la tendance baissière. La France se rapprochera ainsi de l’objectif de consacrer 2 % de son PIB à l’effort de défense, conformément à la norme fixée par l’OTAN et réaffirmée lors du sommet de Newport, en septembre 2014.
Les crédits consacrés par la France à sa défense seront donc en 2016 de 32 milliards d’euros. Nous retrouvons bien les 600 millions d’euros de crédits budgétaires supplémentaires prévus par la loi d’actualisation de la LPM, auxquels s’ajouteront les 100 millions d’euros prévus par l’amendement que vous avez déposé, monsieur le ministre.
Ces crédits supplémentaires permettront d’accompagner une remontée des effectifs de l’ordre de 2 300 personnels pour cette année. Notons que le montant des recettes exceptionnelles ne sera plus que de 250 millions d’euros en 2016.
Le budget est donc aujourd’hui plus que clairement sanctuarisé, si je puis dire. La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous les présidences de MM. Carrère et Raffarin, a fortement contribué à ce qu’il en soit ainsi. Nous sommes nombreux, au sein de cet hémicycle, à avoir ardemment plaidé en ce sens ; nous ne pouvons donc que nous féliciter de cette décision.
Avec ce budget, la France continue d’exprimer une ambition stratégique à la hauteur des nouveaux défis sécuritaires qui s’imposent à nous. Nous ne pouvons l’ignorer, ces derniers sont nombreux. L’environnement stratégique très dégradé qui affecte aujourd’hui le territoire national nous impose de continuer à moderniser nos équipements et à régénérer nos potentiels.
Compte tenu de l’accroissement des engagements opérationnels qui pèsent sur nos armées ainsi que sur leur capacité à les assumer dans la durée, les crédits destinés à l’activité et à l’entraînement continuent de progresser. Les crédits alloués à l’entretien programmé des matériels augmentent ainsi de 7 % à 8 %, comme vous vous y étiez engagé, monsieur le ministre. Cette progression accompagne l’entrée en service de nouveaux systèmes d’armes : hélicoptères Tigre et NH90, avions Rafale et A400M, une frégate FREMM, lots de missiles de croisières navals et poids lourds pour les forces spéciales, indispensables aux forces projetées. Ces nouveaux équipements s’accompagnent d’une remise à niveau des infrastructures, pour un montant significatif. Au total, les crédits d’équipements passent à 17 milliards d'euros. Il faut souligner que c’est le premier budget d’investissement de l’État.
L’effort en faveur de la préparation de l’avenir est maintenu, près de 4 milliards d'euros étant alloués à la recherche et au développement, dont 710 millions d'euros destinés aux études amont.
Des choix ont donc été faits afin de relever les nouveaux défis sécuritaires, tout en maintenant un niveau d’ambition élevé sur la scène internationale. Cela doit permettre à la France d’assumer les missions fondamentales que sont, aujourd’hui plus que jamais, la protection du territoire et de la population – c’est le sens de l’opération Sentinelle et de la montée en puissance des services de renseignement – et le maintien de forces de projection qui nous permettent d’être la seule nation européenne à détenir la capacité singulière d’entrer la première sur un théâtre d’opérations dans les trois milieux – terrestre, naval et aérien – et de prévoir, planifier et conduire de tels engagements. Les opérations Chammal, Barkhane et Sangaris témoignent tous les jours non seulement du professionnalisme de nos militaires, mais aussi d’un exceptionnel niveau opérationnel.
Ce faisceau de capacités fonde notre autonomie stratégique, que le projet de budget dont nous débattons permet à la France de conserver.
Mes chers collègues, ce projet de loi de finances pour 2016 répond au mieux aux impératifs de la poursuite de la modernisation de nos armées, de leur nécessaire adaptation aux opérations que nous menons aujourd'hui et aux perspectives d’avenir – ce que le chef d’état-major appelle le « temps court » et le « temps long ». C’est pourquoi le groupe socialiste et républicain votera sans aucune réserve les crédits de la mission « Défense ».
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Yvon Collin applaudit également.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant tout, je tiens à rendre hommage, au nom du groupe Les Républicains, au courage, au dévouement et au professionnalisme des femmes et des hommes de nos armées. Ils font la fierté de notre pays, à l’étranger, sur les théâtres d’opérations extérieurs où la France est engagée, mais également sur le sol national, où ils participent à la sécurité de nos concitoyens. Rentrant d’un séminaire consacré au terrorisme à l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, je peux témoigner que tous les participants ont rendu des hommages appuyés à notre pays et à nos forces.
Concernant la mission « Défense », le projet de loi de finances pour 2016 contraste avec celui de 2015 ; nous nous en réjouissons, car le chemin fut quelque peu ardu.
C’est le premier budget résultant de l’application de la loi du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense, que le Sénat a améliorée et votée.
De fait, il importe de saluer la mise en œuvre de modifications que nous appelions de nos vœux : l’augmentation des crédits, la modification de leur nature, qui se traduit par la fin du recours aux recettes exceptionnelles, les REX, en tout cas pour ce qui concerne les fréquences hertziennes, l’arrêt des déflations des effectifs.
En 2016, le budget des armées s’élèvera à 31, 7 milliards d'euros, soit une hausse de 1, 8 %.
L’année prochaine, les ressources exceptionnelles ne dépasseront pas 250 millions d’euros : 200 millions d'euros proviendront des cessions immobilières et 50 millions d'euros de ventes de matériels militaires.
Si la très forte diminution des REX était attendue, une pierre d’achoppement demeure concernant le produit des cessions immobilières.
Nous regrettons que, lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances par l’Assemblée nationale, nos collègues députés soient revenus sur le plafonnement de la décote résultant de la loi Duflot pour les immeubles de l’îlot Saint-Germain. Rappelons que cette mesure résultait d’un consensus obtenu en commission mixte paritaire, au mois de juillet dernier. En plus de constituer une mauvaise manière à notre égard, ce retour en arrière fragilise les crédits.
L’îlot Saint-Germain n’est pas un lieu banal, n’en déplaise à Mme le maire de Paris. Aussi serait-il dommageable que les armées, alors qu’elles sont soumises à de fortes pressions, pâtissent de la négation des lois économiques élémentaires.
C’est pour cette raison que notre groupe soutiendra les amendements du rapporteur spécial, Dominique de Legge, et ceux de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
Je souhaiterais en outre appeler l’attention sur les crédits d’équipement, qui passeront de 16, 7 milliards d'euros en 2015 à 17 milliards d'euros en 2016. Le renforcement de ces crédits est plus que nécessaire, au moment où les OPEX se multiplient et se prolongent. Au-delà de la question du financement des OPEX – parfaitement posée, et depuis longtemps, par le rapporteur spécial –, c’est du maintien en condition opérationnelle dont il s’agit.
Les opérations menées dans la bande sahélo-saharienne constituent un bon exemple à cet égard. Les conditions sont particulièrement éprouvantes pour les matériels, dont le vieillissement et l’usure sont fortement accélérés par une faible disponibilité aggravée par la multiplication des théâtres d’engagement, les conditions climatiques extrêmes, enfin par un état d’usage avancé qui réduit leur marge de régénération et augmente à terme les coûts. Cette surmobilisation des matériels altère nos capacités opérationnelles et a une incidence importante sur les conditions d’entraînement.
N’oublions pas que, après la deuxième intervention en Irak et celle en Afghanistan, la défense britannique avait épuisé ses potentiels de régénération, au point que le Royaume-Uni avait cessé ses participations militaires, en vertu du concept du « at home ».
Dès lors, on ne peut qu’encourager les mesures participant à la régénération et au renouvellement des équipements. Nos trois rapporteurs pour avis du programme 146 nous ayant brillamment présenté les futures acquisitions, j’en viens à un autre sujet, tout aussi important : les ressources humaines.
La révision de la loi de programmation militaire a freiné la déflation des effectifs. Le Président de la République a annoncé qu’elle serait définitivement stoppée en raison du tragique contexte et de nos besoins, tant en OPEX qu’en opérations intérieures. C’est une initiative que nous approuvons. Lors de la révision de la loi de programmation militaire, le relèvement d’effectifs devait profiter à la force opérationnelle terrestre et aux effectifs de la mission de renseignement et de la cyberdéfense. Monsieur le ministre, nous savions que la suppression des effectifs annoncée en 2013 n’était pas soutenable, mais nous aimerions que vous nous éclairiez sur les redéploiements à venir.
Mes chers collègues, cette préservation des effectifs représente un coût, qu’il faudra assumer. Ce sera autant de personnels à entraîner, à équiper et à projeter.
Les rapports de MM. del Picchia et Roger, tant sur la révision de la loi de programmation militaire que sur le projet de loi de finances pour 2016, sont clairs : la manœuvre « RH » doit se poursuivre en dépit du maintien des effectifs. C’est tout le chapitre III de la nouvelle loi de programmation militaire qui est remis en question du fait des impératifs sécuritaires.
Avant de conclure, j’aborderai un sujet qui m’est cher depuis longtemps, celui des réserves opérationnelles et citoyennes. Elles sont un moyen de renforcer notre résilience, en France comme à l’étranger, ainsi que je l’ai souligné dans un rapport d’information, en 2010, et à l’occasion d’une question d’actualité au Gouvernement après les attentats du mois de janvier dernier.
La sécurité nationale doit être l’affaire de chacun. Associer la société civile à cet effort est indispensable. J’ai vivement regretté la parution plus que tardive – quatre ans après son adoption – des décrets d’application de la loi du 28 juillet 2011, qui tend à faciliter l’utilisation des réserves militaires et civiles en cas de crise majeure. Quel bilan pouvons-nous faire ?
Par ailleurs, lors de l’examen du projet de loi d’actualisation de la loi de programmation militaire, j’ai présenté des amendements visant à favoriser le déploiement des réserves parmi nos communautés à l’étranger. Le dernier avait pour objet la mise à disposition de compétences spécifiques des expatriés, au service des besoins de notre défense nationale. Avons-nous un peu avancé sur ce sujet ? S’il est encore trop tôt pour une mise en œuvre effective, monsieur le ministre, sachons user des outils que nous avons créés et inscrits dans la loi.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, les tragiques événements survenus en France, l’extrême instabilité géopolitique et les besoins de la lutte contre le terrorisme exigent que nous votions des moyens qui soient à la hauteur des enjeux et des combats que nous souhaitons mener.
Vous l’aurez compris, monsieur le ministre, à la lumière des efforts accomplis, sans pour autant oublier ceux qui restent à faire, le groupe Les Républicains votera les crédits de la mission « Défense » pour 2016.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur certaines travées de l’UDI -UC, du RDSE et du groupe socialiste et républicain.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les attentats du 7 janvier 2015 ont entraîné le déclenchement de l’opération Sentinelle. Avant cette série d’attaques terroristes islamistes, au cours desquelles ont été tués des journalistes, des policiers et des clients d’une supérette casher, nous avions déjà connu l’horreur, au mois de mars 2012, quand, au nom du djihad, à Montauban et à Toulouse, trois militaires, ainsi qu’un professeur et trois jeunes élèves d’une école juive, avaient été assassinés.
Depuis quelques jours, la France est en guerre. Les actes commis dans la nuit du vendredi 13 novembre sont en effet des actes de guerre. Ces attaques constituent une agression contre notre pays, contre nos valeurs, contre notre jeunesse, contre notre mode de vie. L’ennemi a franchi une nouvelle étape.
À l’extérieur, les OPEX engagent la France. Je tiens à saluer l’action de nos forces, de nos 10 000 soldats présents au Sahel, en Centrafrique et en Irak. Je tiens également à rendre hommage aux victimes, tuées et blessées, de la prise d’otages de Bamako. Par ailleurs, depuis le 27 septembre, notre pays procède à des frappes en Syrie afin de contrer Daech.
En 1918, Georges Clemenceau disait : « Ma politique étrangère et ma politique intérieure, c’est tout un. Politique intérieure ? Je fais la guerre. Politique étrangère ? Je fais toujours la guerre. »
Ainsi, la mission « Défense » du projet de loi de finances pour 2016 n’a plus rien à voir avec la politique de programmation militaire des années 2009 à 2014, remise en cause par la crise des finances publiques et les engagements pris à l’égard de Bruxelles de ramener le déficit public à 3 % du PIB en 2013. En 2015, l’effort de défense représente la moitié du déficit.
Le projet de budget que nous examinons doit être à la mesure des enjeux nationaux et internationaux. Les années passées, nous engagions des restructurations et une réduction des effectifs militaires. Il s’agit désormais de conforter nos effectifs et nos moyens techniques.
C’est avant tout sur le personnel militaire que notre politique de la défense repose. Solliciter nos troupes pour renforcer notre sécurité à chaque instant ne nous exonère pas de tenir compte de la surchauffe et de l’épuisement de nos soldats. Bercy doit comprendre que la masse salariale n’est ni compressible ni aliénable. Il faut être lucides : après des réductions d’effectifs constantes, nos troupes sont juste suffisantes et notre matériel est surutilisé.
Il faut veiller à ne pas trop multiplier nos engagements. Cela pourrait nuire à notre efficacité. Ce projet de loi de finances permet de conserver 18 750 postes, avec un déploiement d’effectifs sur le territoire national pour des opérations intérieures. Si nos militaires peuvent assumer cette mission ponctuellement, il ne leur appartient pas de le faire de manière pérenne.
D’autres fléchages sont possibles. Il faut veiller à ce que les effectifs de gendarmes et de policiers soient suffisants pour assurer pleinement la sécurité intérieure et limiter le déploiement de militaires aux compétences complémentaires.
Le programme 212 « Soutien de la politique de défense » regroupe notamment l’ensemble des crédits de personnel du ministère de la défense. En 2016, ces dépenses devraient augmenter de 3 %.
On apprécie les efforts consentis pour l’augmentation des effectifs dans le domaine du renseignement « sécurité et défense », mais on peut regretter que les dépenses diminuent pour la marine et l’armée de l’air.
La question du surcoût des opérations extérieures a largement alimenté le débat ces dernières années. La provision destinée à couvrir ce surcoût n’est que de 450 millions d’euros, comme en 2015, alors que le dépassement s’élevait à plus de 650 millions d'euros cette année-là. Elle devrait donc de nouveau se révéler insuffisante.
De la même manière, le surcoût lié aux opérations intérieures devrait être largement supérieur aux 26 millions d'euros budgétisés au titre II. En 2015, il s’est élevé à 194 millions d'euros pour l’opération Sentinelle et il ne devrait pas baisser en 2016.
De plus, la question de la budgétisation et du financement des OPEX et des opérations intérieures crée une incertitude sur l’équilibre budgétaire.
Monsieur le ministre, en 2013, l’exécution de la loi de programmation militaire était mal engagée, étant donné l’existence d’une forte contrainte budgétaire, alors que débutaient les interventions au Mali. Nous constatons que vous avez su transformer d’aléatoires recettes extrabudgétaires en crédits budgétaires ; cela représente 9 milliards d’euros de crédits supplémentaires pour la période 2015-2019.
Les opérations extérieures ont fortement mobilisé l’ensemble de nos troupes. Le maintien de l’efficacité opérationnelle nécessite de prendre en considération les difficultés matérielles et morales auxquelles elles sont confrontées.
Les opérations menées de front par l’armée française ne pourront se poursuivre sur le long terme sans effectifs supplémentaires, d’autant que l’étendue des théâtres d’opérations est parfois considérable.
La France s’est investie au-delà de ses capacités. Membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, elle assume ses responsabilités. Pourrons-nous durablement poursuivre toutes les opérations extérieures en cours ?
Les OPEX démontrent la nécessité d’une Europe de la défense, nécessité dont le groupe UDI-UC est absolument convaincu, car nous sommes désormais en état de guerre, ce qui signifie que nous devrons faire des sacrifices.
Le terrorisme international utilise tous les moyens médiatiques pour séduire, convaincre, tromper, terroriser, notamment à partir des réseaux sociaux. Nous devons gagner la bataille du cyberespace, car la cybernétique est à la source d’une réelle menace, qui ne cesse de croître en se perfectionnant.
Le déploiement d’effectifs est une réponse objective au besoin d’un corps militaire nouveau. Nous en sommes très satisfaits.
J’évoquerai maintenant les moyens techniques. Avec la menace terroriste, tant à l’intérieur de nos frontières qu’à l’international, le contexte a radicalement changé.
Le monde s’arme vite et lourdement. Plus que jamais, nous vendons dans le monde entier des armes terrestres, maritimes ou aériennes. Le montant des commandes annuelles d’armement français a été multiplié par trois, passant de 5, 1 milliards d’euros en 2010 à 15 milliards d’euros en 2015.
Nous saluons la réussite à l’exportation de l’avion de combat Rafale, en Égypte, au Qatar et, prochainement, en Inde. La construction de frégates permet également d’optimiser la charge des chantiers navals concernés.
Ces succès à l’export soulagent le budget de la défense. Une bonne partie de cette manne contribue à améliorer le traitement des militaires et une autre à remplacer et à moderniser nos équipements.
Nos excellents résultats à l’exportation ont un effet favorable à court terme, mais ils placent la barre très haut pour les prochaines années. Au rythme où évoluent nos besoins, ne faudra-t-il pas, à moyen terme, trouver encore de nouvelles recettes pour assurer le financement pérenne des programmes militaires et celui des OPEX ?
Nos armées soutiennent nos industriels à l’exportation. Leurs prestations sont facturées. En 2013, l’armée de terre a ainsi reçu 1, 3 million d’euros et l’armée de l’air 6, 3 millions d’euros. Ces montants sont-ils à la hauteur des services rendus ? Sur ce point, monsieur le ministre, il nous semble qu’une analyse fine s’impose. Dans un contexte budgétaire tendu, toute recette est importante. N’y a-t-il pas lieu de réévaluer le règlement des prestations militaires au bénéfice de nos industriels ?
Les crédits du programme 146 « Équipement des forces » passent de 16, 7 milliards d’euros à 17 milliards d’euros. Les actions déjà engagées par les armées françaises rendent urgent l’engagement des dépenses d’équipement prévues par la Direction générale de l’armement. Ce programme connaît de fortes tensions de trésorerie, car les crédits budgétaires sont mis tardivement à disposition du délégué général pour l’armement.
L’intensité de l’engagement des armées sur les théâtres extérieurs et sur le territoire national représente une lourde charge pour le programme 178 et risque d’entraîner d’importants problèmes de trésorerie.
Les crédits du programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense » sont en baisse. Nous approuvons que la priorité soit donnée aux activités opérationnelles.
Au-delà de ce projet de budget, notre diplomatie doit renouer un dialogue ferme avec l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et le Qatar, qui, du fait d’intérêts divergents, reprennent d’une main ce qu’ils nous concèdent d’une autre.
La France joue un rôle clé en Syrie et en Irak, mais surtout en Europe. Les frontières à l’Est et les frontières en Méditerranée sont d’une importance stratégique essentielle. La mise en place d’un bouclier européen doit se concrétiser. La France seule ne peut pas tout : elle doit agir avec l’OTAN et le Conseil de sécurité des Nations unies.
Pour conclure, nous constatons avec satisfaction, monsieur le ministre, que le projet de budget pour 2016 traduit des changements attendus. Les ressources du ministère de la défense sont accrues et mieux sécurisées. Elles s’établissent à près de 32 milliards d’euros, soit une hausse de 1, 8 % par rapport à 2015. Les ressources exceptionnelles sont remplacées par des crédits budgétaires, afin de sécuriser le budget de la défense. L’effort de défense exige un effort de dépense !
Les sénateurs UDI-UC voteront à l’unanimité ce projet de budget.
Applaudissements sur les travées de l'UDI -UC, ainsi que sur certaines travées du groupe Les Républicains, du RDSE et du groupe socialiste et républicain.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « Défense » pour 2016 intervient dans un contexte dramatique et tout à fait particulier.
Après les attentats terroristes de janvier, ceux du 13 novembre dernier ont entraîné la mort de cent trente de nos compatriotes ; c’est notre pays et son modèle de société qui sont directement attaqués.
À ces victimes s’ajoutent nos soldats tombés cette année au Mali, en opération extérieure de lutte contre le terrorisme djihadiste. C’est aussi pour intensifier notre combat contre cette forme de terrorisme que nous avons triplé nos capacités de frappes aériennes en Syrie et en Irak.
C’est dire combien le budget de la défense joue un rôle de premier plan pour préserver les intérêts fondamentaux de la nation, protéger notre territoire et nos concitoyens.
Avec l’augmentation des effectifs de l’opération Sentinelle à la suite des attentats et l’appareillage du porte-avions Charles-de-Gaulle, 34 000 militaires se trouvent engagés dans ce combat à long terme, en France et dans le monde.
Le premier traumatisme causé par les attentats du mois de janvier avait déjà donné lieu à des décisions fortes du Président de la République, prises au cours d’un conseil de défense en avril. Elles ont nécessité une actualisation de la loi de programmation militaire. Globalement, le présent projet de budget met en œuvre ces décisions. J’en relèverai deux caractéristiques majeures, qui découlent de l’évolution des menaces pesant sur notre pays.
La première, c’est que, après que 18 700 postes ont été préservés au mois de janvier, le projet de budget marque l’arrêt de la déflation des effectifs jusqu’en 2019, au bénéfice des unités opérationnelles de la cyberdéfense et du renseignement. Nous approuvons cette décision. Elle est courageuse, car elle a un coût budgétaire. En outre, elle met temporairement fin à une contradiction absurde consistant à cumuler les diminutions d’effectifs prévues par les lois de programmation militaire successives alors même que nos armées interviennent simultanément dans plusieurs pays étrangers et qu’elles se voient confier un nouveau contrat de protection du territoire national, pouvant amener au déploiement de jusqu’à 10 000 hommes.
La seconde caractéristique majeure de ce projet de budget, c’est d’avoir tiré les conséquences budgétaires de la nécessaire adaptation du format de nos armées à l’évolution des menaces, en attribuant 600 millions d’euros de crédits supplémentaires au budget de la défense, ce qui porte celui-ci à 32 milliards d’euros, au lieu des 31, 4 milliards d’euros prévus par la loi de programmation militaire initiale.
Sans entrer dans le détail, je relèverai d’autres motifs de satisfaction, tel le remplacement de la majeure partie des ressources exceptionnelles qui ont fait défaut cette année par des crédits budgétaires. Nous serons évidemment attentifs à ce que cette décision soit effectivement appliquée au travers du collectif budgétaire.
De même, nous souhaitons que soient tenus les engagements concernant les 57 millions d’euros avancés cet été à l’occasion du remboursement à la Russie des deux bâtiments de type Mistral non livrés.
Conformément à la loi de programmation militaire actualisée, les crédits d’équipement pour 2016 progressent de 16, 7 milliards d’euros en loi de finances initiale à près de 17 milliards d’euros, afin de permettre la poursuite de la modernisation des matériels, la montée en puissance des nouveaux équipements et la régénération des parcs plus anciens, fortement sollicités lors des OPEX.
Je note avec satisfaction l’évolution positive des crédits destinés à la préparation des forces et au maintien en condition opérationnelle des matériels, d’une importance déterminante pour que les hommes et les matériels puissent remplir des missions de plus en plus nombreuses et exigeantes.
Dans ces temps troublés où le lien entre les armées et la nation a besoin d’être renforcé, il est également important de valoriser les réserves et de porter le nombre des réservistes de 28 000 à 40 000 d’ici à 2019, conformément à la loi de programmation militaire. J’observe que 300 réservistes sont engagés sur le territoire national, l’objectif étant qu’ils soient 1 000 en 2016.
Reste la question récurrente, et toujours délicate, du financement des OPEX et des opérations menées sur le territoire national, telle l’opération Sentinelle.
Par définition, ces opérations sont imprévisibles. Elles sont souvent nécessaires, même si certaines sont discutables, et il serait difficilement concevable d’y renoncer par impossibilité de les financer.
Toutefois, du point de vue de la démocratie, une plus grande transparence serait nécessaire sur le financement du surcoût de 620 millions d’euros des OPEX et des 200 millions d’euros de dépenses de personnel, de frais de fonctionnement, d’équipement et de logement de l’opération Sentinelle. Ce financement est assuré à l’échelon interministériel, par le biais d’un décret d’avance et au prix d’annulations de crédits dans d’autres domaines.
Au final, monsieur le ministre, permettez-moi d’exprimer un certain scepticisme quant aux possibilités d’adaptation de votre budget aux défis auxquels notre pays est aujourd’hui confronté.
Les OPEX, par exemple, sont de plus en plus nombreuses et de plus en plus longues. Elles répondent à des objectifs politiques de plus en plus difficiles à atteindre ; dans le même temps, votre équation budgétaire reste quasiment inchangée. C’est ainsi que les moyens engagés pour des interventions ponctuelles ou de longue durée restent les mêmes.
Dans ces conditions, je crains fort que, comme le dit un ancien directeur de l’École de guerre, officier général placé en deuxième section, nos armées ne soient « surdéployées » par rapport à leurs capacités et qu’elles ne s’usent, à l’instar de ce qui est arrivé aux armées britanniques.
Par ailleurs, l’opération Sentinelle étant appelée à se poursuivre, cette intervention sur le territoire national, dans le cadre qui a été défini, est-elle bien du ressort de nos armées ?
On sait d’ores et déjà que le nouveau contrat assigné à nos forces terrestres, outre son coût budgétaire, pourrait avoir des répercussions négatives sur l’action de nos forces engagées à l’extérieur. C’est pourquoi il est vraiment urgent que vous nous présentiez les conclusions de la réflexion sur une nouvelle doctrine d’emploi de nos forces terrestres.
Je conclurai mon propos en évoquant notre sujet de désaccord principal et récurrent : l’armement nucléaire. Outre qu’il constitue un obstacle aux politiques de désarmement, nous considérons qu’il ne représente plus une réponse pertinente aux menaces d’aujourd’hui. Surtout, son coût budgétaire et les investissements qu’il nécessitera dans l’avenir provoqueront un déséquilibre de notre politique de défense, au détriment de la crédibilité et de l’efficacité de nos forces conventionnelles.
Compte tenu des efforts budgétaires consentis, qui, du fait de leur inscription annoncée dans un pacte de sécurité, ne viendront pas réduire les crédits d’autres missions, dont la préservation et le renforcement sont tout aussi indispensables pour relever les défis qui s’imposent à nous, le groupe CRC s’abstiendra sur les crédits de la mission « Défense ».
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour conduire l’évolution de notre armée, que commandent les bascules stratégiques, ainsi que l’irruption de l’irrationnel sur la scène internationale – je veux parler du terrorisme lâche et aveugle –, il fallait d’abord réviser la loi de programmation militaire. Cela est fait !
Il fallait ensuite inscrire dans le projet de budget pour 2016 la tranche des crédits additionnels, dont nos collègues Daniel Reiner et Jacques Gautier viennent de décrire parfaitement les contours et le contenu. Cela est fait !
Il nous fallait enfin flécher financièrement la prise en compte de la montée en puissance des champs nouveaux de la guerre moderne : renseignement et transmissions, cyber-défense et drones, dont la panoplie devra être encore étendue dans le futur. Cela est fait !
La guerre n’est pas un leurre, la guerre n’est pas un écran virtuel : elle est réelle, même si l’action psychologique et la bataille médiatique sont devenues, de l’amont à l’aval, une composante de la belligérance.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement consacre des financements supplémentaires à la consolidation de nos troupes au sol, à la reconfiguration des dispositifs, à nos capacités d’intervention sur terre, en mer et dans les airs.
Certains esprits chagrins critiquent les OPEX, sous divers prétextes, notamment financiers. Mais, outre les raisons politiques et diplomatiques qui les justifient, que serait une défense si elle n’était pas en même temps une capacité d’attaque ? Notre dissuasion nucléaire, colonne vertébrale de l’indépendance nationale, bouclier de fait de l’Europe occidentale, doit être nécessairement complétée par une armée de protection et de projection, bien et mieux entraînée, et dotée de matériels appropriés.
À un moment où de nouveaux empires se dessinent, mondialisant les enjeux, à un moment où le creusement des inégalités fragilise le pacte social, où l’Europe hésitante, souvent frileuse, parfois tétanisée, hoquète au lieu d’aller de l’avant, l’armature de notre État doit être garantie, densifiée, blindée par une défense solide. Dans le bouillonnement sociétal qui chavire nos certitudes, qui dilate et fait éclater notre cadre de vie, qui égare les consciences civiques, l’armée reste un rempart de la République et de son intégrité.
Et si l’Europe ne veut pas réellement d’une défense européenne, eh bien qu’elle participe, au-delà des pétitions de principe, financièrement à l’effort de la France, quand celle-ci brandit l’étendard de la liberté, de nos valeurs, de notre conception de l’histoire, de Tombouctou à Bamako, de Beyrouth à Raqqa, de N’Djamena à Bangui !
L’Europe ne peut se limiter à un conclave renouvelé de questionnement économique ; elle doit dire que le progrès humain ne se déploie que dans la sécurité. Et en tirer les conséquences !
Aujourd’hui, il nous faut prendre par ailleurs en compte la mutation insolite du terrorisme, notre ennemi intime, à la fois surgi d’un terreau laissé en déshérence par l’aventure américaine en Irak, de Bagdad à Mossoul, mais aussi dissimulé dans des replis de diasporas prises en otage et actionnant des filets mafieux pour se financer.
Et comme ce terrorisme se nourrit des errances de jeunes en quête d’absolu, qui sont-ils ces jeunes, nos jeunes, qui en arrivent à jeter par-dessus bord leurs parents, leur humanité, leur pays ? Des guerriers d’Allah ? Des anticolonialistes ? Des anti-impérialistes ? Non. Ce sont des révoltés, des nihilistes, des individualistes, à peine pratiquants, coupés de leurs coreligionnaires, individus non intégrés issus d’une deuxième génération musulmane ou des égarés fraîchement convertis à des slogans extrémistes, habités par l’instinct de mort.
Car notre ennemi n’est pas l’islam. En France, il y a d’ailleurs, selon la belle formule d’Olivier Roy, non pas « radicalisation de l’islam », mais « islamisation de la radicalité ».
Cela commande donc que l’effort de destruction de l’ancrage territorial de Daech soit adossé naturellement à l’intense travail diplomatique, mais aussi qu’en France l’islam modéré, tel le fil à plomb dans sa verticalité, maîtrise l’enseignement et la transmission du message religieux.
Pour mettre fin à ces folles équipées, la réponse est nécessairement globale, militaire sur le terrain, diplomatique à l’international, sociétale et policière chez nous.
Notre appareil de défense s’adapte à cette nouvelle donne : nos technologies d’écoute, d’analyse et nos moyens d’action directe sont – et seront – renforcés. Et puisque chacun comprend que cette guerre asymétrique et sauvage va hélas ! durer, chacun comprend ici que les efforts budgétaires importants consentis par le Gouvernement s’inscrivent dans le processus de reconquête, nécessaire et long, d’un budget de la défense jusqu’à hauteur de 2 % du PIB.
Qui ne souscrirait, ici, à la prééminence sécuritaire énoncée par le Président de la République lors du Congrès de Versailles ?
Au-dedans, il y a matière et urgence à réorganiser, à redynamiser notre réserve territoriale, pour peut-être en faire une garde nationale. Le raffermissement du lien armée-nation, le déploiement de Sentinelle, l’attention portée au moral de nos soldats, le besoin de mobiliser, notamment dans l’armée de terre, les citoyens au service de la patrie, l’enseignement de l’histoire, l’instruction civique et morale dès l’école primaire et le travail mémoriel viendront compléter l’ensemble du dispositif de défense, qui est aussi une reconquête des esprits.
L’avenir et le rang de la France, notre unité et notre dignité passent par là : ne pas baisser la garde et ne pas baisser la tête.
Pour ce qui nous concerne, nous sommes fiers de voter un budget debout, un budget qui, non seulement, a stoppé une attrition dangereuse, mais qui, surtout, réenclenche une dynamique patriotique vertueuse.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du RDSE, ainsi que sur plusieurs travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en cette année marquée par le terrorisme en France et dans le monde, le vote du budget de la défense est un moment évidemment important.
Important pour nos armées, important aussi pour notre communauté nationale, qui, au vu des tragiques événements qui s’enchaînent, est dans l’attente de réponses claires.
La protection de nos compatriotes contre les agressions extérieures doit être au cœur de nos préoccupations. C’est ce qu’attendent les Français dans un monde où nos alliés européens nous laissent bien seuls pour assurer la défense au Levant.
Il est donc capital, monsieur le ministre, que vous ayez fait le choix de mettre un terme aux coupes budgétaires et aux baisses d’effectifs qui ont touché la défense.
Nos forces armées ne pouvaient subir une nouvelle baisse de leurs crédits sans que la cohérence globale et irréversible de notre outil de défense en soit affectée.
Les événements de janvier et novembre 2015, mais aussi la tension qui règne sur la scène internationale, incitent à rééquilibrer la situation dans le cadre du budget pour 2016.
En effet, les coupes budgétaires opérées dans le budget de la défense ont fait perdre de la cohérence en termes d’organisation à nos armées. Elles se retrouvent, aujourd’hui, amputées et déséquilibrées dans l’ensemble de leurs forces.
La déflation des effectifs s’interrompt.
Cette décision s’imposait, mais la programmation et son actualisation renvoient à l’après-2017 de lourds enjeux.
Nous serons alors face à un challenge redoutable entre les économies qui n’auront pas été faites et les investissements importants à consentir pour préparer l’avenir, en particulier moderniser la dissuasion.
Le gel de la déflation est donc un progrès indéniable, mais insuffisant. Des questions restent en suspens pour concrétiser nos engagements et rassurer nos armées.
Concernant le maintien des effectifs, les forces armées s’interrogent légitimement sur la cohérence de l’organisation qu’elles ont repensée sur un nouveau modèle de ressources humaines déflaté.
Vers quelles fonctions ces effectifs vont-ils être affectés, monsieur le ministre ? Comment seront-ils équipés et de quels moyens disposeront-ils pour s’entraîner ?
Concernant la situation au Proche-Orient et au Moyen-Orient, les récents développements de la crise montrent clairement qu’elle comporte des risques importants de contagion régionale : au Liban, en Jordanie, en Égypte et peut-être même dans le reste de la péninsule arabique.
Ces risques semblent avoir été largement sous-estimés par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013.
Au-delà de l’inévitable réactualisation de la loi de programmation militaire, la LPM, n’est-il pas nécessaire de relancer une nouvelle appréciation stratégique, un nouveau Livre blanc ?
À long terme, avons-nous une programmation militaire adaptée aux enjeux à venir ?
Prenons l’exemple du Rafale : la cible actuelle du nombre de Rafale a été réduite de façon significative.
Avec un seul porte-avions, nous ne disposerons plus de moyen de réaction aéronaval pendant dix-huit mois d’IPER – indisponibilité périodique pour entretien et réparation – à partir du début de 2017, soit jusqu’à la mi-2018.
La crise s’inscrit dans la durée. Ces brèches capacitaires ne doivent-elles pas être comblées dans ce contexte lourd de menaces ?
Par ailleurs, les événements de janvier dernier ont été le déclencheur de l’opération Sentinelle. Cela a été abordé, à de nombreuses reprises, cet après-midi ; 10 000 hommes ont été mobilisés et 63 000 auront, en 2015, participé à cette opération. Ce dispositif se poursuit dans un contexte où le risque est encore plus élevé.
Cette pérennisation ne sera pas sans conséquence sur le niveau d’entraînement de nos forces, en particulier celui de l’armée de terre, au moins le temps que cette dernière ait recruté et formé les 11 000 hommes destinés à sa remontée en puissance.
C’est d’autant plus vrai que le dispositif actuel est de nature statique et que les capacités opérationnelles de nos unités ne sont donc pas exploitées de manière optimale.
Dans le climat international actuel, est-il raisonnable de figer dans la durée le cœur de notre armée de terre dans des missions de protection du bas du spectre, confiées, il y a peu, à des forces de police ?
Ne serait-il pas plus sage de pérenniser cette surveillance en créant une force dédiée qui n’amputerait pas nos forces armées ?
N’est-il pas temps de repenser, monsieur le ministre, la manière d’employer nos soldats sur le terrain, en cohérence avec les modes d’action qu’ils mettent en œuvre en opérations extérieures ?
En parallèle, n’est-il pas urgent de rendre plus facile l’emploi des réservistes ? Leur engagement constituerait une réponse citoyenne à la menace actuelle, et nous avons tous des témoignages nombreux de gens qui souhaiteraient s’investir.
Compte tenu de nos engagements, quelle est notre crédibilité si nous ne disposons plus d’une réserve stratégique capable d’être engagée dans un nouveau soubresaut de la crise ?
Pour conclure, je veux, à mon tour, rendre hommage à l’engagement et au courage de nos soldats.
Malgré les difficultés matérielles, ils sont présents sur de multiples théâtres d’opérations, extérieures comme intérieures. Ils interviennent au péril de leur vie.
L’actualité récente nous le rappelle cruellement puisque l’un de nos soldats d’un commando parachutiste de l’air, le CPA 10, blessé au Mali, est décédé hier.
Ils sont les premiers défenseurs de la démocratie et de la liberté.
Ils méritent notre respect et notre admiration et ils méritent surtout qu’on prenne de bonnes décisions.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens, d’abord, à saluer le travail des rapporteurs de la commission des finances et de la commission des affaires étrangères et de la défense sur ce projet de loi.
Ce débat budgétaire s’ouvre dans un contexte sécuritaire inédit.
Longtemps mal comprise, son parc d’équipements vieillissant, ses effectifs rognés, la défense a souvent servi de variable d’ajustement : une solution de simplicité, peut-être, accompagnée parfois d’un certain angélisme vis-à-vis des questions de sécurité.
La dégradation de la situation internationale, la multiplication des attentats ont fait entrer la France et l’Europe dans une dure réalité.
Dans ces moments difficiles, c’est vers la nation, le drapeau, l’armée – des symboles parfois jugés « surannés » par certains – que les Français se tournent. Et l’on assiste aujourd’hui au retour en grâce de l’armée, que de nombreux jeunes souhaitent désormais intégrer.
Nos soldats, dont je salue l’engagement total, sont présents sur tous les fronts.
Dans un conflit asymétrique, je voudrais m’arrêter un instant sur le travail très difficile accompli par nos forces spéciales, dont je rappelle qu’elles paient un lourd tribut aux opérations : trois commandos parachutistes de l’armée de l’air ont été très gravement blessés en octobre dernier, et l’un d’eux est décédé hier.
Les récents événements ont montré le besoin de poursuivre les opérations militaires extérieures. Dans ce contexte, on comprend mal le mode de financement des OPEX, notamment leur surcoût toujours insuffisamment provisionné et les modalités de son financement par la solidarité interministérielle, qui pénalisent le ministère de la défense. Le rapporteur spécial l’a d'ailleurs très bien souligné.
Les opérations intérieures aussi coûtent cher et mobilisent de nombreux personnels, en particulier pour l’armée de terre, dont les effectifs vont quelque peu remonter – cela a été dit –, mais qui devra faire face au défi du recrutement et de la fidélisation.
L’engagement dans le cadre de Sentinelle érode aussi la préparation opérationnelle de l’armée de terre. Il y aura probablement encore une à deux années difficiles sur lesquelles il faudra être attentif.
Je voudrais dire également quelques mots plus spécifiques des problématiques de la marine.
En octobre dernier, nous avons pu, avec quelques collègues emmenés par le président Raffarin, embarquer sur le Charles-de-Gaulle et constater le professionnalisme de son équipage. Aujourd’hui, le déploiement de notre groupe aéronaval, en démultipliant nos capacités de frappe et de renseignement, par l’intérêt aussi qu’il suscite de la part des marines étrangères, valide la pertinence du maintien des capacités de premier rang au sein du modèle d’armée issu des Livres blancs et les lois de programmation militaire successives.
Il y a néanmoins des problèmes de disponibilité pour certains aéronefs de la marine et la nécessité d’accélérer le remplacement des plus anciens, singulièrement des hélicoptères légers.
Des difficultés existent aussi pour les avions Atlantique II, dont l’utilité opérationnelle n’est plus à démontrer, en particulier en matière de renseignement. Il y aura lieu de rester vigilant.
Par ailleurs, la France dispose d’un domaine maritime important, lequel s’est encore étendu récemment, qu’il faut surveiller et protéger. Certains patrouilleurs hauturiers qui participent à ces missions présentent des signes de fatigue après plus de trente ans de service. De plus, les patrouilleurs océaniques assurent la défense maritime du territoire au large, ce qui, dans un contexte sécuritaire dégradé comme il l’est actuellement, doit nous convaincre de l’importance d’anticiper le programme BATSIMAR, bâtiment de surveillance et d’intervention maritime.
Plusieurs bâtiments manquent déjà à l’appel outre-mer et nous arriverons à un déficit plus important en 2020, alors que le programme est prévu pour 2024.
Dans un contexte de globalisation des opérations maritimes, de globalisation économique et de retour en force des puissances maritimes, une marine française moderne est un atout majeur pour notre pays.
De plus, alors que nous peinons déjà à trouver des financements, nous ne pourrons pas toujours « courir » seuls après les effectifs et les moyens. « L’Europe désarme, mais le monde réarme », notaient dans un rapport nos collègues Jacques Gautier et Daniel Reiner, alors que la menace s’accroît.
Il faut aussi faire face à l’augmentation du coût des équipements militaires, qui rend indispensable un meilleur partage à l’échelle européenne.
Ainsi, en matière de sécurité et de défense, nous payons les atermoiements de l’Union européenne et de certains États membres.
Le Président français a choisi d’invoquer le traité de l’Union européenne pour demander l’assistance des autres États membres. Les ministres européens de la défense ont récemment exprimé leur soutien à la France. Je sais et je salue, monsieur le ministre, votre engagement sur ce dossier. Mais au-delà des mots, nous attendons de nos partenaires des actes concrets perceptibles par les personnels engagés sur le terrain.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, de l'UDI-UC, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.
Applaudissements.
Madame la présidente, monsieur le président de la commission, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais à mon tour rendre hommage au sergent-chef Alexis Guarato, du commando parachutiste de l’air n° 10 – CPA 10 –, récemment décédé à la suite d’un attentat au nord du Mali. Je serai amené à présider l’hommage qui lui sera rendu par la nation au début de la semaine prochaine.
Je voudrais aussi en profiter pour saluer à mon tour l’engagement, le dévouement et le courage de nos forces, qui opèrent aujourd’hui sur le théâtre extérieur, à travers les opérations Barkhane, Sangaris et Chammal, au Liban et en prépositionnement sur un certain nombre de lieux, mais aussi sur notre sol, dans le cadre de l’opération Sentinelle – j’aurai l’occasion d’y revenir.
Je vous remercie, les uns et les autres, d’avoir pensé à leur rendre hommage, ce sentiment étant partagé, je n’en doute pas, par l’ensemble du pays.
L’examen de notre budget 2016 intervient dans un contexte d’une gravité particulière, que vous me permettrez d’évoquer pour commencer. Depuis l’adoption du projet de loi de finances pour 2016 en conseil des ministres, et son vote par l’Assemblée nationale, la France a basculé dans la guerre.
Vendredi 13 novembre, ce que nous redoutions, ce que nous appréhendions, en particulier depuis le 7 janvier dernier, s’est dramatiquement concrétisé : la France a subi une attaque armée sur son sol, perpétrée par les membres d’un groupe terroriste militarisé qui prétend s’ériger en État.
Un hommage national vient d’être rendu ce matin aux morts et aux blessés de cette agression, au cours duquel le Président de la République a exprimé la compassion et la détermination de la nation.
Au moment de conclure cette discussion, je voudrais saluer ici, mesdames, messieurs les sénateurs, votre mobilisation permanente, depuis trois ans et demi, en faveur des moyens de notre défense, plus que jamais sollicités par cette actualité tragique.
Au cours des différentes discussions que nous avons pu avoir dans cette enceinte, vous nous avez toujours soutenus, vous avez toujours apporté votre contribution, en particulier, tout récemment, lors de l’actualisation de la loi de programmation militaire, qui nous permet aujourd’hui de disposer d’une base solide pour aborder le budget 2016.
Mes remerciements s’adressent en particulier à M. le président de la commission, à M. le rapporteur spécial et à l’ensemble des porte-parole des différents groupes qui se sont exprimés tout à l’heure.
Ce soutien est très précieux en cette période, et le vote que vous allez émettre, mesdames, messieurs les sénateurs, sera aussi une manière forte de lutter contre Daech, en montrant que l’effort en faveur de la sécurité et de la défense de notre territoire se poursuit et rencontre un consensus fort.
Je n’ai pas le temps de répondre à l’ensemble des observations qui ont été formulées.
Comme je vous le disais à l’instant, monsieur Raffarin, je pourrais peut-être, dans les jours qui viennent, fournir à la commission des réponses plus techniques sur un certain nombre de points.
Je me concentrerai aujourd’hui sur les éléments les plus directement en rapport avec le budget.
À la suite des décisions annoncées par le Président de la République le 16 novembre devant le Congrès, j’ai déposé un amendement qui prévoit, pour 2016, une hausse de 100 millions d’euros des crédits de paiement et de 173 millions des autorisations d’engagement par rapport au projet de budget qui vous était soumis initialement.
Cet amendement, dont je détaillerai tout à l’heure le contenu, vise en particulier à couvrir les besoins en munitions pour les opérations en Syrie et en Irak. Les flux de munitions peuvent être éligibles aux OPEX, au contraire des stocks. Il nous faut donc inscrire ces crédits au budget, de même que quelques moyens supplémentaires permettant de répondre aux orientations fixées par le Président de la République, en particulier le renforcement du renseignement, de la cyberdéfense et de la réserve opérationnelle dès l’année 2016.
Au-delà de cet amendement, qui s’inscrit dans le droit fil des orientations qui avaient été arrêtées au moment de l’actualisation de la loi de programmation militaire, je voudrais revenir sur quelques points relatifs aux effectifs, aux engagements financiers pour 2015 et 2016 et aux engagements capacitaires, pour répondre aux questions posées et lever toute ambiguïté.
S’agissant des effectifs, nous devons avoir à l’esprit l’ensemble des chiffres.
Dans la loi de programmation militaire 2014-2019, 34 000 suppressions de postes étaient prévues, mais elles intégraient 10 000 suppressions de postes issues de la loi de programmation militaire 2009-2014 – sur les 54 000 suppressions de postes que celle-ci avait prévues, un peu plus de 40 000 avaient été exécutées ; il en restait donc 10 000, qui s’ajoutaient aux 24 000 suppressions découlant du Livre blanc.
Depuis lors, l’actualisation de la loi de programmation militaire a permis le rétablissement de 18 500 postes. Nous honorerons ces engagements en 2015 et en 2016, ce qui nous permet, au budget 2016, d’afficher un solde positif de 2 300 postes. S’y ajouteront 10 000 postes supplémentaires à l’horizon 2017, 2018 et 2019, qui seront sauvegardés en application de la décision du Président de la République et affectés à la cyberdéfense, au renseignement et aux forces opérationnelles.
Puisque la question m’a été posée par M. Lorgeoux ou par M. Reiner, je précise que 1 000 postes supplémentaires seront affectés au renseignement à l’horizon 2017, 2018, et 2019 par rapport aux chiffres contenus dans l’actualisation de la loi de programmation.
Cette orientation ne modifie en rien la nécessité de rationaliser, de réorganiser et de transformer nos armées, de nous adapter aux nouvelles menaces. Ainsi, les programmes prévus par les chefs d’état-major des différentes armées, notamment le programme d’adaptation « Au contact » pour l’armée de terre, seront mis en œuvre, avec toutefois un peu plus de souplesse et de moyens, ce qui les aidera à accomplir leurs missions. Cette adaptation de nos forces aux nouvelles menaces est nécessaire.
Dans ce contexte, pour tirer les conséquences des engagements pris par le Président de la République devant le Congrès, je précise aussi que nous allons renforcer notre capacité de réserve.
Plusieurs orateurs, en particulier Mme Garriaud-Maylam, ont parlé de cette perspective avec enthousiasme. Comme vous le savez, c’est l’une de mes préoccupations depuis que j’exerce mes responsabilités ministérielles. Les réserves, c’est vrai, servaient souvent de variables d’ajustement dans les choix budgétaires. De fait, les engagements passeront, pour la période 2016-2019, de 28 000 à 40 000 réservistes, en favorisant l’élargissement des recrutements.
Nous engagerons également une réflexion – j’insiste sur ce point – sur le lien opérationnel entre la garde nationale et la réserve territoriale. Comment faire pour que l’accroissement de la réserve puisse, en se territorialisant, devenir une forme de réserve-garde nationale ? Telle est la question à laquelle le Président de la République me demande de réfléchir, à la suite des engagements qu’il a pris devant le Congrès. Je souhaite bien entendu que vous soyez, les uns et les autres, associés à cette réflexion. D’ores et déjà, l’amendement présenté par le Gouvernement permet une montée en puissance de notre capacité de réserve à l’horizon 2016.
Je voudrais aussi prendre note avec vous – Mme Demessine, comme d’autres orateurs, a soulevé cette difficulté – des contraintes qu’entraîne l’opération Sentinelle.
En effet, cette dernière a été mise en œuvre très rapidement, et les recrutements prévus ne produiront leurs effets qu’en 2016. L’année 2015 contribue pour moitié au recrutement supplémentaire destiné à la force opérationnelle terrestre, mais il faut le temps de recruter et de former les nouveaux personnels. En 2016, la deuxième phase permettra d’aboutir au résultat escompté.
L’année 2015 est donc particulièrement difficile pour les soldats engagés dans l’opération Sentinelle. J’ai pris des mesures d’accompagnement indispensables dans le domaine de l’hébergement, des primes et des décorations, et je vais souvent à la rencontre de nos soldats. Il est vrai que nous traversons une période de forte tension à la suite des tragédies que nous avons vécues, mais l’horizon va sensiblement se dégager grâce aux inflexions qui ont été apportées et aux recrutements qui sont en cours.
Je voudrais encore ajouter deux choses à propos de l’opération Sentinelle.
D’abord, notre pays compte une armée, et une seule. Il n’y aura pas une armée spécialisée dans les opérations intérieures et une autre spécialisée dans les opérations extérieures ; c’est le même ennemi, il sera combattu par la même armée, celle qui, aujourd’hui, intervient aussi bien dans les OPEX que dans les opérations intérieures. C’est un point majeur, et j’ajoute, comme je l’avais déjà annoncé au moment de l’actualisation de la loi de programmation militaire, qu’il nous faudra réfléchir ensemble au nouveau concept de « sécurité intérieure » et au lien qu’il entretient avec la sécurité extérieure.
Je serai amené à soumettre au Parlement, avant la fin du mois de janvier, des propositions qui nous permettront d’engager un débat sur ce point. Nous sommes confrontés à une nouvelle donne, nous avons fait le choix de la cohérence globale de l’action de nos forces armées sur les théâtres extérieurs comme sur le terrain intérieur, mais il convient de définir plus précisément le concept.
J’ajoute – ce point est peut-être passé un peu inaperçu à l’Assemblée nationale mercredi dernier – que le Premier ministre a décidé, à la demande du Président de la République, d’engager une réflexion commune sur l’articulation entre sécurité intérieure et sécurité extérieure. Cette réflexion, à laquelle chacun sera associé, permettra de définir plus précisément les concepts.
Nous avons donc une vraie question et une amorce de réponse, mais nous devons encore intensifier notre réflexion en vue d’aboutir, dès le début de l’année prochaine, à une élaboration conceptuelle plus forte.
À M. le rapporteur spécial, qui m’a interrogé à juste titre sur la validité et l’opérabilité de mes propos, je veux dire que les arbitrages budgétaires qui ont été rendus sont en tout point conformes aux engagements pris lors de l’actualisation de la loi de programmation militaire et lors du débat que nous avons eu, ici même, pour l’exercice de fin de gestion et le budget 2016.
Pour l’exercice de fin de gestion, tous les engagements que j’avais pris sont respectés, grâce au décret d’avance et au projet de loi de finances rectificative de fin d’année, parfaitement conforme à la volonté du Parlement.
S’agissant des OPEX, leur surcoût pour 2015, au-delà des 450 millions d’euros inscrits en loi de finances initiale, s’élève à 625 millions d’euros et, conformément à la loi de programmation militaire, ce montant sera intégralement couvert par le décret d’avance.
Quant aux dépenses de l’opération Sentinelle, dont plusieurs sénateurs se sont souciés, notamment MM. Gautier et Reiner, qui, sur ce sujet comme sur d’autres, font front commun, elles seront intégralement financées par le décret d’avance, pour un montant de 171 millions d’euros.
C’est un engagement que j’avais pris.
Par ailleurs, le ministère de la défense va « autoassurer », au sein de la mission « Défense », les dépassements de crédits de masse salariale, dus, notamment, aux déboires de Louvois. C’était un autre de mes engagements, et nous avons réussi à le mettre en œuvre en interne.
En ce qui concerne, toujours, le budget 2015, la suppression des ressources exceptionnelles se traduit par l’ouverture de crédits budgétaires propres, à hauteur de 2, 144 milliards d’euros, dans le projet de loi de finances rectificative qui a été présenté en conseil des ministres au matin du vendredi 13 novembre dernier. S’y ajouteront les 57 millions d’euros de charges induites par le remboursement à l’État russe des deux bâtiments de projection et de commandement non livrés, ce qui rend l’opération parfaitement blanche, monsieur le rapporteur spécial.
Enfin, une annulation de 200 millions d’euros, répartie entre le décret d’avance et le projet de loi de finances rectificative, constituera la contribution de la mission « Défense » à la solidarité interministérielle de fin de gestion – vous avez soulevé cette aspérité. Ce montant sera presque intégralement compensé par la reprise, en 2015, de 187 millions d’euros d’intérêts financiers accumulés sur les comptes de l’Organisation conjointe de coopération en matière d'armement, l’OCCAr, si bien que l’annulation « nette », pour la mission « Défense », ne portera que sur 13 millions d’euros.
Mesdames, messieurs les sénateurs, avouez que l’ensemble présente, globalement, la forme d’une sanctuarisation de nos crédits !
Je veux que les choses soient très claires sur ce point.
Le budget pour 2016 connaît, quant à lui, une augmentation de 600 millions d’euros, auxquels s’ajouteront 100 millions d’euros, si vous adoptez l’amendement que je vous présenterai tout à l'heure. Les crédits de la mission seraient alors portés à 32, 1 milliards d’euros, ce qui constitue une progression significative.
J’ai déjà eu l’occasion de m’expliquer sur le coût des facteurs. Toutefois, je me tiens à votre disposition pour analyser leur évolution favorable et la réaffectation qui en découlera au profit des opérations d’armement à l’occasion d’une prochaine réunion de votre commission des affaires étrangères. Je n’entrerai pas maintenant dans le détail de ce dossier, mais sachez que la diminution du coût des facteurs sera bien au rendez-vous et nous permettra d’acquérir les équipements inscrits dans la loi actualisant la programmation militaire.
Je veux profiter du peu de temps qui me reste pour rassurer M. Gautier sur la question des drones : effectivement, nous avons engagé, avec l’Allemagne, puis avec l’Italie et, maintenant, avec l’Espagne – la Pologne manifestant à son tour beaucoup d’intérêt – une discussion extrêmement approfondie sur le drone Reaper de nouvelle génération à l’horizon 2025-2030, de manière à ne pas être dépendants de la technologie américaine, aussi performante soit-elle. Il serait tout à fait dommageable que l’Europe ne soit pas au rendez-vous sur ce dossier ! En tout état de cause, je peux vous dire que celui-ci avance bien et que je serai amené à signer, au premier semestre 2016, les études de définition du concept avec les industriels concernés.
J’ai également été interrogé sur l’A400M, le transport tactique et les discussions engagées avec Airbus à propos des trois avions qui doivent être livrés à la fin de l’année 2016 et des trois, déjà livrés, qui doivent être rétrofités. Disons, sur cette question très sensible, que nous avons des discussions « toniques » avec Airbus. M. Enders, avec lequel mes échanges sont directs, m’a écrit qu’Airbus devrait être en mesure de tenir l’engagement pris. J’espère que tel sera effectivement le cas.
Au reste, cela ne nous empêchera pas d’engager l’acquisition de quatre avions C130, pour compléter la flotte d’A400M disponibles. Nous discutons actuellement en interne du type de C130 qu’il nous faut acquérir. Quel que soit le choix qui sera fait au final – avion ultraperformant très récent ou avion d’occasion –, je peux vous assurer que nous serons au rendez-vous pour honorer le besoin existant en la matière.
Mais, madame la présidente, on ne m’a alloué qu’un temps de parole de vingt minutes, et je l’ai déjà presque épuisé !
Et je ne voudrais pas faire attendre mon collègue Michel Sapin !
Nouveaux sourires.
Mêmes mouvements.
Néanmoins, puisqu’il est possible de faire preuve d’un peu de souplesse, je veux en profiter pour porter à votre connaissance quelques éléments significatifs.
Tout d’abord, certains intervenants ont estimé que nous étions présents sur de trop nombreux théâtres d’opérations. Je ne peux pas les laisser dire, car j’estime que l’on ne se retire pas des théâtres sur lesquels on s’engage !
Aujourd'hui, nous participons à l’opération Barkhane ; je vois mal comment nous pourrions nous en retirer ! Nous prenons part à l’opération Chammal ; personne ne peut imaginer que nous puissions abandonner cette opération ! Nous sommes engagés dans l’opération Sangaris ; j’ai déjà indiqué ici que nous envisagions de réduire progressivement notre participation de manière très sensible, lorsque les conditions politiques auront été rétablies en Centrafrique.
De ce point de vue, dès lors que l’élection présidentielle est maintenant annoncée, qu’un calendrier a été défini et que les candidats sont en train de se manifester, il me semble que nous sommes engagés dans un processus vertueux, même si des tensions préoccupantes demeurent.
Nous avons estimé indispensable de rester présents en République centrafricaine pendant toute la période électorale, afin que l’autorité politique qui émergera des élections puisse être en situation d’assurer sa prise de fonctions dans les meilleures conditions.
Je rappelle, du reste, que nous nous sommes retirés d’autres théâtres. Je le dis aussi à l’attention de M. Perrin, qui s’interrogeait sur ce point. Ainsi, nous ne sommes plus engagés au Kosovo, et nous nous sommes retirés de l’opération Atalante, compte tenu de ses bons résultats. Nous intervenons au moment où notre présence est requise et, quand notre présence n’est plus indispensable, nous pouvons nous retirer.
À ceux qui m’ont interrogé sur ce point, je veux dire que la France a les moyens d’être en situation de répondre aux différents défis et aux différentes menaces auxquels elle fait face, conformément à son rang et à ses capacités et contrairement à ce que j’ai pu entendre ici ou là, notamment dans la bouche de Mme Demessine ou dans celle d’un ancien patron de l’École de guerre, qui ne semble aujourd'hui plus tellement aux prises avec l’actualité militaire immédiate
Mme la présidente de la commission des finances opine.
Sourires.
Une inquiétude a été exprimée à propos de la participation européenne à notre effort. Sachez, mesdames, messieurs les sénateurs, que j’ai pris part, la semaine dernière, à Bruxelles, à la réunion des ministres de la défense de l’Union européenne. À la demande du Président de la République, j’ai sollicité l’application du 7 de l’article 42 du traité de Lisbonne, qui précise qu’un État membre victime d’une agression armée sur son territoire bénéficie de la solidarité de l’ensemble des autres États membres. Cette solidarité nous est acquise !
Je veux insister sur la participation de l’Allemagne, entre autres soutiens qui nous sont apportés. Cette participation, très récente, a fait l’objet de discussions entre le Président de la République et Mme Merkel. Pour ce qui me concerne, j’ai été plusieurs fois en contact cette semaine, jusqu’à ce matin, avec ma collègue Ursula von der Leyen, ministre de la défense de la République fédérale d’Allemagne. Notre voisin va soutenir la MINUSMA en envoyant 650 hommes au Mali, ce qui allégera d’autant la participation française. C’est un point très important.
Mme la présidente de la commission des finances approuve.
Plus importante encore est sa participation sur le théâtre du Levant. D’une part, elle va mobiliser des avions de chasse de type Tornado pour effectuer des vols de reconnaissance en Irak et en Syrie. D’autre part, elle apportera un soutien dans le domaine du ravitaillement par la mise à disposition d’un A310 MRTT, un appui renforcé de conseil aux peshmergas du Kurdistan irakien et dépêchera une frégate d’accompagnement du porte-avions Charles-de-Gaulle dans le golfe arabo-persique à partir du début de l’année prochaine.
Mesdames, messieurs les sénateurs, mesurez-vous l’ampleur de ce que cela représente sur le plan politique en l’Allemagne ? Si la décision du Gouvernement allemand n’a pas encore été validée par le Bundestag, elle a été rendue publique hier soir ou ce matin
M. Michel Bouvard applaudit.
, et nous avons eu l’occasion de dire que nous nous en réjouissions.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam opine.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le voyez, des étapes importantes sont franchies. À l’heure où je vous parle, on trouve, autour du porte-avions Charles-de-Gaulle, en plus de notre propre frégate d’accompagnement et de notre navire ravitailleur de pétrole, une frégate belge et une frégate britannique, qui contribuent à la force que nous représentons.
Des évolutions très sensibles se manifestent. La décision du gouvernement allemand et la volonté, annoncée par le Premier ministre britannique David Cameron, de s’engager plus fortement dans le théâtre du Levant témoignent d’une prise de conscience européenne dont il faut se réjouir.
Je répondrai de manière plus détaillée à plusieurs questions techniques qui m’ont été posées à l’occasion d’une prochaine réunion de la commission des affaires étrangères.
Toutefois, je veux encore répondre à M. Lorgeoux sur la nécessité de la formation dans le domaine du renseignement, singulièrement dans le secteur de la cybersécurité. Je sais que cette question vous préoccupe beaucoup – moi aussi, du reste ! Comme vous le savez, j’ai annoncé un plan relatif à la cybersécurité il y a peu, avant même les événements tragiques du 13 novembre dernier.
Il est vrai que le ministère de la défense connaît un problème de recrutement et de qualification. Cela vaut également pour les grands groupes industriels, qui ont eux aussi besoin de compétences en matière de cybersécurité. À cet égard, je me réjouis que le nombre d’étudiants formés dans ce domaine dans le cadre du pôle d’excellence Cyber, que j’ai créé pour tenir compte des risques nouveaux, soit passé, en une seule année, de 2 000 à 2 800. Cela donne la mesure de l’intérêt que suscite ce secteur et des perspectives en la matière.
Enfin, Mme Demessine s’est interrogée sur le maintien en condition opérationnelle aéronautique, ou MCO aéronautique, sujet très compliqué, mais qu’il est tout à fait nécessaire d’aborder. Avant-hier, la réunion du conseil de surveillance du service industriel de l'aéronautique, le SIAé, a abouti à des décisions importantes, dont l’autorisation du recrutement d’ouvriers d’État. L’engagement que j’avais pris sur ce plan est donc tenu.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, je terminerai par une simple observation : comme vous, je suis frappé, mais aussi ému et réconforté par la montée de l’élan patriotique que l’on constate depuis les attentats du 13 novembre.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam opine.
L’image de nos armées était déjà très positive ; elle ne l’avait même jamais été autant depuis de nombreuses années. Elle est maintenant vraiment très attractive.
Ainsi, ce sont en moyenne 1 500 jeunes, contre 500 avant les attentats, qui, chaque jour, sur l’ensemble du territoire national, entrent en contact avec l’armée de terre pour se renseigner sur les carrières qu’elle propose. Le chiffre a triplé ! Ce regain d’intérêt se vérifie aussi, dans des proportions à peu près identiques, pour les autres armées.
Cet élan patriotique est formidable. C’est celui d’une nouvelle génération, d’une génération qui croit en notre pays, qui considère qu’il faut se battre pour sa sécurité, qui est attaché à notre manière de vivre ensemble. Cet élan, je veux, en conclusion de mon propos, le saluer !
défense
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Défense », figurant à l’état B.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Défense
Environnement et prospective de la politique de défense
Préparation et emploi des forces
Soutien de la politique de la défense
Dont titre 2
19 132 708 271
19 132 708 271
Équipement des forces
L'amendement n° II-311, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
E n euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Environnement et prospective de la politique de défense
Préparation et emploi des forces
Soutien de la politique de la défensedont titre 2
Équipement des forces
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. le ministre.
J’ai déjà évoqué, dans mon intervention, les engagements nouveaux dont je voulais proposer l’adoption au Parlement, à la suite des déclarations du Président de la République et des mesures que celui-ci a annoncées lors de son discours devant le Congrès.
Par cet amendement, il vous est proposé d’augmenter les crédits de paiement de 100 millions d’euros et les autorisations d’engagement, de 173 millions d’euros.
Ces ressources supplémentaires visent à couvrir les quatre besoins suivants : les munitions – c’est le besoin le plus important – ; le dispositif renforcé d’intervention lié à l’opération Sentinelle ; le renseignement, pour se doter des moyens techniques nécessaires à la mise en œuvre immédiate de la loi relative au renseignement ; le renforcement de la réserve opérationnelle.
Il s’agit de permettre la mise en œuvre immédiate, dès 2016, de l’ensemble de ces mesures.
Cet amendement, que la commission n’a pu examiner que peu de temps avant le début de la séance, vise à modifier le projet de loi de finances initiale pour 2016, conformément aux annonces du Président de la République.
Par cet amendement, le Gouvernement nous demande d’allouer des crédits complémentaires à la mission « Défense », à l’instar de ceux que nous avons accordés, hier, à la mission « Justice ».
Le ministre a expliqué à l’instant les besoins que ces crédits sont destinés à couvrir.
Il s’agit tout d’abord de financer la reconstitution des stocks de munitions à la suite de l’intensification des frappes. J’avoue qu’il existe une subtilité que je n’ai pas encore bien saisie – mais que je vous promets d’examiner de plus près – sur le point de savoir ce qui, des stocks ou des flux, est éligible aux OPEX. Mais les opérations extérieures, ce sont aussi des dépenses de carburant ou de personnels, par exemple. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous faire un point sur les opérations actuellement en cours et le solde des OPEX pour 2015, eu égard à l’intensification des frappes ?
La question de la réserve, quant à elle, ne nous pose aucune difficulté.
M. Lorgeoux évoquait, voilà quelques instants, une baisse des crédits alloués au renseignement entre 2015 et 2016. Vous nous proposez, par cet amendement, de les réévaluer. Pourriez-vous nous apporter également quelques précisions sur ce sujet ?
Sous ces réserves, la commission des finances a émis un avis favorable sur cet amendement.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Monsieur le rapporteur spécial, vous m’interrogez tout d’abord sur la question des munitions. Il s’agit d’un débat technico-financier que nous pourrons poursuivre avec mon collègue Michel Sapin, dont les compétences sont grandes en ce domaine.
Sourires.
Il se trouve que, juridiquement parlant, les flux de munitions sont éligibles aux OPEX, mais non les stocks.
M. Michel Sapin, ministre. Et quand il n’y a plus de stocks ?
Sourires.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Quand il n’y a plus de stocks, il n’y a plus de flux !
Nouveaux sourires.
Nos discussions inspireront peut-être aux chercheurs des sujets de thèse très pointus…
S’agissant du niveau des OPEX pour 2015, monsieur le rapporteur spécial, il me semble vous avoir répondu lors de mon intervention liminaire. Comme je vous l’ai indiqué, leur coût sera intégralement couvert par le décret d’avance.
Je ne peux faire aucun commentaire sur les outils techniques que les crédits supplémentaires que je vous demande de bien vouloir allouer au renseignement nous permettront de mettre en place. Ces détails relèvent du secret-défense. Je dirai simplement qu’il s’agit d’appliquer les dispositions techniques prévues dans la loi relative au renseignement afin de la rendre complètement opérationnelle.
Je souhaite préciser, notamment à M. Lorgeoux, que les crédits affectés au renseignement n’ont jamais diminué. Leur baisse apparente tient au changement de périmètre de ces services dont je vous propose, à travers cet amendement, de renforcer encore les moyens.
Nous n’avons cessé d’accroître les effectifs de nos services de renseignement, qui sont un outil de notre souveraineté. Il est indispensable de garantir et de poursuivre cet effort.
Un besoin en moyens techniques supplémentaires se fait sentir pour 2016. S’agissant des besoins en personnels, j’ai indiqué à quel rythme ils pourraient être pourvus dans le cadre de la loi de programmation militaire.
La parole est à M. le président de la commission des affaires étrangères.
J’exprimerai d’abord un regret sur notre méthode de travail.
Si je comprends qu’il faille faire vite et que les règles de la discussion budgétaire nous obligent à des interventions courtes, je trouve que disposer de trois minutes seulement pour s’exprimer sur un sujet aussi important que celui des crédits du programme 146, ce n’est pas suffisant.
Applaudissements.
Le Parlement devrait revoir ses méthodes de travail. Nous sommes contraints de résumer nos travaux, alors que les circonstances actuelles devraient nous pousser à aller au fond des choses.
Cela étant dit, monsieur le ministre – et je sais que nous aurons l’occasion de poursuivre notre discussion en commission –, je voudrais vous dire pourquoi je vais voter avec conviction cet amendement.
D’abord, parce qu’il correspond aux engagements que vous avez pris. Nous avons entrepris un effort de redressement et, de rendez-vous en rendez-vous, tout se passe comme nous le souhaitons.
Mais surtout, parce que ce vote, que nous souhaitons le plus large, le plus massif possible, sera la vraie réponse à apporter aux terroristes. Ces derniers spéculent toujours sur la fragilité de la démocratie, sur nos divisions, sur nos incapacités – par moments – à décider.
Le Président de la République a fixé une orientation. La démocratie française, forte autour de ses institutions, forte autour de son État, forte autour de son Parlement, est capable de répondre massivement « oui » à cet effort de défense pour protéger la France et les Français.
Ce vote, qui nous satisfait sur le plan technique, exprime avant tout notre volonté, celle d’un pays qui veut se défendre avec cœur, avec courage dans le respect de ses institutions rassemblées.
Applaudissements.
Je m’associe à tout ce qui s’est dit sur la qualité de notre défense, l’effort fourni et la façon dont la nation soutient à la fois ce que vous êtes, monsieur le ministre, et ce que vous représentez.
Je ne veux pas apporter de bémol et j’entends bien la problématique de la durée des interventions. Je veux simplement rappeler que nous devons examiner trente missions en vingt jours. Je comprends que le temps de parole alloué puisse ne pas sembler suffisant, mais nous avons dû faire des arbitrages et formuler des propositions. À notre grand regret, mon cher collègue et président de la commission des affaires étrangères, nous ne pouvons guère faire mieux.
Lorsque j’avais présenté l’organisation de la discussion budgétaire, en juillet dernier, lors de la conférence des présidents, j’avais indiqué combien ce serait difficile.
Les commissions, notamment la commission des finances, ont réalisé un travail remarquable. Nous vous avions d’ailleurs reçu, monsieur le ministre, avec grand plaisir au moment de l’examen de la loi de règlement.
Je sais que cela peut sembler difficile, mais accorder plus de temps aux orateurs nous emmènerait trop loin.
L’importance de ce vote se trouve non pas dans les temps de parole, monsieur le ministre, mais dans la façon dont vous allez être soutenu. Je pense que la quasi-totalité, sinon la totalité, des membres de cet hémicycle votera les crédits de cette mission. C’est historique.
Vous aurez noté, monsieur le président Raffarin, que j’ai laissé à M. le ministre tout le temps nécessaire pour s’exprimer, eu égard à l’importance du sujet.
Monsieur le ministre, en toute responsabilité, nous voterons cet amendement.
Nous regrettons cependant que le Gouvernement n’ait pas dévolu davantage de moyens à l’opération Sentinelle et au renseignement.
Au regard des tristes événements du 13 novembre dernier, il semble clair que l’armée est plus à même de répondre aux défis d’une guerre asymétrique qui ne porte pas son nom.
Sous ces deux réserves, nous voterons cet amendement.
Mme Nathalie Goulet. Le groupe UDI-UC avait majoritairement voté la loi de programmation militaire, ce qui avait permis de faciliter l’adoption de ce texte, sous la houlette du président Carrère, auquel je voudrais aussi rendre hommage.
M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.
L’ensemble de mon groupe votera cet amendement pour les raisons déjà invoquées par les précédents orateurs.
Nous sommes quelque peu frustrés de ces temps de parole écourtés et je m’associe à la remarque du président de la commission des affaires étrangères, ainsi qu’à celle de la présidente de la commission des finances.
Je voudrais juste évoquer deux chiffres : les exportations d’armement ont rapporté 15 milliards d’euros à la France en 2015. Savez-vous quelle est la part de l’armée dans cette somme ? Elle n’est que de 7, 5 millions d’euros, au titre des prestations vendues, ainsi que l’a rappelé tout à l’heure Joël Guerriau ! La comparaison se passe de mots.
Il nous semble plus que jamais nécessaire de réfléchir à la façon dont l’armée pourrait bénéficier davantage de ces ventes d’armes. Si nous arrivions à gratter tout cela, peut-être pourrions-nous éviter, à l’avenir, d’avoir à adopter de tels amendements.
L'amendement est adopté.
Je constate que cet amendement a été voté à l’unanimité des présents.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-84 est présenté par MM. Trillard, Lorgeoux, J. Gautier, Reiner et Pintat, au nom de la commission des affaires étrangères.
L'amendement n° II-181 est présenté par M. Bouvard.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
en euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Environnement et prospective de la politique de défense
Préparation et emploi des forces
Soutien de la politique de la défensedont titre 2
Équipement des forces
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. André Trillard, rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° II-84.
La Cour des comptes s’est fait l’écho des difficultés bien connues que traverse actuellement l’Office national d’études et de recherches aérospatiales, l’ONERA, comme elle s’est fait l’écho de difficultés dans toutes les administrations.
La situation appelle non seulement des solutions à moyen terme, mais surtout la conclusion rapide d’un contrat d’objectifs et de performance.
Nous avons que la soufflerie de Modane est en danger et que le site de Châtillon n’est pas tout à fait aux normes de sécurité.
C'est la raison pour laquelle nous proposons de transférer 15 millions d’euros du programme 146 vers le programme 144.
Cet amendement nous permettra au moins d’entendre le ministre sur ce sujet. Peut-être a-t-il des solutions à nous proposer…
La parole est à M. Michel Bouvard, pour présenter l’amendement n° II-181.
Eu égard au contexte actuel, je n’aurais pas déposé cet amendement si nous n’étions pas en situation de grande urgence.
Il faut, à l’évidence, que le contrat d’objectifs et de moyens soit négocié, que l’ONERA relève le challenge et que la direction générale de l’aviation civile apporte sa part au financement de l’ONERA, car il s’agit ici de recherche duale.
Je le répète, l’urgence est extrême. La soufflerie de Modane, dont l’intérêt stratégique est souligné par tous les constructeurs européens, est menacée par un affaissement des sols, qui s’est amplifié ces derniers temps. À terme, c’est la structure même du bâtiment qui pourrait être affectée.
Le coût de la reconstruction de cette soufflerie s’élèverait à 700 millions d’euros. Si nous n’intervenons pas rapidement, sa remise en état, quant à elle, peut coûter jusqu’à 300 millions d’euros.
La soufflerie de Modane est unique au monde. C’est la seule qui permette d’analyser des maquettes de missile en grandeur réelle ou des maquettes de gros avions à une taille raisonnable.
Il y a une vingtaine d’années, on considérait que le numérique pouvait tout faire. Puis on s’est aperçu que ces grandes souffleries gardaient toute leur utilité, puisqu’elles permettaient d’obtenir des résultats qu’on ne peut avoir qu’en situation réelle.
Monsieur le ministre, nous avons besoin d’une décision rapide. L’ONERA autofinance déjà 1, 6 million d’euros, pour mener les études et trouver la solution technique, qui est complexe. Les travaux doivent être engagés en 2016, ce qui suppose que l’ONERA en ait les moyens budgétaires.
Il s’agit de sauvegarder un patrimoine de recherche scientifique incomparable au niveau mondial. Pour avoir été longtemps l’élu territorial de ce secteur, j’ai vu défiler à cet endroit tous les grands constructeurs mondiaux, toutes les équipes de recherche.
Je rappelle que nous avons été alertés sur la situation de la soufflerie de Modane, qui est désormais bien connue. Je note que la subvention du ministère de la défense à l’ONERA augmente de 7 % cette année, ce qui constitue déjà un effort.
La position de la commission des finances, c’est la sanctuarisation des crédits de la défense.
Si l’ONERA a incontestablement une vocation militaire, il a également une vocation civile. Je ne verrais aucun inconvénient à ce que la direction générale de l’aviation civile participe au financement en question. J’observe simplement qu’elle ne subventionne plus l’ONERA.
J’ajoute que l’office est un EPIC, un établissement public à caractère industriel et commercial, qui a vocation à travailler avec le secteur public, mais aussi avec le secteur privé. En tant qu’EPIC, il est tout à fait à même d’avoir un plan de développement. La Cour des comptes l’a souligné elle-même, il faut éviter de lancer des investissements sans plan stratégique ni contrat d’objectifs. Je n’ai pas noté que l’ONERA disposait de ces deux outils.
Enfin, d’un strict point de vue budgétaire, l’ONERA dispose de biens immobiliers inutilisés dans les secteurs de Meudon et Châtillon, certains de mes collègues, notamment des Hauts-de-Seine, me l’ont rappelé. Il y a peut-être là une recette possible…
Pour toutes ces raisons, la commission des finances demande le retrait de ces amendements identiques, qui sont des amendements d’appel. À ce titre, ils seront, j’en suis sûr, entendus par M. le ministre.
S’ils n’étaient pas retirés, la commission se verrait contrainte d’émettre un avis défavorable.
J’ai bien entendu les appels des sénateurs faisant état des difficultés de l’ONERA. Je les entends d’autant mieux qu’elles ont déjà été portées à ma connaissance au moment du débat qui s’est tenu à l’Assemblée nationale. Il y a vraiment un groupe qui soutient fortement l’ONERA ! Et je voudrais en faire partie !
Premier point, le ministère de la défense, contrairement à ce que j’ai pu lire ou entendre ici ou là – je ne parle pas de ce que vous venez de dire – ne laissera pas tomber l’ONERA. D’ailleurs, en 2015, nous avons ajouté 9 millions d’euros pour boucler le budget de l’office. Nous sommes donc tout à fait conscients de la situation.
Deuxième point, cette situation traduit un problème de fond, évoqué par le rapporteur spécial. Il convient en effet d’envisager avec l’ONERA une refondation de sa stratégie, qui permette aux industriels de s’investir davantage dans cet outil, qui n’est pas propre au ministère de la défense. Un contrat d’objectifs et de performance, que j’espère pouvoir valider, me sera ainsi présenté avant la fin de cette année.
Troisième point, concernant la soufflerie, qui est un sujet dans le sujet, je comprends vos préoccupations. Des mesures urgentes ont été prises par l’ONERA et un plan de rénovation pour les années 2016-2017, que je vais étudier avec beaucoup d’attention, est en cours d’élaboration. Il entrera dans le cadre du contrat d’objectifs que je viens d’évoquer.
Je suis défavorable à ces amendements identiques. J’espère toutefois avoir apporté les réponses nécessaires.
M. André Trillard, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. M. le ministre a toutes les cartes en main pour mener une telle opération. Je ne voudrais pas être amené à déposer un nouvel amendement sur le même sujet l’an prochain. Je lui fais donc confiance pour analyser rapidement la direction à prendre. Certaines solutions ont été avancées. Il est possible que les industriels préfèrent payer les brevets à la valeur qu’ils ont plutôt que la recherche.
M. Jacques Gautier applaudit.
Je partage l’analyse de M. le rapporteur spécial. Les travaux de la Cour vont dans le bon sens. J’ai entendu le ministre affirmer qu’il y avait « un sujet dans le sujet » et que des décisions pourront être prises s’agissant de la soufflerie S1, dans le cadre d’un contrat d’objectifs et de performance, qui est nécessaire et à propos duquel le Gouvernement est légitimement exigeant.
Je retire l’amendement n° II-181.
L’amendement n° II-181 est retiré.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Défense », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits, modifiés.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Défense ».
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », ainsi que des comptes d’affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » et « Participations financières de l’État ».
La parole est à M. Serge Dassault, rapporteur spécial.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en tant que rapporteur spécial de la mission « Engagements financiers de l’État », je vais vous faire part de mes observations sur la situation de nos finances publiques, avant de formuler un certain nombre de propositions qui permettraient de contribuer à une véritable amélioration de notre situation économique et budgétaire. En réalité, cette dernière n’est pas aussi brillante qu’on le souhaiterait ou qu’on le dit.
Le Gouvernement prévoit en effet une croissance de 1, 1 % pour 2015 et de 1, 6 % pour 2016. Si le Haut Conseil des finances publiques estime, dans son avis rendu le 30 septembre dernier, que l’objectif du Gouvernement est crédible pour 2015, il considère en revanche que, « compte tenu de l’accroissement des incertitudes depuis l’été, […] l’hypothèse d’une croissance de 1, 5 % en 2016 ne peut plus être qualifiée de “prudente” ».
Si le Gouvernement doit à juste titre augmenter le financement de notre sécurité, rien ne l’empêche de faire aussi des économies, en arrêtant de financer des dépenses de fonctionnement par des emprunts. Je pense notamment aux aides supposées inciter les chômeurs à travailler et qui ne servent malheureusement à rien.
Le 18 septembre 2015, l’agence de notation Moody’s a procédé à une nouvelle dégradation de la note de la dette française. Elle s’est ainsi alignée sur les autres agences, qui avaient dégradé la note de la France au dernier trimestre 2014. La prochaine baisse risque de décourager nos investisseurs et de déclencher une augmentation des taux d’intérêt exigés par eux, ce qui serait dramatique, car cela pourrait nous mettre en cessation de paiement. Ce n’est pas sûr, mais il faudrait se préparer à une telle hypothèse, ce que l’on ne fait pas. Or nous sommes sous haute surveillance !
Les principales raisons de notre manque de croissance résident dans notre système fiscal. L’ISF, des prélèvements sociaux sur les dividendes de 15, 5 % et un impôt sur le revenu dont le taux maximum atteint 45 % conduisent à une imposition totale de plus de 65 %, ce qui provoque le départ de nos investisseurs, nous privant ainsi de toute croissance.
En maintenant dans le même temps toute leur confiance à l’Allemagne, qui bénéficie auprès de chacune des agences de notation de la note triple A, les agences de notation ont clairement marqué tout l’écart qui sépare aux yeux des investisseurs un pays capable de dégager un excédent budgétaire, parce qu’il a fait les économies nécessaires, d’un pays comme le nôtre ou plutôt d’un gouvernement comme le nôtre, qui continue de créer de nouvelles dépenses, sans faire de réelles économies de fonctionnement.
Certes, il faut que les riches paient plus, comme vous le dites, monsieur le ministre, mais il y a une limite au-delà de laquelle ils ne paieront plus rien, car ils partiront, excédés, investir ailleurs.
L’impôt sur le revenu, dont 80 % est payé par seulement 20 % des contribuables, est un suicide collectif. Trop d’impôt tue l’impôt ! Ce sont les pays où la pression fiscale est la plus faible qui sont les plus riches. Tous les contribuables devraient payer un impôt, même minime.
Notre besoin de financement en 2016 atteindra 200, 2 milliards d’euros : le déficit budgétaire sera de 73 milliards d’euros et les emprunts arrivant à échéance en 2016 devront être remboursés, à hauteur de 127 milliards d’euros.
Je le rappelle, financer les échéances d’un emprunt par un autre emprunt est rigoureusement interdit pour les entreprises et les collectivités locales. Cela relève de la faillite.
Selon le projet annuel de performances pour 2016, l’encours de la dette de l’État passera, au sens du traité de Maastricht, de 1 584, 6 milliards d’euros à la fin de l’année 2015 à 1 647, 1 milliards d’euros à la fin de 2016, soit une augmentation de 3, 9 %.
La charge de la dette, qui représente 44, 5 milliards d’euros – elle est en hausse de 2, 1 milliards d’euros par rapport à 2015 –, pèsera très lourd dans le budget.
Cette situation exceptionnelle, qui nous permet de ne pas voir augmenter, pour le moment, la charge de notre dette, est due aux taux d’intérêt dont nous profitons actuellement. Le directeur général de l’Agence France Trésor, que j’ai auditionné, prévoit cependant que les taux à dix ans peuvent augmenter progressivement dans les mois qui viennent. Ils pourraient atteindre 1, 4 % fin 2015, puis 2, 4 % fin 2016, en lien avec l’amélioration de la conjoncture économique aux États-Unis et en Europe, mais malheureusement pas en France.
Toutefois, je dois vous signaler que j’ai auditionné avec l’Agence France Trésor dix-huit banques souhaitant participer au financement de notre dette pour les prochaines années. Elles ne craignent pas, pour le moment, une augmentation de nos taux d’intérêt, il faut le signaler. Toutefois, cela pourrait ne pas durer.
Enfin, pour nous permettre de réduire le chômage et améliorer notre croissance, je vous propose – j’espère que vous m’écouterez ! – de mettre en place la flexibilité de l’emploi, avec des contrats de mission ou de chantier. En effet, vous n’arriverez jamais à inverser la courbe du chômage avec les emplois d’avenir, qui ne sont pas d’avenir, ou les emplois aidés, qui ne sont pas aidés.
Cela ne sert à rien ! Les entreprises doivent pouvoir licencier le personnel qu’elles ont embauché si elles n’ont plus de travail à leur fournir. Ce n’est pas en conservant le CDI que vous résoudrez un jour le problème du chômage, au contraire ! D’ailleurs, il ne cesse d’augmenter.
Deuxièmement, je propose de mettre en place un nouveau système fiscal, articulé autour d’une flat tax à trois ou quatre taux, 5, 10, 20, 30 %, tous les contribuables étant imposables. C’est indispensable ! Le taux maximum tout compris ne doit pas excéder 30 % : c’est le seul moyen susceptible de relancer la croissance et d’augmenter nos recettes fiscales, les investissements et l’emploi.
La croissance n’augmentera pas tant que vous ne baisserez pas les impôts des plus riches ! C’est ainsi : ce sont non pas les plus pauvres, mais les plus riches, qui font la croissance, parce que ce sont eux qui investissent ! Et si vous persistez à imposer excessivement les plus riches, ils partiront, et la croissance avec eux. Il ne faut pas rêver !
Je propose enfin de supprimer les lois fixant la durée légale du temps de travail à 35 heures hebdomadaires, afin d’améliorer la compétitivité de toutes nos entreprises. Ces mesures grèvent chaque année notre budget de 21 milliards d’euros !
Chers collègues, permettez-moi de préciser que ces réformes ne sont ni de droite ni de gauche, …
Sourires.
M. Serge Dassault, rapporteur spécial. … mais relèvent simplement du bon sens.
Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du groupe CRC.
Elles fonctionnent partout où elles sont appliquées. Je les propose uniquement dans l’intérêt de la France et de tous les Français.
Tant qu’un gouvernement, de droite ou de gauche, ne les appliquera pas, nous continuerons à nous enfoncer dans le déclin économique et social.
En conclusion, je vous propose d’adopter les crédits de cette mission – ils l’ont été, à l’unanimité, par la commission des finances. La France doit en effet respecter ses engagements à l’égard de ses créanciers, ce qu’elle reste, pour le moment, en position de faire.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Je vous remercie pour cette dernière phrase !
Madame la présidente, madame la présidente de la commission des finances, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette discussion est l’occasion d’assurer le contrôle budgétaire de la gestion des participations financières de l’État, qui représentent un total d’environ 110 milliards d’euros pour 77 entreprises.
Je rappelle que ce portefeuille de l’État actionnaire est fortement marqué par le poids du secteur énergétique, qui en représente plus de la moitié, avec des entreprises comme EDF, Engie, Areva. Les autres secteurs importants sont les transports – nous avons beaucoup parlé d’Air France-KLM, mais aussi d’Aéroports de Paris, ces derniers temps –, la défense, l’automobile, la finance, les services.
Depuis quatre ans, le Gouvernement a affirmé le principe d’une gestion active de ce portefeuille, ce qui est à mon sens une excellente chose.
Je voudrais toutefois souligner la complexité de cette gestion active, liée à la coexistence de plusieurs logiques.
Une logique financière, d’abord : il s’agit d’optimiser la valeur du portefeuille de l’État tout en s’efforçant de ne pas remettre en cause son rendement, qui oscille entre 3 et 5 milliards d’euros de dividendes chaque année au bénéfice du budget général.
Une logique industrielle, ensuite, renforcée par la loi du 29 mars 2014 visant à reconquérir l’économie réelle, dite « loi Florange », instaurant le principe du droit de vote double pour les investisseurs de long terme – j’y reviendrai dans un instant.
Une logique de souveraineté nationale, enfin, puisque plusieurs entreprises des secteurs de l’énergie, notamment nucléaire, et de la défense sont concernées.
Je vous livre quelques éléments concernant les principaux événements de l’année 2015. J’en ai retenu quatre.
Tout d’abord, l’État a cédé pour 2, 8 milliards d’euros d’actifs, ce qui est inférieur aux prévisions de la loi de finances initiale, qui s’élevaient à 5 milliards d’euros. Les principales opérations de vente ont concerné Safran, Engie et l’ouverture du capital de l’aéroport de Toulouse-Blagnac.
Deuxièmement, l’État a fait l’acquisition de titres Renault pour 1, 258 milliard d’euros, et de titres Air France-KLM pour 42 millions d’euros.
Dans les deux cas, il s’agit d’acquisitions temporaires permettant à l’État d’assurer la mise en œuvre, dans les conseils d’administration, du dispositif du droit de vote double. Un certain nombre de débats se poursuivent à propos de Renault ; quoi qu’il en soit, cette décision a permis à l’État de garantir sa capacité d’action et d’influence s’agissant du redressement de cette grande entreprise, qui est, en partie grâce à son intervention, en cours depuis quelques années.
Troisièmement, les importantes difficultés financières et stratégiques d’Areva vont conduire, dans les mois qui viennent, à une refonte de la filière nucléaire et, probablement, à une recapitalisation par l’État qui serait de l’ordre de 3 milliards d’euros – M. le ministre pourra sur ce point nous donner quelques précisions.
Il s’agit d’une restructuration difficile, qui fait suite à des problèmes de gestion considérables. La recapitalisation serait en effet assortie d’une division en deux de ce grand groupe, elle-même liée à l’acquisition partielle, à hauteur de plusieurs milliards d’euros, par EDF, de la partie de l’entreprise dédiée à la fabrication des réacteurs.
Je retiens enfin – il est bon de l’avoir en tête – le soutien au développement d’une pépite de haute technologie, le LFB, Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies, grâce à l’action de l’APE, l’Agence des participations de l’État, et par le biais d’une augmentation de capital souscrite par la BPI, la Banque publique d’investissement.
Il s’agit d’un réel succès : plus de 500 emplois vont être créés dans le nord de la France pour favoriser le développement de ce laboratoire spécialisé dans un domaine de haute technologie promis, selon toute probabilité, à un essor important.
Pour 2016 sont inscrits, de façon prévisionnelle, 5 milliards d’euros de recettes tirées de la cession des titres de l’État – cette prévision est évidemment aléatoire, puisque sa concrétisation dépendra de la situation du marché, par définition imprévisible.
Comme le veut l’usage, sur ce total, 2 milliards d’euros ont vocation à être affectés au compte du désendettement de notre pays.
Parmi les recettes d’ores et déjà annoncées, je mentionnerai les cessions de participations majoritaires détenues par l’État au capital des sociétés de gestion des aéroports de Nice et de Lyon.
Un point, monsieur le ministre, reste également à éclaircir : il concerne l’attitude de l’État dans le dossier Alstom, sachant que des annonces ont été faites sur l’acquisition probable de titres. Elles méritent peut-être quelques explications.
Je conclurai en soulignant les succès réels de cette politique de gestion des participations de l’État, mais également en rappelant que, compte tenu de l’importance budgétaire de ce compte d’affectation spéciale, des questions restent en suspens, relatives notamment à la capacité de ce compte à contribuer, en 2016, au désendettement de l’État.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste.
La parole est à M. Philippe Leroy, en remplacement de M. Alain Chatillon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’interviens au nom de notre collègue Alain Chatillon sur le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ». Je le remplace avec d’autant plus de plaisir que je partage les points de vue qu’il exprime, qui font écho, d’ailleurs, aux observations de notre collègue Maurice Vincent.
Alain Chatillon souligne en premier lieu que l’année écoulée atteste de progrès incontestables dans la gestion du portefeuille de l’État.
L’État a utilisé à plusieurs reprises les possibilités ouvertes par la « loi Florange » sur le droit de vote double afin de peser davantage sur les orientations d’entreprises stratégiques, sans avoir pour autant à engager des ressources financières nouvelles. Optimiser l’influence en minimisant les besoins en capital : cette approche est nécessaire en période de maîtrise budgétaire.
Alain Chatillon appelle cependant à insuffler davantage d’audace et de réalisme dans la gestion du portefeuille de l’État.
Pour cela, il propose d’ouvrir effectivement – cet adverbe a toute son importance – l’accès aux postes d’administrateurs, dans les conseils d’administration des entreprises dont l’État est actionnaire, à des personnalités expertes et reconnues du monde de l’entreprise et de l’économie. Elles apporteront plus de pragmatisme, mais aussi plus d’imagination, que certains administrateurs actuels.
Les errements de la gestion d’un fleuron industriel tel qu’Areva montrent en effet que l’intelligence économique et industrielle n’a pas toujours été parfaitement au rendez-vous dans le pilotage des participations de l’État.
Alain Chatillon souhaite également que l’État privilégie des acquisitions plus offensives, donnant la priorité à des prises de participation dans des entreprises à fort potentiel de croissance, d’innovation et d’emploi.
De ce point de vue, la mobilisation de quelque 2 milliards d’euros pour entrer au capital d’Alstom serait probablement une erreur. Un tel investissement n’améliorera pas la situation ni les perspectives économiques de notre pays.
A contrario, investir cette somme dans des ETI, des entreprises de taille intermédiaire, produirait des effets sensibles, notamment pour l’emploi.
Le dernier point sur lequel notre rapporteur pour avis souhaite attirer notre attention concerne le choix de réduire l’endettement public en utilisant le produit des cessions de titres.
Il s’agit apparemment d’une bonne idée. Ce choix est cependant absurde d’un point de vue économique. Compte tenu du différentiel entre la charge annuelle de la dette et le taux de rémunération relativement élevé des participations de l’État, il serait financièrement plus profitable de se désendetter en utilisant les dividendes générés par les participations plutôt qu’en cédant celles-ci.
M. Philippe Leroy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Fidèle à l’avis de son rapporteur pour avis, la commission des affaires économiques a émis un avis de sagesse sur le vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ».
Mme Catherine Procaccia applaudit.
Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
M. Michel Sapin, ministre. Discipline militaire !
Sourires.
Nous allons tâcher de nous y tenir !
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, on ne peut pas faire grand-chose en quatre minutes, sinon faire acte de témoignage.
Je me contenterai de dire que je trouve absolument formidable, pour ne pas dire très insatisfaisant, le sort réservé à cette mission et à ces comptes spéciaux.
Le portefeuille financier géré par l’Agence des participations de l’État est pourtant évalué à 110 milliards d’euros, soit l’un des postes les plus importants du patrimoine des administrations publiques françaises, et presque trois fois le budget de la défense que nous venons d’examiner !
Ces participations sont réparties dans des entreprises qui comptent au total 1791 millions de salariés, avec, d’ailleurs, un taux de féminisation de 31 %. Quant au budget de la mission « Engagements financiers de l’État », il s’élève à 45 milliards d’euros !
Les participations de l’État sont en définitive devenues une « recette de poche », comme le disait notre excellent collègue Jean Arthuis.
En 2015, des titres de participation ont été cédés pour 2, 8 milliards d’euros, contre 1, 69 milliard d’euros seulement d’acquisitions : la gestion du portefeuille de l’État semble avoir eu pour objectif principal de dégager un peu moins de 1, 2 milliard d’euros de recettes ponctuelles.
Il fut un temps où l’État actionnaire était schizophrène, puisque les entreprises dans lesquelles l’État détenait une participation recherchaient l’optimisation fiscale – Éric Bocquet et moi-même l’avions relevé à l’occasion de la commission d’enquête sur l’évasion fiscale dont nous avons assuré le suivi.
Je sais, monsieur le ministre, que vous y avez mis bon ordre. L’exemple doit néanmoins venir d’en haut : l’État étant lui-même actionnaire, il faut s’assurer, à tout le moins, de l’intelligibilité des mesures d’optimisation fiscale qu’il met en œuvre. C’est le minimum que nous devons à nos concitoyens et à l’ensemble des contribuables.
L’État actionnaire, c’est aussi le réacteur pressurisé européen, ou EPR, qui, depuis une quinzaine d’années, est attendu comme le messie de l’industrie nucléaire, et qui semble finalement rencontrer quelques difficultés. On parle de 4 milliards d’euros de pertes.
Air France, ainsi qu’Areva, évidemment, connaissent également un certain nombre de difficultés, qui doivent nous conduire à nous interroger, de façon constructive et non négative, sur l’action de l’Agence des participations de l’État, son contrôle, ses limites.
Je ne fais malheureusement pas partie, pour le moment, de la commission des finances ; je ne suis que membre de la commission des affaires étrangères.
Il n’empêche que la lecture régulière du jaune budgétaire concernant cette mission est un émerveillement continu : je me demande toujours comment l’État, dans ce véritable Monopoly, peut parvenir à agir en assurant la prévisibilité et, du moins, le contrôle de ses opérations. C’est la possibilité du contrôle qui m’interpelle, compte tenu de la diversité des secteurs dans lesquels l’État intervient.
Dans la minute qui me reste, monsieur le ministre, et, comme d’habitude, en oubliant de m’en tenir à mon texte, je me dis qu’il serait sans doute extrêmement intéressant de savoir comment fonctionnent nos voisins européens en matière de participations de l’État dans les entreprises publiques.
J’ai, pour ma part, le souvenir des Chantiers de l’Atlantique pour lesquels la participation de l’État a représenté une bouée de secours absolument nécessaire. Mais sur les questions d’armement – dont nous avons parlé et dont nous reparlerons, car, vous le savez, le fait que la France soit le plus grand marchand d’armes du monde interpelle –, il me semble que si nous comparions le mode de fonctionnement de l’État français actionnaire et celui de nos amis européens sur le sujet, nous aurions alors probablement de grands motifs de satisfaction quant à la façon dont l’Agence pour les participations de l’État est gérée. Bien sûr, sans point de comparaison, ce sera plus difficile, car, effectivement, nous manquons d’éléments d’information à ce sujet.
Je conclurai, monsieur le ministre, en vous indiquant que l’ensemble du groupe de l’UDI-UC votera ce budget.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, compte tenu du temps qui m’est imparti, je m’attarderai simplement sur la question de la dette publique.
Depuis plusieurs années déjà, elle nous est présentée à la fois comme un épouvantail qui signerait nos errements de gestion ou notre absence de réforme structurelle, et comme une obligation qui doit guider la politique budgétaire.
Pour une raison que nous ignorons toujours, il fut un temps posé que les pays de l’Union européenne devaient respecter un certain nombre de critères dits « de convergence », notamment en termes de rapport de la dette publique au produit intérieur brut – ce qui n’a scientifiquement aucun sens –, de proportion de déficit public au regard du PIB ou encore de niveau des taux d’intérêt.
Dans le cas de notre pays, si nous avons une dette publique proche des 100 % du PIB, nous sommes, en revanche, dans le peloton de tête du point de vue des taux d’intérêt.
Constituée de quatre éléments différents, la dette de l’État, principal poste de la dette publique, a connu une expansion réelle ces dernières années, même si elle s’est ralentie depuis 2012, après des années de hausse ininterrompue. Mais les intérêts s’avèrent de moins en moins pesants.
Ainsi, notre pays émet pour le moment des titres de court terme à un taux négatif, notamment pour les bons du Trésor, qui lui permettent de payer le quotidien des affaires publiques.
Le taux moyen de la dette publique française à dix ans est d’environ 1 %, ce qui signifie qu’il est devenu « supportable » au regard de la progression du PIB, qui lui est supérieure.
Pour ceux qui s’interrogent, rappelons que nous remboursons notre dette comme n’importe quel pays et que, pour ce faire, nous procédons à l’amortissement de la dette existante par émission de nouveaux titres : 60 % de ceux qui seront émis en 2016 serviront ainsi à consolider et à amortir la dette existante arrivant à maturité. Cela signifie également que la qualité de la signature France est assez reconnue pour que les marchés financiers y consacrent encore 120 milliards d’euros !
Le processus est le même pour la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, qui refinance la dette sociale en réalisant notamment des emprunts en devises, tandis que la dette locale présente d’autres caractéristiques.
Nous pouvons toujours estimer que le service de la dette publique s’avère bien trop élevé ; les 45 milliards d’euros qui y sont consacrés pourraient, en effet, trouver d’autres utilisations plus pertinentes. Le poids des remboursements ne peut se faire qu’au regard des besoins de la collectivité et de l’intervention publique au cœur de la société.
Le vecteur principal de la dette est, bien évidemment, le déficit budgétaire, mais c’est surtout, nous semble-t-il, l’accumulation des incitations fiscales et sociales qui, en bien des domaines, fait office de politique publique et qui est à la source de ce déficit.
Quand nous remboursons aux entreprises 15 milliards d’euros au titre du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, cela signifie qu’il nous faut souscrire 3 milliards d’euros de titres de dette de plus pour payer.
Quand nous remboursons 5, 5 milliards d’euros de crédit impôt recherche, il nous faut, là encore, emprunter plus de 1 milliard d’euros.
La même analyse pourrait porter sur les allégements fiscaux, les exonérations ou allégements dégressifs de cotisations sociales, outils bien trop sollicités, nous semble-t-il, aujourd’hui pour les politiques publiques.
Réduire la dette publique ne passera pas par la cession massive d’éléments de patrimoine. Il n’y en aura, de toute manière, pas suffisamment pour cela. Cela passera bel et bien par une remise en cause de choix fiscaux, politiques et budgétaires qui n’ont pas permis à notre pays de retrouver la voie de la croissance, sinon celle de son endettement !
Voilà pourquoi notre groupe votera majoritairement contre ces crédits.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il me semble important d’évoquer ici la politique actionnariale de l’État, tant certains choix qui y président ont de quoi surprendre.
Comme l’a rappelé Maurice Vincent, notre rapporteur spécial, l’État est très exposé à l’évolution du secteur énergétique, qui constitue plus de 60 % de son patrimoine coté.
EDF, dont le cours de l’action a baissé d’environ un tiers en six mois, en représente à elle seule 43 %. C’est à cette aune qu’il convient d’apprécier l’effondrement d’Areva.
Ses causes sont multiples.
D’abord, à la suite de Fukushima, les nouvelles normes de sécurité induisent de considérables surcoûts, tandis que la demande baisse.
Ensuite, l’opacité de la gouvernance de l’entreprise, l’omnipotence de son directoire, les carences et contradictions des représentants de l’État ont permis des décisions désastreuses, comme le fiasco de l’EPR de Finlande ou les investissements hasardeux, sinon frauduleux, dans des mines sans minerai.
Enfin, alors qu’EDF va investir plus de 1 milliard d’euros dans l’activité « réacteur » d’Areva NP, on est incapable de trouver, par ailleurs, les 25 millions d’euros qui permettraient de préserver Nexcis, sa prometteuse filiale dédiée au photovoltaïque.
Mitsubishi devrait également entrer au capital d’Areva NP pour continuer à développer le réacteur franco-japonais ATMEA, concurrent direct d’un EPR qui ne s’exporte déjà pas.
Ensuite, ce qui reste d’Areva sera, vraisemblablement, repris en partie par la China National Nuclear Corporation. Ce groupe, il faut le savoir, constitue le cœur du complexe militaro-industriel chinois, et c’est à lui que nous allons donc donner les dernières clés d’une filière hautement stratégique.
Enfin, pour compléter le tour de table, le Gouvernement va recapitaliser l’entreprise à hauteur d’environ 3 milliards d’euros, en soldant notre patrimoine et nos infrastructures, par exemple l’aéroport de Toulouse-Blagnac, pourtant crucial pour Airbus.
Qui peut sérieusement prétendre qu’Areva constitue un investissement d’avenir, que ces choix d’alliances répondent à une logique industrielle et stratégique ?
Même face à l’échec avéré, à la faillite patente, l’impéritie gestionnaire d’une industrie nucléaire qui, depuis des décennies, vampirise l’État le dispute aujourd’hui à l’aveuglement politique face aux nouvelles réalités énergétiques.
Au-delà des problèmes de gouvernance, il faut désormais avoir le courage de prendre acte de l’obsolescence de nos orientations technologiques en matière de nucléaire. Si le risque d’accident, la pollution des déchets et la dépendance géostratégique ne convainquent pas, l’argument économique devrait pouvoir suffire.
L’électricité produite par certaines énergies renouvelables est, aujourd’hui, d’un coût moindre que l’électricité issue de l’EPR. Encore faudrait-il pour cela ne pas délaisser la filière des énergies renouvelables au profit d’une filière dépassée.
Areva pourrait alors s’approprier le colossal marché du démantèlement, assurément plus promoteur en termes d’emplois que la politique actuelle qui planifie 3 000 suppressions de postes d’ici à 2017.
Face à l’effondrement programmé de notre industrie nucléaire, je crois qu’un sursaut politique est aujourd’hui nécessaire.
Mme Nathalie Goulet applaudit.
La mission « Engagements financiers de l’État » regroupe cinq programmes, dont le programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l’État », qui concentre en réalité l’essentiel des crédits dévolus et inscrits à la mission.
À la phrase, désormais historique, selon laquelle « le pacte de sécurité l’emporte sur le pacte de stabilité », nous répondrons très clairement, monsieur le ministre, que notre effort nécessaire de guerre ne doit pas légitimer un déficit public excessif et le renoncement à la rigueur.
Alors que l’État vit déjà à crédit depuis ces deux derniers mois – tous les chiffres le corroborent –, nous assistons encore, à l’occasion de la préparation de ce budget 2016, à un accroissement, que dis-je, une ascension de la dette pour 2016.
Oserai-je ajouter que, dans notre histoire, les dettes ont souvent nourri les guerres, et je vous renvoie à cet égard au traité de Versailles, bien connu de nous tous ?
Depuis 2014, la dette croît à un rythme soutenu, au point de dépasser l’étiage symbolique des 2 000 milliards d’euros. Ce rythme, loin de décélérer, s’est encore accentué au premier semestre 2015 : la dette a ainsi atteint plus de 2 100 milliards d’euros, soit 97, 6 % du PIB. Nous pensons, monsieur le ministre, que ce montant est déjà trop élevé pour permettre à notre économie de se redresser, même avec des taux très bas. Les 52 000 chômeurs supplémentaires sonnent, à cet égard, comme une véritable alerte.
La réalité que l’on se refuse à voir est pourtant évidente : avec une augmentation de 2, 1 milliards d’euros de la charge de sa dette prévue pour 2016, la France s’avance dangereusement vers la paralysie et, avant les événements dramatiques du 13 novembre, la Commission européenne faisait savoir son scepticisme quant à la capacité du Gouvernement, monsieur le ministre, à ramener son déficit sous la barre des 3 % en 2017.
Ce taux de 3 %, mes chers collègues, n’est ni un dogme ni un totem européen ; il représente le seuil en deçà duquel, plus ou moins, la dette ne se creuse pas.
Ces chiffres sanctionnent l’absence de toute réforme d’envergure, les trop maigres efforts financiers réalisés reposant sur la seule logique du rabot. Votre manque d’audace réformatrice explique que, depuis 2012, vous ayez sans cesse dû reporter la date à laquelle vous annonciez un recul de la dette publique. D’abord évalué à 91, 3 % du PIB en 2013, le niveau maximal de la dette publique fut ainsi, dès l’année suivante, rehaussé à 94, 3 % du PIB, niveau plafond à nouveau revu à la hausse par le programme de stabilité 2014-2017, porté à 95, 6 % du PIB, avant d’être lui-même aussitôt pulvérisé !
Autre chiffre inquiétant dans cette mission « Engagements financiers de l’État », excellemment rapportée par M. le rapporteur spécial, le besoin de financement de la France atteindra en 2016 un niveau record d’autant plus inquiétant qu’il est inédit au sein de la zone euro. Pour le seul financement de son déficit et l’amortissement de ses emprunts, l’État devra, en effet, emprunter près de 200 milliards d’euros.
Ces résultats traduisent un lent enlisement en matière de politique fiscale et budgétaire.
La France demeure plus que jamais exposée à une hausse des taux d’intérêt, comme semble l’envisager la Fed, la Réserve fédérale des États-Unis, pour son taux directeur, avec des effets d’entraînement mondiaux bien connus. De fait, toute augmentation des taux d’intérêt, maintenus jusque-là à un niveau exceptionnellement bas, creusera inévitablement et dangereusement la charge de la dette.
S’il fut un temps possible, monsieur le ministre, de créer de la croissance avec de la dette, aujourd’hui, c’est par la maîtrise de la dépense publique qu’elle se déclenche durablement. Or en aggravant la fiscalité de 90 milliards d’euros entre 2012 et 2014, vous avez consolidé le niveau des prélèvements obligatoires autour de 45 %, à contre-courant de ce qu’ont fait nos partenaires et concurrents.
Comme l’a souligné le rapporteur spécial, seule une politique de baisse des dépenses publiques plus ambitieuse que celle qui est conduite à l’heure actuelle permettrait de faire diminuer l’impact de la dette de l’État sur la croissance.
Pourquoi, dès lors, ne pas avoir engagé plus tôt et plus amplement, à l’image de nos voisins, les réformes structurelles que commande une situation insupportable ? Il nous faut pourtant bien la supporter, et nous pensons tous aux 5, 5 millions de personnes au chômage ou sans emploi. Je songe donc tout particulièrement à des réformes relatives à notre marché du travail, à l’assurance chômage, au financement de l’économie, véritable problème qui repose trop exclusivement sur les banques, à l’ajustement des droits à la retraite et à l’accord AGIRC-ARRCO, ou encore à la sécurité sociale et à la nécessaire maîtrise des dépenses des administrations sociales, qui s’élèvent aujourd’hui, monsieur le ministre, à 492 milliards d’euros.
Il n’est pas exagéré de dire que le véritable défi civil de ce pays pour les prochaines années sera de créer 2 millions d’emplois marchands. Les prévisions, ce qui est annoncé par cette mission, nous obligent tous à réfléchir à la façon de redéployer les moyens de ce pays pour endiguer enfin cette dette qui, un jour ou l’autre, nous sanctionnera durement.
Il est temps d’abandonner les oripeaux keynésiens, que l’on met trop souvent en avant dans cet hémicycle, ainsi que le culte de la dépense publique qui nous engloutit aujourd'hui.
Le groupe Les Républicains votera néanmoins les crédits de cette mission, car nous ne pouvons remettre en cause les engagements financiers de la France à l’égard de ses créanciers. Monsieur le ministre, nous n’attendons pas pour autant de vous des remerciements, qui pourraient ne pas être totalement sincères !
Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », que nous examinons aujourd'hui, 2015 est une année de concrétisation.
C’est cette année, en effet, que la nouvelle doctrine initiée en 2013 de mise en œuvre d’un État actionnaire et stratège sera pleinement concrétisée.
Nous disposons des outils législatifs et réglementaires qui permettent de déployer cette stratégie de manière beaucoup plus efficace.
L’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique a été en effet utilement complétée par la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
Je souhaite à ce titre rappeler les termes de cette doctrine. Nous sommes ici pour examiner non pas simplement la cession et la valorisation d’actifs, mais bien un programme de réinvestissement stratégique.
Pour la première fois depuis 2006, des produits de cessions de participations ont été réaffectés au désendettement, ce qui est conforme aux objectifs énoncés en 2013.
La cession d’actifs concerne pour cette année Safran, Aéroport de Toulouse-Blagnac et Engie.
Le réinvestissement stratégique concerne essentiellement Renault, avec l’achat de 14 millions de titres pour un montant de 1, 26 milliard d’euros, Air France-KLM pour 42 millions d’euros et la première tranche de souscription de l’Agence française de développement pour 280 millions d’euros.
Je souhaite rappeler combien l’investissement et le soutien stratégique dans le secteur automobile sont précieux pour soutenir et accompagner l’évolution de celui-ci.
Chacun se souvient, ici, que l’État en 2008 avait déjà, à un moment de décrochage de la filière automobile, été un partenaire très avisé de l’ensemble du secteur.
La prise de participation en 2014 de 800 millions d’euros dans le groupe PSA Peugeot Citroën, qui représente 60 000 emplois directs, et quatre fois plus en emplois indirects, a eu un effet indéniable d’entraînement, notamment à l’égard de l’investisseur chinois Dongfeng Motor Corporation.
Cette année, 1, 26 milliard d’euros ont été engagés en avril 2015 pour acquérir 4, 73 % supplémentaires du capital de Renault, afin de porter la participation de l’État à 19, 74 %.
Cette opération était destinée à s’assurer que l’assemblée générale des actionnaires puisse adopter le dispositif du droit de vote double, comme cela était prévu par la loi du 29 mars 2014 visant à reconquérir l’économie réelle en faveur de l’actionnariat de long terme dans les entreprises françaises.
La stratégie de double vote déjà fait preuve de son efficacité. Elle a permis notamment de promouvoir une nouvelle gouvernance, plus diverse, plus féminisée, ce qui était un vrai problème, monsieur Dassault !
L’État bénéficie déjà d’un droit de vote double dans des groupes comme Safran, Thales ou PSA Peugeot Citroën, et prochainement Orange, Aéroports de Paris, CNP Assurances, Areva, EDF ou encore Engie.
Dernier point, vous permettrez, monsieur le ministre, que je réaffirme ici la nécessité que le désendettement ne prenne pas le pas sur l’investissement.
Nous sommes, à ce titre, très favorables au lissage sur deux ans de l’objectif de désendettement à hauteur de 4 milliards d’euros. Je sais que vous partagez cette vision des choses. Il s’agit d’une position des plus opportunes, dans le contexte d’instabilité boursière constaté depuis août 2015.
Par ailleurs, l’investissement doit être préservé. Il s’agit d’une question essentielle pour la reprise de la croissance. L’investissement est plus que jamais nécessaire à la montée en gamme de l’ensemble de l’appareil productif, en pleine cohérence avec la stratégie plus globale de compétitivité.
Redonner à la France un socle productif puissant doit être une priorité fondamentale. À travers ce budget et cette politique d’État stratège, le Gouvernement se donne les moyens de reconquérir une industrie puissante et capable de relever les défis du XXIe siècle.
J’ai entendu tout à l’heure M. le rapporteur spécial parler de déficit. Il est vrai qu’il est expert en la matière puisque sous l’ancien quinquennat, notre pays a enregistré 600 milliards d’euros de déficits. Plutôt que de travailler à fleuret moucheté, mieux vaudrait trouver ensemble les moyens de déployer une vraie stratégie industrielle pour notre pays. Cette stratégie, le Gouvernement l’a mise en œuvre, notamment avec la vente de vos avions, et en insufflant à notre industrie une nouvelle vigueur.
Nous voterons donc ces crédits, car nous sommes pleinement conscients que nous sommes en train de doter notre pays d’un socle productif puissant !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Madame la présidente, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai attaché le plus grand intérêt à vos interventions, même si je ne me sens pas capable de répondre en détail à tous les sujets qui ont pu être abordés de manière très précise. Je pense à Areva ou à d’autres politiques industrielles de cette nature.
La mission « Engagements financiers de l’État », que votre assemblée examine cet après-midi, comprend des programmes très divers et se chiffre en milliards d’euros.
Je m’arrêterai sur deux d’entre eux en particulier, et j’évoquerai ensuite le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ».
Commençons par la mission « Engagements financiers de l’État », qui retrace notamment la charge budgétaire de la dette.
Depuis 2012, cette charge budgétaire a diminué malgré l’augmentation de l’encours de dette, qui est beaucoup plus faible et maîtrisée que les années précédentes. En 2012, cette charge atteignait 46, 3 milliards d’euros ; puis elle a baissé à 44, 9 milliards d’euros en 2013 et à 43, 2 milliards d’euros en 2014. En 2015, cette diminution se poursuit et la charge de la dette devrait s’établir à 42, 4 milliards d’euros, soit 2 milliards de moins que la prévision de la loi de finances initiale.
Pour 2016, nous avons une prévision de 44, 5 milliards d’euros : la charge de la dette resterait inférieure de près de 2 milliards d’euros au niveau atteint en 2012. Notre prévision pour 2016 est prudente, voire très prudente. En effet, les hypothèses qui la sous-tendent anticipent une hausse des taux : de 0, 8 % aujourd’hui, les taux à dix ans passeraient, dans notre prévision qui est davantage une prévision de précaution qu’une prévision scientifique, à 1, 4 % au mois de décembre de cette année – preuve que nous avons une vision extrêmement prudente – et à 2, 4 % en fin d’année 2016, même si j’espère que nous n’atteindrons pas ce niveau de taux. Nous avons donc budgété le risque de hausse de taux et nous sommes prêts à le financer s’il devait se matérialiser.
Nous engrangeons aujourd’hui des niveaux de taux faibles qui nous aideront durablement pour les années à venir à contenir la charge d’intérêt. Je rappelle en effet que la maturité moyenne des titres émis par l’État est de sept ans : c’est donc en moyenne pendant sept ans que ces taux bas acquis aujourd'hui viendront minorer la charge de la dette assumée par le budget de l’État.
Cette même mission « Engagements financiers de l’État » porte également le fonds d’aide aux collectivités territoriales pour sortir des emprunts dits « toxiques » qu’elles ont souscrits dans le passé.
Sur ce sujet, le Gouvernement a fait preuve de réactivité face à la très forte appréciation du franc suisse au début de l’année 2015, qui a renchéri le coût des emprunts indexés sur cette devise. Alors que la doctrine d’emploi du fonds était prête, il a fallu à la fois doubler son montant global, qui sera porté à 3 milliards d’euros par le projet de loi de finances rectificative de fin d’année, et réécrire intégralement les modalités d’emploi des ressources du fonds pour répondre à cette évolution du franc suisse.
S’agissant du doublement du fonds, la taxe sur les banques, qui en finance la moitié, sera également doublée. Ce doublement est prévu par l’article 9 du projet de loi de finances pour 2016.
Le fonds disposera, après le vote du projet de loi de finances pour 2016 tel qu’il est proposé par le Gouvernement, et compte tenu des reports de crédits des années antérieures, d’un total de 278 millions d’euros de crédits de paiement disponibles pour les décaissements des années 2015 et 2016.
Comme vous l’avez peut-être constaté, plus de 700 collectivités et établissements ont déposé un dossier auprès du service à compétence nationale qui assure la gestion du fonds, ce qui traduit le succès du dispositif. Ce service procède désormais, depuis le mois dernier, aux premières notifications officielles d’aides. Les premiers versements interviendront donc avant la fin de l’année 2015.
S’agissant du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » – je remercie aussi bien M. le rapporteur spécial que M. Bourquin de l’avoir commenté de manière très précise et juste –, l’élaboration en 2014 d’une stratégie de l’État actionnaire, puis la publication de l’ordonnance relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique ont marqué une étape importante. Cette ordonnance a été ratifiée et complétée lors de l’adoption, cette année, de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
L’État actionnaire doit défendre une vision de long terme. Pour cela, il doit être actif et faire entendre sa voix pour garantir le développement de nos entreprises, de leur activité et de leurs emplois, et pour défendre nos intérêts stratégiques, par exemple dans le champ de la défense nationale, de l’énergie ou de l’automobile. Plusieurs d’entre vous ont illustré cette nécessité de réflexion et d’engagement de long terme qui, d’ailleurs, justifie le droit de vote double dont l’État peut disposer à cette occasion.
Nous devons être exemplaires, comme l’a souligné Nathalie Goulet dans son intervention, dans le domaine de la lutte contre l’évasion fiscale ou contre l’optimisation fiscale agressive. J’ai demandé aux entreprises où l’État est présent au capital de me fournir la liste de la totalité des filiales implantées, ainsi que les modalités et les motifs de cette implantation. Certaines d’entre elles ont été ou seront bientôt fermées, car elles ne présentaient pas d’utilité générale, si ce n’est de pouvoir réaliser des opérations d’optimisation fiscale qui me semblaient malvenues.
Nous avons mené en 2015 une gestion active du portefeuille des participations. Les opérations de cession réalisées – Safran, Aéroport de Toulouse-Blagnac ou ENGIE – nous ont permis de dégager les ressources nécessaires pour assurer des investissements utiles – Renault, Air France, l’Agence française de développement –, mais les cessions doivent également nous permettre de réduire notre endettement.
Après avoir réalisé 1, 5 milliard d’euros de désendettement en 2014, pour la première fois depuis 2007 – n’est-ce pas, monsieur Delattre –, nous avions inscrit l’objectif ambitieux de 4 milliards d’euros de désendettement en 2015.
Compte tenu des conditions de marché dégradées de ces derniers mois, qu’a soulignées M. Bourquin, nous avons revu à la baisse les capacités de cession, car nous sommes évidemment soucieux de ne pas brader nos actifs. Par conséquent, l’objectif initial de 4 milliards d’euros de désendettement a été ramené à 2 milliards d’euros pour 2016. L’atteinte de cet objectif dépendra, bien sûr, des conditions de marché.
Le projet de loi de finances pour 2016 s’inscrit dans la continuité, avec un volume de prévision de recettes qui reste inchangé à 5 milliards d’euros, dont 3 milliards d’euros pour le programme 731, qui concerne l’investissement, et 2 milliards d’euros pour le programme 732, qui est relatif au désendettement, compte tenu des besoins identifiés.
Cette orientation témoigne de l’importance donnée par le Gouvernement à la fois à la maîtrise de la dette et à la poursuite d’opérations de réinvestissement stratégique.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », figurant à l’état B.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Engagements financiers de l’État
Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs)
Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs)
Épargne
Majoration de rentes
Dotation en capital du Mécanisme européen de stabilité
Augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement
Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
Ces crédits sont adoptés.
Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux », figurant à l’état D.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Accords monétaires internationaux
Relations avec l’Union monétaire ouest-africaine
Relations avec l’Union monétaire d’Afrique centrale
Relations avec l’Union des Comores
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
Ces crédits sont adoptés.
Nous allons procéder à l’examen des crédits du compte de concours financiers « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », figurant à l’état D.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics
Avances à l’Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune
Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics
Avances à des services de l’État
Avances à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) au titre de l’indemnisation des victimes du Benfluorex
L’amendement n° II-276, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
en euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Avances à l’Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune
Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics
Avances à des services de l’État
Avances à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) au titre de l’indemnisation des victimes du Benfluorex
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. le ministre.
Les avances dont bénéficie l’Agence de services et de paiement, l’ASP, permettent d’assurer le préfinancement des aides agricoles de la politique agricole commune avant leur remboursement par la Commission européenne, conformément à la réglementation européenne en matière de paiement aux bénéficiaires.
Initialement estimé à 7, 2 milliards d’euros, le besoin d’avances du trésor doit être exceptionnellement relevé à 16 milliards d’euros au titre de l’année 2016, afin d’assurer la continuité du paiement des aides agricoles, notamment la transition entre le dispositif national ponctuel d’aide à la trésorerie remboursable mis en place à la fin de 2015 et les aides de la PAC payées régulièrement en 2016.
Chacun aura compris que ce dispositif est neutre, puisque les avances sont remboursées au cours de la même année par la Commission européenne. Il n’y aura donc pas d’augmentation globale du niveau de la dépense publique.
Sourires.
L'amendement est adopté.
Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics ».
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits, modifiés.
Ces crédits sont adoptés.
Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce », figurant à l’état D.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Participation de la France au désendettement de la Grèce
Versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus sur les titres grecs
Rétrocessions de trop-perçus à la Banque de France
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
Ces crédits sont adoptés.
Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », figurant à l’état D.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Participations financières de l’État
Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État
Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
Ces crédits sont adoptés.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », ainsi que des comptes d’affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » et « Participations financières de l’État ».
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » (et article 65), ainsi que du compte d’affectation spéciale « Pensions ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon rapport a porté sur deux missions : les contributions financières aux régimes spéciaux de retraite et le financement des pensions civiles et militaires.
Les régimes spéciaux de retraite sont au nombre de dix, parmi lesquels figure celui des marins. C’est toujours avec beaucoup d’amusement que j’interviens en tant que rapporteur spécial sous la statue de Colbert, qui a été le créateur de ce régime...
C’est une bonne nouvelle pour ces régimes : leur besoin de financement est en diminution pour la deuxième année consécutive. Le projet de loi de finances pour 2016 prévoit en effet une dotation globale en baisse de 1, 5 %, le montant des crédits s’établissant à 6, 3 milliards d’euros. Cette baisse est le résultat de trois facteurs : la faible inflation, la réduction du nombre de retraités et les mesures de convergence prises entre les régimes.
Peut-être serez-vous intéressés, mes chers collègues, de connaître la situation comparée des âges de départ à la retraite : 63 ans pour le régime général, 61 ans pour les fonctionnaires, entre 54 et 58 ans pour les régimes spéciaux.
Peut-être un jour, mais je n’en suis pas certain, l’âge de départ à la retraite dépendra-t-il non plus du statut professionnel, mais de la pénibilité du travail. Ce jour-là, le corporatisme sera effacé en France. Je ne suis pas sûr que ce soit pour demain !
M. le ministre sourit.
Pour ce qui concerne le financement des pensions civiles et militaires, la contribution totale de l’État est de 46 milliards d’euros, soit 15 % du budget général.
Deuxième indicateur : les engagements de l’État dans ce domaine représentent 75 % de la production intérieure brute. C’est un élément intéressant pour les régimes de répartition.
On assiste, ici également, à une tendance au ralentissement du besoin de financement, avec une progression de 0, 6 % en 2016, inchangée par rapport à 2015. C’est, là aussi, le résultat d’un certain nombre de mesures prises en termes d’évolution des cotisations et d’allongement de leur durée.
Il faut noter un point original dans ce projet de loi de finances. On s’interroge souvent sur la sincérité des écritures, en se demandant si elles seront suffisantes pour faire face aux dépenses. Cette fois, les crédits au titre des pensions civiles et militaires se situent un peu au-delà des besoins. Ainsi, à la fin de 2016, le fonds de roulement au titre du compte d’affectation spéciale sera de 2, 9 milliards d’euros, alors que le besoin prudentiel est limité à 1 milliard d’euros. Il y a là un gage possible, qui aurait permis de faire un geste dans d’autres domaines.
À la vérité, une seule question se pose. Un accord a été passé récemment au niveau national sur l’intégration d’une partie des primes dans les traitements, aussi bien pour les fonctionnaires de l’État que pour ceux des collectivités locales. Le chiffrage des conséquences financières de cet accord n’est pas encore totalement établi. On sait qu’il comportera des dépenses supplémentaires, non seulement pour l’État, mais aussi pour les collectivités locales.
Monsieur le ministre, voilà ce que je voulais indiquer sur ces deux missions. La sincérité des écritures, confirmée par l’absence d’amendement, a conduit la commission des finances à émettre un avis favorable sur le vote de ces crédits.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE. – M. Marc Laménie applaudit également.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur spécial, mes chers collègues, au fond, trois catégories de régimes spéciaux peuvent être distinguées parmi les onze régimes qui relèvent de cette mission.
Il y a, tout d’abord, les huit régimes qui sont dits « fermés » et qui n’accueillent plus de nouveaux affiliés. Le premier d’entre eux, qui compte 276 000 pensionnés, est le régime des mineurs, au sein duquel les cotisations ne couvriront, en 2016, que 0, 8 % des prestations, en raison d’un rapport entre cotisants et pensionnés presque nul. Il semble logique que l’État accompagne l’extinction de ces régimes, dont le nombre de pensionnés décroît d’année en année. La solidarité nationale sera mise à contribution en 2016, à hauteur de 1, 5 milliard d’euros.
Il y a ensuite le régime des marins, auquel j’ai consacré une partie thématique de mon rapport. La dangerosité et la pénibilité du métier justifient pleinement un traitement différencié. C’est pourquoi ce régime n’a pas été concerné par le relèvement de l’âge légal et par l’allongement de la durée de cotisation décidés par les réformes récentes. La subvention d’équilibre pour le régime des marins s’élève à 825 millions d’euros dans ce projet de loi de finances.
Il est bien entendu légitime de relever l’écart de performance entre l’Établissement national des invalides de la marine, l’ENIM, et le régime général, ou même les autres régimes spéciaux. Les coûts de fonctionnement de la branche vieillesse, qui atteindront encore 10, 8 millions d’euros en 2016, pourraient être moindres si celle-ci était gérée par le régime général, comme l’a fait remarquer le président de la commission des affaires sociales, M. Alain Milon.
Je veux cependant souligner les efforts substantiels accomplis par l’ENIM, qui a réussi à diminuer ses dépenses de gestion de 13 % depuis 2012. Dans le cadre de la convention d’objectifs et de gestion 2013-2015, les effectifs ont été réduits et diversifiés, tandis que de nouvelles missions, comme la lutte contre la fraude, ont été mises en place.
La nouvelle convention d’objectifs et de gestion, ou COG, qui sera négociée en 2016, devra aller encore plus loin. L’acceptation sociale de ce régime est à ce prix.
Il en va tout autrement de la dernière catégorie de régimes spéciaux de cette mission, à savoir les régimes de la SNCF et de la RATP. Les subventions d’équilibre qui leur sont versées absorberont en 2016 plus de 60 % des crédits de la mission, soit près de 3, 9 milliards d’euros.
Alors que le relèvement des bornes d’âge prévu par la réforme de 2010 ne leur sera applicable qu’à partir de 2017, nos concitoyens n’admettent plus l’existence de ces statuts particuliers, qui leur paraissent excessivement avantageux pour des métiers ayant considérablement évolué.
Cette année encore, la commission des affaires sociales m’a suivie, en décidant d’assortir l’avis favorable que nous portons sur les crédits de la mission d’une réserve concernant ces deux régimes : il est impératif que le processus d’alignement des paramètres des régimes de la RATP et de la SNCF sur ceux de la fonction publique d’État, entrepris en 2008, soit non seulement poursuivi, mais accéléré.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Olivier Cadic.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les conclusions des deux rapports qui viennent de nous être exposées soulignent l’amélioration, depuis le dernier exercice, de la situation de la mission « Régimes sociaux et de retraite ».
Cette amélioration intervient après presque dix années de forte augmentation des crédits. Pouvons-nous, pour autant, nous en réjouir pleinement ? D’un point de vue purement financier, oui, dans la mesure où il est nécessaire de faire des économies partout où cela est possible.
La baisse des concours de l’État constatée aujourd’hui se justifie avant tout par l’effet de la diminution des effectifs des régimes fermés, qui entraîne une baisse des prestations qu’ils servent, mais également par l’effet des dernières réformes des retraites.
Cela dit, nous parlons bien d’un effort de solidarité nationale de 6, 3 milliards d’euros à destination de onze régimes spéciaux de retraite en déséquilibre démographique pour financer les deux tiers de ces prestations, ce qui n’est tout de même pas négligeable.
Lors de l’examen en commission du rapport de notre collègue Agnès Canayer, je me suis interrogé sur l’état d’avancement du processus d’unification des régimes de retraite.
S’il est évident que les spécificités des métiers doivent être prises en compte – l’exemple des marins était parfaitement justifié concernant, notamment, la pénibilité –, il n’est plus pour autant nécessaire qu’elles le soient par le biais de régimes spéciaux qui répondent à des règles trop éloignées de celles qui sont applicables aux autres régimes.
Il faudrait que l’on prenne conscience que la pénibilité n’est, pour certains de ces métiers, sans doute plus la même aujourd’hui qu’à la création de ces régimes, et que ces derniers devraient donc évoluer, comme l’ensemble du système des retraites.
Si je prends l’exemple de l’âge de départ à la retraite, celui-ci était en moyenne de 56 ans et 4 mois à la SNCF – 52 ans et 4 mois pour les personnels roulants – et de 54 ans et 6 mois à la RATP en 2014, contre 63 ans en moyenne pour le régime général. La différence est-elle vraiment justifiée ?
Il a effectivement été acté dans les dernières réformes qu’un relèvement de l’âge de départ s’effectuerait progressivement pour les régimes de retraite de la SNCF et de la RATP à partir de 2017. Toutefois, ces efforts ont été demandés dès 2010 pour les autres salariés. Il est grand temps de prendre conscience que nos compatriotes ne comprennent plus en quoi se justifient ces régimes spéciaux et qu’ils ressentent un véritable sentiment d’injustice.
C’est pourquoi nous appelons de nos vœux une véritable réforme systémique, afin de garantir l’avenir et la justice du système de retraites. Une réforme d’ampleur, en profondeur, pourrait ainsi nous conduire vers l’institution d’un régime universel par points ou en comptes notionnels. Cela passerait nécessairement par une remise à plat de tout le système et par la définition de critères permettant d’assurer la prise en compte la plus juste des différentes situations.
Certes, il y aura prochainement des améliorations, et il faut espérer que, au minimum, la tendance à la baisse des crédits affectés à la mission « Régimes sociaux et de retraite » se poursuive. De même, et cela a été souligné dans les rapports, les efforts de gestion des caisses de retraite des régimes spéciaux devraient permettre d’aller dans ce sens, et nous le saluons.
Pour autant, parce que les crédits de cette mission sont présentés en baisse par rapport aux précédents exercices et que le contexte économiquement difficile que nous connaissons nous oblige à aller dans ce sens, mais tout en appelant à une importante réforme des régimes de retraite, le groupe UDI-UC votera les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaiterais rappeler que la mission « Régimes sociaux et de retraite » recouvre des régimes en déséquilibre démographique, du fait de l’écart entre le nombre de cotisants et de pensionnés, comme cela a été souligné.
À ce titre, l’État est sollicité non pas pour subventionner les régimes, mais pour contribuer à l’équilibre des régimes sociaux et de retraite des transports terrestres, des marins, des mines et de la SEITA notamment.
Si le nombre de pensionnés a encore diminué en 2015, les crédits de la mission ont aussi décru. Cette diminution s’explique certes par la baisse du nombre de pensionnés, mais surtout par la très faible revalorisation des prestations et le report de la revalorisation pour 2015.
Je voudrais insister sur deux éléments précis : d’une part, les conséquences de la reconnaissance des mineurs licenciés lors des grèves de 1948, d’autre part, la négociation de la future convention d’objectifs et de gestion, la COG.
Le régime des mines représente 20 % des crédits de la mission en 2016 et occupe donc une part non négligeable dans notre discussion. Il possède une histoire intimement liée au mouvement ouvrier et à l’action syndicale. Ainsi, lorsque les mineurs ont entamé, le 4 octobre 1948, une grève en réaction à un projet du Gouvernement de démantèlement de leur statut et de baisse de leur rémunération, leur action fut violemment réprimée.
En plus des milliers de blessés et des dizaines de morts, plusieurs centaines de mineurs furent condamnés et emprisonnés pour « atteinte à la liberté de l’industrie et du travail » et de nombreux mineurs grévistes furent par ailleurs licenciés par la société des Houillères du Nord et du Pas-de-Calais, là où la grève débuta.
Depuis des années, les anciens mineurs ont fait de la reconnaissance de cette répression et du préjudice subi un combat pour l’honneur, appuyés par des élus locaux, des parlementaires, dont notre collègue Dominique Watrin, qui a fait entendre, au sein de cet hémicycle, leur voix.
Lors du projet de loi de finances pour 2015, la garde des sceaux a répondu à cette demande de justice. Aussi, alors que l’on ne connaissait l’an dernier qu’une trentaine de dossiers, cette reconnaissance a permis qu’une centaine de nouveaux cas se fassent connaître. Malheureusement, l’examen de ces dossiers est directement menacé par le cadre restrictif de la loi. À ce projet de loi de finances, nous avons donc déposé un amendement visant à garantir que tous les mineurs ou ayants droit concernés puissent accéder à cette reconnaissance, et ce indépendamment des contraintes administratives.
Devant l’engagement du ministère de la justice d’organiser une concertation avec les représentants syndicaux et Dominique Watrin, nous avons retiré cet amendement, que nous redéposerons si nécessaire dans le cadre du projet de loi de finances rectificative. Cette reconnaissance illustre en tout cas que des modifications remettant en cause cette logique de diminution inexorable des crédits peuvent avoir lieu, même si les régimes spéciaux sont fermés et que le nombre de pensionnés est en diminution.
Je voudrais également insister sur la négociation de la future convention d’objectifs et de gestion 2016-2020 avec ces régimes spéciaux. En effet, cet outil de gestion pluriannuel ne doit pas se transformer en simple outil pour organiser le remplacement des départs à la retraite par des logiciels informatiques. Nous avons vu encore récemment que l’absence de réflexion globale sur le non-remplacement des départs à la retraite à la CNAV a entraîné des cafouillages administratifs regrettables – c’est le moins que l’on puisse dire.
Selon la CGT, quelque 8 000 pensions auraient été versées en retard cette année. Mes chers collègues, je vous laisse imaginer le nombre de personnes qui ont dû connaître des difficultés. Il est donc indispensable que, lors de la négociation de la future COG, ces dysfonctionnements soient pris en considération, afin de mettre fin aux fermetures des accueils et de maintenir une présence physique dans les territoires, en parallèle des procédures informatiques.
Je voudrais, enfin, souligner que le décret pris par la ministre de la santé pour mettre en place un « droit opposable à la retraite » ne vise que le régime général et ne concerne donc pas les régimes spéciaux, ni les pensions de réversion. C’est lourd de conséquences pour les femmes concernées, qui se trouvent dans des situations inextricables. Je n’ai pas le temps de développer ce point, mais je souhaitais attirer votre attention, monsieur le ministre, ainsi que celle de mes collègues.
Pour l’ensemble de ces raisons, et devant la baisse des crédits affectés à la mission « Régimes sociaux et de retraite », le groupe CRC votera contre ce budget.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, le compte d’affectation spéciale relatif aux pensions des agents de l’État retrace les opérations relatives aux pensions des personnels civils et militaires, soit 57 milliards d’euros de dépenses, dont environ 54 milliards d’euros au titre des pensions de retraite au sens strict.
Les mesures d’économie transverses à l’ensemble du système de retraite contribueront en 2016 à en limiter la progression, comme cela a été dit. La modernisation de la gestion des retraites de l’État permet également d’illustrer que, sur ce segment comme sur les autres, il est possible de maîtriser les dépenses sans pour autant diminuer le niveau des prestations accordées.
Ces dépenses connaîtront en effet en 2016 une évolution modérée, d’un peu plus de 1 % par rapport à 2015, soit un rythme en fort ralentissement par rapport aux périodes antérieures. Cette modération est due à plusieurs facteurs, parmi lesquels, bien sûr, des facteurs démographiques et l’évolution de choix individuels, mais aussi l’effet des économies décidées non seulement par le gouvernement précédent – c’est le cas de l’augmentation de l’âge légal de départ –, mais aussi par la majorité actuelle, depuis 2012.
Il convient en effet de rappeler que la réforme des retraites de 2014 s’applique aux fonctionnaires comme à l’ensemble des travailleurs actifs. Je pense notamment au décalage de la date de revalorisation et à l’augmentation de la durée d’assurance à partir de 2019. La réforme des modalités de revalorisation décidée dans ce projet de loi de finances aura aussi des effets sur les pensions des fonctionnaires.
Les mesures de recettes s’appliquent à tous de manière indifférenciée, puisque la hausse des cotisations salariales, soit 0, 3 point sur quatre ans, s’ajoute aux mesures décidées en 2010 et en 2012, ce qui se traduit par un effort significatif, qu’il ne faut pas nier, de contribution des fonctionnaires au redressement des comptes publics.
Les mesures de la réforme des retraites de 2014 contribuent déjà pour près de 400 millions d’euros à la maîtrise des dépenses de retraite de l’État et continueront à monter en charge.
Par ailleurs, l’année 2015 a été marquée par des avancées significatives dans le sens de la modernisation de la gestion des pensions, qui va de pair avec l’optimisation des coûts.
Ainsi, grâce à la centralisation progressive des activités au sein du service des retraites de l’État, le SRE, les ministères employeurs ne sont plus chargés de préparer le dossier de retraite des agents. Le dernier ministère concerné par ce mouvement, celui de la défense, transfèrera une partie de son activité dès le 1er janvier prochain. D’ores et déjà, pour une douzaine de ministères, le SRE assure seul l’ensemble de la relation avec les agents partant en retraite.
Grâce à l’ensemble des efforts de maîtrise, en 2016, le coût de gestion par ressortissant, qui avait été fixé à 27, 1 euros dans le cadre du projet annuel de performance, ou PAP, annexé au projet de loi de finances pour 2015, est ainsi revu, dans le PAP pour 2016, à quelque 24, 6 euros, soit une baisse de 10 %.
La mission « Régimes sociaux et de retraite » correspond, quant à elle, aux versements réalisés par l’État au bénéfice de onze régimes de retraite. Il est proposé d’ouvrir des crédits à hauteur de 6, 3 milliards d’euros, soit 100 millions d’euros de moins que pour 2015.
Les caractéristiques démographiques de ces régimes sont similaires et marquées par un fort déséquilibre, en particulier pour des régimes fermés, qui n’acceptent plus de nouveaux cotisants, comme celui des mines ou de la régie des tabacs. Il est également très important dans les régimes des marins, des agents de la SNCF ou bien de la RATP. C’est parce que ces régimes sont dans l’impossibilité de s’autofinancer qu’ils font appel à la solidarité nationale.
En raison de l’arrivée à la retraite de générations nombreuses, les crédits de la mission n’avaient cessé d’augmenter ces dernières années : leur croissance avait été de 46 % entre 2006 et 2013. Ils ont légèrement diminué depuis lors et, comme en 2015, la contribution de l’État baissera de 1, 5 % en 2016.
Je tiens à souligner ici encore que l’évolution de ces dépenses est, elle aussi, affectée par les mesures d’économies prises depuis 2012 et le sera encore davantage par l’augmentation progressive de la durée d’assurance à partir de 2019, puisque celle-ci s’appliquera bien à l’ensemble des régimes.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Marc Laménie applaudit également.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite », figurant à l’état B.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Régimes sociaux et de retraite
Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres
Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins
Régimes de retraite des mines, de la SEITA et divers
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
Ces crédits sont adoptés.
Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Pensions », figurant à l’état D.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Pensions
Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invalidité
Dont titre 2
53 296 300 000
53 296 300 000
Ouvriers des établissements industriels de l’État
Dont titre 2
1 907 622 000
1 907 622 000
Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et autres pensions
Dont titre 2
16 000 000
16 000 000
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
Ces crédits sont adoptés.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d’affectation spéciale « Pensions ».
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».
La parole est à Mme la rapporteur spécial.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Remboursements et dégrèvements » est la mission la plus lourde du budget de l’État : en 2016, quelque 100, 2 milliards d’euros de crédits sont demandés, un montant quasiment stable par rapport aux crédits inscrits dans la loi de finances initiale pour 2015.
Les remboursements et dégrèvements d’impôts d’État devraient s’élever à 88, 2 milliards d’euros en 2016, en baisse d’environ 3 milliards d’euros par rapport à la prévision révisée pour 2015.
Cette baisse prévisionnelle de 2, 9 milliards d’euros, soit une diminution de 3, 2 %, fait suite à deux années consécutives de forte augmentation des crédits alloués au programme. La baisse attendue en 2016 s’explique par deux facteurs principaux.
D’une part, l’augmentation anticipée du bénéfice fiscal des entreprises entre 2014 et 2015 s’élève à près de 10 % en raison de la reprise de la croissance. Aussi, les premiers acomptes versés par les entreprises en 2016 au titre des revenus de 2015 devraient être dans l’ensemble inférieurs au total de l’impôt dû et donner lieu à moins de restitutions.
D’autre part, les remboursements liés à la prime pour l’emploi connaissent une baisse drastique qui résulte de la suppression du dispositif, à compter de 2016, par la seconde loi de finances rectificative pour 2014.
En ce qui concerne les impôts locaux, les crédits demandés au titre des remboursements et dégrèvements s’élèvent en 2016 à quelque 11, 97 milliards d’euros, traduisant une hausse de 325 millions d’euros, soit de 2, 8 %, par rapport à la loi de finances initiale pour 2015.
Les dégrèvements de taxe foncière et de taxe d’habitation permettent notamment de constater une hausse du contentieux sur ces deux taxes, sans que celle-ci soit compensée par une baisse des demandes gracieuses. Peut-être faut-il voir dans ce phénomène une plus grande vigilance des collectivités territoriales quant à l’évolution de leurs bases fiscales, dans un contexte de forte diminution des concours de l’État.
Je souhaite également insister de nouveau sur l’importance de la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation. Au-delà des effets qu’elle aura en matière de justice fiscale et de justice entre collectivités, cette révision pourrait avoir des conséquences très importantes sur les dégrèvements d’impôts locaux si elle se traduisait par une baisse relative de la valeur locative des logements des ménages de condition modeste.
Enfin, mes chers collègues, je voudrais vous faire part des premières conclusions du contrôle budgétaire que j’ai commencé en 2015 et qui a porté sur le crédit d’impôt compétitivité emploi, le CICE. Je souhaite faire quatre remarques à cet égard.
En premier lieu, il est important d’avoir en tête que le CICE constitue une dépense fiscale extrêmement coûteuse : avec plus de 13 milliards d’euros en 2016, c’est la niche fiscale la plus importante du budget de l’État. La créance fiscale devrait ainsi atteindre près de 18 milliards d’euros en 2015, pour s’élever à plus de 20 milliards d’euros en 2017.
En deuxième lieu, le CICE fait peser une charge de gestion très importante sur l’administration fiscale. J’ai pu le constater lors d’une visite sur place à la direction régionale des finances publiques d’Île-de-France : le travail préalable de vérification d’un dossier de demande de CICE est très lourd.
En troisième lieu, l’analyse du profil des bénéficiaires du CICE fait ressortir que la présentation du dispositif ne correspond pas à la réalité de son fonctionnement. En effet, le CICE n’est pas concentré sur les entreprises effectivement soumises à la concurrence internationale, c’est-à-dire sur celles qui exportent.
En quatrième lieu, et enfin, l’efficacité du CICE n’est pas prouvée. Je tiens à signaler que ni le rapport de Jean Pisani-Ferry ni le récent rapport, abondamment cité par la presse, de l’Institut national de la statistique et des études économiques, l’INSEE, ne concluent à l’efficacité du dispositif. Les études montrent seulement que le CICE a baissé le coût de l’emploi ; c’est la moindre des choses pour un crédit d’impôt qui équivaut à un allégement de charges ! Toutefois, en ce qui concerne la compétitivité des entreprises françaises, qui ne dépend pas seulement du coût du travail, ainsi que l’emploi, le ton est nettement plus prudent, voire réservé.
Permettez-moi de faire quelques citations. Dans le rapport de l’INSEE, les économistes indiquent que le CICE devrait « se répercuter sur le taux de marge, mais [que son] impact précis est complexe à évaluer. » Le rapport du comité de suivi est plus circonspect encore ; il y est écrit, à la page 45, que « dans les grands groupes interrogés, notamment dans l’industrie, le CICE pèse peu dans les processus de décision » et, à la page 47, que « dans les [petites et moyennes entreprises] et plus encore [dans les très petites entreprises, le CICE] entre difficilement comme un élément prévisible dans les business plans. »
Ces éléments – issus de travaux non partisans, je le rappelle –, invitent à examiner plus en détail l’efficacité réelle du CICE en faveur de la compétitivité et de l’emploi sur nos territoires. Je poursuivrai donc ce contrôle en 2016 et pourrai ainsi compléter ces premières observations.
Je précise pour finir que la commission des finances propose d’adopter les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ». En revanche, à titre personnel, comme les autres membres de mon groupe, je voterai contre ces crédits.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – M. André Gattolin applaudit également.
Mes chers collègues, je rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Maurice Vincent.
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des finances, madame la rapporteur spécial, mes chers collègues, je veux simplement souligner quelques points relatifs à cette mission.
En ce qui concerne son architecture, il s’agit d’une des missions les plus lourdes du budget de l’État, avec plus de 100 milliards d’euros, soit 26 % des recettes fiscales brutes. Elle comporte deux programmes, les remboursements et les dégrèvements relatifs aux impôts d’État et ceux qui sont relatifs aux impôts locaux.
Par ailleurs, précisons d’emblée que, pour une grande partie des sommes en jeu, il s’agit de l’application de mesures assez techniques, puisqu’environ 70 % de ces 100 milliards d’euros s’expliquent par la gestion de la mécanique de l’impôt. Il y a néanmoins des dépenses qui relèvent des politiques publiques et de la gestion de l’impôt, en particulier les recours gracieux et contentieux.
Pour 2016, les principales tendances que l’on peut observer montrent, me semble-t-il, la prise en considération de davantage de justice sociale dans les politiques conduites.
En ce qui concerne les impôts d’État, une baisse de 3 milliards d’euros est prévue par rapport à 2015, baisse liée en partie, comme le disait à l’instant notre collègue Mme Beaufils, aux prévisions de croissance économique, donc au résultat des entreprises, ce qui conduira à moins de dégrèvements. C’est aussi dû à la restitution de la prime pour l’emploi, fusionnée en 2016 avec le RSA activité.
Par ailleurs, 2016 sera aussi l’année où les dégrèvements dont bénéficiaient les contribuables les plus aisés au titre du bouclier fiscal disparaîtront totalement ; il s’agissait tout de même de 450 millions d’euros en 2012.
En ce qui concerne les impôts locaux, les dégrèvements s’élèveront à près de 12 milliards d’euros, traduisant une hausse de 328 millions d’euros. Il s’agit principalement de la taxe d’habitation et de la taxe foncière.
En l’espèce, ces dégrèvements traduisent des décisions relevant de la justice sociale la plus élémentaire. Par exemple, le montant de la taxe d’habitation est plafonné à 3, 44 % du revenu fiscal de référence ; quelque 9 millions de contribuables en ont bénéficié en 2015, pour une dépense fiscale de 3, 3 milliards d’euros. De même, les ménages modestes sont exonérés de taxe d’habitation ; cette mesure concerne 3, 7 millions de contribuables en 2015.
Si l’on rapproche ces décisions d’exonération de ce que je disais précédemment du bouclier fiscal, on voit dans cette politique, me semble-t-il, la différence très concrète qui existe entre des orientations de gauche et des orientations de droite.
Je veux également dire quelques mots du CICE, que vous évoquiez à l’instant, madame Beaufils. Il s’agit d’une mesure importante, qui va peser à hauteur de 20 milliards d’euros en 2020, mais qui s’inscrit dans la volonté de contribuer au redressement de la compétitivité des entreprises françaises. Il est vrai que ses effets sur la croissance et sur l’emploi seront forcément plus visibles à moyen ou long terme qu’à court terme.
Plusieurs rapports ont été rédigés à ce sujet, vous les avez évoqués, ma chère collègue. Ils dressent tout de même un bilan plutôt positif du dispositif, même s’ils lui adressent aussi des critiques. Selon l’enquête de conjoncture de l’INSEE, 60 % des entreprises comptent utiliser cette ressource en premier lieu pour l’investissement et l’emploi, ce qui est son objectif majeur.
Par ailleurs les petites et moyennes entreprises et les très petites entreprises – les PME et TPE – bénéficient pleinement du dispositif, en particulier parce que les rémunérations y sont plus basses en moyenne que dans les grandes entreprises.
Enfin, les entreprises de moins de 50 salariés recueillent aujourd’hui quelque 40 % de la créance totale du CICE, soit légèrement plus que celles de plus de 500 salariés. Ces entreprises bénéficient donc du dispositif et renforcent ainsi leur compétitivité, d’autant qu’elles profitent également de certaines améliorations en matière de trésorerie, au travers de l’action de la banque publique d’investissement Bpifrance.
Je suggère néanmoins que soient suivies les recommandations de la mission d’information parlementaire relative au CICE, afin d’améliorer encore l’efficacité de ce dispositif. Je pense en particulier à l’encouragement au dialogue social concernant son utilisation – cela ne peut pas faire de mal ! –, ainsi qu’à la possibilité d’accorder un avantage similaire au secteur non lucratif. C’est d’ailleurs ce que nous avons commencé de faire il y a quelques jours ici même, en adoptant deux amendements de notre collègue François Marc au profit des coopératives.
J’en termine en insistant sur la nécessité de renforcer encore la lutte contre la fraude fiscale ; ce n’est pas directement l’objet de cette mission, mais il y est tout de même beaucoup question de remboursement de taxe sur la valeur ajoutée, la TVA. Or on sait que la fraude sur cette taxe est estimée à 14 milliards d’euros par an en France ; des gains sont donc possibles. Enfin, en ce qui concerne la lutte contre la fraude liée à l’optimisation fiscale, le Sénat a également adopté un amendement il y a quelques jours.
Après ces observations, mes chers collègues, je vous indique que le groupe socialiste et républicain votera en faveur des crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Remboursements et dégrèvements » est assez atypique au sein du budget de l’État, dans la mesure où ses dépenses viennent en fait en atténuation des recettes. Elle est aussi la plus importante du budget général.
Dans le temps, assez court, qui m’est ici dévolu, je voudrais attirer votre attention sur une dépense assez marginale de cette mission : les dégrèvements et exonérations de la contribution à l’audiovisuel public, la CAP.
Je l’ai dit, celle-ci est marginale au sein du budget global de la mission, car elle ne représente que 513, 8 millions d’euros sur un total de 100 milliards de crédits prévus pour l’exercice 2016. Toutefois, elle est capitale pour les sociétés de l’audiovisuel public, car cette dépense fiscale représente environ 14 % des 3, 7 milliards d’euros de CAP qui leur sont affectés.
Ces dégrèvements, justifiés dans le cas de foyers à très faibles revenus ou comportant une personne handicapée, reposent néanmoins sur un empilement de dispositions dérogatoires, pour certaines peu compréhensibles, qui contribuent à battre en brèche la logique même de la redevance.
On le sait, l’audiovisuel public français connaît une crise majeure de son modèle de financement et, dans un rapport récent du Sénat consacré à ce sujet, j’en appelle, avec mon collègue rapporteur Jean-Pierre Leleux, à une réforme d’ampleur destinée à garantir la stabilité de ses ressources à moyen et long terme.
Baisse du taux d’équipement en téléviseurs oblige, nous avons notamment proposé d’instaurer, à l’horizon de 2018, une contribution universelle de type allemand. Celle-ci aurait l’avantage d’augmenter d’un million le nombre de foyers redevables de la CAP.
Ce serait une bonne chose pour les sociétés de l’audiovisuel public, mais cela aurait pour incidence indirecte d’augmenter d’environ 60 millions d’euros les compensations pour exonération de la CAP versées par le budget général. En effet, près de la moitié des nouveaux redevables, soit environ un demi-million de personnes, répondraient aux critères actuels d’exonération.
Or certains de ces critères sont obsolètes et ne correspondent plus à des critères économiques et sociaux légitimes. Sur cette base, ce sont actuellement déjà plus de 4, 1 millions de foyers, qui sont totalement exonérés de CAP. Il est donc indispensable de remettre à plat ces critères d’exonération.
Ainsi, parmi les quelque 28 millions de foyers français, plus de 12, 5 millions s’acquittent mensuellement d’un abonnement à une ou plusieurs chaines de télévision payantes.
D’après nos estimations, au moins le quart des foyers actuellement exonérés souscrivent par ailleurs un abonnement à une offre payante pour un montant annuel bien supérieur à celui de la CAP, qui équivaut à 11, 33 euros mensuels. Le prix de l’abonnement de la plus connue et de la plus populaire des chaînes à péage, que je ne citerai pas ici, est ainsi de 40 euros par mois. Celui de la chaîne sportive payante actuellement la plus en vue est de 12, 99 euros par mois.
C’est pourquoi, monsieur le ministre, je souhaiterais que vos services et ceux du ministère de la culture fassent rapidement réaliser une étude sur les dépenses en télévision payante des foyers exonérés de CAP, afin de pouvoir sereinement et équitablement décider des mesures à mettre en œuvre pour corriger cette situation assez anormale à mon sens.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Compte tenu du caractère extrêmement complet des analyses réalisées par Mme la rapporteur spécial, ainsi que des interventions qui viennent d’avoir lieu, je serai particulièrement bref.
L’examen par votre assemblée de la mission « Remboursements et dégrèvements » me donne l’occasion d’évoquer devant vous les principaux contentieux qui ont ou pourront avoir un impact significatif sur nos finances publiques.
Tout d’abord, le contentieux dit « OPCVM » affecte fortement le budget de l’État depuis plusieurs années. Pour 2015, nous anticipons de manière prudente un coût de 1, 4 milliard d’euros. Au vu des décaissements à la fin du mois d’octobre dernier, il est possible que ce coût soit finalement moins élevé que prévu.
Le contentieux dit « précompte mobilier », qui dure depuis plus de dix ans, est aujourd’hui suspendu à un possible nouveau rebondissement, qui conduirait à une nouvelle saisine de la Cour de justice de l’Union européenne. Nous estimons que cette saisine, qui aurait pour objet de mettre en cause une décision du Conseil d’État, n’est pas justifiée. C’est pourquoi nous avons anticipé, pour 2016, le fait que la Cour de justice ne serait pas saisie et que le contentieux serait entièrement apuré. Si elle devait l’être, cet apurement serait repoussé au-delà de 2016.
Nous anticipons également de nouveaux contentieux, d’une part, sur la CSG, du fait de l’arrêt De Ruyter, d’autre part, sur l’impôt sur les sociétés, du fait de l’arrêt Steria, pour un coût anticipé de l’ordre de 800 millions d’euros en 2016.
De manière générale, nous retenons des prévisions prudentes quant au coût des contentieux fiscaux. Compte tenu des aléas importants qui pèsent sur ces dépenses, nous souhaitons les budgéter correctement, pour éviter toute mauvaise surprise en cours d’exécution.
Nous nous attachons à régler ensuite les sujets pour l’avenir. C’est le cas par exemple dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, avec le contentieux lié à l’arrêt De Ruyter. Nous aurons aussi à travailler sur celui qui est lié à l’arrêt Steria.
En tout cas, mesdames, messieurs les sénateurs, la transparence à l’égard du Parlement, qui, à juste titre, suit ces dossiers avec attention, sera systématiquement assurée.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », figurant à l’état B.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Remboursements et dégrèvements
Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs)
Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs)
L'amendement n° II-253, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
E n euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs)
Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs)
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. le ministre.
Avec cet amendement, il s’agit finalement de dresser un constat. Pour la bonne information du Sénat, je précise que la diminution globale de 120 millions d’euros résulte de deux mouvements.
D’une part, l’abaissement du taux marginal de la troisième tranche du barème et le relèvement du plafond du quotient familial conduisent, apparemment, à augmenter les remboursements et dégrèvements d’environ 30 millions d’euros. Toutefois, des estimations rigoureuses sont difficiles à réaliser en la matière.
D’autre part, la suppression de la réforme de la décote conduirait à diminuer les remboursements et dégrèvements d’environ 150 millions d’euros.
Même s’il faut garder une certaine prudence pour ce qui concerne les montants concernés, la commission a émis un avis favorable sur cet amendement.
L'amendement est adopté.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits, modifiés.
Ces crédits sont adoptés.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante, est reprise à vingt-et-une heures, sous la présidence de M. Jean-Pierre Caffet.