Intervention de Fabienne Keller

Réunion du 27 novembre 2015 à 21h00
Loi de finances pour 2016 — Compte de concours financiers : prêts à des états étrangers

Photo de Fabienne KellerFabienne Keller :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la discussion du budget de l’aide publique au développement revêt cette année un caractère particulier. En effet, l’actualité récente a été marquée par plusieurs grands rendez-vous internationaux, notamment par l’organisation à Paris, dans quelques jours, de la COP21, mais aussi par l’épidémie du virus Ebola et la « crise des réfugiés ».

Ces différents événements et drames nous invitaient à afficher une nouvelle ambition pour notre politique d’aide publique au développement, qui, depuis quelques années, s’est complètement effondrée. En 2010, notre aide publique au développement représentait 0, 5 % de notre revenu national brut. En 2014, elle devrait atteindre 0, 36 %, d’après les derniers chiffres de l’OCDE, ce qui nous placerait au douzième rang des pays donateurs. Dans le même temps, le Royaume-Uni est parvenu à respecter l’objectif de 0, 7 % de son revenu national brut.

J’en viens à la seconde particularité de la discussion budgétaire de cette année, à savoir sa complexité. De nombreux changements sont intervenus au cours de la discussion, mêlant des dispositions qui sont relatives aux recettes du budget et d’autres qui portent sur les crédits de la mission.

Je reviens rapidement sur les différentes étapes de cette discussion.

Le 28 septembre dernier, le Président de la République a annoncé que « la France, qui veut toujours montrer l’exemple [...], a décidé d’augmenter le niveau de l’aide publique au développement pour dégager 4 milliards d’euros de plus à partir de 2020 ». Deux jours plus tard, le Gouvernement présentait un budget où les crédits de la mission « Aide publique au développement » étaient caractérisés par la baisse la plus importante de toutes les missions !

Le décalage entre les annonces et la réalité de ce qui était proposé était tel que le Gouvernement a dû, dans l’urgence, annoncer des amendements pour rétablir les crédits de la mission à leur niveau de 2015. Il s’agissait en quelque sorte de sauver les apparences, à quelques semaines du début de la COP21.

Ces éléments, mes chers collègues, n’ont pas paru suffisants aux députés, qui ont souhaité attribuer 270 millions d’euros de ressources supplémentaires à l’Agence française de développement, l’AFD, en lui affectant une part supplémentaire de la taxe sur les transactions financières. Il s’agissait, pour citer votre propre majorité, madame la secrétaire d’État, de faire en sorte que « les actes succèdent aux discours ».

Or quel a été l’avis du Gouvernement sur cet amendement ? Défavorable ! C’est pourquoi, lors de la seconde délibération de la seconde partie du projet de loi de finances, vous avez diminué de 162 millions d’euros les crédits de la mission, afin – je cite le Gouvernement – de « revenir partiellement sur les amendements votés en première partie ».

Au total, le texte qui nous est transmis permet de revenir au niveau de 2014, en prenant en compte à la fois les crédits de la mission et les taxes affectées. Doit-on s’en réjouir ? Je rappelle simplement que notre aide publique au développement, au sens de l’OCDE, représentait en 2014 à peine 0, 36 % de notre revenu national brut, soit la moitié de l’objectif et le plus bas niveau depuis quinze ans.

Je rappelle également que le taux d’exécution des crédits de la mission est loin d’être satisfaisant. En 2013, les autorisations d’engagement n’ont pas été exécutées à hauteur de 200 millions d’euros environ. En 2014, ce chiffre est monté à 238 millions d’euros et, en 2015, plus de 100 millions d’euros ont été annulés par le dernier décret d’avance, examiné cette semaine par la commission des finances.

Mes chers collègues, pour l’ensemble de ces raisons, la commission des finances vous propose de rejeter les crédits de la mission « Aide publique au développement », ainsi que ceux du compte de concours financier « Prêts à des États étrangers ». Plusieurs amendements relatifs aux crédits ont par ailleurs été déposés ; j’y reviendrai lors de leur discussion.

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