L’apport de la culture à l’économie a d’ailleurs été chiffré dans le même rapport à 104, 5 milliards d’euros, soit l’équivalent de 5, 8 % de la somme des valeurs ajoutées nationales.
En effet, la culture, ce sont aussi les secteurs liés au rayonnement et à l’attractivité de la France : le luxe, la mode, la gastronomie, les arts décoratifs. Les emplois dans les entreprises culturelles représentaient 670 000 personnes en 2010, soit 2, 5 % de l’emploi total en France. Les événements culturels, tels que les festivals, peuvent avoir des retombées économiques directes équivalant au tiers ou à la moitié de son budget global. L’incidence indirecte, quant à elle, se chiffre à un coefficient multiplicateur de 1, 3 % à 1, 8 %.
Par ailleurs, si l’exception culturelle française, qui constitue l’un des moyens de notre rayonnement dans le monde, a des répercussions marchandes, elle a aussi d’autres effets plus qualitatifs et non quantifiables. Elle est ce qui constitue le cœur de ce capital sympathie de la patrie des Lumières. Elle a notamment été à l’origine de toutes les marques de solidarité que nous ont montrées les autres pays après les attentats des mois de janvier et de novembre de cette année.
Le premier défi de la culture est donc cette résorption des fractures au sein de notre société, morcelée par le communautarisme et les intérêts catégoriels.
Un second défi, que doit relever le secteur culturel, est constitué par le numérique. À l’évidence, le numérique bouleverse de manière transversale tous les secteurs en modifiant les habitudes culturelles, du côté tant des supports – ordiphones, tablettes, télévisions connectées –, que du format des produits culturels – programmes plus courts, séries, etc.
Le changement de paradigme s’accompagne de mutations, parfois sociales et souvent douloureuses, liées à l’intensification de la concurrence sur des segments jusque-là épargnés. L’action publique a permis de garder un réseau de librairies actives, ainsi qu’un cinéma français vigoureux, dont la qualité est à la hauteur de la renommée.
Nous avons voté, en 2014, une loi interdisant aux libraires en ligne de cumuler à la fois la remise de 5 % sur le prix des livres et la gratuité de la livraison. Mais cette loi a vite été contournée, puisque les plateformes y ont répondu en fixant les frais de livraison à un centime d’euro par commande contenant des livres.
C’est dire aussi que la France doit mieux devancer la transformation numérique pour l’orienter et la maîtriser, et surtout en tirer les bénéfices. Le retard de l’Europe en la matière lui est préjudiciable par rapport aux États-Unis, qui ont su tirer de ces innovations une croissance plus soutenue que la nôtre.
Aussi, madame la ministre, attendons-nous avec impatience les propositions du projet de loi relatif au numérique, qui a été coélaboré avec la participation du public. Nous espérons que ce texte accordera une large place à l’économie culturelle, en permettant de repenser les droits de propriété intellectuelle qui apparaissent parfois dépassés à l’ère numérique. Je pense notamment à la proposition sur la liberté de panorama qui permettrait aux personnes d’exploiter les reproductions, ainsi que les représentations d’œuvres architecturales et de sculptures réalisées pour être placées en permanence dans des lieux publics.
De même, la logique inhérente à la création de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet, l’HADOPI, il y a quelques années, a fait long feu. Comme l’a souligné Jacques Mézard dans le rapport de la commission d’enquête sur les autorités administratives indépendantes, cette entité « n’a pas apporté la preuve de son efficacité en tant que gendarme de l’internet et les moyens de lutte contre le piratage à travers le mécanisme de la réponse graduée sont inopérants. »
Parce que la culture est un chantier permanent de construction de l’avenir, et après examen des crédits qui lui sont dédiés pour 2016, le groupe du RDSE apportera, sans retenue, son soutien à la présente mission budgétaire.