Intervention de Fleur Pellerin

Réunion du 28 novembre 2015 à 14h30
Loi de finances pour 2016 — Culture

Fleur Pellerin, ministre :

La deuxième priorité du Gouvernement est le soutien à la création, dans sa diversité et dans son renouvellement. Elle est cohérente avec la reconnaissance législative du régime de l’intermittence, qui prend en compte la spécificité des métiers du spectacle.

Ainsi, l’intervention de l’État en faveur de la création s’élèvera à 400 millions d’euros, dont 365 millions d’euros pour le spectacle vivant et 35 millions d’euros pour les arts plastiques. C’est 4 % de plus qu’en 2015.

Nous avons affecté ces crédits en priorité à la jeunesse, en consacrant en particulier plus de 7 millions d’euros à la mise en œuvre des conclusions des Assises de la jeune création.

Les moyens que nous dédions à la formation des artistes seront en hausse de 4, 9 millions d’euros. Pour accompagner un recrutement plus juste et plus diversifié, cette hausse viendra, entre autres mesures, financer la mise en place de classes préparatoires aux écoles de l’enseignement supérieur « Culture » et l’accès aux bourses et à un logement universitaire pour les élèves de ces classes. Ainsi, nous entendons réparer une injustice sociale manifeste.

Je dirai quelques mots sur les musiques actuelles et le cirque, en réponse à Mme Marie-Christine Blandin.

L’État consacre chaque année plus de 25 millions d’euros aux musiques actuelles, pour le soutien à la création, aux structures de diffusion, aux festivals et aux ensembles musicaux. Ces crédits vont augmenter de 2 millions d’euros en 2016 pour achever le plan de développement des scènes de musiques actuelles, ou plan SMAC, et atteindre l’objectif d’une centaine de structures labellisées sur l’ensemble du territoire.

Cela étant, madame Blandin, j’entends évidemment votre interpellation sur le rééquilibrage nécessaire des crédits en faveur d’esthétiques qui, jusqu’à présent, ont pu être moins considérées que les autres.

Par ailleurs, deux nouveaux pôles nationaux des arts du cirque – Auch depuis 2014 et Châlons-en-Champagne l’an prochain – viennent renforcer le réseau des institutions dédiées au cirque. J’ai en outre consacré 4 millions d’euros de crédits à la rénovation du Centre national des arts du cirque, afin que notre école nationale ait les moyens de rester l’une des premières au monde, garante de la formation des artistes de demain.

Enfin, nous financerons à hauteur de 1 million d’euros la programmation « Avant les murs » du projet Médicis Clichy-Montfermeil, qui est emblématique de la politique menée par le Gouvernement en faveur des arts et de la culture : hybridation des esthétiques, renouvellement de la création, accès de tous aux œuvres et aux pratiques culturelles.

Nous continuerons également de protéger la diversité du cinéma et d’améliorer sa compétitivité en France, en stabilisant les financements que nous lui consacrons et en élargissant les crédits d’impôt.

Ainsi les moyens du CNC seront-ils stabilisés en 2016 : il n’y aura ni ponction ni plafonnement des taxes prélevées sur le marché de la diffusion audiovisuelle.

En 2016, le crédit d’impôt sera amélioré, pour mieux soutenir les entreprises françaises du cinéma et relocaliser les tournages sur notre territoire. Il vous est notamment proposé de l’élargir aux œuvres tournées en langue étrangère pour des raisons artistiques – en particulier pour respecter le scénario –, aux films d’animation et aux films à fort effet visuel.

Le taux sera majoré à 30 % pour les œuvres tournées en français, et le plafond, pour une même œuvre, sera relevé à 30 millions d’euros, contre 4 millions d’euros auparavant.

Enfin, la troisième priorité du Gouvernement est de donner à mon ministère les moyens de son ambition à long terme.

Préparer l’avenir, c’est sécuriser les outils de financement, en particulier pour l’archéologie préventive. Afin de stabiliser le financement des activités de diagnostic réalisées par l’INRAP, le projet de loi de finances prévoit de budgétiser la redevance d’archéologie préventive.

Préparer l’avenir, c’est préserver les crédits consacrés aux investissements. L’an prochain, ils seront portés à 524 millions d’euros, soit 1, 5 % de plus qu’en 2015.

Pour la troisième année consécutive, nous maintiendrons nos efforts en faveur des monuments historiques. Malgré les 5 millions d’euros de rabot votés par l’Assemblée nationale, les crédits de paiement seront quasi stabilisés l’an prochain à 308 millions d’euros, et les autorisations d’engagement portées à 333 millions d’euros.

Les crédits bénéficiant aux territoires, via les services déconcentrés, ne seront pas pénalisés. Dans un contexte où certaines collectivités territoriales se désengagent de la politique de soutien aux monuments historiques, je veillerai à ce que l’intervention de l’État soit strictement préservée. Le rabot sera appliqué avec discernement. Il portera sur de grosses opérations engagées sur les monuments dont la responsabilité relève de l’État.

Compte tenu de la complexité technique des chantiers en question, un glissement naturel des opérations dans le temps est courant. Dans d’autres cas, les fonds de roulement des établissements publics concernés par ces chantiers permettront d’absorber ce rabot.

Nous continuerons enfin à lancer ou à poursuivre des chantiers importants : archives, schémas directeurs du château de Versailles, de celui de Fontainebleau, du Centre Pompidou, lancement des études consacrées au relogement du Centre national des arts plastiques, réaménagement des Ateliers Berthier...

Ce budget, mesdames, messieurs les sénateurs, est ambitieux, et je suis fière d’appartenir à un gouvernement qui a fait le choix de la culture et qui assume ses priorités, comme s’y était engagé le Premier ministre, Manuel Valls, dans ce contexte si difficile.

À l’heure où des pays voisins s’engagent à leur tour dans une offensive culturelle, n’oublions pas que nous avons la chance d’avoir, en France, le ministère de la culture le plus puissant et le mieux doté d’Europe. Et réjouissons-nous que certains de nos partenaires se reconnaissent dans la voie que nous avons prise.

La culture apporte des réponses essentielles pour l’avenir de notre pays. Si elle est un remède contre l’obscurantisme – je l’ai évoqué, et vous avez été nombreux à le redire aujourd’hui –, elle est aussi très précieuse pour mettre à distance les peurs qui parfois nous assaillent, ces peurs dont se nourrissent les marchands de fausses solutions qui n’attendent que l’occasion d’entonner à nouveau le chant du repli. Notre responsabilité – la mienne, la vôtre – est bien de leur opposer toujours plus de culture.

C’est donc avec la pleine conscience de tout cela que je vous soumets ce projet de budget, avec l’espoir qu’il puisse être très largement adopté par votre assemblée.

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