Intervention de Francis Delattre

Réunion du 1er décembre 2015 à 14h30
Loi de finances pour 2016 — Santé

Photo de Francis DelattreFrancis Delattre :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2016 ouvre 1, 257 milliard d’euros de crédits pour la mission « Santé », soit un budget en hausse de 4, 7 % par rapport à 2015.

Cette dotation, qui a été réduite de 8, 5 millions d’euros par l’Assemblée nationale, représente une enveloppe relativement modeste par rapport aux 200 milliards d’euros de dépenses annuelles prises en charge par l’assurance maladie, et plus encore par rapport aux 493 milliards d’euros de dépenses supportées chaque année par l’ensemble des administrations sociales.

Les crédits de cette mission n’en financent pas moins deux aspects importants de la politique sanitaire de notre pays : les agences sanitaires et la politique de prévention des agences régionales de santé, les ARS, à travers le programme 204, « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », et l’aide médicale d’État, l’AME, ainsi que l’indemnisation des victimes de l’amiante, au titre du programme 183, « Protection maladie ».

En ce qui concerne le programme 204, un nouvel effort est demandé aux opérateurs sanitaires, dont les subventions pour charge de service public baisseront l’an prochain de 3, 1 %, et les effectifs d’une cinquantaine d’équivalents temps plein travaillé.

Trois agences, amenées à fusionner en 2017, sont cependant épargnées : l’Institut national de veille sanitaire, l’INVS, l’Institut national de prévention et d’éducation à la santé, l’INPES, et l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, l’EPRUS, trois organismes dont le regroupement, souhaitable compte tenu du caractère complémentaire de leurs missions, n’appelle aucun commentaire particulier, sinon qu’il faudra veiller à conserver l’efficacité et la réactivité de l’EPRUS.

En effet, cette agence, peut-être la plus importante des trois, constitue en effet un outil essentiel en cas d’épidémie ou d’attaque terroriste, puisqu’elle assure sur le plan logistique l’approvisionnement en médicaments. Elle n’emploie que 50 salariés, mais peut compter sur 2 000 réservistes ; elle dispose de sept plateformes de stockage réparties sur le territoire national.

En réalité, la hausse des crédits de la mission « Santé » résulte exclusivement de l’augmentation des fonds alloués à l’AME : la dotation de l’État pour les trois types d’AME, en hausse de 10 % par rapport à la prévision initiale pour 2015, atteindra 744 millions d’euros en 2016.

Il n’est pas inutile de rappeler qu’il existe trois types d’AME

Tout d’abord, l’AME dite « de droit commun », dotée de 700 millions d’euros de crédits en 2016, est réservée aux étrangers qui se trouvent en situation irrégulière sur notre territoire depuis plus de trois mois.

Ensuite, l’AME pour soins urgents représente une dotation forfaitaire de 40 millions d’euros : ce dispositif correspond à la prise en charge par l’assurance maladie d’un ensemble de dépenses qui sont notamment liées aux soins délivrés à des patients étrangers dont le pronostic vital est engagé.

Enfin, l’AME dite « humanitaire » est réservée à des patients étrangers bénéficiant d’une autorisation ministérielle, pour un montant de 4, 5 millions d’euros en 2016.

Il n’en reste pas moins que le nombre de demandeurs de l’AME tend aujourd’hui à s’accroître. Même si les dépenses sont relativement stabilisées, dans la mesure où elles sont en partie compensées par une baisse du coût moyen de l’aide pour chaque patient, elle-même consécutive à la réforme de la tarification des soins hospitaliers, nous dénombrons aujourd’hui près de 300 000 bénéficiaires d’une carte d’AME, soit environ 5 000 patients supplémentaires en une année.

Par conséquent, un resserrement du dispositif d’accès aux soins gratuits sur les soins urgents, inspiré du système allemand, me paraît pertinent.

Tenant compte d’une proposition de notre collègue Roger Karoutchi, adoptée en octobre dernier dans le cadre du projet de loi relatif à la maîtrise de l’immigration, la commission des finances vous propose donc, mes chers collègues, d’adopter un amendement qui vise à réduire les crédits relatifs à l’AME dite « de droit commun » de 200 millions d’euros.

Naturellement, mes chers collègues, nous sommes confrontés à un exercice difficile, car le prochain projet de loi de finances rectificative prévoit que ce poste budgétaire bénéficiera d’une dotation supplémentaire d’environ 85 millions d’euros pour couvrir la fin de l’année 2015.

Néanmoins, nous devons également prendre en compte les remarques répétées de la Cour des comptes, qui nous appelle à élaborer des critères plus pertinents, afin que le dispositif, qui, comme chacun le sait, pose quelques problèmes, atteigne ses véritables objectifs.

Enfin, la commission des finances a examiné l’article 62 quinquies du présent projet de loi de finances, introduit en première lecture par l’Assemblée nationale, à l’initiative du Gouvernement : il prévoit une remise de créance au profit des personnes débitrices du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, le FIVA. Il s’agit de salariés qui, à la suite de revirements jurisprudentiels, bénéficient désormais d’un arrêt définitif de la Cour de cassation, qui semble stabiliser le droit en vigueur.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances vous propose, mes chers collègues, d’adopter les crédits de la mission « Santé » sous réserve du vote de l’amendement visant à réduire de 200 millions d’euros l’AME dite « de droit commun », et d’adopter l’article 62 quinquies sans modification.

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