Intervention de Robert del Picchia

Réunion du 2 décembre 2015 à 9h30
Loi de finances pour 2016 — Action extérieure de l'état

Photo de Robert del PicchiaRobert del Picchia :

Le chef de l’État a indiqué que la France veut montrer qu’elle n’est pas simplement « le soutien aux forces africaines qui doivent assurer la sécurité du continent », et l’on ne peut que l’approuver. Signalons au passage que notre pays finance pour plus de 100 millions d'euros la force de l’ONU en République démocratique du Congo.

Mes chers collègues, nous ne contestons pas ces chiffres ni ces aides, certes justifiées. Toutefois, ces chiffres doivent être gardés en mémoire, en vue de ma présentation ultérieure d’amendements visant l’aide à l’enseignement destiné aux enfants de familles françaises résidant à l’étranger.

Monsieur le secrétaire d'État, j’ai soutenu votre politique lors des votes et par des déclarations au sein de la précédente commission des affaires étrangères, présidée par Jean-Louis Carrère. Je soutiens et je soutiendrai la politique étrangère de la France étroitement liée, en cette période extrêmement difficile, à sa politique de défense. La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées se comporte de façon pleinement responsable dans ce soutien. Elle le fait, sous la direction de Jean-Pierre Raffarin, de façon très honnête et, j’ose dire, mes chers collègues, intelligente.

Toutefois, si j’approuve tout ou presque, j’ai des réserves sur les crédits dédiés aux Français de l’étranger, monsieur le secrétaire d'État.

Oui, il existe des difficultés un peu partout, des impasses budgétaires, on fait ce qu’on peut. Cependant, le réseau de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE, est, sans jeu de mots, l’atout maître de notre rayonnement. C’est un réseau exceptionnel qui, malgré les difficultés rencontrées, fonctionne au mieux grâce à sa direction générale, ses proviseurs, ses directeurs et ses professeurs dans nos écoles à travers le monde. On sous-estime son incidence. Les écoles de l’AEFE sont en outre les seules quasi obligatoires pour les enfants français à l’étranger.

Je sais que nous sommes à un tournant ; des personnes, qui sont certainement compétentes, réfléchissent à des transformations du réseau. Alors oui, il convient d’améliorer celui-ci, mais il faut faire attention à son devenir. La concurrence internationale existe.

Faut-il créer, comme l’avancent certains, une trente-deuxième académie, celle des Français de l’étranger ou, faute de moyens suffisants, laisser glisser l’AEFE vers un système d’enseignement totalement privé, que l’État financerait de moins en moins ? Le réseau prendrait alors une tout autre forme, connaîtrait des difficultés, et le rayonnement de la France et son influence disparaîtraient peu à peu. Ne devrait-on pas plutôt consolider l’Agence et lui donner les moyens de faire face à ces transformations ?

Je soulignerai simplement deux points. Premièrement, le coût pour l’État de la scolarité d’un enfant dans un établissement d’enseignement français à l’étranger est moins élevé que celui de la scolarité d’un enfant dans un lycée en France. Deuxièmement, seul un tiers des enfants français à l’étranger est scolarisé dans nos écoles ; un tiers n’y est pas inscrit par choix personnel des parents ou en raison de l’éloignement, mais un autre tiers, et c’est plus grave, ne l’est pas pour des raisons financières, les frais de scolarité étant trop élevés.

Voilà pourquoi, monsieur le secrétaire d'État, autant je soutiens votre politique étrangère, autant je m’insurge contre votre politique budgétaire envers l’Agence ! La diminution de 14 millions d'euros cette année du budget de l’AEFE me paraît être une erreur. Pis, la réduction de 10 millions d'euros pour ce qui concerne les bourses scolaires constitue une faute envers les Français à l’étranger.

Je connais les arguments : les crédits n’ayant pas été dépensés, il était logique de les supprimer. Je comprends très bien le fonctionnaire qui a agi ainsi, nous aurions procédé de la même façon. Toutefois, si le dispositif ne fonctionne pas, monsieur le secrétaire d'État, le ministère aura failli à sa mission. Alors, on pourra vraiment s’engager vers une modification du système et une prise en charge du budget des bourses scolaires par l’éducation nationale, dont c’est finalement le métier. On peut d'ailleurs se demander pourquoi tel n’est pas déjà le cas ! Le ministère de l’éducation nationale pourrait facilement s’en charger, on me l’a assuré clairement.

Dès lors, on ne baisserait pas les crédits de 10 millions d'euros. Ce budget de 115 millions d'euros serait conservé. Il devrait être sanctuarisé, au moins pour cette année et pour l’année prochaine. J’espère que nous ne serons pas obligés d’en arriver là, monsieur le secrétaire d’État, et que les amendements que je présenterai seront adoptés. Je vous demande peu, et j’espère que nous serons tous suffisamment sages pour accepter de rectifier le budget alloué aux bourses.

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