Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des finances, monsieur le rapporteur spécial, mes chers collègues, les crédits prévus par le projet de loi de finances pour 2016 pour les juridictions administratives à travers le programme 165, et pour les juridictions financières à travers le programme 164, présentent une certaine stabilité permettant à ces juridictions de bénéficier de conditions relativement favorables pour l’exercice de leurs missions.
C’est pourquoi la commission des lois a émis, sur ces crédits, un avis favorable.
Monsieur le secrétaire d’État, je tiens à aborder succinctement trois sujets.
J’évoquerai tout d’abord la maquette de performance du programme 165, « Conseil d’État et autres juridictions administratives ».
Depuis le projet de loi de finances pour 2015, l’indicateur « délai moyen constaté pour les affaires ordinaires », qui permettait de mesurer le délai de règlement des affaires ordinaires, c’est-à-dire hors procédures d’urgence et procédures particulières, a été supprimé.
Dès lors, le fait de communiquer sur un délai de jugement inférieur à un a, en se fondant sur l’indicateur « délai prévisible moyen de jugement des affaires en stock », c’est-à-dire tous types d’affaires confondus, risque d’induire le justiciable en erreur : les délais observés pour le traitement des affaires ordinaires, par exemple le contentieux des marchés publics ou de l’urbanisme, sont sensiblement plus élevés.
Pour quelles raisons a-t-on supprimé l’indicateur « délai moyen constaté pour les affaires ordinaires », qui nous paraissait tout à fait pertinent ? En quoi cette suppression apporte-t-elle une « simplification budgétaire », comme on a pu l’affirmer l’an dernier ?
Je m’interroge ensuite sur la situation de la Cour nationale du droit d’asile, la CNDA. Les moyens qui lui seront consacrés en 2016 lui permettront-ils de faire face à l’accélération attendue de son activité, découlant non seulement de la politique de déstockage des dossiers en instance mise en œuvre par l’OFPRA, mais aussi de la politique d’attribution du statut de réfugié ? La CNDA pourra-t-elle tenir les délais de jugement imposés par la loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d’asile ?
En vertu de ce texte, la CNDA s’est vu fixer un délai de cinq mois à compter de sa saisine lorsqu’elle statue en formation collégiale, et un délai de cinq semaines lorsqu’elle statue à juge unique. Or, pour 2015, le délai prévisible moyen de jugement des affaires en stock à la CNDA s’est établi à six mois, et la prévision pour 2016 est plus proche de sept mois.
Enfin, j’aborderai la question des formations interjuridictions mises en place au sein des juridictions financières.
J’attire votre attention sur la nécessité de faire preuve de prudence dans l’utilisation de cet outil. En effet, dans un contexte de restructuration de la carte des juridictions financières, et compte tenu du contexte budgétaire contraint, les effectifs ont été calculés au plus juste des besoins des juridictions, au regard de leur programme de contrôle.
Il ne faudrait pas que ces formations communes se développent au détriment des missions de contrôle organique des chambres régionales et territoriales des comptes.
Le principe doit demeurer celui de juridictions autonomes, assurant librement la programmation et la conduite de leurs travaux.
Tels sont les points sur lesquels je souhaitais attirer l’attention du Gouvernement.