La séance, suspendue à treize heures quinze, est reprise à quatorze heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Claude Bérit-Débat.
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances, rapporteur spécial. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des finances, mes chers collègues, je constate que l’auditoire est particulièrement nombreux, mais c’est sans doute moins pour la mission « Conseil et contrôle de l’État » que pour celle qui suit, « Politique des territoires »…
Sourires.
La mission « Conseil et contrôle de l’État » comporte quatre programmes, de poids très inégaux : si la justice administrative représente 386, 9 millions d’euros, les crédits du Haut Conseil des finances publiques s’élèvent, eux, à 620 000 euros.
Cette mission se caractérise également par une prépondérance des frais de personnel. Ces derniers représentent à eux seuls 85 % des 639, 2 millions d’euros qui y sont affectés à cette mission. Cela étant, hors dépenses de personnel, le budget de la mission est en repli de 1, 2 % par rapport à 2015.
Le programme 165, « Conseil d’État et autres juridictions administratives », bénéficiera, comme en 2015, de 35 équivalents temps plein supplémentaires, principalement en faveur des tribunaux administratifs et du traitement du contentieux de l’asile.
Cette politique de création d’emplois se poursuit dans un contexte de progression continue des entrées : sur l’année 2014, l’augmentation s’établit à 11 % pour les tribunaux administratifs, à 3, 4 % pour les cours administratives d’appel, à 26 % pour le Conseil d’État et à 7, 5 % pour la Cour nationale du droit d’asile, la CNDA.
J’ajoute que cette tendance à la hausse du contentieux devrait se poursuivre en 2016, avec la mise en place de plusieurs réformes dont il n’est pas encore possible d’évaluer l’impact budgétaire. Réforme du droit d’asile, réforme du droit des étrangers, projet de loi portant application des mesures relatives à la justice du XXIe siècle, autant d’exemples prouvant que les juridictions auront besoin de s’organiser pour faire face à de nouvelles missions.
L’année 2016 sera également particulière pour la CNDA. Cette instance devra face à un double défi : d’une part, l’adaptation de son organisation à la réforme du droit d’asile, qui impose de nouveaux délais de jugement ; d’autre part, un « déstockage » des dossiers en instance à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, l’OFPRA, qui pourrait entraîner une augmentation sensible des recours. Dans ce contexte, la CNDA devrait malheureusement connaître une dégradation de son délai de jugement.
Quant au Conseil économique, social et environnemental, le CESE, il voit sa démarche volontariste d’économies et de valorisation du patrimoine se traduire par l’abaissement de son plafond d’emplois et par le développement de ressources propres – notamment la location de ses locaux - estimées à 1, 7 million d’euros pour 2016.
Par ailleurs, dans la perspective de son renouvellement, qui vient d’avoir lieu, le CESE a adopté des mesures visant à préserver l’équilibre de sa caisse de retraite au-delà de 2020.
Enfin, à propos du programme 164, « Cour des comptes et autres juridictions financières », il faut noter que la réforme des juridictions financières, engagée en 2012, a été menée à son terme. Son coût total a été réévalué à la baisse, pour être fixé à 6, 15 millions d’euros pour la période 2012-2016, et le coût de cette réforme pour 2016 est très faible : 120 000 euros.
Toutefois, la restructuration des chambres régionales des comptes se poursuit, dans le cadre fixé par la loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions. Ce texte impose la réduction du nombre des chambres régionales des comptes métropolitaines, qui passe de 15 à 13. Ainsi, leur ressort correspondra à celui des nouvelles régions.
Le financement de cette réforme n’est pas inclus dans le projet de loi de finances pour 2016. Or, à l’instar de celle qui l’a précédée, cette réforme impliquera de nouvelles dépenses, que l’on peut estimer à 4 millions d’euros de crédits de paiement pour 2016. Au demeurant, le décret d’avance notifié le 18 novembre dernier a déjà ouvert 5, 4 millions d’euros en autorisations d’engagement. Il permet ainsi l’installation du nouveau siège de la chambre régionale des comptes de Languedoc-Roussillon à Montpellier, à partir du 1er janvier 2016.
Par ailleurs, le champ de compétences des juridictions financières devrait s’étendre, notamment avec l’expérimentation de la certification des comptes des collectivités territoriales. À ce titre, on peut également évoquer les missions portant sur les établissements médico-sociaux et sur les établissements privés de santé.
Monsieur le secrétaire d’État, peut-être pourrez-vous nous préciser les modalités de mise en œuvre de cette expérimentation ?
Enfin, je relève que le programme 340, « Haut Conseil des finances publiques », voit son budget, déjà extrêmement modeste, réajusté à la baisse : il est porté de 820 000 euros à 620 000 euros.
En conclusion, et sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances propose au Sénat l’adoption des crédits de la mission.
MM. Charles Revet et André Gattolin applaudissent.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des finances, monsieur le rapporteur spécial, mes chers collègues, les crédits prévus par le projet de loi de finances pour 2016 pour les juridictions administratives à travers le programme 165, et pour les juridictions financières à travers le programme 164, présentent une certaine stabilité permettant à ces juridictions de bénéficier de conditions relativement favorables pour l’exercice de leurs missions.
C’est pourquoi la commission des lois a émis, sur ces crédits, un avis favorable.
Monsieur le secrétaire d’État, je tiens à aborder succinctement trois sujets.
J’évoquerai tout d’abord la maquette de performance du programme 165, « Conseil d’État et autres juridictions administratives ».
Depuis le projet de loi de finances pour 2015, l’indicateur « délai moyen constaté pour les affaires ordinaires », qui permettait de mesurer le délai de règlement des affaires ordinaires, c’est-à-dire hors procédures d’urgence et procédures particulières, a été supprimé.
Dès lors, le fait de communiquer sur un délai de jugement inférieur à un a, en se fondant sur l’indicateur « délai prévisible moyen de jugement des affaires en stock », c’est-à-dire tous types d’affaires confondus, risque d’induire le justiciable en erreur : les délais observés pour le traitement des affaires ordinaires, par exemple le contentieux des marchés publics ou de l’urbanisme, sont sensiblement plus élevés.
Pour quelles raisons a-t-on supprimé l’indicateur « délai moyen constaté pour les affaires ordinaires », qui nous paraissait tout à fait pertinent ? En quoi cette suppression apporte-t-elle une « simplification budgétaire », comme on a pu l’affirmer l’an dernier ?
Je m’interroge ensuite sur la situation de la Cour nationale du droit d’asile, la CNDA. Les moyens qui lui seront consacrés en 2016 lui permettront-ils de faire face à l’accélération attendue de son activité, découlant non seulement de la politique de déstockage des dossiers en instance mise en œuvre par l’OFPRA, mais aussi de la politique d’attribution du statut de réfugié ? La CNDA pourra-t-elle tenir les délais de jugement imposés par la loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d’asile ?
En vertu de ce texte, la CNDA s’est vu fixer un délai de cinq mois à compter de sa saisine lorsqu’elle statue en formation collégiale, et un délai de cinq semaines lorsqu’elle statue à juge unique. Or, pour 2015, le délai prévisible moyen de jugement des affaires en stock à la CNDA s’est établi à six mois, et la prévision pour 2016 est plus proche de sept mois.
Enfin, j’aborderai la question des formations interjuridictions mises en place au sein des juridictions financières.
J’attire votre attention sur la nécessité de faire preuve de prudence dans l’utilisation de cet outil. En effet, dans un contexte de restructuration de la carte des juridictions financières, et compte tenu du contexte budgétaire contraint, les effectifs ont été calculés au plus juste des besoins des juridictions, au regard de leur programme de contrôle.
Il ne faudrait pas que ces formations communes se développent au détriment des missions de contrôle organique des chambres régionales et territoriales des comptes.
Le principe doit demeurer celui de juridictions autonomes, assurant librement la programmation et la conduite de leurs travaux.
Tels sont les points sur lesquels je souhaitais attirer l’attention du Gouvernement.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Michel Canevet.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des finances, mes chers collègues, la mission « Conseil et contrôle de l’État », mission importante, ne consomme pas beaucoup de crédits. Elle représente, en tout, un peu moins de 640 millions d’euros. Les membres du groupe UDI-UC tiennent à saluer l’évolution modérée de ce budget, qui ne croît que de 0, 4 % par rapport à l’année 2015.
Cette augmentation s’explique par diverses créations de postes, qui, à mon sens, sont justifiées. Parallèlement, les dépenses de fonctionnement diminuent globalement de 1, 2 %. Cette évolution va dans le sens souhaité par les élus du groupe UDI-UC, celui d’une bonne maîtrise des dépenses de l’État.
J’en viens, très concrètement, aux différents volets de cette mission.
Le Haut Conseil des finances publiques a été créé assez récemment. Les moyens dont il est doté sont extrêmement modestes, au point que l’on se demande s’ils suffisent pour analyser de manière suffisamment large, mais suffisamment précise aussi les propositions budgétaires formulées par le Gouvernement. Pour l’heure, nous avons pu nous satisfaire des avis du Haut Conseil, mais peut-être devrons-nous, à l’avenir, lui donner les moyens de densifier un certain nombre d’études.
Viennent ensuite diverses instances, que j’évoquerai par ordre d’importance budgétaire croissante, en commençant par le Conseil économique social et environnemental.
Au nom du groupe UDI-UC, j’adresse mes félicitations à M. Patrick Bernasconi, élu hier à la présidence du CESE. Par les avis qu’elle émet, cette institution a toute son importance. Néanmoins, elle devrait selon nous se concentrer sur la prospective. Ses membres ne doivent pas s’attacher à étudier l’activité passée. Mieux vaut qu’ils dirigent leurs regards vers l’avenir, de manière à éclairer le Gouvernement et le Parlement de leurs conseils avisés.
J’en viens maintenant à la Cour des comptes, dont le Sénat salue tout particulièrement l’excellent travail. Nous, sénateurs, sollicitons de manière assez régulière son expertise et ses avis, qui nous permettent de mieux assurer notre mission de contrôle parlementaire, à l’instar de nos collègues députés. En tout cas, nous sommes particulièrement satisfaits. On le sait, la refonte des régions implique une évolution des juridictions financières. C’est prévu. Peut-être quelques crédits supplémentaires seront-ils nécessaires à la réinstallation de diverses juridictions financières.
Il reste le Conseil d’État et l’ensemble des juridictions administratives. C’est sur cette partie de la mission que sont prévues des créations de postes. Cela nous semble justifié, car il est important, dans notre pays, de réduire les délais de jugement.
Dans le rapport de la commission des finances, il est indiqué que, pour ce qui concerne les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel, ce délai est désormais de dix mois. Laissez-moi vous dire que je n’en crois rien ! Il nous faudrait des éléments plus précis sur la nature des jugements, afin de savoir précisément lesquels connaissent une réduction de délais.
En conclusion, le groupe UDI-UC votera les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je concentrerai mon intervention sur le programme 165 « Conseil d’État et autres juridictions administratives », qui représente plus de 60 % des crédits de la mission que nous examinons.
En progression de 1 % par rapport à 2015, après une hausse d’environ 2 % l’année précédente, ce programme peut, à première vue, passer pour privilégié, dans le contexte budgétaire global très contraint que nous connaissons.
Mais, disons-le clairement, ces crédits sont en réalité très chiches, au regard du volume croissant d’activité auquel les institutions concernées par ce programme doivent aujourd’hui faire face et, surtout, au regard des défis auxquels elles devront répondre dans les années à venir.
L’an passé, l’essentiel des 35 équivalents temps plein supplémentaires dégagés a été absorbé par la Cour nationale du droit d’asile, qui depuis 2009 voit le nombre de recours en contentieux exploser. Et vu l’accroissement exponentiel des demandes d’asile, les besoins de cette cour ne risquent pas de diminuer...
Cette fongibilité des moyens à l’intérieur du programme pour répondre aux urgences ne permet pas, à mon sens, de satisfaire correctement d’autres besoins cruciaux, notamment ceux qui sont attachés à la fonction de conseil assignée au Conseil d’État.
En effet, celui-ci doit continuer d’affronter une inflation législative, à l’œuvre depuis plusieurs années. Face à cette frénésie, le Conseil doit multiplier sa production d’avis sur des textes de plus en plus longs, et ce dans des délais toujours plus réduits, qui ne garantissent pas toujours leur précision et leur qualité.
Ainsi, la loi Macron, qui ne comportait pas moins de 308 articles, a dû être étudiée par le Conseil dans des délais proprement surréalistes.
Cela nuit évidemment à la sécurité juridique des textes adoptés, rallonge encore les délais de publication des décrets d’application et tend à multiplier les recours et les contentieux.
Les amendements, qui par nature ne font pas l’objet d’un avis préalable du Conseil d’État, sont de plus en plus régulièrement utilisés par le Gouvernement afin de contourner l’institution chargée de le conseiller et de le contrôler.
Il est d’ailleurs étonnant que la fonction de conseil à l’État du Conseil d’État s’exerce quasi exclusivement au bénéfice de l’exécutif et que le Parlement ne puisse avoir recours à ses services, depuis 2008, que dans des cas extrêmement limités.
Cela supposerait évidemment une charge de travail encore accrue pour le Conseil d’État, mais je crois qu’au final nous y gagnerions singulièrement en pertinence et en efficacité.
Alors, certes, les exécutifs modernes sont sommés d’agir toujours plus vite. Mais, face à cette exigence, il faut marteler que le temps passé en amont de l’examen des textes par le Parlement est un temps démocratique, un temps indispensable qu’il faut cesser de compresser à l’excès.
Renforcer très significativement les moyens du Conseil d’État serait aussi une manière de défendre et de renforcer l’intérêt général, aujourd’hui confronté à une juridictionnalisation croissante de la vie publique.
Face à des groupes d’intérêts particuliers et à de grandes entreprises internationales aujourd’hui capables de mobiliser d’importants moyens de lobbying et, surtout, une armée de juristes pour exploiter toutes les failles de l’incroyable sédimentation de notre droit, il est donc urgent, mes chers collègues, de renforcer significativement les moyens et les missions du Conseil d’État.
Applaudissements sur les travées du groupe écologiste. – M. Jean-Pierre Sueur applaudit également
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce que je constatais avant le déjeuner reste valable, même si les rangs de notre assemblée sont un peu moins clairsemés !
Pourtant le rôle de contrôle du Parlement sur les politiques de l’État mérite toute notre attention. Nous pourrions d’ailleurs à cette occasion tordre le cou à quelques mauvais canards !
Les élus, quels qu’ils soient, seraient une espèce très rare, de celle qui ne ferait jamais du bon travail et dépenserait toujours plus d’argent !
Aujourd’hui, nous avons la chance d’examiner les crédits d’une mission qui devrait être votée à l’unanimité.
C’est assez rare ! Et il serait tout à fait normal de le mettre en exergue, de le faire savoir à nos populations, dans nos villes ou dans nos campagnes : les élus, quelle que soit leur sensibilité, font un excellent travail, en particulier dans l’exercice de leur mission de contrôle.
Non sans avoir salué la qualité du travail fourni par les rapporteurs, le groupe du RDSE votera, à l’unanimité, les crédits de la mission. Il vous revient, monsieur le secrétaire d’État, de faire mieux connaître le rôle des élus au plus profond de nos campagnes !
Applaudissements sur les travées du RDSE. – M. André Gattolin applaudit.
Très bien !
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais ajouter quelques mots sur cette mission, même si beaucoup de choses ont déjà été dites.
Je tiens d’abord à saluer l’excellent travail des deux rapporteurs et, pour éviter les répétitions, je centrerai mon propos sur un thème précis : la justice administrative.
Si je résume les rapports qui nous ont été présentés, la justice administrative se caractérise aujourd’hui par un double mouvement de réduction : elle réussit à réduire tout à la fois ses dépenses, ce qui est excellent, et ses délais de jugement, ce qui était tout à fait indispensable.
En ce qui concerne les délais de jugement, chacun sait que la qualité du travail de la justice administrative est remarquable, mais la longueur des délais constitue un handicap, qu’elle partage – parfois – avec le juge judiciaire.
J’entends dire qu’en 2000 il fallait attendre deux ans pour qu’un tribunal administratif rende son jugement. Je dirais plutôt qu’il fallait au moins deux ans ! Il faut y ajouter ensuite deux ou trois années pour que la cour administrative d’appel valide ou non ce jugement. Puis c’est la grande aventure du Conseil d’État, où les procédures se perdent parfois dans des méandres. Certaines procédures peuvent ainsi durer jusqu’à dix ans !
Cela constitue un véritable scandale républicain, surtout en comparaison d’autres pays. Dans ceux où existent des juridictions administratives, les procédures sont plus rapides que les nôtres. Affaire de moyens, bien évidemment !
Il existe, en outre, un risque très important d’aggravation, puisque l’on sollicite de plus en plus le juge administratif. Il y avait 20 000 recours en 1970 ; il y en a 200 000 aujourd’hui ! En quarante ans, ils ont été multipliés par dix, sans que le nombre de magistrats ait suivi la même évolution… Jean-Marc Sauvé, vice-président du Conseil d’État, souligne lui-même ce qu’il faut considérer comme un risque. Les recours devant le tribunal administratif augmentent, chaque année, de 6 %, les appels de 10 %.
Nous sommes dans une impasse et courons à la catastrophe.
Des efforts pour contrarier ces perspectives ont été faits. On affiche, pour la solution d’un litige, un délai de dix mois devant le tribunal administratif et de onze mois devant la cour administrative d’appel, si je m’en réfère aux rapports budgétaires.
Je crois qu’il s’agit d’une illusion !
En effet, et Michel Delebarre le souligne lui-même dans son rapport pour avis, on arrive à ces résultats remarquables pour une raison simple : on a supprimé l’indicateur spécifique ! Dorénavant, l’indicateur est uniquement global et inclut tous les types de procédures. Si l’on regarde uniquement les affaires dites « ordinaires », celles qui concernent le plus grand nombre, on n’aboutit certainement pas à ces délais. La pratique et ce qui remonte du terrain laissent penser que nous sommes toujours à plus d’un an devant le tribunal administratif, et plus encore devant la cour administrative d’appel. Néanmoins, je ne nie pas les progrès réalisés.
La difficulté réside dans le développement de contentieux de masse : sur le revenu de solidarité active, le contentieux a augmenté de 360 % en cinq ans ; sur le droit au logement opposable, de 100 % ; sur la fonction publique, notamment en ce qui concerne la fonction publique territoriale, le contentieux s’est également beaucoup développé, comme celui du droit des étrangers.
Face à cela, plusieurs solutions existent, que je qualifierai de « techniques » : dispenser le rapporteur public de conclusions, supprimer l’appel dans certains cas ou instaurer un juge unique.
Je m’arrête un instant sur ce dernier point. Quand j’étais plus jeune, on disait fréquemment, et cela valait pour toutes les juridictions, « juge unique, juge inique »… C’était sans doute arbitraire, caricatural, excessif, je veux bien l’admettre.
Aujourd’hui, pour résorber les stocks et faire face à l’inflation du nombre de procédures, on va recourir de plus en plus au juge unique. On le voit, par exemple, en matière de droit d’asile. La loi du 29 juillet 2015, excellente loi, réduit considérablement les délais, mais elle ouvre aussi une possibilité au requérant : soit il s’adresse, pour son recours, à une juridiction collégiale, et il attend cinq mois, soit il s’adresse à un juge unique, et il bénéficie alors d’un délai de cinq semaines. Le choix est vite fait !
Plus généralement, on constate une tendance au développement du recours au juge unique, puisque, en 2014, 55 % des affaires devant le tribunal administratif relevaient déjà de ce régime.
La question posée est alors celle de la qualité du travail effectué. Mme Taubira, garde des sceaux, s’est elle-même interrogée : cela n’entraîne-t-il pas une perte de qualité ? Le bon sens consiste à répondre par l’affirmative. Évidemment, un juge unique va plus vite, mais il fait sans doute moins bien…
Je suis très attaché à la juridiction administrative. Ce n’est pas qu’une particularité française, mais c’est tout de même une spécificité de notre pays, qui fait partie de notre culture. Un travail remarquable est effectué par tous les juges administratifs, qui doivent toutefois en avoir les moyens. Plusieurs solutions existent, mais, en fin de compte, cela exige une réponse budgétaire, que j’appelle de mes vœux.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE.
Monsieur le président, madame la présidente de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, monsieur le rapporteur pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens, avant toute chose, à remercier l’ensemble des orateurs pour leurs interventions précises, riches et constructives.
Vous avez tous souligné la bonne gestion et la performance des quatre institutions dont les crédits relèvent de la mission « Conseil et contrôle de l’État ».
Ces institutions contribuent de manière significative au bon fonctionnement de l’État et de la démocratie. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le Gouvernement a tenu à préserver leurs crédits, tout en renforçant, cette année encore, les moyens dévolus aux juridictions administratives, qui font face, comme vous l’avez souligné, à une pression contentieuse de plus en plus forte.
Ces conditions budgétaires positives ont été soulignées tant par votre rapporteur général, M. Albéric de Montgolfier, que par votre rapporteur pour avis, M. Michel Delebarre. Et je me réjouis qu’en conséquence les deux commissions compétentes aient émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission.
Toutefois, à l’écoute attentive de chacune de vos interventions, j’ai compris que des interrogations légitimes persistaient sur plusieurs sujets.
Les bonnes performances des institutions dont les crédits relèvent de la mission « Conseil et contrôle de l’État » et la préservation de leurs moyens budgétaires ne doivent pas nous exonérer d’une réflexion approfondie sur les tâches toujours plus nombreuses que le législateur leur confie. Je vais donc m’efforcer, dans le respect de l’indépendance des institutions concernées, d’apporter des réponses aussi claires que possible à vos interrogations.
Pour ce qui concerne les juridictions administratives, plusieurs orateurs ont souligné que le rythme de croissance des contentieux de masse risquait, à terme, de provoquer une dégradation des délais de jugement.
Pour illustrer mon propos, je rappellerai que les contentieux sociaux, qui comprennent notamment le contentieux du droit au logement opposable, le DALO, ou celui du revenu de solidarité active, le RSA, représentent 16 % des affaires enregistrées par les tribunaux administratifs. Par ailleurs, leur volume a augmenté de plus de 20 % dans la seule année 2014. L’activité de la Cour nationale du droit d’asile augmente elle aussi chaque année, à hauteur de 7 %.
La progression de ces contentieux appelle des réponses sérieuses et ambitieuses de la part du Gouvernement.
En premier lieu, comme l’ont souligné M. le rapporteur général de la commission des finances et M. le rapporteur pour avis de la commission des lois, 35 postes nouveaux seront créés dans la justice administrative en 2016, comme en 2015. Ces créations d’emplois sont principalement destinées aux tribunaux administratifs et à la Cour nationale du droit d’asile. C’est la raison pour laquelle les crédits du programme « Conseil d’État et autres juridictions administratives » progresseront en 2016 de 1 % par rapport à 2015.
Certains orateurs ont fait part de leurs interrogations quant aux moyens octroyés à la CNDA pour respecter le nouveau délai de jugement, fixé à cinq mois par le législateur dans la loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d’asile.
L’augmentation des crédits de la CNDA, inscrite en PLF 2016, de près de 3, 6 % pour le titre 2 et de 5, 6 % pour les dépenses globales, s’inscrit dans une stratégie pluriannuelle : depuis 2009, 144 ETP supplémentaires sont venus renforcer la capacité de jugement de cette juridiction, ce qui a permis, dans le même temps, de diviser par deux le délai moyen de jugement, aujourd’hui de six mois.
Certes, nous savons que cette moyenne se dégradera en 2016, en raison du « déstockage » important de dossiers en instance de l’OFPRA. Cependant, cette dégradation sera conjoncturelle et ne saurait remettre en cause l’objectif de moyen terme que nous avons fixé ensemble à cinq mois.
En second lieu, le Gouvernement salue et encourage la mise en place de procédures allégées et plus rapides.
Le développement des procédures à juge unique, même s’il soulève un certain nombre d’interrogations, permet ainsi d’absorber une part de l’augmentation des recours, notamment en matière d’asile. En tout état de cause, je partage l’avis de M. Delebarre : ces procédures simplifiées doivent être réservées aux affaires dont l’issue est évidente. Je pense, par exemple, au contentieux du droit au logement opposable.
Je me réjouis que le juge administratif, en modernisant son office, soit parvenu à concilier deux droits du justiciable, à savoir le droit au procès équitable et le droit à un « délai raisonnable de jugement », affirmés par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Toutefois, nous ne saurions nous affranchir d’une réflexion plus large sur l’état de notre droit. Nous devrons notamment réfléchir, de manière approfondie et sincère, au droit au logement opposable.
Enfin, plusieurs d’entre vous ont, en commission ou dans leurs interventions, déploré que le délai de traitement des affaires ordinaires ne soit plus mentionné dans les indicateurs de performance de la justice administrative.
L’indicateur correspondant a en effet été supprimé dans le PLF 2015 afin de répondre au souhait du Parlement de rationaliser les indicateurs de performance, foisonnants, trop nombreux. Cependant, permettez-moi de souligner que les réponses adressées par les juridictions aux questionnaires des commissions compétentes font état de la poursuite de l’effort de « rajeunissement du stock », ce qui implique naturellement une amélioration du délai de traitement des affaires ordinaires.
Ainsi, la part des affaires enregistrées depuis plus de deux ans représente, en 2015, 9, 5 % du total des affaires en stock dans les tribunaux administratifs, contre 11, 6 % en 2013. Le délai moyen évoqué par MM. Delebarre et Canevet continue de s’améliorer, pour s’établir à un an, neuf mois et quatre jours devant les tribunaux administratifs, et à un an, deux mois et un jour devant les cours d’appel.
J’en viens à présent aux juridictions financières, et plus particulièrement à la Cour des comptes, que le Sénat connaît bien, puisqu’à sa demande, et en application de l’article 58, 2°, de la LOLF, la Cour lui a remis cinq rapports en 2015, comme l’a rappelé M. Canevet.
Le budget des juridictions financières est, lui aussi, préservé. Je crois qu’il s’agit là d’une nécessité, compte tenu des nouvelles missions que le législateur a confiées ou entend confier aux juridictions financières, qu’il s’agisse de la certification des comptes des collectivités locales ou du contrôle des établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux prévu dans le projet de loi de modernisation de notre système de santé.
Concernant la certification des comptes des collectivités locales, je voudrais répondre aux remarques de M. le rapporteur général de la commission des finances. L’expérimentation, prévue par la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, débutera en fait en 2018. La Cour a déjà installé une équipe « projet » chargée d’élaborer un plan d’action pour les huit ans à venir, et un cahier des charges doit prochainement être rédigé à l’intention des collectivités, dont plusieurs sont déjà candidates à l’expérimentation.
Il n’est cependant pas possible de définir pour l’instant les moyens complémentaires qui seront nécessaires pour l’accomplissement de cette nouvelle mission. Ils dépendront en effet du périmètre de l’expérimentation et du nombre de collectivités concernées. Néanmoins, il ne fait aucun doute que la capacité d’innovation des juridictions financières permettra aussi de relever ces nouveaux défis.
J’en veux pour preuve la réforme de la carte des juridictions financières de 2011, qui a réduit le nombre de chambres régionales des comptes de 20 à 15. Si elle a suscité de nombreuses critiques lors de sa conception, cette réforme s’est finalement déroulée dans un esprit consensuel, et son coût est inférieur à ce qui était prévu.
La loi relative à a délimitation des régions prévoit une nouvelle réduction du nombre des chambres régionales des comptes, qui passeront de 15 à 13, pour l’adapter à la carte des régions. Le Gouvernement sera attentif à ce que le coût de cette réforme soit supportable pour les juridictions financières.
À terme, grâce aux gains de productivité et aux économies d’échelle réalisés, les CRC pourront non seulement se montrer plus efficaces dans l’exercice de leurs missions traditionnelles, mais aussi atteindre la taille critique nécessaire pour remplir de nouvelles missions.
Je voudrais également saluer la gestion du Conseil économique, social et environnemental opérée sous la présidence de M. Jean-Paul Delevoye. Hors titre 2, le montant des crédits de paiement affectés à cette institution diminuera en 2016 de 2, 8 % par rapport à 2015, confirmant la tendance déjà observée en 2014. En 2016, 3 ETP seront supprimés. Je ne doute pas que le CESE poursuivra dans cette voie.
Vous aviez été nombreux à vous inquiéter, l’an dernier, de la situation de la caisse de retraite des anciens membres de cette institution. Sachez que le bureau du Conseil économique, social et environnemental a voté en 2015 une réforme importante visant à assurer la pérennité du régime en question au-delà de 2020, sans solliciter un concours supplémentaire de l’État.
Comme l’a souligné M. le rapporteur général de la commission des finances, le Conseil économique, social et environnemental s’est engagé dans un cycle vertueux, notamment en valorisant le Palais d’Iéna pour financer la rénovation des bétons d’Auguste Perret, qui figurent parmi ses très belles réalisations.
Je terminerai en disant quelques mots sur le Haut Conseil des finances publiques. Comme vous l’avez indiqué, monsieur le rapporteur général, les faibles crédits du Haut Conseil ne lui donnent qu’une place marginale dans l’architecture de la mission. Un rattachement au programme des juridictions financières, envisagé en commission des finances, mériterait d’être mûrement réfléchi.
Je rappellerai à votre assemblée qu’un programme ad hoc a été inscrit à l’article 22 de la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques par le vote d’un amendement de M. Philippe Marini : présidant à l’époque la commission des finances du Sénat, il avait ainsi souhaité donner au Haut Conseil « une dotation spécifique afin de souligner son indépendance matérielle et fonctionnelle. »
Ainsi se présentent, retracés à grands traits, mesdames, messieurs les sénateurs, les crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État », que le Gouvernement vous invite à adopter.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État », figurant à l’état B.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Conseil et contrôle de l’État
Conseil d’État et autres juridictions administratives
Dont titre II
323 070 394
323 070 394
Conseil économique, social et environnemental
Dont titre II
32 594 997
32 594 997
Cour des comptes et autres juridictions financières
Dont titre II
185 636 195
185 636 195
Haut Conseil des finances publiques
Dont titre II
372 842
372 842
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
Ces crédits sont adoptés.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l’État », figurant à l’état B.
Le Sénat va maintenant examiner les crédits de la mission « Politique des territoires » et du compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale ».
La parole est à M. Bernard Delcros, rapporteur spécial.
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nouvellement élu, j’ai eu la chance de travailler sur cette mission pour mon premier rapport. Plutôt que d’exposer le détail des programmes qui la composent, j’ai préféré vous faire part de mon point de vue de façon plus générale sur une politique publique qui m’inspire deux constats.
Premier constat, notre politique d’aménagement du territoire manque de lisibilité, et cela ne date pas d’aujourd’hui.
Certes, le Gouvernement a pris une série de mesures en faveur des territoires, notamment ruraux : la création de 1 000 maisons des services ; le programme de revitalisation des centres-bourgs ; l’affectation d’une somme de 200 millions d’euros à la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR.
Malheureusement, la politique d’aménagement du territoire est aujourd’hui éclatée en quatorze missions et trente programmes, cette fragmentation ne contribuant pas à la cohérence et à l’efficacité.
Comment expliquer, par exemple, la coexistence de la mission « Politique des territoires », d’un côté, et de la mission « Égalité des territoires et logement », de l’autre ?
Comment parler de politique des territoires sans évoquer la question du logement, alors que, nous le savons, l’habitat doit être au cœur des politiques territoriales, lui qui joue un rôle majeur pour l’avenir de ces territoires ?
Second constat : les crédits affectés à la mission « Politique des territoires » sont en constante diminution, et il en sera encore ainsi en 2016, puisque les autorisations d’engagement baisseront de 3 % et les crédits de paiement de près de 4 %.
De surcroît, certaines actions sont en voie d’extinction, des crédits de paiement étant inscrits seulement pour honorer des engagements pris antérieurement.
C’est par exemple le cas pour les maisons pluridisciplinaires de santé, qui ne sont plus éligibles au FNADT, le Fonds national d’aménagement et de développement du territoire, alors que, nous le savons, elles sont indispensables au maintien d’une offre de soins de proximité dans les territoires ruraux.
Je veux d’ailleurs profiter de l’occasion qui m’est donnée aujourd’hui pour rappeler ici avec force que les crédits consacrés aux territoires fragiles, en milieu urbain comme en milieu rural, constituent non pas une faveur, mais une mesure d’équité pour corriger des inégalités.
M. Jean-Louis Carrère applaudit.
Ces constats m’amènent à faire trois propositions.
Première proposition, nous devons nous orienter vers une politique de l’aménagement du territoire plus globale. De ce point de vue, la démarche de rationalisation que le Gouvernement a engagée en 2015, avec la création du Commissariat général à l’égalité des territoires, lequel rassemble trois organismes, ou encore avec le rattachement de la politique de la ville à la mission « Politique des territoires », allait dans le bon sens.
Ce processus doit être poursuivi et une réflexion engagée pour faire évoluer la maquette financière de façon à rassembler plusieurs missions actuelles dans une grande mission « Aménagement du territoire ». Nous irions ainsi vers une politique de l’État plus lisible, plus cohérente, plus globale et, à mon sens, plus efficace.
Ma deuxième proposition concerne le mode d’intervention de l’État en faveur des territoires : nous devons le faire évoluer et passer d’une logique de guichet à une logique de projet. Il faut simplifier les procédures et accompagner les mutations des territoires ruraux en contractualisant avec eux, sur la base de schémas de développement menés de manière partenariale.
À cet égard, monsieur le ministre, je regrette que le Gouvernement n’ait pas donné un avis favorable à notre proposition de loi, d’ailleurs adoptée par le Sénat, qui visait à mettre en place des contrats territoriaux de développement rural répondant précisément à ce besoin.
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.
Troisième proposition, il serait logique de rattacher au programme 112, qui a porté la première génération de ce type d’opérations, les 300 millions d'euros prévus pour le programme de revitalisation des centres-bourgs et des petites villes. En effet, ces crédits ne sont pas inscrits au titre de la mission « Politique des territoires ».
Monsieur le ministre, seriez-vous favorable à ce rattachement au programme 112 et, dans le cas contraire, pourriez-vous nous dire pourquoi ?
Avant de conclure, je poserai encore deux questions.
La première concerne l’accès à la téléphonie mobile et à un service internet performant, qui est devenu une nécessité économique, un besoin social indispensable, comme l’ont été, en leur temps, d’autres services issus de progrès techniques.
Or, aujourd’hui, ce droit fondamental n’est pas assuré sur la totalité du territoire national et cette situation n’est plus tenable !
Monsieur le ministre, nous savons que le Gouvernement a prévu de remédier à cette situation, mais pouvez-vous nous dire à quelle échéance tous les citoyens de notre pays pourront accéder à ce service universel ? Voilà un vrai sujet d’aménagement du territoire !
Ma seconde question concerne les zones de revitalisation rurale, les ZRR.
Le projet de loi de finances rectificative, dans son article 18, prévoit de réformer les ZRR à partir de deux critères, qui sont, d’une part, la densité de population moyenne cette fois à l’échelle des intercommunalités, d’autre part, le revenu fiscal des ménages. Ainsi, 3 000 communes nouvelles entreraient dans le zonage, alors que 4 000 en sortiraient.
Monsieur le ministre, nous aimerions que vous nous indiquiez, d’abord, les conditions de mise en œuvre de ces deux critères, ensuite, le calendrier de mise en application de cette réforme, laquelle devra, bien sûr, tenir compte des nouveaux schémas de coopération intercommunale, enfin, le coût actuel du dispositif ZRR et les prévisions pour 2017 et les années suivantes.
En conclusion, et dans l’attente de réponses à nos questions, la commission des finances propose au Sénat de ne pas adopter les crédits pour 2016 de la mission « Politique des territoires ».
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC, ainsi que sur certaines travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des finances, mes chers collègues, même si je porte, à titre personnel, une appréciation positive sur les crédits proposés pour le programme « Politique de la ville », je souhaite tout de même exprimer un regret, qui rejoint l’analyse du rapporteur précédent.
Il est dommage que le programme 147 « Politique de la ville » ne figure plus dans la mission « Égalité des territoires et logement ». Je considère en effet que les politiques du logement et de la ville sont étroitement liées et que la précédente architecture du budget était plus cohérente.
Mais je me réjouis que la politique de la ville bénéficie de crédits confortés pour 2016 afin de tenir compte des mesures décidées le 6 mars 2015, dans le cadre du comité interministériel pour l’égalité et la citoyenneté, le CIEC, et qui s’appuient sur une nouvelle géographie prioritaire, avec 1 500 quartiers prioritaires et 100 zones franches urbaines-territoires entrepreneurs.
Ainsi, les crédits d’intervention de la politique de la ville sont tout particulièrement renforcés. Certes, la seconde délibération à l’Assemblée nationale a réduit de 3 millions d’euros l’effort initial de 15 millions d’euros supplémentaires par rapport à 2015, mais le soutien aux associations et aux actions menées sur le terrain est indéniable, ce qui mérite d’être souligné au moment où des événements tragiques, que nous avons tous à l’esprit, prouvent la nécessité d’interventions et d’accompagnement de ce type.
L’établissement public d’insertion de la défense, l’EPIDE, bénéficiera aussi d’une dotation de fonctionnement majorée de 3, 9 millions d’euros. Plus largement, votre ministère porte des actions en faveur des quartiers prioritaires, comme le financement de 1 000 éducateurs ou des subventions aux associations agréées « Jeunesse éducation prioritaire ». Je pense que vous ne vendez pas assez cet aspect, monsieur le ministre !
C’est donc bien la simple mise en extinction progressive, au 31 décembre 2014, du dispositif d’exonération de charges sociales dans les zones franches urbaines, les ZFU, qui explique principalement l’apparente diminution des crédits du programme 147. L’engagement du Gouvernement sur le plan opérationnel n’est pas en cause.
L’ensemble des mesures décidées dans le cadre du CIEC devraient être ainsi financées par une enveloppe globale de 55 millions d’euros en 2016, dont 18, 5 millions d’euros inscrits en loi de finances initiale ; le solde proviendra du dégel des crédits en cours d’exercice, comme en 2015, année au cours de laquelle le programme 147 a bénéficié d’un dégel de 31, 5 millions d’euros.
Les dépenses fiscales rattachées au programme, qui représenteraient 367 millions d’euros en 2016, ont été profondément redéfinies. Elles visent à assurer, dans les quartiers concernés, une mixité à la fois sociale et fonctionnelle, mixité fonctionnelle à laquelle je suis particulièrement attaché. Il ne suffit pas d’exiger la mixité sociale dans l’habitat, il faut qu’elle soit aussi dans les activités !
Ainsi en est-il de l’application de la TVA à taux réduit pour l’accession sociale à la propriété étendue à l’ensemble des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Nous pouvons encore aller plus loin, et je sais que l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, l’ANRU, fait en sorte d’aider les projets à se développer dans le domaine économique.
Je me félicite également du lancement de l’Agence France Entrepreneur, pour laquelle 660 000 euros ont été transférés depuis le présent programme. Cette agence devrait permettre de mutualiser les moyens aujourd’hui éclatés et de concentrer les efforts sur les territoires les plus fragiles. Je sais que le montant initial de ces 660 000 euros suscite des interrogations, mais je pense, monsieur le ministre, que vous pourrez nous donner des précisions sur cette agence.
Les crédits de droit commun, qui représenteraient en 2016 4, 2 milliards d’euros de crédits de paiement, sont désormais mobilisables à l’échelon territorial, dans les contrats de ville. Je me félicite que plus de 90 % de ces contrats soient d’ores et déjà signés. Pensez-vous parvenir à signer l’ensemble des contrats avant la fin de l’année ?
De nombreuses mesures en faveur des habitants des quartiers prioritaires, en termes de développement économique, d’emploi, de santé ou de rénovation urbaine, sont d’ailleurs prévues par le CIEC. Elles doivent désormais se concrétiser.
Je finirai par le financement de la rénovation urbaine.
Trois conventions ont permis, au cours des derniers mois, de fixer les ressources qui permettront de couvrir à la fois la fin du programme national de rénovation urbaine, le PNRU, dont les engagements s’achèveront à la fin de cette année, et le nouveau programme national de renouvellement urbain, le NPNRU, pour les années 2014 à 2019.
Ainsi, le NPNRU disposera de concours financiers à hauteur de 6, 4 milliards d’euros, correspondant à 5 milliards d’euros d’équivalents subventions. Action Logement en financera l’essentiel, avec 3, 2 milliards d’euros de subventions directes et 2, 2 milliards d’euros en prêts bonifiés. Le reste du financement sera assuré par la Caisse de garantie des logements locatifs sociaux, la CGLLS, à hauteur de 400 000 euros, et le reliquat attendu au titre du PNRU, soit environ 600 millions d'euros.
L’équilibre financier du NPNRU semble donc assuré, ce dont il faut se féliciter. Il repose toutefois sur l’hypothèse de ce report de 600 millions d’euros du PNRU, dont la concrétisation apparaît désormais indispensable. Les dernières nouvelles semblent rassurantes sur ce point.
Par ailleurs, le niveau de trésorerie, qui suscitait des inquiétudes, continue de se réduire. Toutefois, avec le soutien de trésorerie d’Action Logement et le système de préfinancement de 1 milliard d’euros prenant la forme d’un prêt de la Caisse des dépôts et consignations, le financement de la rénovation urbaine semble assuré jusqu’en 2019. Action Logement s’est même engagé, dès à présent, à verser, après cette date, 500 millions d’euros jusqu’en 2031.
Il apparaît toutefois que la soutenabilité financière de l’ANRU reste fragile. Un pilotage fin de la mise en œuvre des programmes et des capacités financières de l’Agence devra donc être assuré.
Compte tenu de l’ensemble de ces éléments et, en particulier, du renforcement des crédits consacrés aux actions territorialisées et aux dispositifs spécifiques de la politique de la ville, j’avais proposé à la commission des finances d’adopter les crédits consacrés à la politique de la ville.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je rapporte pour la deuxième année consécutive les crédits du compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale », le FACÉ.
Créé en 1936, le « Fonds d’amortissement des charges d’électrification » est resté jusqu’à aujourd’hui le FACÉ. Il a en effet conservé le même acronyme, mais il a changé de statut depuis 2012, en devenant un compte d’affectation spéciale, intitulé « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale ».
En tant que président du syndicat des énergies de l’Ardèche, fonction que j’occupe depuis huit ans, je pourrais vous parler très longuement du FACÉ. Cela étant, je m’en tiendrai, ce jour, à une présentation des principales observations que m’inspire ce compte d’affectation spéciale dans le projet de loi de finances pour 2016.
Ma première remarque concerne les recettes du FACÉ, qui sont assises sur une contribution due par les gestionnaires des réseaux de distribution d’électricité – ERDF, principalement.
Le taux de cette contribution est recalculé régulièrement, de manière à couvrir exactement les crédits prévus sur l’exercice. Son produit est ainsi attendu à hauteur de 377 millions d’euros en 2016, soit un montant stable depuis 2012.
Ainsi, les taux en vigueur à ce jour ont été récemment fixés par un arrêté du ministre chargé de l’énergie en date du 2 septembre dernier. Aux termes de cet arrêté, le taux de la contribution reste cinq fois plus élevé en zone urbaine qu’en zone rurale, faisant du FACÉ, dès le stade de son financement, un dispositif de péréquation. Ce mécanisme de répartition des charges entre communes rurales et communes urbaines doit rester, selon moi, du même ordre et devrait même être appliqué au très haut débit.
Ma deuxième remarque porte sur les destinataires des aides du FACÉ, c'est-à-dire les autorités organisatrices de la distribution publique d’électricité, ou AODE. Il peut s’agir de communes ou d’établissements publics de coopération intercommunale, en particulier des syndicats d’électrification, dans la mesure où ces collectivités sont les maîtres d’ouvrage de travaux d’électrification rurale.
Ces AODE sont, le plus souvent, des établissements publics de coopération intercommunale, en particulier des syndicats d’électrification à l’échelle départementale. À cet égard, je me félicite qu’en 2015 le mouvement de regroupement des syndicats soit quasi achevé ; seuls cinq départements n’ont pas encore abouti aujourd’hui.
Ma troisième remarque est relative à la destination des dotations. Il s’agit de financer des travaux sur les réseaux de distribution d’électricité, avec un taux de prise en charge du coût des travaux qui s’établit à 80 % hors taxes. Les dotations sont notamment réparties en fonction des départs mal alimentés, les DMA, calculés par ERDF.
En 2016, les investissements sur les réseaux de distribution publique d’électricité auront, comme à l’accoutumée, diverses finalités : le renforcement des réseaux, qui vise à accroître la qualité de l’électricité distribuée pour 184 millions d’euros ; la sécurisation des réseaux, à hauteur de 81 millions d’euros, en prévision d’événements exceptionnels, tels que des tempêtes ou d’autres intempéries ; l’enfouissement, soit 55, 5 millions d’euros d’aides, permettant d’importantes améliorations d’ordre esthétique, mais également de fiabilisation, en particulier en montagne ; ou encore, l’extension des réseaux, pour près de 47 millions d’euros, afin d’assurer leur développement.
J’estime que les actions de renforcement et de sécurisation doivent bien demeurer des axes prioritaires pour les missions du FACÉ, mais il convient de réviser progressivement à la hausse la part des travaux d’extension et d’enfouissement.
Ma quatrième et dernière remarque – sans doute la plus importante, monsieur le ministre – vise les graves dysfonctionnements rencontrés en 2014 et 2015 dans l’exécution du FACÉ, qui ne doivent plus se reproduire. Je déplore, en effet, que des retards de paiement soient à nouveau intervenus en 2014 et 2015.
Après les problèmes rencontrés en 2012, à la suite de la réforme du FACÉ, la situation a été en voie de normalisation en 2013, mais l’exécution 2014, loin de confirmer le processus de rattrapage, n’a non seulement pas permis de combler le retard, mais l’a aggravé.
Monsieur le ministre, le taux de consommation des crédits ouverts n’a été, l’année passée, que de 74 % en autorisations d’engagement et de 47 % en crédits de paiement.
Le rapport annuel de performance 2014 de la mission indiquait un « ralentissement lié à une situation exceptionnelle, composée du déménagement du FACÉ sur le site de la Défense à l’été 2014, suivi de la vacance de plusieurs postes de gestionnaires, ainsi que de la formation dispensée aux nouveaux arrivants ». Malheureusement, ces difficultés se sont poursuivies tout au long du premier semestre de 2015.
J’ai obtenu des précisions sur la nature du problème : ce fonctionnement perturbé fait suite au départ d’agents qui ont choisi de rejoindre EDF en 2014 avant l’emménagement du FACÉ dans les locaux de la DGEC, la Direction générale de l’énergie et du climat, à l’été 2014, la mission étant placée sous la dépendance d’une convention de mise à disposition de personnels issus d’EDF. La vacance de plusieurs postes pendant de nombreuses semaines a profondément désorganisé la gestion des aides du FACÉ.
Monsieur le ministre, il faut tirer des enseignements de cette exécution difficile en 2014 et 2015. Je m’interroge sur l’état de dépendance de la mission à l’égard de la mise à disposition de personnels issus d’EDF. Faut-il s’orienter vers une gestion en régie du FACÉ et sur la fin de la convention avec EDF, de manière à garantir la continuité du fonctionnement de ce compte d’affectation spéciale ?
Quelle que soit votre réponse, la priorité est aujourd’hui que les services de l’État assurent le bon déroulement de l’exécution 2015 et procèdent aux paiements en retard dans les délais les plus brefs.
Ce mauvais fonctionnement est illustré par le délai inadmissible de délivrance des arrêtés de subvention. Pour des demandes complètes déposées en juin les arrêtés ne sont délivrés que fin novembre, et encore pas pour toutes les opérations.
C’est inadmissible, mais cela illustre l’impensable lourdeur de l’administration française.
De ce fait, l’acompte de 10 % de la subvention ne peut être délivré qu’à ce moment-là, soit six mois après la demande…
En cette période de chômage exceptionnel tout autant qu’exponentiel, et pour relancer l’investissement, il est indispensable, d’une part, de réduire au minimum le délai de rédaction des arrêtés en supprimant les étapes technocratiques inutiles, …
… et, d’autre part, de porter à 30 % l’acompte, comme pour toute autre subvention de l’État.
Les phénomènes de retards de paiement constatés en 2012, 2014 et 2015 ne doivent plus jamais se reproduire !
C’est sous le bénéfice de ces observations que la commission des finances propose l’adoption, sans modification, des crédits pour 2016 du compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale », ce FACÉ qui est pour moi un bel instrument de solidarité entre les territoires !
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC, ainsi que sur quelques travées du RDSE.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, s’agissant des crédits du programme 147, « Politique de la ville », je tiens à saluer, dans un contexte global de restriction budgétaire, les efforts du Gouvernement pour augmenter les crédits destinés aux quartiers prioritaires de la ville.
Je ferai deux observations, sur l’emploi des jeunes et sur l’habitat.
Le CIEC, le comité interministériel à l’égalité et à la citoyenneté, a en effet décidé de renforcer les mesures en faveur de la formation et de l’emploi des jeunes dans les quartiers prioritaires, dont le taux de chômage demeure très supérieur au taux constaté en dehors des quartiers « politique de la ville ».
C’est le cas de l’EPIDE, qui met en place un cadre structurant d’inspiration militaire.
Le CIEC a décidé d’augmenter de 27 % le nombre de places d’accueil de cet établissement. Ce sont ainsi 4 000 jeunes qui pourront être accueillis dans l’un des dix-huit centres à partir de 2016 pour une durée de huit mois environ. Deux nouveaux centres devraient ouvrir, à Nîmes et à Toulouse.
Il faut encourager ce dispositif, qui a permis en 2014 d’insérer 51 % des jeunes engagés, alors même que le contexte économique était difficile.
En matière d’habitat, le Premier ministre a appelé à « casser les logiques de la ségrégation avec une autre répartition de l’habitat ».
À cette fin, le CIEC a adopté plusieurs mesures parmi lesquelles l’accélération de la mise en œuvre du nouveau plan de renouvellement urbain, dont tous les acteurs rappellent l’importance au regard du succès du précédent plan, le PNRU, et une meilleure répartition du parc social sur les territoires.
S’agissant plus particulièrement du NPNRU, le nouveau programme national de renouvellement urbain, qui va concerner 200 quartiers d’intérêt national et 250 quartiers d’intérêt régional, il me paraît essentiel que l’on mette fin à la concentration de logements sociaux dans un certain nombre de quartiers et que l’on favorise la mixité tant sociale que fonctionnelle.
Je souhaite redire que la démolition-reconstruction est l’un des moyens pour mettre un terme à une situation que le Premier ministre a qualifiée d’« apartheid territorial, social, ethnique », …
… sachant qu’il est prévu que, dans les zones tendues, les logements sociaux démolis soient reconstruits en dehors des quartiers prioritaires, sauf exception justifiée par l’intérêt local.
Le NPNRU se verra consacrer 6, 4 milliards d’euros – Action Logement sera le premier contributeur – ; un prêt de 1 milliard d’euros de la Caisse des dépôts et consignations devrait en outre permettre d’accélérer sa mise en œuvre.
Si la question de la trésorerie semble ainsi résolue, il faudra cependant prendre en compte les conséquences, sur la réalisation des projets de rénovation urbaine, des baisses de dotations et des nouvelles règles de financement de l’ANRU, règles qui obligent les bailleurs sociaux à avoir recours de façon plus importante à leurs fonds propres, car il est indispensable d’agir, et d’agir vite.
En conclusion, la commission des affaires économiques a émis un avis défavorable à l’adoption des crédits du programme 147, « Politique de la ville », crédits que je voterai à titre personnel.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je viens rapporter devant vous l’avis de la commission de l’aménagement du territoire sur les crédits consacrés à la politique des territoires inscrits sur le programme 112, « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire », sur le programme 162, « Interventions territoriales de l’État » – ou PITE – et sur le compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale ».
Au regard de l’importance de ces programmes et de ce compte d’affectation spéciale, je commencerai par regretter que cette commission ne dispose que de trois minutes de temps de parole…
Je regrette aussi, comme j’ai eu l’occasion de le dire à cette tribune depuis plusieurs années, que notre commission n’ait pas l’occasion de donner son avis sur l’ensemble de la politique d’aménagement du territoire, qui représente 5, 7 milliards d’euros, contre 6, 1 milliards d’euros en 2012, je le rappelle.
Les programmes examinés représentent un des plus faibles postes du budget de l’État, avec 270 millions d’euros en crédits de paiement et de 227 millions d’euros en autorisations d’engagement pour 2016, soit une baisse respective de 9 % et de 7 % par rapport à 2015.
Cette diminution prolonge, une nouvelle fois, la forte baisse des crédits constatée depuis 2012. C’est un signal regrettable, pour nos territoires ruraux en particulier. Malgré les effets d’annonces à Laon et à Vesoul, nous ne pouvons que constater un recul du soutien aux territoires, qui ne semble pas être une priorité du Gouvernement.
Avec l’objectif de maîtrise des finances publiques et la baisse sans précédent des dotations de l’État, c’est une double peine pour nos territoires.
Certes, ces crédits ne représentent que 5 % des ressources de la politique transversale d’aménagement du territoire, mais celle-ci se limite finalement à 1, 4 % du budget général.
C’est très peu pour une politique publique qui ambitionne d’assurer le développement équilibré des territoires et qui devrait résorber les inégalités existantes.
Aujourd’hui, nous partageons la pénurie plutôt que la richesse, et la politique des territoires illustre le fossé qui sépare les promesses des réalisations.
Bien sûr, nous pouvons souscrire à un certain nombre de mesures, comme l’effort consacré aux maisons de services au public, mesure lancée en 2010, ou encore le soutien aux bourgs-centres, mais sous réserve que cette démarche soit sous-tendue par une vision socioéconomique et corresponde à un vrai soutien aux artisans et commerçants, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui !
Pour ce qui est de l’accès aux soins, avec les maisons de santé pluriprofessionnelles, il n’y a plus de financement dédié, puisque c’est dorénavant la DETR, la dotation d’équipement des territoires ruraux, qui interviendra dans ces opérations.
Quant à la fracture numérique, vécue comme une grande inégalité, force est de constater que les financements annoncés n’arrivent pas davantage à un très haut débit !
Par ailleurs, plusieurs dispositifs efficaces qui avaient été mis en place par la précédente majorité voient leurs ressources réduites ou diluées, quand ils ne sont pas abandonnés. Je pense aux pôles de compétitivité, aux grappes d’entreprises ou encore aux pôles d’excellence rurale.
En conclusion, même si le montant des crédits ne témoigne pas à lui seul de l’effort réalisé en direction des territoires, nous déplorons le manque de lisibilité, d’innovation et, finalement, de stratégie pour mener une politique d’aménagement du territoire cohérente et ambitieuse.
Mais avons-nous encore, dans notre pays, une véritable politique d’aménagement du territoire ?
On peut sans doute se poser la question aujourd’hui !
Pour toutes ces raisons, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis défavorable à l’adoption de ces crédits.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Patrick Abate.
Nous centrerons notre intervention sur l’accès aux technologies numériques.
Le programme concernant le très haut débit est, certes, rattaché à la mission « Économie », mais, pour nous, il relève bien de l’aménagement du territoire. C’est ce qui a conduit le rapporteur de l’Assemblée nationale à examiner, dans son rapport sur la politique des territoires, le programme sur le très haut débit. Il s’agit d’ailleurs d’un élément clé des futurs contrats de plan État-régions. Il figure enfin au sommaire des deux comités interministériels à la ruralité qui se sont tenus cette année.
C’est un enjeu essentiel de ce XXIe siècle, comme l’ont été en leur temps le rail ou l’électricité. Les possibilités de croissance liées au développement numérique sont immenses, au point que l’on a pu parler de « révolution » numérique, tant ces nouvelles pratiques transforment les manières de s’informer, de communiquer, d’échanger, de produire, et donc de vivre.
Le Gouvernement a présenté en 2013 un plan pour le très haut débit. Nous sommes d’accord avec l’objectif d’une couverture totale de la population en très haut débit fixe d’ici à 2022, principalement par la fibre optique jusqu’à l’habitant. Malheureusement, nous doutons que le calendrier puisse être respecté. Ce n’est pas le premier plan numérique dont les objectifs seraient repoussés faute de financements et malgré les efforts réalisés par les collectivités !
En effet, les objectifs fixés reposent principalement sur le bon vouloir des opérateurs privés. Or, soyons clairs, le « conventionnement » ne garantit pas le respect des engagements pris. Pensons à SFR…
Certes, la carence peut être déclarée, mais elle ne permet que l’intervention du public pour pallier ce défaut d’exécution. D’ailleurs, nous notons que ce sont dans les territoires où les collectivités publiques sont intervenues que les efforts les plus importants ont été réalisés et l’accès a été le plus renforcé. À l’échelle nationale, la couverture en très haut débit est passée de 27 % à 44 % en juin 2015 ; en zone d’initiative publique, c’est-à-dire en zone peu dense, autrement dit non rentable, la couverture est passée de 2 % à 24 %.
Pourtant, il est aujourd’hui risqué pour les collectivités d’intervenir. Elles ne disposent ni des moyens financiers ni des moyens juridiques pour le faire. Surtout, les opérateurs contestent souvent la qualité de leur réseau.
Bien sûr, dans les zones très denses, il n’y a pas de problème : les opérateurs sont tous au rendez-vous !
Dans les zones intermédiaires, l’idée de mutualisation est intéressante, mais la fusion entre SFR et Numericable a ralenti les déploiements et montre, une fois de plus, que l’intérêt privé n’est pas toujours l’intérêt général.
À cet égard, la secrétaire d’État chargée du numérique, Axelle Lemaire, a indiqué que la Commission européenne s’interrogeait sur l’application du régime des aides d’État au cahier des charges.
La France a longtemps disposé, pour les activités de service public, d’opérateurs historiques efficaces sous contrôle public, voire en situation de monopole. C’était le cas dans les transports, les télécommunications ou l’énergie. Ces opérateurs servaient l’intérêt général et assuraient l’aménagement du territoire tout en développant la recherche et des savoir-faire qui sont encore aujourd’hui en pointe dans le monde.
L’objectif des politiques actuellement mises en œuvre sous l’égide des textes européens n’est pas vraiment de protéger le consommateur, mais bien d’« effacer » le service public et ses opérateurs.
Le choix de l’État de concentrer la totalité des investissements publics sur les zones rurales part d’un bon sentiment, mais cela revient à accepter l’idée qui fonde tout le système : au privé les activités rentables, au public les activités déficitaires. Ne pourrait-on pas, à un moment ou à un autre, remettre ce principe en discussion ?
Les géants de l’industrie des télécommunications menacent aujourd’hui le Gouvernement de ne pas faire les investissements sur lesquels ils s’étaient engagés concernant la téléphonie mobile et la couverture des zones blanches, en invoquant la récente hausse de la taxe sur les fournisseurs d’accès à internet. Le patron d’Orange a qualifié cette mesure de « racket », tandis que Free a indiqué que cette augmentation serait répercutée sur la facture de l’abonné. Les politiques publiques seraient ainsi tout à fait incongrues et illégitimes, ce qui, bien sûr, n’est jamais le cas de la rémunération des actionnaires !
En dernier lieu, je souhaite évoquer la nécessité de contrôler le niveau d’émission des ondes.
La crainte des populations du « bain » d’ondes électromagnétiques n’est pas totalement infondée. Il convient de mieux associer les citoyens et de mettre en œuvre le principe de précaution, non pas pour bloquer les initiatives, mais pour introduire un questionnement légitime et nécessaire.
Nous avons besoin de données fiables pour mieux décider des implantations des antennes-relais et être en mesure d’apporter des réponses concrètes aux riverains. En attendant, nous demandons, depuis plusieurs années, la réduction du seuil maximal d’exposition du public à 0, 6 volt par mètre pour les antennes-relais. Cette proposition est soutenue par plusieurs associations et est reprise par une résolution du Conseil de l’Europe de 2011. La prendre en considération est nécessaire dans la mesure où nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à se déclarer électro-sensibles.
Plutôt que de n’envisager l’avenir qu’au travers de la construction et du développement de réseaux prétendument concurrents, ne pourrait-on s’interroger sur l’intérêt du déploiement d’un seul réseau organisé par la puissance publique, qui permettrait à la fois de garantir la suppression des déserts numériques, d’éviter aux collectivités d’être mises en difficulté et de prévenir la surabondance des sources d’ondes électromagnétiques, en mettant ainsi en œuvre le principe de précaution ?
M. Joël Labbé applaudit.
Tels sont, mes chers collègues, les éléments que nous voulions verser au débat.
M. Alain Bertrand. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout a été dit, ou presque…
Sourires.
Monsieur le ministre, nous voterons les crédits de cette mission. Nous saluons la rénovation des centres-bourgs, la dotation d’équipement des territoires ruraux, supérieure à 100 millions d’euros, l’extension du champ d’intervention du Fonds de compensation pour la TVA, l’expérimentation du guichet unique, le plan de développement des maisons de services au public et des maisons de santé.
Cependant, il est tout de même un peu effrayant de constater que la politique d’aménagement du territoire se résume aux quelques centaines de millions d’euros de la mission « Politique des territoires »…
Imaginez un habitant d’un quartier difficile relevant de la politique de la ville, qui entend sans cesse affirmer, sur toutes les chaînes de télévision, que l’on vit mal dans les quartiers comme le sien, qu’y sévissent le mal-logement, l’entassement, le manque d’emplois, l’absence de services publics et d’entreprises… Il finit par se demander quand on s’occupera enfin de son quartier, s’il y a un plan, une stratégie pour remédier à une telle situation. Il se répond à lui-même qu’il n’y en a pas, constatant que l’on ne définit jamais de moyens ni d’objectifs. Dans ces conditions, il ne croit plus dans les politiques publiques et, s’il ne s’abstient pas, il votera sans doute pour un parti extrémiste.
D’autres émissions de télévision traitent de la ruralité. On y montre une exploitation agricole, une école de campagne, un beau village où l’on aimerait passer des vacances, mais ces images recouvrent une réalité moins flatteuse : faute d’accès à l’internet et à la téléphonie mobile, les touristes hésitent à venir, l’infirmière ne peut pas prendre rendez-vous avec les patients, l’artisan, ne pouvant commander rapidement une pièce, perd du chiffre d’affaires. Quant à l’école, elle est fermée ! Restent l’église, le monument aux morts
Rires.
Tout le monde s’accorde à dire qu’il faudrait tout de même maintenir un minimum de symboles républicains, …
… mais on ne le fait pas !
Tout le monde s’accorde à dire qu’il faudrait aider à la démétropolisation, à l’implantation d’entreprises dans ces territoires ruraux et hyper-ruraux.
Tout le monde s’accorde à dire qu’il faudrait mettre en place un plan associant le département, la région et l’État pour amener l’internet, mais je puis vous assurer que nous autres, ruraux et hyper-ruraux, nous aurons internet vingt ans après tout le monde !
Le problème de fond, c’est le manque de stratégie et de volonté pour s’atteler à ce qui devrait être une grande cause nationale. Toutes les lois devraient prendre en compte l’hyper-ruralité, la démétropolisation devrait être une règle, mais ce n’est pas le cas ! On commence seulement à expérimenter les guichets uniques dont j’avais préconisé la mise en place dans mon rapport. Peut-être l’habitant de l’hyper-ruralité n’ira-t-il pas non plus voter dimanche prochain, à moins qu’il ne vote pour un parti extrémiste…
Chers camarades sénateurs…
Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.
Camarades, c’est un beau mot, qui exprime la fraternité, comme dans la devise de la République ! Nous sommes tous camarades !
Monsieur le ministre, si Mme Pinel et vous ne parvenez pas à convaincre le Premier ministre et le Président de la République de la nécessité d’élaborer une grande loi de programmation pour les ruralités et une loi de programmation pour la ville, nous manquerons forcément l’objectif. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste et républicain, de l'UDI -UC et du groupe Les Républicains.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Politique des territoires » est très diverse, puisqu’elle recouvre des missions du Commissariat général à l’égalité des territoires, le CGET, l’intervention territoriale de l’État, l’aménagement des territoires et la politique de la ville, mais ses différents programmes relèvent d’une logique de solidarité territoriale et d’équilibre des territoires.
Qu’il s’agisse de territoires ruraux en voie de désertification ou de quartiers déshérités de certaines agglomérations, tout le monde s’accorde à dire que, pour maintenir ou redynamiser ces territoires, il faut des services publics, des entreprises et des commerces de proximité, de la mixité fonctionnelle entre habitat et activités compatibles avec celui-ci.
Cette dernière dimension est essentielle. On ne peut cantonner des espaces à une fonction spécifique, comme nous l’avons fait trop longtemps dans de nombreuses agglomérations : ici les zones résidentielles, là les zones commerciales, un peu plus loin les activités industrielles. On observe même cette sectorisation dans les espaces ruraux, où l’on multiplie parfois les zones d’activités, au détriment de la mutualisation et des terres agricoles, alors que la démarche consistant, chaque fois que c’est possible, à conjuguer sur un même espace plusieurs fonctions favorise les échanges, le dynamisme et la résilience du territoire, bref le lien social, qui nous fait tant défaut aujourd’hui.
S’agissant des actions du CGET, l’aménagement numérique est effectivement devenu essentiel pour favoriser l’installation de nouvelles entreprises et de nouveaux habitants. Il faut veiller toutefois à ne pas se fourvoyer en pensant que cela suffira à rendre leur dynamisme à des territoires en déshérence.
Il reste néanmoins important de favoriser l’accès aux technologies numériques, et pas seulement en rendant possible la connexion, mais aussi en accompagnant les possibles nouveaux connectés dans l’utilisation de ces technologies. Il convient de rappeler que, à l’heure actuelle, 13 % de nos concitoyens, qui ne vivent pas seulement dans les zones rurales, sont encore entièrement déconnectés d’internet : cela peut tenir à des difficultés de connexion ou à une forme de militantisme, mais il y a aussi des victimes de la fracture numérique, qui ne sont pas entrées dans cette culture.
Cela doit nous inciter à conserver des points d’accès physiques de proximité pour l’ensemble des services publics.
M. Jean Desessard approuve.
Au sein du programme « Interventions territoriales de l’État », deux éléments ont retenu particulièrement mon attention.
Le premier est l’action Eau agriculture en Bretagne, relative à l’amélioration de la qualité de l’eau en Bretagne. Elle vise à mettre en cohérence, par bassin versant, les démarches des différents acteurs économiques, en particulier les agriculteurs, au travers notamment de la poursuite du plan de lutte contre les algues vertes. Pour cette action, les autorisations d’engagement passent de 7 millions à 5 millions d’euros et les crédits de paiement de 8 millions à 5 millions d’euros. Est-ce parce que l’on entreverrait enfin le bout du tunnel ? Je ne le pense pas. De gros efforts restent à fournir.
Les mesures curatives, c’est une chose ; le financement de la nécessaire transition agricole permettant d’éviter ces désordres, c’en est une autre !
Second élément ayant retenu mon attention, les crédits affectés au plan de lutte contre la contamination par le chlordécone des sols et des eaux en Martinique et en Guadeloupe diminuent également, passant de 2, 5 millions à 2 millions d’euros. Sur ce point également, on peut s’interroger.
Le big bang territorial, dont on verra les premiers effets en 2016, se prépare déjà au travers de ce projet de loi de finances. Les régions auront-elles les moyens d’assumer leurs compétences ? Elles auront à mettre en œuvre des schémas prescriptifs pour l’aménagement du territoire et le développement économique. Cela concerne les transports, les déchets, l’énergie, la biodiversité. Il faudra bien qu’elles en aient les moyens.
Au sein du programme 147, un dispositif a retenu mon attention, celui de l’Établissement public d’insertion dans l’emploi, l’EPIDE. Les crédits de ce dispositif sont revalorisés, ce qui permet le financement de la création de 570 places nouvelles. Ainsi, 1 000 jeunes supplémentaires pourront être accueillis, ce qui porte la capacité des dix-huit centres à plus de 3 700 jeunes, bénéficiant d’un accompagnement renforcé. Cette progression et la création de la garantie jeunes témoignent de l’engagement du Gouvernement en faveur de la jeunesse. Cet effort mérite d’être soutenu et encore accentué dans les années à venir.
Sans pouvoir entrer dans tous les détails des crédits de la mission, j’indiquerai que, malgré les contraintes budgétaires, il semble que leur ventilation tient compte des enjeux de solidarité et d’équilibre de nos territoires. C’est pourquoi les écologistes les voteront.
Mes chers collègues, je vais devoir vous quitter, Mme la ministre de l’écologie m’ayant invité à intégrer la délégation française à la COP 21. §Je dois me rendre au Bourget en vue de m’informer des idées des peuples autochtones pour faire face aux changements climatiques.
M. Joël Labbé. Ces peuples, qui entretiennent un rapport harmonieux à la biosphère, se reflétant dans leur gestion des ressources naturelles, sont les premières victimes du dérèglement climatique. Je souhaite vivement que leur sagesse puisse nous inspirer !
Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le ministre, je voudrais d’abord redire ici combien le groupe socialiste et républicain apprécie que vous ayez mis en 2015 la ruralité au cœur de votre action, notamment par la tenue de deux comités interministériels aux ruralités. Nous pouvons d’ailleurs déjà voir, au travers de différentes mesures, la traduction des propositions et des engagements pris à ces occasions.
La mission « Politique des territoires » ne représente, il est vrai, qu’une très petite partie – moins de 5 % – de l’engagement global de l’État en faveur de l’aménagement du territoire, mais si l’on considère l’ensemble des crédits consacrés à la politique d’aménagement du territoire, on constate qu’ils sont globalement stables : 5, 675 milliards d’euros de crédits étaient inscrits dans la loi de finances pour 2015 et 5, 706 milliards d’euros sont prévus dans le projet de loi de finances pour 2016. Seuls les crédits des programmes 112 et 162 accusent une légère baisse, qui peut s’expliquer par le cadre budgétaire contraint dans lequel nous sommes tenus de travailler.
Des engagements ont été pris, et soixante-cinq mesures ont été mises en place lors des deux comités interministériels aux ruralités, que ce soit au travers des volets territoriaux des contrats de plan État-région, les CPER, de l’extension du haut débit ou de la création de 1 000 maisons de services au public. Ces dernières ouvriront d’ici à la fin de l’année 2016, grâce à une mutualisation avec La Poste. Le dispositif du prêt à taux zéro rural sera quant à lui étendu. Enfin, 200 maisons de santé supplémentaires ont été créées en 2015 et le chiffre de 1 000 sera atteint en 2017. Toutes ces mesures, et bien d’autres encore sur lesquelles je ne reviendrai pas, témoignent de l’engagement du Gouvernement.
Une autre réforme importante, celle des zones de revitalisation rurale, vient d’être engagée, avec une redéfinition des critères de classement. Cette réforme, prévue par l’article 18 du projet de loi de finances rectificative pour 2015, était nécessaire.
Je constate aussi avec satisfaction que le centre-bourg a été remis au cœur de l’aménagement du territoire : le programme de revitalisation des centres-bourgs a été officiellement lancé le 3 novembre dernier. Ce programme, qui concerne cinquante-quatre sites, est doté d’un budget global de 230 millions d’euros sur six ans ; il bénéficiera également d’une partie de l’enveloppe de 300 millions d’euros issue du fonds de soutien dont la mobilisation a été annoncée lors du comité interministériel de Vesoul.
Ce programme a suscité un réel intérêt de la part des bourgs-centres, dans la mesure où plus de 300 communes se sont déclarées candidates. Il était important d’apporter une réponse aux quelque 250 d’entre elles qui n’ont pas été retenues, mais qui avaient perçu, dans l’annonce de ce nouveau programme, une réelle chance à saisir.
Je retiens à ce sujet la prise de position de Mme la ministre, qui nous a indiqué, lors de son audition par la commission, que les préfets avaient reçu pour instruction de donner la priorité à ces bourgs au titre de l’attribution des dotations de l’État. Je vous suggérerais volontiers, monsieur le ministre, d’augmenter le taux de subvention au bénéfice de ces bourgs, afin d’améliorer le caractère incitatif de cette politique, qui redonne aux bourgs-centres une place centrale dans l’aménagement du territoire. En effet, une loi de l’aménagement du territoire veut que quand le bourg va bien, l’arrière-pays se porte bien, et que quand il va mal, c’est tout l’arrière-pays qui souffre.
Le message adressé par les territoires ruraux a été entendu. La démarche était opportune, le diagnostic est précis, les réponses sont pertinentes. Les crédits affectés à cette politique constituent une première réponse, que certains jugeront insuffisante, mais une véritable politique d’aménagement du territoire doit aussi être faite de mutualisation et de transversalité.
L’État n’est pas seul à mettre en œuvre les projets. Cette transversalité suppose certes de mettre à disposition tous les moyens de l’État. C’est le cas aujourd’hui avec la DETR, qui a été augmentée, et le Fonds national d’aménagement et de développement du territoire, le FNADT. Il est également possible de faire appel non seulement aux fonds européens, au travers notamment du programme LEADER, que les régions géreront, mais aussi aux départements, dont les solidarités territoriales relèvent désormais.
Pour faire évoluer le monde rural, il faut donc une volonté politique et un projet de territoire. Pour autant, l’élaboration d’un véritable projet de territoire nécessite de l’ingénierie, laquelle fait défaut dans les territoires ruraux. Il faut donc travailler dans cette direction : les territoires ont besoin d’outils pour déceler et mettre en valeur leurs potentialités. Ils ont besoin d’une ingénierie, c’est-à-dire d’une aide à l’analyse, au diagnostic, puis à la mise en forme du projet.
Dans le département du Pas-de-Calais, dont je suis élu, une enquête réalisée auprès des communes a révélé que 25 % d’entre elles ont renoncé à un projet par défaut d’ingénierie. Beaucoup d’élus ruraux ont une vision du développement de leur territoire, mais ils ne disposent pas, la plupart du temps, de moyens humains suffisants pour concrétiser leur ambition. C’est là que l’ingénierie joue un rôle fondamental. Certains vont la chercher auprès des agglomérations, lesquelles sont dotées d’agences de développement ou d’urbanisme, mais cette démarche a l’inconvénient de renvoyer le plus souvent à une vision urbaine du développement du territoire rural. D’autres attendent beaucoup du renforcement de l’ingénierie départementale, consacrée par la loi NOTRe portant nouvelle organisation territoriale de la République et à laquelle peuvent s’adosser les territoires ruraux depuis la disparition programmée de l’ATESAT, l’assistance technique fournie par l'État pour des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire.
Le monde rural se modernise et sait être inventif. Il s’agit donc, non seulement pour l’État, mais aussi pour l’ensemble des partenaires potentiels de ces territoires, de continuer à lui en donner les moyens. Nous sommes convaincus que les dispositions retenues sont une première réponse et qu’elles vont dans le bon sens. C’est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, nous voterons les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à associer à mon propos mon collègue de l’Ardèche Mathieu Darnaud, empêché, qui devait intervenir dans cette discussion générale.
En examinant les crédits de la mission « Politique des territoires » prévus pour 2016, on s’étonne d’abord de l’éclatement de la politique d’aménagement du territoire entre trente programmes, eux-mêmes disséminés entre quatorze missions du projet de loi de finances. L’existence de deux comités interministériels distincts, consacrés l’un aux ruralités, l’autre aux villes, illustre le fait que la démarche d’unification née de la création du Commissariat général à l’égalité des territoires est loin d’être aboutie.
Ne disposant que de peu de temps, je concentrerai mon intervention sur le programme 112, « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire », qui concerne notamment les territoires ruraux, éternels parents pauvres de la politique d’aménagement du territoire, où vivent des citoyens qui peinent à se faire entendre.
Monsieur le ministre, on observe que si des dispositifs pertinents existent aujourd’hui pour favoriser l’attractivité de ces territoires, l’insuffisance des moyens les prive d’efficacité. Ainsi de la montagne, qui n’a plus de ligne budgétaire dédiée, des centres-bourgs, qui sont menacés par le déclin démographique et par les dernières réformes, liées à la loi NOTRe ou au nouveau découpage des cantons, ou encore des communes qui, touchées par le phénomène de périurbanisation, voient s’accroître les demandes de services et d’équipements de la part de leur population.
J’aimerais pouvoir faire preuve d’enthousiasme devant l’expérimentation conduite par le CGET, en lien avec l’Agence nationale de l’habitat, sur la base des projets des cinquante-quatre communes sélectionnées – sur plus de 300 éligibles – en matière de logements sociaux, de soutien à l’habitat privé et d’actions de revitalisation menées dans les centres-bourgs, mais, sur l’enveloppe initialement prévue lors de l’appel à projets lancé en juin 2014, seulement 6 millions d’euros de crédits de paiement sont débloqués.
De plus, est-il réaliste d’espérer faire « rebondir » durablement ces communes sans en développer le dynamisme économique ? Comment expliquer que le budget du Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, le FISAC, dont les crédits, je vous l’accorde, sont inscrits dans une autre mission budgétaire, soit tombé à 15 millions d’euros en autorisations d’engagement dans ce projet de budget pour 2016 ? Il était en effet de plus de 19 millions d’euros en 2015, et de 40 millions d’euros en 2012.
Concernant les déserts médicaux, monsieur le ministre, nous avons entendu votre collègue Marisol Touraine promettre l’ouverture d’un millier de maisons de santé d’ici à 2017. Nous constatons cependant que ce projet de loi de finances ne mentionne que 2 millions d’euros de crédits de paiement, qui serviront à couvrir des engagements anciens.
J’en viens au numérique : il s’agit d’une dimension incontournable de la politique des territoires, tant un piètre accès à internet, dans les territoires enclavés, aggrave encore les inégalités entre les citoyens.
Certes, un effort notable est réalisé en la matière : 188 millions d’euros d’autorisations d’engagement viennent abonder le plan « France très haut débit » et s’ajouter aux moyens importants votés en 2014. Néanmoins, comme le rappelait notre collègue Pointereau dans son rapport pour avis, le traitement des dossiers déposés par les collectivités est trop lent, deux ans séparant souvent l’enregistrement de la demande de la prise de décision, ce qui oblige les collectivités à des décaissements importants. Même le Fonds d’amortissement des charges d’électrification, le FACÉ, est battu : ses délais ne sont que de six ou sept mois !
Or le très haut débit représente non seulement un lien offrant aux habitants des zones rurales les mêmes capacités de communiquer que celles dont disposent leurs concitoyens urbains, mais aussi une chance incontournable pour développer le travail à domicile et aider nos PME à tirer leur épingle du jeu dans la mondialisation.
M. Labbé – j’espère qu’il se rend au Bourget à vélo ! – se désole d’une prétendue multiplication des zones d’activités en milieu rural, mais cela relève d’une vision urbaine et idéologique. Nous, élus ruraux, savons protéger nos terres agricoles tout en essayant de développer les autres activités économiques.
Le Président de la République a annoncé le 14 septembre dernier, à Vesoul, la création d’un fonds doté de 1 milliard d’euros, destiné à soutenir l’investissement des communes et des EPCI. Le moins que l’on puisse dire est qu’un grand flou entoure cette annonce quelque peu miraculeuse…
Une part substantielle des ressources de ce fonds provient d’un recyclage des crédits de la dotation d'équipement des territoires ruraux.
Pour l’ensemble de ces raisons, je voterai contre l’adoption des crédits de la mission « Politique des territoires ».
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-François Longeot applaudit également.
Applaudissements sur les travées de l'UDI -UC.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Politique des territoires », composée des trois programmes « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire », « Politique de la ville » et « Interventions territoriales de l’État », constitue un outil d’intervention en faveur de l’ensemble de nos territoires.
Une approche globale de cette mission budgétaire nous permet de tenir compte des disparités entre des zones urbaines, périurbaines ou touristiques concentrant une part croissante de la population et certaines zones de montagne ou rurales isolées et en voie de dépeuplement.
Tous ces territoires, malgré leur diversité, sont confrontées à certaines problématiques communes, comme le logement, l’emploi, les transports, l’accès aux services publics de proximité, le très haut débit, la téléphonie mobile, le développement économique, l’égal accès aux soins et, enfin, la mise en réseau des territoires, depuis les métropoles jusqu’aux villes moyennes, aux petits bourgs et aux zones rurales environnantes.
C’est pourquoi il me paraît essentiel et urgent de pouvoir disposer des moyens nécessaires pour mettre en œuvre une politique nationale volontariste en matière d’aménagement du territoire, afin de permettre un développement territorial équilibré et d’éviter que le déséquilibre existant déjà entre ces zones rurales et urbaines ne se transforme en une fracture irrémédiable.
Comme en témoignent les différents domaines que j’ai cités, le maître-mot, en matière d’aménagement du territoire, est bien celui de transversalité. Tous les ministères, ou presque, ont une part active à prendre dans cette politique.
Malheureusement, les crédits de la mission budgétaire dont nous débattons aujourd’hui sont bien maigres en regard des enjeux et des sommes à mettre en œuvre. Ils s’élèvent pour 2016 à 674 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 718 millions d’euros en crédits de paiement, soit une baisse, respectivement, de 2, 75 % et de 3, 75 %.
Pourtant, le document de politique transversale d’aménagement du territoire présente 5, 38 milliards d’euros de crédits au total, répartis entre trente programmes relevant de quatorze missions.
Dans ces conditions, comment apprécier réellement l’effort budgétaire réalisé pour l’aménagement du territoire ? Je le dis, comme d’autres l’ont fait avant moi aujourd’hui et les années précédentes, cette mission budgétaire n’aura de sens que lorsqu’elle regroupera un maximum de crédits. C’est aussi une question de sincérité et de priorités.
La mission « Politique des territoires » ne concentre, au final, que 13 % des crédits destinés à l’aménagement du territoire. Si l’on observe l’évolution de ces crédits globaux, c’est une baisse de 9, 73 % qu’il faut noter pour cette politique, si essentielle pour l’équilibre et le développement territoriaux. Cette baisse n’est pas acceptable. Elle l’est d’autant moins que nos territoires souffrent également des autres mesures prises par le Gouvernement : diminution drastique des dotations aux collectivités locales, transfert de compétences sans compensation financière, évolution du paysage institutionnel.
Tous ces changements ont des conséquences sur nos territoires. Les élus locaux, qui sont les premiers maillons de l’animation des territoires, qui sont finalement les meilleurs acteurs de l’aménagement du territoire, ne comprennent plus quel cap leur est fixé – leur est imposé, devrais-je dire. Monsieur le ministre, au-delà des considérations purement budgétaires, ne négligez pas les élus et leur implication.
J’aborderai maintenant quelques thèmes qui me tiennent particulièrement à cœur, à commencer par celui de la mobilité, sous toutes ses formes : mobilité physique, notamment avec la problématique des trains d’équilibre du territoire, et mobilité des idées, avec la téléphonie mobile et le développement du très haut débit.
Les conclusions du rapport Duron sur l’avenir des trains d’équilibre du territoire ne sont pas pour nous rassurer. Les secteurs les plus ruraux pâtiront encore des décisions prises.
On verra ! J’espère me tromper, mais j’en doute.
Si le constat sur la situation de ces lignes de train est sans appel, les réponses proposées ne conviennent pas. Faute d’entretien, l’État va limiter les services aux usagers et, demain, le même État dira que les trains d’équilibre du territoire ne sont pas assez fréquentés et supprimera encore des lignes. La baisse de qualité de nos services publics provoque immanquablement une disparition de ceux-ci en milieu rural, comme cela a été le cas pour La Poste.
Par ailleurs, derrière ces questions d’aménagement du territoire, il y a aussi des enjeux industriels. Des entreprises comme Alstom souffrent aussi des décisions prises par l’État et la SNCF. L’absence de renouvellement du matériel pourrait entraîner un démantèlement de ce fleuron de notre industrie, avec pour conséquence une perte de nos savoir-faire techniques et de nos emplois.
En matière de communications, l’accès à la téléphonie mobile, marqué par d’importantes inégalités, constitue toujours, en 2015, un grave problème. Les difficultés sont encore plus flagrantes en ce qui concerne l’accès au très haut débit pour tous.
Aujourd’hui encore, trop de communes sont en zones blanches. Ces communes, situées en zones rurales ou de montagne, ne disposent pas d’une couverture numérique digne de ce nom.
En effet, pas assez peuplées, ces zones blanches présentent peu d’intérêt pour les grands opérateurs. Le coût de l’installation du très haut débit étant très élevé en zone rurale, les programmes d’équipement actuels privilégient très majoritairement les zones offrant un retour sur investissement. Heureusement, les collectivités locales, tels les départements, viennent pallier l’absence d’investissement des opérateurs.
J’en viens à la question des déserts médicaux.
Vous le savez, j’ai eu la chance d’être rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire pour le projet de loi de modernisation de notre système de santé. Les propositions que nous avons formulées étaient fortes, mais mesurées. Elles s’inscrivaient dans la droite ligne du rapport d’information réalisé par Hervé Maurey quelques années auparavant.
Les déserts médicaux progressent. La densité médicale départementale moyenne, toutes spécialités confondues, diminue : elle est passée de 275, 7 médecins en activité régulière pour 100 000 habitants au 1er janvier 2007 à 266, 4 au 1er janvier 2015. Aujourd'hui, 3 millions de Français vivent dans un désert médical, et les prévisions n’ont rien pour nous rassurer. En effet, la demande de soins augmente avec le vieillissement de la population et les maladies chroniques. La démographie médicale devrait ainsi connaître un creux dans les dix prochaines années, sachant que 26, 4 % des médecins ont plus de soixante ans.
Même si nos propositions pour favoriser l’installation des médecins n’ont pas été retenues, je reste convaincu qu’elles constitueraient de bonnes solutions pour remédier à ces difficultés.
D’autres voies peuvent nous permettre de progresser : le développement de la télémédecine et de la délégation de soins pourrait également être accéléré.
En conclusion, compte tenu de la déception que nous ne pouvons qu’éprouver à l’examen des crédits de cette mission, le groupe UDI-UC suivra les avis de la commission des finances et de celle de l’aménagement du territoire et votera contre.
Applaudissements sur les travées de l'UDI -UC, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’égalité des territoires au sein de l’État est essentielle. Il y va de l’unité de notre République, laquelle est, nous ne le répéterons jamais assez, une et indivisible.
Il s’agit de renforcer cette égalité et de lutter encore et toujours contre la dichotomie urbain-rural, contre les fractures non seulement territoriales, mais également économiques, sociales et numériques dont souffre notre pays depuis de longues années.
C’est notamment le rôle du Commissariat général à l’égalité des territoires, dont je salue la création au mois de mars 2014 et qui participe au processus de désenclavement et de développement des territoires ruraux.
Certes, cela a été souligné, les crédits alloués à la mission « Politique des territoires », notamment aux programmes 112 et 162, baissent par rapport à l’année dernière. Néanmoins, comme ce fut le cas pour la loi de finances de 2015, la baisse de ces crédits ne fait que refléter, en partie, la nécessité affirmée et assumée, de la part de l’État, de maîtriser les dépenses et de redresser les comptes publics.
M. Charles Revet s’exclame.
Je souhaite, en particulier, exprimer ici ma satisfaction au regard des actions menées par le Gouvernement en faveur de l’égalité des territoires. Les assises de la ruralité et les deux comités interministériels aux ruralités ont conduit à des annonces sans précédent en faveur des territoires ruraux, apportant plus de cohérence et de lisibilité à l’action du Gouvernement en la matière. Je fais notamment référence aux 3 milliards d’euros engagés pour le déploiement du haut débit : quatre-vingt-sept départements sont déjà concernés par le plan « France très haut débit » et tous le seront d’ici à la fin de l’année 2016.
Il faut poursuivre dans cette voie, car nous savons tous que l’accès au numérique est un élément clef de l’égalité des territoires. Nous nous devons de répondre aux préoccupations et aux inquiétudes des Français dans ce domaine, ainsi qu’à celles des élus locaux.
Il en est de même de la couverture des zones blanches en matière de téléphonie mobile. Je sais que le programme de résorption de ces zones se poursuit et que le Gouvernement s’est engagé à couvrir en 3G l’ensemble des 3 600 bourgs-centres d’ici à la fin de l’année 2017. Je soutiens pleinement cette initiative, qui était indispensable.
D’autres actions ont été mises en œuvre pour lutter contre les inégalités territoriales. Afin de favoriser l’accès aux soins, 200 maisons de santé supplémentaires seront créées d’ici à la fin de l’année 2015. En matière d’accès aux différents services publics, 1 000 maisons de services au public seront en fonction d’ici à la fin de l’année 2016. Près de 400 existent déjà, et je salue le partenariat conclu avec La Poste, que nous a présenté le président-directeur général de cette entreprise au cours de son audition, le 3 novembre dernier, et qui permet d’accélérer le déploiement de ces maisons de services au public, en vue d’atteindre l’objectif de 1 000.
L’État doit garantir l’égalité d’accès aux services pour tous ses citoyens sur tout le territoire, et il remplit là sa mission. Dans ce contexte, monsieur le ministre, pouvez-vous nous confirmer que l’objectif de la mise en service de 1 000 maisons pluridisciplinaires de santé sera atteint d’ici à 2017 ?
Il faut continuer à soutenir nos territoires ruraux dans leur diversité, lutter contre le sentiment d’abandon et de déclassement. Il est essentiel de poursuivre dans cette voie. Il faut travailler sans relâche pour instaurer toujours plus de justice, de simplification, de concertation et de connexion entre les différents territoires.
Comme l’a rappelé Mme Pinel, il faut « remettre la République dans les territoires, dans tous les territoires ». Transformons ces paroles en actes, redynamisons nos territoires ruraux, car, pour reprendre les mots du Président de la République, « l’égalité, ce n’est pas seulement celle des citoyens, c’est aussi celle des territoires ». Nous voterons ces crédits.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, plus de dix ans ont passé depuis la mise en œuvre de la loi Borloo. Près de 9 milliards d’euros ont été investis, générant le triple de travaux, 340 000 logements ont été rénovés, 141 000 ont été construits. De nombreux quartiers ont changé de visage et beaucoup d’habitants s’en trouvent mieux.
Cependant, les chiffres de l’Observatoire national des zones urbaines sensibles dessinent toujours un paysage sombre : une pauvreté trois fois plus élevée qu’ailleurs, un taux de chômage de près de 25 %, toutes générations confondues, une hausse du taux d’inactivité des femmes, quatre fois plus d’illettrés chez les 18-29 ans que dans le reste du pays et un an de retard scolaire en moyenne pour les enfants admis en sixième.
Ces politiques publiques ont été concentrées sur l’urbanisme – c’était une nécessité – et sur les questions sociales, mais en sous-estimant la problématique de l’intégration et celle des flux migratoires. La progression de l’islam radical a été ignorée, voire niée dans certains quartiers.
Plus que jamais, à la suite des attentats barbares du 13 novembre dernier et eu égard au risque que de tels événements se reproduisent, la politique de la ville est dans le collimateur. Elle ne pourra plus, cette fois, servir de formule magique ; il en a été ainsi, je vous l’accorde, pour tous les gouvernements au cours des quatre décennies écoulées. Sur le plan budgétaire, comment expliquer un tel décalage entre l’importance des moyens et la minceur des résultats obtenus ?
Dans le cadre de votre réforme de la politique de la ville, monsieur le ministre, 1 500 quartiers ont été reconnus prioritaires, car identifiés comme étant les plus pauvres du territoire français, avec un taux de chômage important, notamment pour les plus jeunes, et un grand nombre d’habitants peu ou pas qualifiés. Plus que jamais, il faut donc développer, renforcer les dispositifs favorisant la qualification, l’insertion professionnelle et la création d’entreprises.
Le 20 octobre 2015, le Président de la République a lancé l’Agence France Entrepreneur, qui assure la coordination et le guichet unique de tous les grands réseaux d’accompagnement de l’entreprenariat. C’est cette agence qui tiendra les cordons de la bourse : 3, 5 millions d’euros sont annoncés pour 2016. Toutefois, on peut légitimement craindre que ces crédits, si tant est qu’ils soient bien affectés à cette nouvelle agence, ne soient pas suffisants.
S’agissant du dispositif relatif aux zones franches urbaines, reconduit à compter du 1er janvier 2015 jusqu’au 31 décembre 2020, il est a priori plus favorable que le précédent, notamment parce qu’il conditionne le bénéfice de l’exonération d’impôt sur les bénéfices au respect d’une clause locale d’embauche. Nous dresserons un premier bilan dans un an.
J’appelle néanmoins votre attention sur le fait que ces dispositifs n’auront d’impact sur le taux de chômage des habitants de ces quartiers que si une reprise économique se dessine à l’échelle nationale, sauf à espérer le développement d’une économie locale, innovante et solidaire, propre à ces quartiers et moins dépendante des cycles économiques nationaux.
Enfin, j’évoquerai le nouveau plan de rénovation urbaine, qui repose sur la contribution d’Action Logement, à hauteur de 3, 2 milliards d’euros de subventions, outre qu’un prêt de la Caisse des dépôts et consignations d’un montant de 1 milliard d’euros est nécessaire pour sécuriser sa mise en œuvre. Le dispositif semble donc déjà sous tension, avant même d’avoir été instauré.
Pourtant, les budgets de l’ANRU devraient être sanctuarisés, pour ne pas nourrir les inquiétudes à l’échelon local. En effet, les aides attribuées aux maîtres d’ouvrage publics – établissements publics de coopération intercommunale et communes – tiennent compte de leur situation financière, de leur effort fiscal et de la richesse de leur territoire. Il en résulte un classement des établissements publics de coopération intercommunale en six catégories, avec un taux maximal de subvention variant entre 10 % et 70 % de l’assiette.
Il va sans dire que ces nouvelles règles de financement risquent de réduire fortement l’ambition des projets de rénovation urbaine. Il pourrait en aller de même pour la reconstitution de l’offre de logements démolis, compte tenu de l’exigence de reconstruire en zones tendues des logements sociaux en dehors des quartiers prioritaires, ce qui pose immanquablement la question de l’arbitrage entre la priorité donnée à l’offre nouvelle, et donc au rattrapage au titre de la loi SRU, et la compensation des démolitions, qui ne seront plus financées qu’à 70 %, contre 100 % auparavant.
Nous attendons aujourd’hui davantage d’explications, monsieur le ministre, mais avant tout des décisions budgétaires en faveur de la rénovation urbaine inscrites dans la durée.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur certaines travées de l’UDI -UC.
Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, je centrerai mon propos sur deux aspects de cette mission : les évolutions de la politique de la ville et la traduction budgétaire de cette grande ambition nationale. Je terminerai en formulant quelques remarques sur l’engagement du nouveau programme national pour la rénovation urbaine.
Le volet relatif à la ville de la mission « Politique des territoires » traduit la haute ambition du Président de la République de lutter contre la pauvreté et le phénomène de désocialisation constaté dans nombre de nos quartiers.
Il faut se garder de tout raccourci réducteur, mais l’actualité douloureuse nous rappelle, si besoin était, combien cette problématique est au cœur des enjeux de cohésion sociale, à quel point les réponses et les solutions que nous pouvons apporter conditionnent notre capacité collective à donner sens à ce que nous avons en commun, à la République.
Je veux ici souligner la pertinence des choix politiques et méthodologiques qui ont été faits par les ministres de la ville successifs, François Lamy, Myriam El Khomri et Patrick Kanner, pour cibler les 1 500 quartiers de la nouvelle politique de la ville et pour améliorer l’efficacité des politiques de renouvellement urbain dans le cadre du nouveau PNRU, lequel concerne 466 quartiers, 216 d’intérêt national et 250 d’intérêt régional, en impliquant les habitants eux-mêmes à travers les conseils citoyens.
Pour la première fois dans notre pays, des quartiers situés dans des territoires ruraux relèvent de la politique nationale de la ville. Certains d’entre eux accèdent aussi au nouveau PNRU. C’est ainsi le cas du Grand Garros, à Auch. C’est une reconnaissance qui mérite d’être soulignée et un progrès important en matière de solidarité nationale !
Dans un contexte général marqué par la nécessité de contribuer au rétablissement des comptes publics, le programme 147 voit ses 438 millions d’euros de crédits préservés, la fin des entrées dans le dispositif des zones franches urbaines expliquant de manière purement mécanique la baisse de 2, 6 %. L’action n° 1 de ce programme, Actions territorialisées et dispositifs spécifiques de la politique de la ville, en atteste, puisque ses crédits sont en augmentation de 15 millions d’euros par rapport à 2015. Les crédits pour les nouveaux contrats de ville s’élèvent à 197 millions d’euros, ceux pour les projets de réussite éducative et les dispositifs adultes-relais à 151 millions d’euros.
Les 7 000 associations et l’action citoyenne dans ces quartiers seront soutenues grâce à 171 millions d’euros de crédits tous ministères confondus, dont 77 millions d’euros pour le seul ministère de la ville.
Pour prendre l’exacte mesure de l’effort budgétaire national en faveur de ces quartiers, il faut ajouter aux 367 millions d’euros de mesures d’allégement fiscal, en hausse par rapport à 2015, les 4, 1 milliards d’euros de crédits de droit commun qui permettront d’améliorer la vie quotidienne des habitants de ces quartiers dans les domaines de l’éducation, de la formation et de l’accès à l’emploi, de la prévention et de la sécurité, de l’accès à la vie associative et culturelle, du soutien social, de la santé, de la lutte pour l’égalité et contre les discriminations.
Enfin, 99 millions d’euros seront consacrés au développement économique des quartiers, par le biais notamment de l’Agence France Entrepreneur, qui sera mise en place en 2016.
L’EPARECA, l’établissement public national d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux, poursuivra son travail remarquable de reconquête commerciale de ces quartiers.
Au total, le budget de la politique de la ville augmente, traduisant ainsi concrètement la priorité que celle-ci constitue pour le Gouvernement.
Pour terminer, je dirai quelques mots du déploiement du nouveau programme national pour la rénovation urbaine.
L’enjeu financier est considérable, les crédits du PNRU s’élevant à 6, 4 milliards d’euros : 5, 3 milliards d’euros pour les quartiers d’intérêt national et 1, 1 milliard d’euros pour les quartiers d’intérêt régional.
Les enseignements tirés des précédents PNRU amènent à s’interroger sur l’efficience de l’emploi des fonds. Nul doute que les stratégies de peuplement, a fortiori selon le périmètre non plus des seuls quartiers, mais des territoires agglomérés, aideront à atteindre l’objectif de mixité sociale, ce qui garantira sur la longue durée l’efficacité globale de l’ensemble du dispositif.
La bonne mise en œuvre du nouveau PNRU sera aussi conditionnée par les capacités budgétaires des partenaires financeurs. La technique du scoring permettra à l’ANRU de tenir compte des situations diverses des territoires, mais je regrette d’avoir à constater que la baisse de la DGF affectera immanquablement les possibilités de financement des communes et des EPCI concernés. La réduction des subventions accordées pour les démolitions à 70 % au maximum du montant des dépenses exposées à ce titre suscite elle aussi des interrogations.
Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, grâce aux contrats de ville, au PNRU et au nouveau PNRU, notre pays, au travers de l’action du Gouvernement et du ministre, dont je salue l’engagement, s’est donné les moyens budgétaires et méthodologiques d’améliorer la vie des habitants des quartiers défavorisés.
Le chemin pris est le bon ; il sera long, et nous n’en sommes qu’au début ! Je vous propose d’adopter les crédits du volet relatif à la ville de la mission « Politique des territoires ».
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « Politique des territoires » prend une résonance toute particulière dans ce contexte d’unité nationale, tant au sein de nos territoires ruraux que dans nos quartiers dits « sensibles » et nos villes traditionnelles.
En préambule, je tiens à souligner qu’il n’y a pas d’un côté les villes et de l’autre le monde rural. Une approche catégorielle de ces territoires, qui ont chacun leurs atouts et leurs problèmes, manquerait forcément de cohérence. Les liens existant entre eux doivent être maintenus : je pense en particulier aux déplacements réguliers de nos concitoyens entre ces différents espaces, à leurs aspirations et leurs attentes communes en matière de services publics, d’emploi, de sécurité ou encore de culture. Les ruraux ont besoin des villes et de leurs services de pointe, les citadins ont besoin du monde rural pour s’oxygéner.
Ce qui rapproche également ruraux et citadins aujourd’hui, c’est, malheureusement, la désillusion.
Il y a la désillusion que suscite un budget en baisse de 3, 8 % par rapport à 2015. Il ne permettra pas de relever les défis immenses de la politique des territoires.
Il y a la désillusion liée à la quasi-disparition du FISAC, qui permet d’aider les petits commerçants, en particulier en milieu rural, tandis que l’on a doublé la taxe sur les surfaces commerciales, la TASCOM. L’insuffisance des crédits affectés au dispositif de revitalisation des centres-bourgs est un autre motif de déception : une enveloppe de 6 millions d’euros de crédits de paiement a été débloquée, alors que 214 millions d’euros étaient prévus.
Il y a la désillusion provoquée par la réforme territoriale, qui était censée apporter une simplification de l’architecture de la France. Au lieu de cela, les bassins de vie se retrouvent enlisés, en matière tant de répartition des compétences que d’organisation, et le nombre d’élus dépasse l’entendement.
Il y a la désillusion engendrée par la diminution, d’année en année, des crédits du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire, outil pourtant indispensable au financement des grands projets structurants.
La déception est encore accrue par la décision du Gouvernement de ne pas reconduire le dispositif des pôles d’excellence rurale, les PER, dont la mise en œuvre avait été décidée à l’occasion du comité interministériel d’aménagement et de développement des territoires du 14 octobre 2005. À cet égard, je ne peux que m’associer aux propos de M. le rapporteur pour avis Pointereau, qui a souligné que « les financements des PER exercent un fort effet de levier comme accélérateurs de projets et sont structurants pour la dynamisation des espaces ruraux ». Cette décision gouvernementale est d’autant plus surprenante qu’elle intervient avant même que l’évaluation du second cycle de PER n’ait été effectuée !
Je ne saurais manquer d’évoquer le désenclavement, dimension structurante de l’aménagement du territoire. Il passe par le développement de l’accès à internet et la couverture en téléphonie mobile, bien sûr, mais aussi par l’amélioration du réseau routier. Or l’écotaxe, qui devait alimenter l’AFITF, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, a été lamentablement supprimée…
Enfin, je tiens à souligner la disparition du fonds de 1 milliard d’euros en faveur de la ruralité dont le Président de la République, affublé de douze ministres
Murmures sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.
, avait annoncé la création lors du comité interministériel qui s’est tenu à Vesoul, dans mon département. On n’en trouve pas la trace dans le présent projet de budget. Cette annonce était flamboyante et elle a bénéficié d’un écho médiatique particulièrement bien orchestré. À mon grand regret, le désenchantement, là aussi, est à la hauteur de l’agitation médiatique. Cela est grave, même si d’autres gouvernements ont déjà recouru, dans le passé, à ce type de communication. Il faut cesser de mentir au peuple
Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.
, ou alors ne pas s’étonner ensuite qu’il fasse des choix dérangeants lors des élections.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le ministre, qu’est devenu ce plan ? S’il doit exister un jour, qu’est-ce qui le différenciera de la dotation d’équipement des territoires ruraux ? Quelle coordination envisagez-vous avec le Fonds national d’aménagement et de développement du territoire ou avec les contrats de plan État-région ?
Nous avons besoin de cohérence. L’aménagement du territoire, comme le développement durable, n’est pas qu’une question budgétaire. C’est un sujet interministériel. Lorsqu’il n’y a ni ligne de conduite ni crédits suffisants, la politique d’aménagement du territoire ne peut être de qualité. Le groupe Les Républicains votera contre les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser Mme Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité, qui ne pouvait malheureusement être présente aujourd'hui. Pour autant, je m’emploierai à répondre au mieux aux questions, importantes, qui ont été posées concernant la mission « Politique des territoires » dans son ensemble.
J’y reviendrai plus loin, mais je tiens d’ores et déjà à souligner combien ce gouvernement est attaché à la défense des intérêts de tous les territoires et de tous leurs habitants. Nous n’appréhendons pas l’aménagement du territoire en opposant les territoires les uns aux autres. Chaque territoire a sa place dans le concert national. L’égalité des territoires, c’est ce qui, précisément, permet à chacun d’entre eux, en fonction de ses ressources et de ses potentialités et en conscience de ses freins et de ses handicaps, de choisir sa trajectoire et d’accomplir son développement, pour ses habitants.
C’est cette mise en capacité, cette mise en mouvement des territoires, dans le respect de leur diversité et de leur complémentarité, que le Gouvernement accompagne. Parmi nos territoires, nous soutenons plus particulièrement ceux que l’on dit fragiles, les zones de revitalisation rurale et les quartiers prioritaires de la politique de la ville.
La territorialisation de l’action publique est aussi un choix gouvernemental fort, qui traduit une conception singulière de l’aménagement du territoire : assurer l’égalité des territoires, c’est aussi, pour l’État, intervenir plus là où les besoins sont le plus importants. C’est là tout le sens de cette mission qui rassemble à la fois les crédits de la politique de la ville et ceux de l’aménagement du territoire.
Ainsi, les crédits du programme 112 « Impulsion et de coordination de la politique d’aménagement du territoire » s’élèvent à près de 192 millions d’euros. Les autorisations d’engagement sont quasiment stables et les crédits de paiement sont en baisse de 4 % par rapport à 2015.
Ce budget traduit les grandes priorités du Gouvernement en matière de soutien au développement des territoires.
Ainsi, les contrats de plan État-région concentrent 60 % des crédits du programme et représentent une enveloppe globale de 12 milliards d’euros d’ici à 2020, destinée à soutenir des investissements d’avenir dans nos territoires, pour favoriser la croissance, le développement, l’emploi et la mobilité, monsieur Longeot.
Dernier régime autorisé d’aide directe de l’État aux entreprises, la prime d’aménagement du territoire voit ses crédits stabilisés à 25 millions d’euros. La réforme mise en œuvre l’année dernière a permis de rendre cette aide plus accessible aux PME, grâce notamment à l’abaissement des seuils d’éligibilité. En 2015, ce sont, à ce jour, vingt-cinq entreprises qui ont été subventionnées, pour un montant total de 14 millions d’euros, ce qui a permis la création de 1 730 emplois.
Le Fonds national d’aménagement et de développement du territoire, le FNADT, qui représente 12 % des crédits, permet quant à lui le financement des pôles d’excellence rurale, des maisons de santé pluridisciplinaires ou encore du programme de revitalisation des centres-bourgs.
Bien évidemment, les crédits de l’État en faveur de l’aménagement du territoire et des ruralités ne se résument pas à ce seul programme. De nombreuses autres mesures participent à cette politique, pour un montant total d’environ 5, 5 milliards d’euros, sans compter les aides fiscales. Cela devrait rassurer M. Pointereau.
C’est notamment le cas des soixante-sept mesures adoptées dans le cadre des deux comités interministériels aux ruralités qui se sont tenus les 13 mars et 14 septembre derniers et qui touchent aux champs du logement, du numérique, de la santé, de l’éducation, de l’agriculture, sans oublier l’hyper-ruralité.
Aujourd’hui, la plupart de ces mesures sont en cours de déploiement. Plusieurs sont déjà opérationnelles. Au total, elles représentent plus de 1, 5 milliard d’euros.
Parmi les principales figurent la création de 1 000 maisons de services au public d’ici à la fin de 2016, grâce à la création d’un fonds de financement par les principaux opérateurs et au partenariat engagé avec La Poste, le déploiement de 1 000 maisons de santé pluridisciplinaires prévu d’ici à 2017, dont 708 sont aujourd’hui en service, contre 170 en 2012. En matière de démographie médicale, nous subissons les conséquences de la fixation du numerus clausus a un niveau extrêmement bas voilà quelques années, sans tenir compte des besoins à venir de notre population. La médecine ne peut pas être la variable d’ajustement de l’équilibre des comptes de la sécurité sociale.
J’évoquerai également la résorption des zones blanches de téléphonie mobile d’ici à la fin de 2016 et la couverture de 3 600 centres-bourgs en 3G d’ici à la mi-2017, grâce au renforcement des obligations des opérateurs, monsieur Abate, le déploiement du plan « France très haut débit », avec notamment le recours aux technologies alternatives pour les territoires les plus enclavés. Mme Tocqueville, MM. Longeot et Bertrand se sont exprimés sur ce point. En ma qualité de président du syndicat mixte du Nord-Pas-de-Calais pour le très haut débit, je viens de recevoir une lettre du Premier ministre m’indiquant qu’une subvention de 180 millions d’euros lui serait consacrée. §Cette aide de l’État permettra demain de desservir les plus de 700 000 foyers de la région qui n’ont pas encore accès au très haut débit.
J’évoquerai par ailleurs l’élargissement à 30 000 communes du bénéfice du prêt à taux zéro pour l’achat de logements anciens à réhabiliter, le déblocage d’une enveloppe de 300 millions d’euros pour soutenir les projets de revitalisation des centres-bourgs, qui s’ajoute à l’augmentation de 200 millions d’euros des crédits de la DETR. Voilà qui répondra aux préoccupations exprimées par M. Jean-Claude Leroy. Le montant de 6 millions d’euros prévu pour l’appel à projets, monsieur Genest, ne concerne que la première des six années d’application du dispositif.
J’évoquerai enfin le soutien à l’ingénierie locale par la création d’un dispositif d’appui interministériel au développement et à l’expertise en espace rural – la mission AIDER –, animé par des agents des corps de l’inspection de l’État mis à disposition des préfets pour des missions pouvant aller jusqu’à deux ans. Il est vrai que le manque d’ingénierie en milieu rural est un handicap qu’il nous faut absolument combler, monsieur Leroy. La ruralité fait partie intégrante de l’ADN de notre République.
L’aménagement du territoire ne peut être dissocié du développement de celles de nos villes qui concentrent les populations les plus pauvres, puisque, je le rappelle, c’est désormais le seul et unique critère retenu dans le cadre de la nouvelle géographie prioritaire : un critère lisible, juste et objectif, qui traduit la conception qu’a ce gouvernement de l’égalité entre les territoires urbains, entre les villes, entre les quartiers de ces villes et entre les habitants de ces quartiers. Au travers de la détermination des poches urbaines de pauvreté, nous n’opposons pas les périphéries des villes à leurs centres anciens, nous n’opposons pas les grandes agglomérations aux petites villes en milieu rural, nous n’opposons pas l’habitat vertical, collectif, fait de tours et de barres, à l’habitat horizontal, individuel et dégradé, nous n’opposons pas l’Île-de-France aux autres régions ou la métropole aux outre-mer. En faisant le choix d’accompagner tous les quartiers en décrochage de notre pays, quels qu’ils soient et où qu’ils se trouvent, cette majorité et ce gouvernement assument pleinement une vision équitable et équilibrée de l’aménagement de notre territoire urbain, en faveur du renforcement de la cohésion nationale.
Je veux rassurer M. Daniel Raoul : près de 95 % des contrats de ville ont déjà été signés et j’espère que tous l’auront été d’ici à la fin de l’année 2017.
En ce qui concerne la pauvreté en milieu rural et le lien avec la politique de la ville, j’étais hier soir à Privas, chef-lieu de 8 300 habitants du département de l’Ardèche, dont le quartier Nouvel Horizon relève depuis cette année de la politique de la ville, tout comme le quartier du Grand Garros à Auch, monsieur Montaugé. Cela montre que la politique de la ville a su intégrer les territoires ruraux.
Le budget alloué au programme « Politique de la ville » augmentera, en 2016, de 4 %, hors poursuite de la baisse mécanique des exonérations en zones franches urbaines. Cette augmentation donne corps à la promesse d’égalité républicaine dans les territoires prioritaires.
Très concrètement, sur les 438 millions d’euros du budget de la politique de la ville, plus de 350 millions d’euros seront consacrés aux actions de terrain des associations dans les quartiers prioritaires, contre 337 millions d’euros en 2015 : nous avançons.
La première priorité du programme « Politique de la ville », c’est le renforcement de la présence des adultes et de ce qui contribue au lien social dans les quartiers. Dans le contexte que nous connaissons, cette priorité doit, plus que jamais, être réaffirmée : il faut occuper l’espace, y compris en soirée et le week-end, et soutenir le tissu social local ; conforter les acteurs de terrain dans la conduite de leurs actions de proximité, au plus près des besoins des habitants ; appuyer nos éducateurs, nos animateurs et nos médiateurs ; reconstruire une chaîne éducative allant de l’école à la cellule familiale, en passant par les acteurs de rue ; assurer, au travers de nos dispositifs, un accompagnement toujours plus individualisé, personnalisé, adapté aux différents besoins des habitants ; reconstruire un discours commun sur nos valeurs, sur la laïcité, ce qui passe par un vaste plan de formation des acteurs ; redonner des repères à une jeunesse qui désespère et décroche parfois ; enfin faire en sorte – c’est essentiel – que les habitants soient des acteurs à part entière des politiques publiques que nous conduisons pour eux.
Je tiens à le dire, tout cela constitue une réponse globale visant à prévenir la radicalisation, à côté de la réponse sécuritaire aujourd'hui déployée.
C’est pourquoi nous restaurons les crédits destinés aux associations des quartiers prioritaires, comme nous en avions pris l’engagement lors du comité interministériel à l’égalité et à la citoyenneté du 6 mars dernier. J’emploie à dessein le verbe « restaurer », parce qu’il s’agit des crédits qui avaient été supprimés, entre 2009 et 2012, par vos amis politiques, madame Estrosi Sassone.
Le forfait d’aide aux structures employeuses des adultes relais a été revalorisé de 5 % le 1er octobre dernier. Ces adultes-relais sont en effet des vigies citoyennes dans ces quartiers.
Le deuxième axe de ce programme, c’est la réussite de nos jeunes. Là aussi, les événements récents nous obligent. Ils nous rappellent la fragilité d’une partie de cette jeunesse et la nécessité d’assurer un accompagnement adapté et un suivi renforcé dès les premiers signes du décrochage, tout d’abord avec le programme de réussite éducative, qui s’adresse aux jeunes en risque de rupture scolaire, sociale et familiale. Nous renforcerons la présence d’équipes de réussite éducative dans tous les collèges des réseaux d’éducation prioritaire qui n’étaient pas couverts jusqu’à aujourd’hui, soit quarante-cinq sites supplémentaires.
Par ailleurs, 1 000 jeunes de plus seront accueillis dans les centres de l’établissement public d’insertion de la défense, l’EPIDE, destinés aux jeunes qui ont besoin et sont en demande de repères. Deux nouveaux centres seront ouverts en 2016 à Toulouse et à Nîmes. À cet égard, je remercie de leur soutien Mme Annie Guillemot, ainsi que MM. Daniel Raoul et Joël Labbé. M. Jean-Yves Le Drian procédera en outre, l’année prochaine, à la création de plusieurs centres de défense destinés à accueillir des jeunes désireux d’accomplir un service militaire volontaire, à l’instar du service militaire adapté outre-mer.
Nous devons également redonner confiance en leur avenir à ces jeunes qui butent dans leur parcours d’insertion. C’est le droit à la seconde chance, avec notamment les contrats starters, qui connaissent un véritable succès puisque, à la fin novembre, près de 12 800 contrats avaient été signés, l’objectif étant fixé à 13 000 à la fin de l’année 2015. Je rappelle que le chômage des jeunes a diminué en un an de 2, 7 %, ce qui est une bonne nouvelle dont nous pouvons tous nous réjouir.
Le troisième et dernier axe de notre action en matière de politique de la ville, c’est le développement économique des quartiers prioritaires. En effet, le meilleur moyen de lutter contre le chômage, c’est de miser sur le potentiel de ces territoires. Il faut « oser les banlieues » ! Un quartier qui se développe économiquement, c’est un quartier qui vit, qui s’anime, qui redevient attractif.
De nombreux outils déjà en place participent pleinement à la réalisation de cet objectif : les territoires entrepreneurs, les exonérations au bénéfice des petits commerces, l’intervention de la Caisse des dépôts et consignations, celle de l’EPARECA… Il y a quelques semaines, j’inaugurais ainsi le cinquantième centre commercial créé par l’EPARECA, à La Chapelle-Saint-Luc, près de Troyes.
Nous avons par ailleurs lancé l’Agence de développement économique des territoires « France Entrepreneur », qui rassemblera tous les acteurs, notamment la Caisse des dépôts et consignations et les régions, sous une même bannière, au bénéfice prioritairement des territoires fragiles. Il est en effet important de rendre nos dispositifs plus lisibles et plus visibles en la matière, pour faciliter la création d’entreprises, accompagner le développement des TPE et des PME. Cette agence, madame Estrosi Sassone, sera une structure légère, qui coordonnera les moyens de l’État et de la Caisse des dépôts et consignations en faveur de l’entrepreneuriat, pour un montant de 60 millions d’euros. Ce projet de loi de finances regroupe en un programme unique, le programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme », les différents crédits ministériels destinés aux réseaux d’accompagnement, dont 660 000 euros provenant du programme 147.
L’agence mobilisera aussi le programme d’investissements d’avenir à hauteur de 50 millions d’euros, pour investir dans des entreprises à potentiel réel de ces quartiers.
Cette dimension économique sera l’un des enjeux du nouveau programme national de renouvellement urbain. L’ANRU et ses partenaires engageront bien 6, 4 milliards d’euros, avec d’ailleurs un préfinancement de 1 milliard d’euros de la Caisse des dépôts et consignations pour accélérer la mise en œuvre des projets, l’objectif étant de susciter 20 milliards d’euros d’investissements. Je n’oublie pas que le plan Borloo avait permis d’engendrer 47 milliards d’euros d’investissements, mais le financement de l’ANRU n’était alors pas sécurisé ; nous avons dû l’assumer dès le début du présent quinquennat. Je sais, madame Estrosi Sassone, que vous appréciez l’intervention de l’ANRU à Nice.
Cet effort est tout à fait significatif et fait sens pour transformer le cadre de vie dans les quartiers, désenclaver ceux-ci, y rénover l’habitat et amener les entreprises qui créent des emplois.
M. Montaugé a évoqué la baisse de la DGF, qui peut affecter la capacité financière des communes. Protéger les communes les plus en difficulté est une préoccupation du Gouvernement. Si la participation des collectivités à l’effort de redressement des finances publiques est légitime, elle doit être juste et solidaire. À cet égard, je souligne que la dotation de solidarité urbaine a été augmentée de 180 millions d’euros depuis deux ans. Les moyens de la péréquation ont progressé de 40 % depuis 2012 et la dotation de la politique de la ville a été reconduite à hauteur de 100 millions d’euros. La péréquation, monsieur le sénateur, est un élément majeur de notre politique.
Monsieur Delcros, la proposition de loi visant à instaurer des contrats territoriaux de développement rural ne me semble pas constituer un outil adapté : un dispositif contractuel est forcément long et parfois complexe à mettre en œuvre, surtout sur un périmètre qui n’est pas clairement défini. Nous préférons mettre en place les mesures arrêtées lors des comités interministériels aux ruralités.
MM. Delcros et Leroy ont évoqué la réforme des zones de revitalisation rurale. Les principes de cette réforme sont la simplification, l’efficacité et la justice. Le classement sera ainsi établi à l’échelle intercommunale et les critères seront la faiblesse de densité de la population et celle du revenu par habitant. Nous avons consulté les associations d’élus ; cette réforme sera inscrite dans le projet de loi de finances rectificative pour 2015 et entrera en vigueur au 1er juillet 2017, pour tenir compte de l’évolution de la carte intercommunale.
Monsieur Delcros, le fonds de soutien à l’investissement local de 1 milliard d’euros souhaité par le Premier ministre comporte une enveloppe de 300 millions d’euros dédiée aux centres-bourgs.
Ces crédits sont rattachés à la mission « Relation avec les collectivités territoriales », comme d’ailleurs la plupart des dotations aux collectivités, par cohérence avec les autres dotations, mais aussi pour ne pas complexifier la gestion de ces crédits par les préfets en doublant les circuits de paiement. Les préfets seront chargés d’attribuer ces crédits à des projets qui leur seront présentés par les collectivités concernées.
Monsieur Genest, s’agissant du Fonds d’aide aux collectivités pour l’électrification rurale, le FACÉ, le Gouvernement reconduit pour 2016 sa structure et ses financements, à hauteur de 377 millions d’euros. Nous sommes particulièrement attachés à ce dispositif, dont l’utilité n’est pas mise en doute.
S’agissant des aides destinées à l’extension des réseaux, les difficultés que vous avez relevées étaient liées à des manques de personnel au sein de plusieurs agences. Il y a été remédié et le rythme normal de paiement des subventions va pouvoir reprendre.
Je répondrai enfin à Mmes Annie Guillemot et Dominique Estrosi Sassone, ainsi qu’à M. Franck Montaugé, à propos de la concentration des logements sociaux. La règle du nouveau programme national de renouvellement urbain, le NPNRU, c’est la reconstitution du parc social hors sites. Le comité interministériel du 6 mars l’a pleinement validée. Au-delà de 50 % de logements sociaux dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, la construction de tels logements sera limitée. L’application du taux de TVA de 5, 5 % pour l’accession sociale à la propriété devrait également favoriser la mixité sociale.
En dépit de l’accueil qui m’est parfois réservé, je veillerai toujours à faire appliquer l’article 55 de la loi SRU partout où il ne l’est pas : je le dis avec beaucoup de force et de vigueur.
Mme Annie Guillemot, rapporteur pour avis, applaudit
En résumé, l’ensemble de ces mesures visent à donner à tous les territoires, qu’ils soient urbains, périurbains ou ruraux, les moyens d’assurer leur propre développement et à garantir l’accès de leurs habitants aux principaux services publics. C’est la raison pour laquelle, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous propose d’adopter les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste et du RDSE.
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Politique des territoires », figurant à l’état B.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Politique des territoires
Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire
Dont titre 2
22 952 997
22 952 997
Interventions territoriales de l’État
Politique de la ville
Dont titre 2
20 830 219
20 830 219
L'amendement n° II-329, présenté par MM. Mézard et Requier, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire
dont titre 2
5 000 000
5 000 000
Interventions territoriales de l’État
Politique de la ville
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Jacques Mézard.
La conclusion de M. le ministre est excellente : il faut rétablir l’égalité. Mais, pour cela, encore faut-il ne pas la perturber…
Pour garantir le respect de la norme de dépense en valeur de l’État, un amendement du Gouvernement, adopté en première lecture à l’Assemblée nationale, a procédé à une minoration de 13 millions d’euros des autorisations d’engagement et des crédits de paiement de la mission « Politique des territoires ».
Cette minoration a été répartie entre le programme « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire » et le programme « Politique de la ville », à concurrence de 10 millions d’euros et de 3 millions d’euros respectivement. Pourtant, les crédits de paiement consacrés à la politique de la ville sont supérieurs de 72 % à ceux de l’aménagement du territoire, les premiers s’élevant à 438 millions d’euros pour 2016, les seconds à 254 millions d’euros.
Cette ponction, car c’est bien de cela qu’il s’agit, ne manquera pas d’avoir des conséquences néfastes sur des territoires ruraux déjà fragilisés et bénéficiant de politiques de l’État en faveur de la ruralité.
Nous souhaitons notamment attirer l’attention de notre assemblée sur l’incidence qu’aurait un coup de rabot de 10 millions d’euros sur le programme 112.
Très concrètement, 5 millions d’euros de prime à l’aménagement du territoire en moins, ce seraient 600 emplois menacés ou non créés dans les territoires ruraux, faute de cette aide au développement des PME. S’il y a un levier efficace pour soutenir l’activité économique dans les territoires ruraux, c’est bien la prime à l’aménagement du territoire !
Les projets d’investissement des collectivités territoriales conduits au travers du Fonds national d’aménagement et de développement des territoires, le FNADT, ou des contrats de plan État-région, les CPER, seraient également directement touchés, dans un contexte déjà contraint du fait de la baisse des dotations.
Afin de rétablir un juste équilibre de l’effort entre villes et campagnes, sans opposer les territoires les uns aux autres, le présent amendement prévoit de répartir la contribution à due proportion des budgets respectifs. Ainsi, il est proposé de procéder à un transfert de 5 millions d’euros du programme « Politique de la ville » vers le programme « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire ».
M. Daniel Raoul, rapporteur spécial. Pour ce qui me concerne, je suis très défavorable à cet amendement, qui vise à prélever 5 millions d’euros sur les crédits destinés à l’accompagnement, à l’éducation et à l’aide à la citoyenneté. Or ces actions sont prioritaires, et ce n’est pas sur cette ligne budgétaire qu’il faut opérer une telle ponction. Certes, chaque mission doit contribuer à l’effort de maîtrise de la dépense publique, mais il faut tout de même choisir ses cibles. Au regard des événements que nous connaissons, cet amendement me semble pour le moins inopportun, sinon irresponsable !
Protestations sur les travées du RDSE.
Mesurez vos propos, il y a des limites ! Ce qui est irresponsable, c’est de tuer les territoires ruraux !
Cet amendement vise à transférer 5 millions d’euros du programme 147 au programme 112, plus précisément à l’action Attractivité économique et compétitivité des territoires.
Bien entendu, à titre personnel, je suis toujours favorable à un renforcement des crédits destinés à la ruralité. Cependant, la commission des finances ayant proposé de rejeter les crédits de cette mission, l’amendement n’aura plus d’objet si cet avis est suivi par le Sénat.
Quoi qu’il en soit, la commission des finances souhaiterait entendre l’avis du Gouvernement.
Monsieur Mézard, comme je l’ai déjà indiqué dans mon propos liminaire, Mme Pinel et moi-même n’entendons nullement opposer les territoires les uns aux autres, en particulier les zones rurales aux zones urbaines.
Nous souhaitons faire en sorte de dépasser les concurrences territoriales, en essayant de promouvoir l’équité dans l’aménagement du territoire. Nous ne sommes donc pas favorables à un renforcement de l’un des axes d’intervention de la mission « Politique des territoires » au détriment de l’autre. Le Gouvernement a d’ailleurs créé le Commissariat général à l’égalité des territoires pour renforcer la cohérence transversale des politiques.
L’action n° 1 du programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire », visée par votre amendement, comprend majoritairement les crédits des CPER. Or une très forte synergie existe entre ces derniers et les contrats de ville.
Par ailleurs, sous l’égide du CGET, des contrats de réciprocité ville-campagne sont expérimentés, car il s’agit de valoriser les complémentarités et les multiples liens entre les territoires, qu’ils soient urbains, ruraux, périurbains, montagnards ou littoraux. Ces contrats de réciprocité doivent aboutir à la mise en place d’actions caractérisées par une équivalence entre les échanges, l’équilibre n’étant pas nécessairement financier.
Enfin, l’adoption de cet amendement aurait pour effet de réduire de près d’un tiers les crédits inscrits au projet de loi de finances pour 2016 au titre du comité interministériel à l’égalité et à la citoyenneté et destinés aux associations de proximité œuvrant dans les quartiers populaires. Or ces crédits, qui s’élèvent à 14 millions d’euros, sont essentiels, notamment dans les temps troublés que nous connaissons.
Pour l’ensemble de ces raisons, je vous demande, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, j’en demanderai le rejet.
Je m’exprimerai ici à titre personnel.
Les crédits consacrés à l’aménagement du territoire sont en baisse continue depuis maintenant quatre ans.
Par principe, je soutiendrai donc l’amendement de M. Mézard, même s’il deviendra très certainement sans objet du fait du rejet des crédits de la mission.
Nous devons être cohérents, dès lors que nous jugeons que les crédits de cette mission sont insuffisants et mal répartis. Il faut savoir ce que l’on veut : mettre en place une politique d’aménagement du territoire efficace, notamment en faveur des territoires ruraux, ou laisser se poursuivre la tendance actuelle à la déshérence.
Je m’associe aux propos de mon collègue Rémy Pointereau et je soutiens moi aussi cet amendement, au nom de la justice géographique.
La politique de la ville est certes une priorité depuis de nombreuses années et il ne s’agit pas pour nous d’opposer la ville à la campagne, car tous les territoires méritent d’être soutenus.
Malheureusement, l’aménagement du territoire est en train de devenir le parent pauvre des politiques publiques. On constate de nombreuses fermetures de collèges et de services publics dans le monde rural. Nous sommes loin de l’époque où la DATAR accomplissait un travail très important en faveur d’un aménagement équilibré du territoire.
Rural je suis, rural je reste, monsieur le ministre ! Je n’oublie pas mes origines, même si je passe maintenant plus de temps à Paris que dans le monde rural.
Il s’agit ici d’un amendement de péréquation et d’aménagement du territoire. Je remercie mon collègue Jacques Genest d’avoir rappelé l’importance du FACÉ. Je rappelle que le FACÉ a été créé en 1936 par Paul Ramadier, alors député socialiste de l’Aveyron et sous-secrétaire d’État aux mines, à l’électricité et aux combustibles liquides ! À l’époque, les grandes compagnies électrifiaient les villes, mais se désintéressaient complètement des campagnes. Paul Ramadier a donc décidé d’opérer un prélèvement sur les sommes destinées à l’électrification des villes au bénéfice des syndicats d’électrification ruraux. C’est là un bel exemple d’outil de péréquation, dont on aurait dû s’inspirer pour financer l’équipement numérique des campagnes !
Je voterai bien entendu l’amendement n° II-329.
Je voterai également l’amendement de Jacques Mézard, pour une raison très simple : un aménagement équilibré du territoire suppose une juste répartition des crédits disponibles. À ce titre, il convient de donner un peu plus à ceux qui ont moins.
Or, aujourd’hui, les campagnes souffrent plus que jamais. Notre assemblée compte un certain nombre de présidents de conseil général ou de conseil régional, qui tous interviennent, quelle que soit leur tendance politique, pour aider les zones rurales. Si la politique de l’État était suffisante, ils n’auraient pas à le faire.
Durant les trente dernières années, l’aménagement rural a plutôt été une réussite : on ne peut pas en dire tout à fait autant de l’aménagement urbain !
M. Jacques Mézard. Je le dis à M. Raoul avec tout le respect et l’amitié que je lui porte : tirer argument des récents attentats pour qualifier cet amendement d’irresponsable ne me semble pas recevable. Si vous opposez constamment cet argument à ceux qui ne sont pas d’accord avec vous, il finira par s’user et cela portera atteinte à votre crédit.
Applaudissements sur les travées du RDSE, de l’UDI -UC et du groupe Les Républicains.
Cet amendement n’est pas dirigé contre la politique de la ville. La communauté d’agglomération que je préside mène une politique de la ville, à laquelle nous sommes attachés.
Quand, dans un contexte de baisse des dotations, on opère des arbitrages tels que ceux qui nous sont proposés et qui ne semblent pas, d’ailleurs, faire l’unanimité au sein du Gouvernement, il faut faire attention à ne pas provoquer des dégâts d’un seul côté. Il importe de parvenir à un juste équilibre.
Si la politique de la ville est mise en danger par un rééquilibrage de 5 millions d’euros, alors il y a vraiment de quoi s’interroger sur son avenir ! Cet amendement vise à adresser un signal : il faut arrêter de traiter nos territoires de cette manière. Il faut douze heures pour rejoindre Paris par le train depuis l’ouest du département du Cantal. Les antennes-relais de téléphonie mobile sont moins nombreuses, sur notre territoire, qu’il y a un ou deux ans. Et je ne parle pas du réseau routier… Si vous venez un jour expliquer la politique du Gouvernement en la matière, monsieur le ministre, il vous sera difficile de rejoindre notre préfecture par la route !
Il faut être attentif à cela, comme il faut être attentif aux mots que l’on emploie !
Urbaine je suis ! Je m’opposerai donc à cet amendement. En tant que chargée de la politique de la ville au Havre, je sais qu’il est essentiel de renforcer la cohésion sociale dans nos quartiers, de mettre en place des actions de proximité, d’impliquer nos concitoyens pour qu’ils apprennent à se connaître, à vivre ensemble et à se respecter les uns les autres.
Il n’est pas question, bien entendu, d’opposer territoires ruraux et territoires urbains, mais je considère qu’il n’est pas opportun de priver la politique de la ville d’une partie de ses financements. Cette politique joue en effet un rôle essentiel pour éviter les décrochages sociaux et éducatifs, si fréquents dans nos territoires.
Le groupe UDI-UC est particulièrement attaché à la politique d’aménagement du territoire. Les milieux ruraux souffrent, notamment en raison des difficultés rencontrées par le secteur de l’agriculture, qui irrigue l’ensemble du territoire et représente une source importante d’emplois.
Le mouvement de métropolisation actuel fait craindre une concentration de l’activité économique au bénéfice des zones fortement urbanisées. Il importe donc d’adresser des signaux positifs au milieu rural, pour manifester que l’État n’entend pas le délaisser, mais a au contraire la volonté d’entretenir une véritable dynamique en sa faveur. Tel est précisément l’objet de cet amendement.
L’approche territoriale différenciée que le rapporteur spécial Bernard Delcros a évoquée dans son propos introductif me semble pertinente. La mise en place de contrats territoriaux permettrait d’apporter des réponses au plus près des territoires, dont les besoins diffèrent.
Le groupe UDI-UC soutiendra cet amendement.
Je voterai cet amendement, même si j’aurais préféré que le prélèvement soit opéré sur une autre ligne budgétaire, car je trouve dommage d’opposer la ville à la campagne.
Je suis plutôt une campagnarde, voire une montagnarde, mais mon département, l’Isère, compte aussi une métropole.
Ce qui importe, c’est l’aménagement de l’ensemble du territoire. Cet amendement nous semble en contradiction avec le vote favorable que ses auteurs s’apprêtent à émettre sur les crédits de la mission, qui sont à nos yeux insuffisants.
Nous ne pensons pas qu’il soit de bonne politique de déshabiller Pierre pour habiller Paul en vue d’un aménagement harmonieux de nos territoires. Il aurait fallu abonder l’ensemble des crédits de cette mission, mais la loi organique relative aux lois de finances nous en empêche, en nous confinant dans un périmètre budgétaire contraint.
Notre groupe s’abstiendra sur cet amendement.
Dans le cadre contraint que vient d’évoquer notre collègue Annie David, le groupe écologiste votera contre cet amendement.
Monsieur Mézard, je ne suis pas certain que M. Borloo, dont l’action en tant que ministre de la ville a été évoquée tout à l’heure, aurait apprécié cet amendement…
En réalité, il s’agit ici non pas de renforcer la péréquation, mais de prélever des crédits destinés à une politique publique pour les affecter à une autre. D’ailleurs, pourquoi se limiter à 5 millions d’euros ? Pourquoi pas 10, 15 ou 20 millions ?
Monsieur Mézard, vous savez que les quartiers sud d’Aurillac, cité chère à votre cœur, bénéficient de la politique de la ville, qui mérite toute notre attention.
En écoutant certains d’entre vous, m’est revenue à la mémoire cette phrase prononcée le 16 septembre : « Il faut que la banlieue arrête de culpabiliser le pays ; au moins, dans les secteurs ruraux, on ne brûle pas les abribus ! » Ces sympathiques propos émanent de l’ancien Président de la République Nicolas Sarkozy. Le message est fort.
Je persiste à préconiser le rejet de cet amendement !
Je mets aux voix l’amendement n° II-329.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe du RDSE.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 83 :
Le Sénat a adopté.
Nous allons maintenant procéder au vote des crédits, modifiés, de la mission « Politique des territoires », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 84 :
Le Sénat n’a pas adopté.
Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale », figurant à l’état D.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale
Électrification rurale
Opérations de maîtrise de la demande d’électricité, de production d’électricité par des énergies renouvelables ou de production de proximité dans les zones non interconnectées, déclarations d’utilité publique et intempéries
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits du compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale ».
Ces crédits sont adoptés.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Politique des territoires » et du compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale ».
M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation d’un sénateur appelé à siéger au sein du Conseil supérieur de la forêt et du bois.
La commission des affaires économiques a fait connaître qu’elle propose la candidature de Mme Anne-Catherine Loisier pour siéger au sein de cet organisme extraparlementaire.
Cette candidature a été publiée et sera ratifiée, conformément à l’article 9 du règlement, s’il n’y a pas d’opposition à l’expiration du délai d’une heure.
Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2016, adopté par l’Assemblée nationale.
Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Travail et emploi » et du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ».
La parole est à M. François Patriat, rapporteur spécial.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de budget de la mission « Travail et emploi » s’inscrit dans la continuité. Cette mission sera dotée de 11, 3 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 11, 4 milliards d’euros en crédits de paiement. Ses crédits seront donc maintenus à un haut niveau en 2016.
Ce budget s’articule selon trois priorités : l’emploi des jeunes, l’accompagnement des personnes les plus éloignées de l’emploi et le soutien aux PME et aux TPE.
L’année 2016 verra tout d’abord la consolidation des dispositifs en faveur de l’emploi et de l’insertion des jeunes.
La garantie jeunes sera ainsi dotée de près de 300 millions d’euros en autorisations d’engagement et de plus de 270 millions d’euros en crédits de paiement, ce qui permettra de financer l’entrée de 10 000 jeunes supplémentaires dans le dispositif. Les bénéficiaires seront ainsi au nombre de 60 000 en 2016.
Les crédits de l’Établissement pour l’insertion dans l’emploi, l’EPIDE, seront également augmentés afin de permettre le financement de 570 places supplémentaires, conformément à l’engagement du Président de la République. Les crédits consacrés aux écoles de la deuxième chance seront également maintenus à hauteur de 24 millions d’euros.
L’accent sera en outre mis sur l’accompagnement des personnes les plus éloignées de l’emploi. Ainsi, près de 590 millions d’euros seront consacrés aux structures de l’insertion par l’activité économique.
Dans le prolongement des mesures prises depuis le début du quinquennat en faveur des demandeurs d’emploi âgés de plus de soixante ans, une prime transitoire de solidarité, ou PTS, a été créée. Elle permet, sous certaines conditions, aux demandeurs d’emploi bénéficiaires de l’allocation de solidarité spécifique, l’ASS, ou du revenu de solidarité active, le RSA, nés entre le 1er janvier 1954 et le 31 décembre 1955 de bénéficier d’une prime de 300 euros par mois jusqu’à leur retraite.
Par ailleurs, le nombre de contrats aidés sera maintenu à un niveau élevé en 2016. La programmation pour 2016 prévoit ainsi la création de 295 000 contrats aidés, en lien avec les évolutions attendues de l’économie et du marché de l’emploi.
Dans le prolongement du plan « Tout pour l’emploi dans les TPE et les PME » lancé par le Premier ministre en juin dernier, un effort particulier sera consenti en faveur de l’apprentissage avec la création de l’aide « TPE jeunes apprentis ». D’un montant de 4 400 euros, cette aide sera versée la première année aux entreprises de moins de onze salariés recrutant un apprenti de moins de dix-huit ans. En 2016, plus de 277 000 contrats d’apprentissage sont ainsi programmés, contre 265 000 en 2015.
L’emploi dans les TPE sera également encouragé au travers de la mise en place de l’aide « TPE-embauche premier salarié ». Cette aide permettra de décider certaines entreprises ne comptant aucun salarié et qui hésitent encore à recruter à « franchir le pas » en embauchant un premier salarié. Quelque 1, 2 million d’entreprises sont concernées.
Les moyens consacrés au service public de l’emploi seront également préservés. La subvention pour charge de service public sera quasiment stable à 1, 5 milliard d’euros, ce qui permettra un accompagnement renforcé des publics les moins autonomes, dans l’esprit des recommandations formulées par la Cour des comptes dans un rapport de septembre 2015.
S’agissant des crédits des maisons de l’emploi, le projet de budget initial prévoyait une diminution de moitié de leurs dépenses, à concurrence de 13 millions d’euros. L’Assemblée nationale a cependant procédé à un abondement à hauteur de 8 millions d’euros supplémentaires. Ce rééquilibrage me semble justifié et suffisant.
Par ailleurs, le projet de budget prévoyait le maintien des crédits de fonctionnement des missions locales, dont nous connaissons tous l’importance pour l’accompagnement des jeunes. L’Assemblée nationale a souhaité abonder leurs crédits à hauteur de 12 millions d’euros supplémentaires, compte tenu du renforcement de leurs missions, notamment en matière d’accompagnement des bénéficiaires de la garantie jeunes. Cette initiative me semble bienvenue.
Mes chers collègues, le budget qui nous est proposé est donc un budget de sortie de crise, qui permettra l’accompagnement des publics les plus fragiles.
Je vous propose d’adopter les crédits de la mission « Travail et emploi », sous réserve des deux amendements du Gouvernement, et du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage », sans modification.
Madame la ministre, je tiens à rendre hommage à votre engagement dans un contexte difficile. Vous ne ménagez pas vos efforts, et j’espère que les crédits que nous voterons aujourd’hui vous aideront dans votre tâche !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avec plus de 11 milliards d’euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, le budget de la mission « Travail et emploi » est préservé.
Le contexte économique et social actuel appelait en effet le maintien de l’intervention de l’État en matière de soutien à l’emploi, et je me félicite des choix qui ont été faits par le Gouvernement.
Le budget qui nous est présenté permettra d’accompagner la reprise grâce au financement de dispositifs en faveur des jeunes, des seniors et des personnes les plus éloignées du marché de l’emploi.
C’est aussi un budget responsable, qui traduit des choix assumés.
La mission « Travail et emploi » participera à l’effort de redressement de nos comptes publics. Il n’aurait pas été responsable de réduire les dépenses d’intervention dans le contexte actuel. C’est pourquoi le choix a été fait de réduire les dépenses de fonctionnement et les dépenses de personnel.
Conformément à la norme gouvernementale de réduction des crédits de fonctionnement, les dépenses du ministère diminueront de 7 % en autorisations d'engagement et de 5 % en crédits de paiement.
Des efforts particuliers seront menés en matière de politique des achats, avec la poursuite du regroupement au niveau central des services supports du ministère du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et du ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, sous l’égide du secrétariat général.
De même, les dépenses afférentes aux affaires immobilières seront réduites de près de 30 % en autorisations d'engagement, et elles demeureront stables en crédits de paiement.
Enfin, les dépenses de titre 2 diminueront de 4, 5 millions d’euros en 2016, avec la suppression de 192 postes. C’est un effort important, qu’il convient de souligner.
L’année 2016 permettra la poursuite de chantiers importants en matière de dialogue social. Elle constituera la dernière année de mesure de l’audience syndicale et verra, en particulier, l’organisation de l’élection dans les très petites entreprises. Près de 15 millions d’euros en autorisations d'engagement et 16 millions d’euros en crédits de paiement seront ainsi consacrés à cet important rendez-vous.
Par ailleurs, en application de la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, un mécanisme de mesure de l’audience des organisations patronales a été mis en place. Les premiers résultats seront connus en 2017, en même temps que la deuxième mesure de la représentativité syndicale.
L’année 2016 sera également la deuxième année de mise en œuvre du fonds paritaire destiné au financement des organisations syndicales et patronales. Une réforme était nécessaire, et le dispositif mis en place me semble garantir un système plus transparent et plus satisfaisant. Il sera doté de près de 33 millions d’euros en crédits de paiement. Ces crédits permettront aussi la prise en charge de la formation des salariés appelés à exercer des responsabilités syndicales, ainsi que la participation des partenaires sociaux à la conception, à la mise en œuvre et au suivi des politiques publiques du travail et de l’emploi.
Mes chers collègues, le budget de la mission « Travail et emploi » s’inscrit donc dans un rapport de cohérence avec l’action menée depuis 2012 et avec les priorités retenues par le Gouvernement : je pense notamment à l’emploi des jeunes. Les orientations arrêtées par le Gouvernement comme les choix effectués me semblent aller dans le bon sens, celui de l’accompagnement de la reprise économique.
C’est pourquoi je vous propose d’adopter les crédits de la mission « Travail et emploi », tels que modifiés par les amendements du Gouvernement, et du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage », sans modification.
La parole est à M. Alain Milon, en remplacement de M. Michel Forissier, rapporteur pour avis.
Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des finances, messieurs les rapporteurs spéciaux, mes chers collègues, je prends la parole au nom de notre collègue Michel Forissier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, qui n’a pas pu se joindre à nous pour des raisons familiales.
Sur la proposition de M. Forissier, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable sur les crédits de la mission « Travail et emploi », sous réserve de l’adoption de l’amendement de la commission des finances tendant à ouvrir 40 000 contrats d’insertion supplémentaires dans le secteur marchand et à réduire de 200 000 le nombre des contrats aidés dans le secteur non marchand. En effet, notre commission a estimé que la politique de l’emploi devait être nettement infléchie pour être rendue plus audacieuse et moins défensive, afin de donner la priorité aux emplois aidés dans les entreprises privées : eux seuls ouvrent de véritables perspectives d’insertion sur le marché du travail, comme le montrent sans ambiguïté de nombreuses études de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES.
En revanche, la commission des affaires sociales a émis, toujours sur la recommandation de M. Forissier, un avis défavorable sur les crédits du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage », en l’absence d’une réforme globale et ambitieuse de cette formation en alternance. Alors que le Gouvernement maintient son objectif de 500 000 apprentis en 2017, le projet de loi de finances n’en prévoit que 405 000 l’an prochain.
Force est de constater que le système d’apprentissage est à bout de souffle, en partie à cause de la faible croissance économique, mais en partie aussi à cause des hésitations dont le Gouvernement fait preuve depuis deux ans en matière de prime.
De fait, cette instabilité législative n’est pas de nature à rassurer les entreprises qui souhaitent accueillir des apprentis, même si les freins non financiers à l’apprentissage ne doivent pas être négligés.
En avril dernier, une délégation de notre commission s’est rendue en Allemagne et en Autriche pour y étudier l’organisation de l’apprentissage. Elle a conclu que notre système souffrait de deux maux essentiels : l’absence de pilotage au niveau national et la trop faible implication des partenaires sociaux dans l’élaboration des référentiels de formation. Tant que ces obstacles ne seront pas levés, l’apprentissage restera peu développé dans notre pays, alors que cette formation en alternance est, de l’aveu de tous, le meilleur moyen de lutter contre le chômage des jeunes.
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. J’ajoute, pour conclure, que la commission des affaires sociales souhaite l’établissement, dès l’année prochaine, d’un « jaune » budgétaire retraçant l’ensemble des contributions financières de l’État et des régions en matière d’apprentissage, car les circuits de financement sont aujourd’hui complexes et peu lisibles.
Applaudissementssur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.
Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Jean Desessard.
Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, le budget de la mission « Travail et emploi » pour 2016 s’élève à 11, 25 milliards d’euros en autorisations d’engagement, ce qui correspond à une baisse de l’ordre de 5, 9 % par rapport aux crédits ouverts par la loi de finances initiale pour 2015.
Ce recul s’explique principalement par la baisse en volume du nombre de contrats aidés, tout particulièrement des emplois d’avenir. Ces aides financières à destination des employeurs ayant recours à de jeunes travailleurs peu qualifiés devraient connaître un ralentissement en 2016 par rapport à cette année : alors que 90 000 contrats auront été conclus en 2015, on en prévoit seulement 35 000 l’année prochaine.
Le même constat peut être dressé pour les contrats de génération. Destinés à assurer la transmission de savoir-faire entre un senior et un jeune travailleur, ces contrats ne rencontrent pas le succès escompté : seuls 20 000 binômes sont prévus pour 2016, alors que le Gouvernement en prévoyait 100 000 en année pleine lors de la création du dispositif en 2013. Le faible recours à ces contrats nous incite à réfléchir à leur pertinence et, peut-être, à trouver de nouveaux outils pour relancer l’embauche.
Force est de constater que, indépendamment des diminutions de crédits liées à ces deux types de contrats, qui expliquent la baisse globale, le reste du budget de la mission « Travail et emploi » jouit d’une certaine stabilité. Ainsi, la subvention allouée à Pôle emploi reste inchangée, au niveau de 1, 5 milliard d’euros, et le budget des missions locales est sanctuarisé à 188 millions d’euros.
Il faut aussi, et surtout, souligner le déblocage de nouveaux crédits et le soutien à certains nouveaux dispositifs.
En particulier, le Gouvernement a choisi de doubler l’enveloppe allouée à la garantie jeunes, en vue de généraliser ce dispositif grâce auquel 60 000 nouveaux jeunes de 18 ans à 25 ans en situation de précarité pourront bénéficier l’année prochaine d’un accompagnement renforcé pour s’insérer dans l’emploi et percevoir une allocation pendant toute la période d’accompagnement. Ce contrat repose sur les principes de confiance et de responsabilité : il vise à redonner à ses bénéficiaires de l’estime de soi, à leur réapprendre à vivre dans un collectif et à les rendre autonomes et capables d’initiative. Les écologistes saluent l’effort financier en faveur de ce dispositif qui, de l’aveu des acteurs sociaux, est extrêmement positif.
Nous soutenons également l’augmentation des crédits alloués à l’Établissement pour l’insertion dans l’emploi, l’EPIDE. Fondé sur le principe du volontariat, le dispositif accueille et héberge des jeunes motivés et désireux de rompre avec la fatalité de l’échec ; il les aide à retrouver leur place dans la société en favorisant leur entrée dans la vie active, notamment en leur permettant d’acquérir les comportements sociaux de base nécessaires pour vivre au sein d’une communauté de travail. Remarquez que ces structures ne visent pas seulement à insérer les jeunes qui les fréquentent sur le marché du travail : elles ont vocation à les réintégrer au sein de la communauté, en cohérence avec les valeurs de la République. Au lendemain des attentats meurtriers qui ont touché notre pays, on ne peut que saluer cette initiative.
Le développement de l’aide à l’embauche d’un premier salarié dans les TPE, la mise en œuvre de l’aide à l’embauche d’un apprenti mineur dans les mêmes entreprises et les moyens supplémentaires alloués aux aides aux postes pour les travailleurs handicapés sont autant de mesures que les écologistes approuvent également.
Avec ce budget, madame la ministre, vous esquissez une politique de soutien à l’emploi et d’inclusion des jeunes dans la société, deux objectifs auxquels les écologistes sont naturellement favorables. C’est pourquoi nous voterons les crédits de la mission « Travail et emploi ».
Reste que votre budget, s’il assure la mobilisation de bons outils pour lutter contre le chômage, ignore le problème des emplois non pourvus. En septembre dernier, vous estimiez que leur nombre était proche de 300 000. C’est un chiffre incompréhensible, qui ouvre la porte à toutes les interprétations, y compris les plus stigmatisantes, dès lors que notre pays compte plus de 5 millions de chômeurs.
Voilà pourquoi je profite de ma présence à la tribune pour attirer votre attention sur une initiative à laquelle je tiens particulièrement : le guide de pilotage statistique, ou GPS, pour l’emploi.
Le GPS pour l’emploi, adopté par le Sénat à une très large majorité le 2 avril dernier, vise à référencer précisément les offres d’emplois non pourvues, par bassin d’emploi et au niveau national, afin d’identifier les causes de cette situation et d’y apporter une réponse. Madame la ministre, vous avez annoncé vouloir lutter contre les vacances de postes en investissant massivement dans les formations prioritaires pour les chômeurs. C’est peut-être l’une des solutions, mais, tant que le travail statistique préalable n’aura pas été réalisé, nous ne pourrons pas être sûrs que cet effort sera couronné de succès.
Comme je le disais lorsque j’ai présenté ce dispositif, nous avons besoin de savoir où sont les besoins, en quoi ils consistent – s’agit-il, par exemple, d’un besoin de formation spécifique ? –, si les conditions de travail ou le niveau des rémunérations sont en cause et, tout simplement, si ces offres non pourvues existent vraiment – car la question se pose !
Avec le GPS pour l’emploi, nous pourrons mobiliser avec une efficacité, une efficience et une pertinence améliorées les politiques publiques de l’emploi. Madame la ministre, je resterai à votre disposition afin de vous aider à mettre en œuvre dans les plus brefs délais cet outil aujourd’hui indispensable !
Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, le budget de la mission « Travail et emploi » pour 2016 est, comme celui voté l’année dernière, un budget de reconduction, relativement stable dans ses engagements financiers.
Dans le contexte actuel, il convenait évidemment de maîtriser ce budget en termes de crédits ; tel est le cas, puisque les crédits de paiements sont ouverts, comme l’an dernier, à hauteur de 11, 4 milliards d’euros. Il traduit cependant une approche un peu trop statique dans ses orientations : une démarche plus novatrice et plus ambitieuse aurait pu être suivie à montant budgétaire équivalent. La mission « Travail et emploi » doit traduire la volonté du Gouvernement d’adapter un certain nombre de structures et de dispositifs afin de peser de manière efficace sur la politique de l’emploi.
Le contexte général économique et social, à défaut d’être favorable, est intéressant.
Il n’est bien évidemment pas très favorable, dans la mesure où nous venons de battre un nouveau record pour le nombre de chômeurs, quel que soit le périmètre considéré. Ainsi, le nombre de demandeurs d’emploi de catégorie A a augmenté de quelque 220 000 personnes en un an, avec comme point noir la destruction en un an de 30 000 emplois dans l’industrie et, surtout, de 50 000 emplois dans le secteur de la construction. L’inversion de la courbe du chômage n’est donc pas d’actualité, même si, paradoxalement, nous allons bien finir par nous en approcher ; en tout cas, nous en sommes forcément plus près qu’il y a deux ans…
Cette évolution décevante est presque spécifique à notre pays. En effet, le taux de chômage au sein de la zone euro a baissé de près de 7 % en un an, passant de 11, 5 % à 10, 7 % de la population active, tandis que, en France, il a progressé de 3 %, passant de 10, 5 % à 10, 8 %. Nous sommes, avec la Finlande et la Belgique, l’un des trois seuls pays parmi les dix-neuf de la zone euro qui ont vu leur taux de chômage progresser au cours de la dernière année.
Malgré tout, le contexte comporte aussi des éléments intéressants et encourageants. Ainsi, l’environnement international est favorable ; songeons au prix du pétrole, à la parité dollar-euro, aux taux d’intérêt et à la faible inflation. Ces paramètres ont sans doute largement contribué à un léger regain de notre taux de croissance : il est attendu à 1, 1 % en 2015, ce qui permet d’espérer atteindre 1, 5 % en 2016. Cette évolution est essentielle, puisque la corrélation est directe entre croissance et création d’emplois.
De fait, notre économie a donné quelques signes de reprise, certes encore très fragiles, sur la voie qui mène au solde net positif de création d’emplois, c’est-à-dire à une augmentation effective du nombre d’actifs ayant un emploi. Un certain volume d’augmentation d’emplois nous est en effet nécessaire pour réduire le chômage, vu que ceux qui arrivent sur le marché du travail sont plus nombreux que ceux qui le quittent – l’Allemagne se trouve de ce point de vue dans une situation assez différente, du fait de sa structure démographique.
Nous arrivons donc à un point d’équilibre où la pertinence des politiques menées dans différents domaines, en matière aussi bien fiscale que sociale, peut nous faire basculer du bon côté : celui de la reprise. C’est en gardant présente à l’esprit cette analyse que nous devons apprécier, madame la ministre, le budget que vous nous présentez.
Les actions du service public de l’emploi et les dispositifs en faveur des personnes les plus éloignées du marché du travail concentrent près des deux tiers des crédits de paiement ouverts pour 2016. Outre les frais de personnel et la contribution versée à Pôle emploi, ces crédits couvrent l’ensemble des dispositifs d’accompagnement des jeunes vers l’emploi, ainsi que, bien évidemment, les emplois aidés.
Pour les jeunes, le Gouvernement a décidé de faire porter son effort sur la garantie jeunes, ce qui paraît une orientation opportune, et les crédits de l’école de la deuxième chance ont été maintenus, à un niveau, il est vrai, relativement modeste.
Quant à l’enveloppe allouée aux emplois aidés, elle est en recul de 536 millions d’euros par rapport à 2015 pour les crédits de paiement.
L’ensemble de ces mesures constitue un dispositif d’accompagnement utile en matière d’insertion ou de retour à l’emploi, même si le traitement social du chômage a une incidence relativement faible sur la création nette d’emplois dans la durée. En effet, lorsque les bénéficiaires de ces contrats aidés trouvent un emploi ou voient leur poste pérennisé, ils viennent alors se substituer à des demandeurs d’emploi n’ayant pas suivi le même parcours ou à des intérimaires.
Cependant, il ne faut pas minimiser les effets positifs de ces contrats, car ils favorisent l’insertion professionnelle et le recrutement par anticipation des chômeurs : les collectivités territoriales – notamment – et les entreprises privées, dans une certaine mesure, procèdent souvent à ces recrutements par anticipation, c’est-à-dire deux ans plus tôt que pour un remplacement normal.
S’agissant de la répartition des contrats aidés entre secteur marchand et secteur non marchand, la proposition formulée par la commission des finances dans son amendement nous paraît tout à fait fondée. Pour le groupe UDI-UC, son adoption sera déterminante pour le vote du budget de la mission « Travail et emploi ».
L’amendement de la commission se justifie principalement par les efforts considérables qu’ont réalisés les collectivités territoriales en matière de recrutement et d’encadrement d’emplois aidés au cours de ces dernières années, celles-ci jouant ainsi un rôle prédominant dans le secteur non marchand.
Pourtant, il semblerait que les collectivités locales sont aujourd’hui arrivées à saturation par rapport à ce type de contrats, dans la mesure où elles disposent désormais de moyens d’encadrement plus limités, en raison des contraintes financières auxquelles elles sont confrontées.
À cet égard, j’émettrai une réserve par rapport aux propos de certains rapporteurs sur l’effet négatif ou nul du passage de certains contrats de travail en contrats aidés dans le secteur non marchand. Même s’ils suivent en cela une étude et des statistiques publiées par la DARES, il existe probablement d’autres explications à ce constat, à commencer par phénomène de saturation que je viens d’évoquer concernant les collectivités locales. Il faut aussi souligner le fait que les collectivités locales acceptent plus facilement les profils professionnels difficiles que les entreprises du secteur privé.
Il est nécessaire de tenir compte de cette réalité, sinon on pourrait penser que les collectivités territoriales ont recruté avec une certaine légèreté, ce qui ne me semble pourtant pas être le cas.
Ensuite, la mise en œuvre du contrat de génération, dispositif a priori séduisant, se solde aujourd’hui par un échec en termes quantitatifs. Ainsi, l’objectif initial de création de 500 000 binômes en cinq ans – le temps du mandat présidentiel – n’est exécuté qu’à hauteur d’environ 10 %, deux ans après son entrée en vigueur. Or vous ne prévoyez aucune accélération dans ce domaine pour l’année à venir, madame la ministre ! Après un réexamen plus approfondi, cette mesure mériterait pourtant d’être relancée, parce que le concept apparaissait excellent à certaines personnes, dont je fais partie !
En ce qui concerne l’apprentissage, on peut espérer que la nouvelle prime mise en place entraînera l’augmentation du nombre d’entrées en apprentissage en 2016. En effet, l’apprentissage reste un dispositif d’intégration dans la vie professionnelle que nous devons privilégier. À cet égard, on ne peut que regretter une pratique trop limitée de celui-ci dans la fonction publique : les collectivités territoriales concentraient 61 % du total des entrées en apprentissage dans le secteur public en 2013, total qui s’élève très modestement à 6 000 nouveaux contrats par an.
En conclusion, madame la ministre, vous devriez envisager une approche plus dynamique de l’emploi, qui favorise une réorientation des emplois aidés, une relance des contrats de génération, la clarification et, éventuellement, la redéfinition du rôle de pilotage et de coordination des maisons de l’emploi, ainsi que le renforcement de leurs moyens. Il faudrait déterminer si ces maisons de l’emploi constituent un bon outil ou non. Dans d’autres circonstances, j’ai déjà dû le dire : lorsqu’un dispositif fait la preuve de son efficacité, il faut le restructurer, le développer et le systématiser ; si ce n’est pas le cas, il faut alors le supprimer ! Cette méthode garantira davantage d’efficacité.
Je le répète : il faudrait ouvrir plus largement l’apprentissage au secteur public, et en particulier aux collectivités territoriales. Il conviendrait également de rechercher des passerelles entre contrats aidés, formation qualifiante et apprentissage.
Madame la ministre, telles sont les quelques pistes qui auraient mérité une réflexion plus approfondie – mais il n’est jamais trop tard !
Mme la ministre sourit.
Je n’évoquerai évidemment pas aujourd’hui dans le détail un sujet qui ne relève pas de la loi de finances, mais qui – je l’espère – marquera fortement l’année 2016 : je veux évidemment parler de la réforme du code du travail, dont il faudra faire, en tout cas je le souhaite, un outil de promotion de l’emploi !
Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC.– MM. Marc Laménie et Charles Revet applaudissent également.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous abordons la mission « Travail et Emploi », alors que 5, 7 millions de personnes sont touchées par le chômage, toutes catégories confondues, selon l’INSEE. Les derniers chiffres du chômage parus en octobre ne peuvent laisser indifférent. Madame la ministre, nous ne pouvons pas laisser la situation se détériorer davantage !
Selon vous, cette mission bénéficierait d’un « budget ambitieux et volontariste pour la création d’emplois, la lutte contre le chômage et l’insertion professionnelle des plus fragiles ». Dans le bleu budgétaire, cette mission est présentée comme « le reflet d’une articulation entre la mobilisation renforcée en faveur de l’emploi et la promotion de la qualité au travail pour l’ensemble des salariés ».
Je souscrirais volontiers à cette déclaration d’intention, madame la ministre, mais les faits la contredisent : le budget de la mission est en baisse. Il est donc davantage le reflet du budget d’austérité que le Gouvernement a décidé de mettre en œuvre cette année encore !
Dans le bleu budgétaire, il est également précisé que le ministère « participe à l’objectif gouvernemental d’amélioration de la qualité globale du service public tout en optimisant le pilotage des moyens ». C’est une manière plus élégante d’écrire que les crédits de la mission vont diminuer, que votre ministère va supprimer des emplois, notamment dans les DIRECCTE, les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, et qu’il va réduire les dotations des différents opérateurs de l’État, tout en augmentant les subventions accordées aux entreprises, en particulier celles qui embaucheront des salariés en contrats aidés.
D’ailleurs, vous allez élargir ces contrats aidés, sans avoir même pris le temps de faire le bilan du dispositif en place ! Les salariés privés d’emploi ont l’impression, tout comme nous, qu’il s’agit d’une multitude de contrats qui servent davantage à les ranger dans des cases qu’à leur garantir de trouver un emploi. Pendant ce temps-là, ces femmes et ces hommes à la recherche d’un emploi en CDI ne sont plus comptabilisés dans les chiffres du chômage.
Ainsi, en complet décalage avec vos engagements, tel que celui de lutter contre le travail illégal ou encore celui de garantir l’effectivité du droit au travail, 192 postes vont disparaître dans les DIRECCTE ! Comment faire plus et mieux avec moins de moyens humains ?
Madame la ministre, vous nous dites également vouloir relancer la politique des contrats aidés et vous créez la garantie jeunes. Or tant Pôle emploi que les missions locales, pourtant chargées de mettre en œuvre ces dispositifs, voient leurs budgets tout juste maintenus à leur niveau de 2015 ! Là encore, comment faire plus, améliorer les services rendus et innover sans moyens supplémentaires ? Tout ne peut pourtant pas résulter de la mutualisation des moyens et de la numérisation, madame la ministre et, encore moins, de la suppression de l’ouverture au public des sites de Pôle emploi l’après-midi, ainsi que le prévoit la réforme dont l’application est prévue dès le mois de janvier 2016 !
Quant aux jeunes, dont le Gouvernement avait pourtant fait sa priorité, vous leur proposez toujours plus d’emplois d’avenir ou de contrats aidés, bien que de tels contrats les maintiennent dans un statut d’extrême précarité et ne favorisent pas leur insertion durable sur le marché du travail.
Par ailleurs, vous imposez un gel de quatre mois des prestations chômage en reportant la date de leur revalorisation du 1er janvier au 1er avril, ce qui vous permet d’économiser 22 millions d’euros au passage ! Vous pénalisez ainsi les demandeurs d’emploi les plus éloignés de l’emploi, ceux qui sont en fin de droits et bénéficient de l’ASS, l’allocation de solidarité spécifique, de l’ATA, l’allocation temporaire d’attente ou encore de l’AER, l’allocation équivalent retraite.
La dotation en faveur de l’amélioration des conditions de travail et de la prévention en matière de santé au travail – qui constitue l’un des axes prioritaires de votre politique, d’après vos déclarations – diminue également, alors que le troisième plan Santé au travail est en cours de finalisation et met justement l’accent sur la prévention !
L’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail, l’ANACT, comme l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, pourtant principales actrices de votre ministère dans ce domaine, verront également leur budget baisser.
Madame la ministre, vos réponses en matière d’emploi semblent se limiter à la poursuite des exonérations et des aides financières en faveur des employeurs qui recrutent des salariés en contrat précaire. Comme si les exonérations de cotisations sociales ne suffisaient pas, vous proposez d’offrir 4 000 euros pendant deux ans aux employeurs qui recrutent un salarié supplémentaire. Les dispositifs incitatifs en matière d’emploi, notamment le CICE, ont démontré leur inefficacité, mais vous persistez !
Vous le voyez, votre déclaration d’intention m’offre en définitive peu de raisons de me réjouir, tant elle est loin d’aboutir ! La seule exception à ce constat, que je tiens à souligner, est la création de 500 aides au poste supplémentaires en 2016, ce qui permettra une meilleure insertion des salariés handicapés – qui sont parmi les plus en difficulté – dans le monde du travail.
Une politique ambitieuse et volontariste vous aurait conduite à changer complètement d’orientation et à prendre enfin la mesure de la solidarité nationale qui est nécessaire pour que chaque salarié soit entendu avec la même attention que celle accordée aux employeurs !
Oui, madame la ministre, une autre politique en matière d’emploi est possible ! Le Gouvernement, même s’il n’est pas seul responsable en matière de création d’emplois, peut toujours inverser la courbe du chômage. Encore faudrait-il utiliser les bons leviers !
Il faudrait commencer par l’emploi public en mettant en œuvre, par exemple, la nécessaire modernisation de nos services publics : le départ des baby-boomers doit être l’occasion de recruter des jeunes en recherche d’avenir.
Il faudrait améliorer l’anticipation et la gestion des restructurations économiques dans nos territoires. Cela nécessite évidemment le maintien ou la hausse des crédits consacrés à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, la GPEC, ce que je ne retrouve pas dans ce budget, ou encore le renforcement des maisons de l’emploi, afin d’élaborer une véritable GPEC et un véritable engagement de développement de l’emploi et des compétences, ou EDEC.
Il faudrait aussi développer la formation professionnelle et renforcer davantage l’AFPA, l’Association pour la formation professionnelle des adultes.
Parallèlement, il faudrait valoriser l’apprentissage : les seules aides financières aux entreprises ne résoudront pas les difficultés actuellement rencontrées par les apprentis. L’amélioration de leurs conditions de travail et de vie implique d’apporter des solutions aux problèmes du logement et du transport. À cela, il convient encore d’ajouter une véritable reconnaissance des maîtres d’apprentissage.
Telles sont les quelques pistes pour une politique ambitieuse et volontariste en faveur de l’insertion professionnelle des plus fragiles !
J’aimerais enfin évoquer les saisonniers, même si j’ai bien en tête, madame la ministre, que l’essentiel les concernant dépend du dialogue social et de la capacité des organisations syndicales à négocier. En effet, vous pourriez tout à fait jouer le rôle de facilitatrice et de médiatrice en leur faveur. De plus, si vous vouliez leur adresser un signe fort, vous auriez toute latitude pour soutenir leurs maisons des saisonnalités.
Pour conclure, madame la ministre, je regrette que votre déclaration d’intention ne soit suivie ni d’effets ni d’un budget en conséquence. Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe communiste républicain et citoyen votera contre les crédits de cette mission !
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
M. Éric Jeansannetas. Madame la ministre, je tiens à vous rassurer : je ne vais pas suivre la position de Mme David, car je ne veux pas que vous pensiez que tout va mal !
Mme la ministre sourit.
Nous examinons les crédits de la mission « Travail et emploi » dans un contexte où la hausse du nombre des demandeurs d’emploi en octobre, après l’embellie de septembre, souligne l’aspect fluctuant de l’activité économique. On compte en effet 42 000 demandeurs d’emploi de catégorie A supplémentaires, alors qu’ils étaient 14 000 de moins le mois précédent.
Il convient cependant de noter la progression de 5, 4 % de l’activité des chômeurs de catégorie B et de 11, 6 % de l’activité de ceux de la catégorie C sur une période d’un an.
Selon l’UNEDIC, le nombre de chômeurs arrivant en fin de droits a baissé de 15 % au premier semestre 2015, grâce à l’instauration de droits rechargeables par la convention pluriannuelle entre l’État, l’UNEDIC et Pôle emploi signée en octobre 2014. Ces demandeurs d’emploi ne basculent donc plus vers l’ASS, allocation financée par l’État, et restent dans les catégories B et C. Ils peuvent ainsi continuer à percevoir une allocation chômage plus élevée.
La progression des catégories B et C peut être interprétée comme un signe – fragile – de reprise économique, car l’augmentation du nombre des missions d’intérim et des CDD précéderait toujours une hausse de l’emploi durable.
Bien que restant extrêmement prudents, les indicateurs nous conduisent à envisager des signes de reprise, madame la ministre. Premièrement, le taux de marge des entreprises se redresse à 31, 1 % : il atteint ainsi son plus haut niveau depuis le premier trimestre 2001. Deuxièmement, le chômage des jeunes est en baisse de 2, 7 % sur un an. Troisièmement, la croissance devrait atteindre 1, 5 % en 2016, ce qui nous laisse présager une stabilisation du chômage, voire espérer sa baisse !
En sanctuarisant les crédits de la mission « Travail et emploi », madame la ministre, vous affirmez la volonté du Gouvernement d’endiguer le chômage, de favoriser la création d’emplois, tout en luttant contre l’exclusion sociale. En léger recul par rapport à 2015, le budget de la mission, qui s’élèvera à 11, 25 milliards d’euros en 2016, est toutefois en hausse de 15 % depuis 2012, malgré les contraintes budgétaires. Il vient donc conforter les réformes engagées depuis 2012 !
Conformément à la feuille de route issue de la conférence sociale pour l’emploi du 19 octobre dernier, ce budget met l’accent sur le droit à une nouvelle chance pour les jeunes, la mobilisation des moyens en faveur des chômeurs de longue durée, le soutien à l’apprentissage et le renforcement de l’efficacité du service public de l’emploi.
Le budget pour 2016 prévoit la création de 295 000 nouveaux contrats aidés pour un montant de 2, 4 milliards d’euros. Il doit financer 200 000 contrats aidés non marchands, ainsi que 60 000 contrats aidés marchands.
Cette programmation cohérente et nécessaire est pourtant remise en cause par nos collègues de la droite sénatoriale. En commission, ceux-ci ont adopté un amendement visant à supprimer purement et simplement les 200 000 contrats aidés non marchands et à créer 40 000 contrats aidés marchands supplémentaires.
Il s’agit à mon sens d’une grave erreur. Pour la justifier, la majorité sénatoriale brandit une étude de la DARES, selon laquelle 66 % des personnes sorties d’un contrat initiative emploi, ou CIE, ont été embauchées après six mois, contre 36 % pour les personnes sorties d’un contrat d’accompagnement dans l’emploi, ou CAE. Ces chiffres, certes avérés, ne sont pas aussi significatifs que cela, et M. Jean-Marc Gabouty a d’ailleurs nuancé leur portée tout à l’heure.
Ainsi, d’après une autre étude, publiée le 6 août 2015 par la même DARES, 81 % des employeurs du secteur marchand indiquent qu’ils auraient recruté, même sans l’aide financière. Il ne s’agit pas de mettre en cause l’utilité de ces contrats aidés : ils favorisent la stabilisation des parcours, en augmentant la durée, pour les emplois d’avenir, et en favorisant une embauche en CDI, plutôt qu’en CDD.
Pourtant, dans le secteur non marchand, il apparaît que 64 % des contrats n’auraient pas été signés sans l’aide, une proportion s’élevant à 87 % pour les établissements d’enseignement et à 62 % pour les associations.
Ces contrats permettent aux personnes les plus éloignées du monde du travail de retrouver le chemin de l’emploi. Les publics ciblés sont les chômeurs de longue durée, les seniors, les résidents des quartiers difficiles, les personnes peu ou pas qualifiées, les travailleurs en situation de handicap. Il s’agit notamment d’offrir une première expérience professionnelle à des jeunes issus de quartiers défavorisés, qui n’y auraient pas eu accès autrement.
Par ailleurs, une enquête menée en 2014 montrait que 80 % des sortants de CAE estimaient avoir acquis des compétences et de la confiance, preuve de l’efficacité de ces contrats dans la lutte contre la démobilisation, la désespérance et l’exclusion.
Alors oui, il faut continuer à mettre l’accent sur la qualité de la formation et l’allongement de la durée des contrats, et ce sera fait ! Mais il me semble parfaitement insensé de se priver d’un tel outil de remise en route vers l’emploi, dans le contexte que nous connaissons.
Maintenir ces 200 000 contrats dans le secteur non marchand apparaît nécessaire. Leur suppression serait totalement inadaptée à la situation actuelle.
Ce budget met l’accent sur l’insertion des jeunes, et je m’en félicite ! Un montant de 90 millions d’euros supplémentaires sera consacré au sujet, avec un accent mis sur les décrocheurs et les habitants de quartiers difficiles.
La garantie jeunes, lancée à titre expérimental sur 10 territoires pilotes à la fin de l’année 2013, élargie cette année à 72 départements, atteindra l’objectif de 50 000 jeunes à la fin de 2015. En 2016, elle sera généralisée à tout le territoire et concernera 100 000 jeunes à la fin de 2017.
Le public cible est constitué par les Français âgés de 18 ans à 25 ans, sans diplôme, sans formation, sans emploi. Ces jeunes pourront prétendre à une allocation minimale de ressources, moyennant l’engagement de se former en vue d’acquérir une première expérience professionnelle. La montée en charge de ce dispositif le porte à hauteur de 255 millions d’euros, contre 132, 7 millions d’euros en 2015. La garantie jeunes, j’y insiste, donne des résultats sur les territoires.
Président de la mission locale de la Creuse, je me réjouis de l’adoption, à l’Assemblée nationale, de deux amendements de la rapporteur pour avis, Mme Chaynesse Khirouni, tendant à augmenter de 12 millions d’euros les crédits dédiés à ces établissements – 10 millions d’euros au titre de l’accompagnement des jeunes et 2 millions d’euros au titre du fonctionnement : 285, 4 millions d’euros seront ainsi consacrés au financement des missions locales.
Pour rappel, en 2014, les missions locales accompagnaient 1, 45 million de jeunes âgés de 16 ans à 25 ans. Elles jouent un rôle de premier plan dans le suivi et l’accompagnement des jeunes entrant dans le dispositif de la garantie jeunes ou dans celui des emplois d’avenir – d’ailleurs, pour ce dernier, elles auront aussi pour mission, cette année, d’accompagner la sortie des bénéficiaires.
La subvention à Pôle emploi est maintenue à 1, 5 milliard d’euros, et les effectifs de l’agence stabilisés à 46 742 équivalents temps plein.
Le demandeur d’emploi est placé au cœur du dispositif, et vous faites bien d’agir ainsi, madame la ministre. Les orientations sont bien évidemment conformes à la convention tripartite : réalisation plus rapide du premier entretien, doublement de l’accompagnement intensif et, autre évolution positive, déploiement de 4 000 conseillers dédiés aux entreprises.
Le budget de l’Établissements pour l’insertion dans l’emploi, l’EPIDE, qui a pu être évoqué dans le cadre d’autres missions, est également renforcé : 1 000 places supplémentaires seront créées afin d’héberger et accompagner vers l’emploi des jeunes en difficulté.
Dans le même temps, la dotation aux écoles de la deuxième chance est maintenue, avec 24 millions d’euros. Cela permettra à 15 000 jeunes d’être accueillis dans ces établissements.
Les crédits alloués aux maisons de l’emploi correspondront finalement aux crédits consommés en 2015, soit 21 millions d’euros. Si l’efficacité des maisons de l’emploi varie fortement d’un établissement à l’autre, une baisse brutale de leur financement aurait été préjudiciable. Ces structures devront être évaluées, mais ce sont des initiatives locales qui peuvent, et doivent, être salutaires.
Outil primordial pour l’insertion des jeunes, l’apprentissage sera financé à hauteur de 2, 74 milliards d’euros par l’État en 2016. Le budget de l’emploi renforce cet effort financier, avec 110 millions d’euros supplémentaires. Ces dotations se traduiront, notamment, par la mise en place d’une aide au recrutement de jeunes apprentis par les TPE d’un montant de 4 400 euros pour la première année du contrat.
Afin de favoriser la création d’emplois, le projet de loi de finances pour 2016 tend également à instaurer une nouvelle aide en faveur des TPE et PME. Il s’agit de l’aide à l’embauche du premier salarié, une mesure annoncée en juin et déjà effective, qui, comme son nom l’indique, est destinée à soutenir les TPE embauchant un premier salarié.
Par ailleurs, l’article 10 du projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoyait l’extinction de plusieurs dispositifs d’exonération de cotisations dans les zones de revitalisation rurale, les zones de restructuration de la défense et les bassins d’emploi à redynamiser. Cet article a été supprimé par les députés et le Gouvernement a décidé, en conséquence, d’abonder les crédits du programme 103 de 38, 3 millions d’euros. Je m’en réjouis, madame la ministre, et je salue la capacité d’écoute du Gouvernement.
Enfin, le taux de chômage est deux fois plus élevé chez les personnes en situation de handicap. Pour faire face à cette situation inacceptable, 802 millions d’euros sont inscrits dans le budget de 2016 pour le soutien à l’emploi dans les structures d’insertion. Avec 500 aides au poste supplémentaires, le Gouvernement concrétise son engagement d’un accroissement de 2 500 aides au poste dans les entreprises adaptées depuis 2012.
Le chômage de masse est un mal profond qui mine la société française. Le rôle d’amortisseur social joué par l’assurance chômage n’est plus à démontrer. Les partenaires sociaux s’apprêtent à renégocier la convention triennale, laquelle devrait être conclue en 2016. Comme vous, madame la ministre, nous nous fions à eux pour conserver le rôle protecteur de l’assurance chômage, l’adapter aux évolutions du marché du travail et pérenniser financièrement ce régime de protection.
C’est en luttant contre l’exclusion sociale que nous atténuerons les maux de la société ! Ce budget, sanctuarisé, va dans le bon sens et le groupe socialiste – qui ne votera pas l’amendement présenté par la majorité sénatoriale – vous soutiendra, madame la ministre, dans votre détermination et votre engagement à faire reculer le chômage.
La reprise économique pointe à l’horizon
Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste.
Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des finances, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, à chacun sa manière d’interpréter les chiffres !
Si, voilà encore quelques jours, nous pouvions être satisfaits de la baisse du nombre de chômeurs enregistrée au mois de septembre, force est de constater que cette embellie a été de courte durée. Les derniers chiffres font état d’une augmentation de 42 000 du nombre des demandeurs d’emploi au mois d’octobre ! Madame la ministre, vous jugez ces chiffres insatisfaisants ; c’est le moins que l’on puisse dire, puisqu’il s’agit là de la plus forte hausse du chômage depuis 2013 !
Bien sûr, nous savons que les chiffres peuvent varier d’un mois à l’autre, mais nous savons aussi qu’ils ne peuvent, en l’état, traduire une diminution durable du nombre de demandeurs d’emploi. Contrairement à ce que le Gouvernement espérait, la forte baisse constatée en septembre ne marquera pas – je le crains – le début d’une inversion crédible et durable de la courbe du chômage.
En incluant l’outre-mer, le nombre de personnes inscrites à Pôle emploi et n’ayant pas du tout travaillé en octobre frôle la barre des 4 millions. Parmi elles, les plus de 50 ans sont particulièrement touchés.
La hausse du mois d’octobre a épargné les jeunes, dont le taux de chômage aurait baissé de 2, 9 % sur les douze derniers mois. Pour autant, les chiffres restent élevés et inquiétants.
C’est une question à laquelle tous les gouvernements qui se sont succédé depuis vingt ans n’ont pas su ou pas pu répondre de manière efficace. Malgré de nombreuses initiatives, les statistiques montrent que, jusqu’à présent, nous n’avons pas réussi à combattre ce fléau. Ce constat est d’autant plus vrai chez les jeunes peu ou pas diplômés.
Voilà une semaine, un débat s’est tenu sur l’initiative du Cercle des économistes, en partenariat avec le journal Le Monde. Le thème était : « Ouvrons le marché du travail à la jeunesse ! » Plusieurs experts ont esquissé des pistes pour tenter d’apporter une réponse. À cette occasion, Natacha Valla, directrice adjointe du Centre d’études prospectives et d’informations internationales, a dressé le constat suivant : en France, « nous sommes capables de former des élites très compétitives et très recherchées dans le monde de l’entreprise et, en même temps, nous laissons de nombreux jeunes sans diplôme. Il faut adapter le système éducatif aux évolutions de la société et outiller ces jeunes non qualifiés pour qu’ils aient quelque chose à proposer sur le marché du travail. »
L’apprentissage est en effet un formidable levier dans la lutte contre le chômage des jeunes. Il répond à la fois au besoin de qualification et d’insertion professionnelle des jeunes et à la demande des entreprises de recruter des salariés qualifiés.
Votre prédécesseur, madame la ministre, avait tenu ces propos : « […] relancer l’apprentissage, c’est relancer l’emploi. C’est rapprocher la jeunesse des entreprises et rendre plus perméable la frontière de la première embauche. Relancer l’apprentissage, c’est aussi permettre la transmission des petites entreprises et le développement des plus grandes. Bref, c’est revaloriser le travail comme valeur républicaine. » Je ne peux qu’y souscrire ! Pour autant, l’apprentissage est encore aujourd’hui stigmatisé, dévalorisé et trop souvent considéré, à tort, comme un pis-aller de la formation par de nombreux parents.
Aussi, je déplore que le nombre d’entrées en apprentissage ait baissé de 8 % en 2013 et de 3, 2 % en 2014. Je regrette surtout les différentes mesures prises par le Gouvernement en la matière : suppression de la prime à l’apprentissage pour les entreprises de plus de 10 salariés, restrictions apportées au crédit d’impôt en faveur de l’apprentissage et réforme de la taxe d’apprentissage.
Je salue toutefois la mise en place de l’aide « TPE jeunes apprentis », mais je pense que beaucoup reste à faire, notamment au niveau de l’éducation nationale, pour changer les mentalités et faire en sorte que l’apprentissage soit considéré, non plus comme l’unique solution de repêchage des élèves en décrochage scolaire, mais comme une véritable voie de l’excellence.
Plusieurs de nos voisins l’ont bien compris, comme cela a été évoqué. Je pense notamment à l’Allemagne, qui compte moins de 8 % de ses jeunes au chômage.
Madame la ministre, parmi les priorités de la mission « Travail et emploi » figure également l’accompagnement des personnes les plus éloignées de l’emploi.
Les crédits consacrés aux contrats aidés restent ainsi élevés, malgré une légère diminution. Je regrette toutefois que l’accent soit mis sur les contrats aidés du secteur non marchand, alors que nous savons pertinemment qu’ils ne permettent pas un retour durable à l’emploi, plus encore quand les collectivités locales et les associations connaissent – et vont continuer de connaître – de fortes diminutions de leurs dotations.
Notre rapporteur pour avis l’a rappelé, selon une étude de la DARES, six mois après la fin de leur contrat, 66 % des personnes sorties d’un contrat unique d’insertion dans le secteur marchand sont en emploi, contre seulement 36 % des personnes sorties d’un contrat unique d’insertion du secteur non marchand.
Par ailleurs, il ne faut pas se leurrer : les contrats aidés sont qualifiés par certains économistes de « patch transitoire », agissant comme un palliatif, et non comme un curatif efficace face au chômage des jeunes. Ces contrats aidés ne doivent donc pas nous exonérer de la mise en place d’une véritable politique de l’emploi, notamment à destination des jeunes.
Mme Mireille Jouve et M. Charles Revet applaudissent.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs spéciaux, mes chers collègues, il est bien difficile d’aborder cette mission « Travail et emploi » tant le constat que nous faisons est amer. Je n’ai, semble-t-il, pas les mêmes lunettes que notre collègue Éric Jeansannetas ; aussi, je ne porte pas forcément le même regard que lui sur ces chiffres.
Je passerai sur les fameuses promesses en matière d’emploi, alors que les chiffres du chômage ne cessent d’augmenter. À cet égard, les deux derniers mois sont à nouveau particulièrement catastrophiques, les orateurs précédents l’ont rappelé.
À cela, il faut ajouter toutes ces personnes qui ont « basculé » – pardonnez-moi l’expression – du statut de demandeur d’emploi vers les dispositifs d’accompagnement dans l’insertion. Il suffit de voir la progression des lignes budgétaires du revenu de solidarité active dans les conseils départementaux : c’est édifiant, pour ne pas dire effrayant.
Pour illustrer mon propos, je note que le budget de cette mission est quasi stable, alors même que le nombre de demandeurs d’emploi explose, avec une progression de 5, 6 % cette année.
Je parlerai d’abord des fameux contrats en tout genre dont le Gouvernement se prévaut pour réduire le chômage : contrats aidés, contrats de génération ou encore emplois d’avenir.
S’agissant des contrats aidés, nous constatons une diminution de leur nombre dans le secteur marchand : 80 000 ont été signés en 2015 et seulement 60 000 nouveaux contrats sont prévus pour 2016 ! Parallèlement, faute de dotations budgétaires suffisantes, les collectivités locales ont, en grand nombre, décidé de mettre un terme à ces contrats aidés, qu’elles ne peuvent plus continuer à financer. C’est pourquoi je soutiens l’amendement de la commission des finances, qui vise à soutenir les contrats aidés dans le secteur marchand, qui sont plus porteurs.
Par ailleurs, seuls 52 000 contrats de génération ont été signés au 20 septembre 2015, alors qu’il était prévu, à l’origine, d’atteindre 500 000 bénéficiaires, comme l’a rappelé Jean-Marc Gabouty. Là aussi, on est très loin du compte !
Enfin, pour les emplois d’avenir, les prévisions pour 2016 semblent en baisse.
Pour ce qui est de l’accompagnement, je parlerai de Pôle emploi et des maisons de l’emploi et de la formation, les MEF.
En ce qui concerne Pôle emploi, j’avais déjà appelé votre attention sur les inégalités de traitement dont sont victimes les demandeurs d’emploi.
Permettez-moi de prendre pour exemple ma région, Nord-Pas-de-Calais-Picardie. Alors que la Cour des comptes, dans un rapport de 2013, préconisait un renforcement des agences dans le département de l’Aisne, les statistiques montrent que le nombre de conseillers par agence de Pôle emploi est inversement proportionnel au nombre d’inscrits ! Le taux de chômage y atteint 14, 9 % de la population active et le nombre moyen de chômeurs suivis par un conseiller est de 175, contre une moyenne nationale de 116.
Parallèlement, je signale l’étonnante décision de la direction régionale de Pôle emploi Picardie de fermer ses agences chaque après-midi, depuis le 12 octobre 2015. Une telle initiative paraît incompréhensible, à la fois pour les demandeurs d’emploi, mais aussi pour les personnels. Notre collègue Annie David a évoqué la généralisation de cette mesure au 1er janvier 2016. Ainsi, la Picardie a essuyé les plâtres…
Dans ces conditions, il est difficile de pérenniser un service public dont les usagers – demandeurs d’emploi et entreprises – sont particulièrement fragiles : un contact facilité et permanent avec leur agence semble donc essentiel. J’ai entendu tout à l’heure que le chômeur était au centre du dispositif ; il faut croire que c’est uniquement le matin…
En ce qui concerne les maisons de l’emploi et de la formation, les MEF, si l’on peut se satisfaire d’une convention pluriannuelle sur trois ans, minimum vital pour une action dans la durée, qui correspond également au temps nécessaire pour monter les dossiers et obtenir les financements européens souhaités, tels que ceux du Fonds social européen pour lesquels une particulière pugnacité est requise, il apparaît aussi nécessaire de stabiliser les sources et la durée des financements de l’État, qui sont en déclin.
La MEF de ma ville de Laon, pour le même programme d’actions, recevait 400 000 euros de l’État en 2007 ; en 2016, ce financement s’élèvera à 80 000 euros. La baisse est vertigineuse !
Il importe de rendre possible, pour ces structures, l’anticipation de la couverture financière des programmes mis en place par l’État. À l’heure actuelle, les MEF ne disposent d’aucune visibilité sur le maintien ou non de la garantie jeunes après 2017, par exemple.
Pour une meilleure efficacité, ne peut-on envisager une mutualisation des bases de données entre les opérateurs du champ de l’emploi et de la formation ? Aujourd’hui, les MEF et Pôle emploi agissent en parallèle sur le même segment d’activité, mais sans avoir développé de véritables synergies. Certes, l’échange de bases de données est un levier d’amélioration, mais aussi un sujet de rivalité : Pôle emploi possède une meilleure base de données, mais souffre d’une moindre efficacité opérationnelle que les MEF. Il serait cependant utile de se pencher sur cette question et d’améliorer les partenariats.
Je souhaite maintenant parler de l’apprentissage, voie d’orientation prometteuse pour de nombreux jeunes.
Le Président de la République, cela a été rappelé, avait fixé un objectif de 500 000 jeunes en apprentissage en 2017. Or, de deux études publiées en février dernier, il ressort que le bilan est particulièrement négatif. En 2013, le nombre d’apprentis a fléchi de 3, 1 % par rapport à 2012. Les entrées en apprentissage ont baissé de 6, 5 %, alors même qu’il est unanimement reconnu que cette formation est synonyme d’insertion et d’emploi.
Son développement chez nos voisins membres de l’Union européenne, où les taux de chômage sont bien moindres, en est la preuve évidente. Il nous appartient de relancer cette voie d’orientation, en facilitant les garanties auprès des entreprises et en répandant ce dispositif au sein d’une fonction publique encore bien frileuse.
Un état des lieux devait être fait en septembre sur la mobilisation en faveur de l’apprentissage, décrétée en septembre 2014 par le Premier ministre, avec, le cas échéant, l’annonce de mesures complémentaires. Qu’en est-il, madame la ministre ? Je vous remercie de nous répondre sur ce point.
Enfin, la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe », a confirmé l’attribution aux nouvelles régions des compétences dans le domaine de l’emploi et de la formation professionnelle. Néanmoins, celles-ci n’auront pas la responsabilité de la politique de l’emploi, mais pourront obtenir de l’État une délégation de service public. Elles coordonneraient alors tous les acteurs, sauf Pôle emploi, qui garde son autonomie. L’apprentissage relèvera également de leur compétence.
Toujours dans ma région, les apprentis représentaient 19 % des effectifs du second cycle professionnel. Sur ce point, je suis obligé, à nouveau, d’évoquer la baisse des dotations aux collectivités territoriales et ses effets induits, notamment sur le secteur du BTP, dont les carnets de commandes se sont vidés, entraînant une diminution de 60 000 du nombre des apprentis dans cette branche d’activité depuis 2012.
Madame la ministre, comme je l’ai dit en introduction de mon propos, le constat est amer. Ce qui pourrait entraîner une création massive d’emplois, c’est, d’une part, une reprise économique, que nous voyons encore bien faible, et, d’autre part, une réforme du code du travail, dont les assouplissements nécessaires tardent à se manifester, puisqu’ils sont annoncés pour 2018 !
Vous comprendrez, madame la ministre, que les crédits de la mission ne peuvent nous satisfaire en l’état. Je les voterai néanmoins, si l’amendement de notre collègue rapporteur général sur les contrats aidés est adopté. Entre-temps, nous serons attentifs à vos réponses et à vos propositions.
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.
Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les derniers chiffres du chômage viennent de tomber. « Variation importante avant une stabilisation proche, suivie d’une probable baisse au début de 2016. » : c’est ainsi que vous commentez ces chiffres, madame la ministre.
Pourtant, le constat est flagrant : les chiffres, qu’ont rappelés différents orateurs qui m’ont précédé, sont catastrophiques, je n’y reviendrai pas. Néanmoins, il est important de les comparer à ceux de nos voisins européens.
Les courbes du chômage de la zone euro et de la France évoluent dans deux directions opposées. Alors qu’en octobre 2015, l’Hexagone a connu une croissance impressionnante et inattendue du nombre de chômeurs, en zone euro, c’est un autre record, à la baisse, qui a été atteint. Le chômage n’a jamais été aussi bas depuis 2011. Le nombre de chômeurs est en baisse de 0, 1 % en octobre 2015, le taux atteignant 10, 7 %. Selon Eurostat, c’est en 2013 que la zone euro a connu son taux de chômage le plus élevé, à 12, 2 %.
Certes, les pays du sud ont des taux de chômage bien supérieurs au nôtre, mais si l’on regarde l’Allemagne, le chômage y a encore baissé, pour atteindre 6, 3 %. Du jamais vu depuis la réunification du pays !
Permettez-moi de mentionner également la Suisse, dont mon département est frontalier. Le taux de chômage y est incroyablement bas : 3, 3 % à l’heure actuelle. J’en profite pour vous alerter sur une problématique spécifique à mon département et, plus généralement, aux départements frontaliers de la Suisse. En Haute-Savoie, le taux de chômage est certes bas – environ 7, 5 % –, mais il ne peut être considéré comme étant réellement juste. En effet, lorsque les frontaliers travaillant en Suisse se retrouvent au chômage, ils s’inscrivent en tant que demandeurs d’emploi en France.
Cette observation étant faite, je passe à l’examen des crédits de cette mission « Travail et emploi », qui s’apparente en quelque sorte à un passage en revue des lacunes de la politique de l’emploi développée par le Gouvernement.
Je tiens d’abord à remercier les rapporteurs François Patriat et Jean-Claude Requier pour leur travail, ainsi que le rapporteur pour avis Michel Forissier, remplacé aujourd’hui par le président de la commission des affaires sociales, Alain Milon.
L’enveloppe budgétaire de la mission « Travail et emploi » est en baisse par rapport à l’année 2015. En 2016, cette mission sera dotée de 11, 3 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 11, 4 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une diminution de 5, 56 % en autorisations d’engagement et une quasi-stagnation en crédits de paiement par rapport à 2015. Cette baisse ne peut nous convenir, l’emploi devant être une des priorités du Gouvernement.
Je ne reviendrai pas sur l’attentisme dont fait preuve l’État quand il concentre son effort budgétaire sur les contrats aidés. Si ceux-ci sont nécessaires – notre groupe approuve d’ailleurs certains de ces dispositifs –, ils ne peuvent pas constituer l’axe principal d’une politique de l’emploi.
Je concentrerai plutôt mon propos sur l’apprentissage.
Le volet consacré à l’apprentissage a fait l’objet de nombreuses annonces, après deux ans d’allers et retours qui s’étaient traduits par une chute de 8 % des contrats d’apprentissage en 2013, de 3 % en 2014 dans le secteur privé et de 4 % dans le secteur public.
Des mesures aux conséquences catastrophiques ont été prises dans la loi de finances pour 2014 : le crédit d’impôt en faveur de l’apprentissage a été divisé par deux et un dispositif de compensation partielle ciblé sur les TPE a été mis en place, à savoir une prime d’apprentissage de 1 000 euros dans les entreprises de moins de 11 salariés, étendue ensuite aux entreprises de moins de 50 salariés, puis à celles de moins de 250 salariés, après une énième révision de la part du Gouvernement. L’apprentissage a besoin de stabilité et de tels revirements mettent à mal ce mode de formation.
Madame la ministre, vous êtes récemment entrée au Gouvernement et nous connaissons votre volonté de mieux développer l’apprentissage. Les Français doivent prendre conscience que celui-ci constitue une « voie royale » vers l’emploi. Il représente un enjeu majeur, tant pour l’artisanat que pour l’emploi et la jeunesse. En effet, ce mode de formation est garant du maintien du tissu d’entreprises artisanales, car les apprentis d’aujourd’hui sont les artisans de demain. Il permet de préserver les savoir-faire qui font la qualité de l’artisanat et débouche, dans 80 % des cas, sur un emploi, préoccupation primordiale pour les jeunes et leurs familles.
Il est donc essentiel de développer cette filière de formation, en soutenant les maîtres d’apprentissage et en assurant aux candidats à l’apprentissage de trouver une entreprise d’accueil. Il s’agit là d’un engagement fort. Nous devons prendre exemple sur l’Allemagne, où le nombre d’apprentis est trois fois plus important pour une même cohorte de jeunes.
Dans la région Rhône-Alpes, le nombre d’apprentis est en baisse de 4, 1 % entre 2013 et 2014. Je soulève à nouveau un problème spécifique à la Haute-Savoie, où les apprentis ont tendance à se former en France et à fuir en Suisse pour trouver un emploi.
Je suis favorable aux deux nouvelles aides en faveur des TPE et PME, dont la mise en œuvre est déjà effective : l’aide « TPE première embauche », qui permet de mobiliser pour le premier salarié une aide de 4 000 euros, et l’aide « TPE jeunes apprentis », mesure ponctuelle d’un an qui couvre les coûts supportés par l’employeur pour l’embauche d’un apprenti. Le Gouvernement maintient aujourd’hui un objectif de 500 000 apprentis en 2017.
Enfin, madame la ministre, ma dernière remarque portera sur les crédits des missions locales.
Les crédits d’accompagnement n’ont pas été reconduits en 2016 à la hauteur de la dotation pour 2015, qui était de 45 millions d’euros. Certes, vous vous être montrée favorable à deux amendements de nos collègues députés tendant à augmenter de 10 millions d’euros les crédits pour l’accompagnement assuré par les missions locales et de 2 millions d’euros les crédits dédiés à leur fonctionnement, mais j’insiste sur l’importance de ces missions locales pour nos jeunes. Dans ce domaine, nous ne pouvons pas non plus tergiverser.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.
Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous examinons les crédits de la mission « Travail et emploi » dans un contexte que chacun connaît.
Malgré les nombreux dispositifs existants et la multiplication des opérateurs chargés de la politique de l’emploi, le chômage de masse ne diminue pas. On pourra toujours se rassurer à bon compte avec le maintien à un niveau important de ces crédits : 11, 3 milliards d’euros en autorisations d’engagement, 11, 4 milliards d’euros en crédits de paiement.
Cependant, nous sommes quelques-uns sur ces travées à estimer que l’effort consenti en faveur de l’insertion professionnelle, de l’apprentissage et de la création d’emplois relève malheureusement avant tout de l’affichage.
Au passage, madame la ministre, je reconnais que votre tâche n’est pas facile, vous êtes même attendue au tournant ! Permettez-moi cependant de vous adresse une supplique : optez pour une certaine sobriété de propos, particulièrement lorsqu’il s’agit de commenter les chiffres mensuels du chômage. Nous avons tous en mémoire les acrobaties sémantiques de vos prédécesseurs, qui, malgré l’enchaînement des mauvais résultats, s’échinaient malgré tout à « faire bonne figure ».
Quand c’est mauvais, c’est mauvais ! De grâce, évitons les déclarations telles que : « Nous sommes en train de stabiliser », ou : « Nous mettons en place les outils de lutte contre le chômage qui vont porter leurs fruits » ! Évitons également le commentaire sélectif sur telle catégorie d’âge ou de chômeurs pour masquer la tendance haussière et, au final, pour démontrer, contre toute évidence, que la hausse n’en est pas une. Et encore, je n’ai pas cité la dernière formule, qui ne manque pas d’inventivité : le fameux « ralentissement de la hausse ».
Madame la ministre, je crois sincèrement que ces acrobaties verbales affaiblissent la parole publique. Nous n’attendons pas de vous que vous accomplissiez un exercice d’équilibriste devant une réalité qui se dérobe, mais que vous actionniez les bons leviers.
Nous savons que le Président de la République lui-même, par ses déclarations posant l’inversion de la courbe du chômage en condition à une éventuelle nouvelle candidature, ne vous met pas dans une position très confortable…
Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.
M. François Bonhomme. Il paraît que votre prédécesseur, quittant sa charge ministérielle, aurait confié avoir vécu beaucoup de « moments de solitude ». Devant cet aveu touchant et sincère, on a envie de manifester de la sollicitude.
Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Ce sentiment serait renforcé si ces aveux prouvaient que le Gouvernement a compris que les outils actuels en faveur de l’emploi s’avèrent, au mieux, insuffisants ou inopérants, au pire, coûteux et aggravants.
Je ne reviendrai pas sur les échecs des contrats de génération ni sur la question des crédits consacrés à l’apprentissage. J’évoquerai brièvement les deux dispositifs suivants : les contrats aidés, particulièrement les contrats d’insertion, et les maisons de l’emploi.
La Cour des comptes a rendu un rapport, me semble-t-il sans appel, sur l’efficacité des contrats aidés. Ce sont les contrats en alternance et le CIE qui favorisent le plus l’accès à l’emploi non aidé et à des contrats de travail durables. À l’issue de leur contrat, les bénéficiaires de contrats aidés en secteur non marchand se trouvent dans une situation moins favorable. Or que nous propose le Gouvernement ? Une projection de 200 000 contrats CAE dans le secteur non marchand, contre la création de seulement 60 000 nouveaux contrats CIE dans le secteur marchand.
Pourquoi s’obstiner à reprendre de vieilles recettes qui ont démontré leur inefficacité ? Ce faisant, on perd de vue l’essentiel : c’est dans le secteur privé qu’il faut aider les entrepreneurs à recruter via des contrats aidés.
Concernant les collectivités locales, c’est une litote de dire qu’elles ne sont pas très enthousiastes à l’idée d’envisager l’embauche en ayant recours à un CUI ou à un CAE.
C’est la raison pour laquelle l’amendement de M. le rapporteur général de la commission des finances va dans le bon sens : il tend à réduire les crédits alloués aux contrats aidés du secteur non marchand par la suppression des 200 000 CUI-CAE supplémentaires prévus en 2016, et à créer 40 000 contrats supplémentaires dans le secteur marchand.
Concernant les maisons de l’emploi, le Gouvernement avait envisagé de réduire de moitié les crédits par rapport à 2015, en leur accordant 13 millions d’euros, alors que la baisse est continue depuis plusieurs années, et que, je le rappelle, la loi Borloo créant les maisons de l’emploi appelle une continuité d’action et de moyens qui ne peuvent tolérer des variations brutales ou des trajectoires chaotiques.
À ce degré de baisse, toute nouvelle restriction envisagée compromettrait à coup sûr l’existence même des maisons de l’emploi. Heureusement, les députés ont abondé, à juste titre, ces crédits à hauteur de 8 millions d’euros. C’est une sage décision. Il était plus que temps, car les maisons de l’emploi sont un outil territorial permettant de regrouper et de coordonner les acteurs de l’emploi au niveau local.
Oui, madame la ministre, vous pouvez vous appuyer sur le réseau des maisons de l’emploi qui ont fait la preuve de leur efficacité. Nous avons besoin de ces outils d’ingénierie territoriale !
Pour terminer, je souhaiterais vous interroger sur l’évaluation externe des maisons de l’emploi que le Gouvernement envisage de mettre en place. Pouvez-vous simplement nous indiquer, madame la ministre, comment, dans quel délai et sur quelle base cette évaluation sera conduite ?
En conclusion, nous voterons les crédits de la mission « Travail et emploi », sous réserve de l’adoption des amendements proposés par la commission. En revanche, nous rejetterons les crédits du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ».
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, madame la présidente de la commission des finances, messieurs les rapporteurs spéciaux, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai écouté avec attention vos interventions, et je souhaite y répondre le plus précisément possible, en remettant en perspective les priorités du budget de l’emploi et, plus largement, de notre action pour 2016.
Il s’agit d’un budget à la fois sanctuarisé et recentré sur les actions les plus efficaces pour la création d’emplois, la lutte contre le chômage et l’insertion professionnelle des personnes les plus fragiles.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le savez, pour que le chômage baisse durablement, il faut deux préalables, comme l’ont dit MM. Gabouty et Jeansannetas.
Le premier est que la croissance reparte. En 2015, la croissance sera d’au moins 1, 1 %. Nous avons donc d’ores et déjà dépassé notre prévision de croissance.
M. Jean Desessard s’exclame.
Le second est que notre économie crée de l’emploi. De septembre 2014 à septembre 2015, près de 50 000 créations nettes d’emplois ont eu lieu, ce qui prouve que les entreprises reprennent peu à peu confiance dans leur capacité à investir et à créer de l’emploi, notamment grâce aux dispositifs que nous avons mis en œuvre comme les allégements de charge, la mise en place du pacte de responsabilité et de solidarité et le CICE. Toutefois, les entreprises restent prudentes et ont majoritairement recours aux CDD ou à des contrats d’intérim, c’est-à-dire à des contrats courts. Cela explique les fortes variations à la hausse et à la baisse que nous enregistrons ces derniers mois.
Les chiffres du chômage que j’ai annoncés jeudi dernier ne sont évidemment pas satisfaisants, mais j’ai tenu les mêmes propos le mois précédent lorsqu’ils étaient bons. Je n’ai fait preuve d’aucun triomphalisme ; j’ai simplement affirmé que les analyses des résultats devaient s’inscrire dans la tendance et dans la durée, car la reprise de l’activité économique est graduelle, ce qui explique ces mouvements de basculement des demandeurs d’emploi de la catégorie A vers la catégorie B ou la catégorie C. Nous devons vraiment améliorer cette situation.
Nous avons obtenu des résultats encourageants concernant le chômage des jeunes, puisque l’on recense 20 000 inscrits de moins depuis le début de l’année. Il est important de le rappeler ici, car notre situation n’est pas identique à celle des autres pays. Comparons ce qui est comparable !
Nous enregistrons chaque année en France 700 000 départs à la retraite, contre 850 000 entrées sur le marché du travail. C’est une chance pour notre pays, mais c’est aussi un défi pour notre économie. L’Allemagne compte en revanche 700 000 départs à la retraite pour 660 000 entrées sur le marché du travail. Voilà la réalité !
Pour analyser notre situation, nous devons impérativement établir ces comparaisons et les adapter pour qu’elles soient crédibles.
Vous l’aurez compris, je veux conforter et amplifier cette relance de notre économie, encore fragile. Tel sera le sens de la loi portant réforme du droit du travail que je défendrai devant vous.
J’ai bien entendu les quelques paroles de réconfort…
Mme Myriam El Khomri, ministre. … que m’ont adressées certains orateurs. Je les en remercie bien évidemment. Néanmoins, mesdames, messieurs les sénateurs, après avoir été secrétaire d’État à la politique de la ville, confrontée aux quartiers où les taux de chômage sont les plus forts, je peux vous assurer que, pour œuvrer à l’amélioration de la situation de l’emploi et du travail, je n’ai pas besoin de réconfort ! Je suis particulièrement mobilisée dans ma recherche de réponses permettant d’innover et de répondre au mieux à la situation de nos concitoyens.
Applaudissementssur les travées du groupe socialiste et républicain.
C’est donc à ces enjeux que répond le budget pour 2016 : il est sanctuarisé dans ses montants et stabilisé en crédits de paiement par rapport à la loi de finances pour 2015, en progression de 15 % par rapport à 2012. Le budget de l’emploi a été renforcé à hauteur de 27 millions d’euros à l’issue de la première lecture à l’Assemblée nationale.
Ces chiffres marquent la priorité donnée par le Gouvernement à l’emploi, dans un contexte de réduction du déficit public. Comme l’ont souligné les rapporteurs spéciaux, ce budget est exigeant concernant la maîtrise des dépenses de fonctionnement, pour donner la priorité aux actions en direction des demandeurs d’emploi.
En premier lieu, le budget pour 2016 amplifie la mobilisation pour la lutte contre le chômage des jeunes et pour le droit à la nouvelle chance, qui est une orientation de la feuille de route de la conférence sociale pour l’emploi.
Comme l’a indiqué M. le rapporteur spécial François Patriat, un engagement massif de 123 millions d’euros supplémentaires est prévu au profit du déploiement de la garantie jeunes. Voilà l’exemple d’un dispositif innovant, expérimenté, puis évalué, avant d’être généralisé avec l’appui de l’ensemble des acteurs locaux, missions locales, départements, entreprises. La garantie jeunes sera étendue à 60 000 nouveaux jeunes en 2016. Par conséquent, à la fin de l’année prochaine, environ 100 000 jeunes auront bénéficié de cette garantie.
Nous avons là aussi l’exemple d’un dispositif qui fonctionne, parce qu’il se construit autour des besoins de chaque jeune accompagné, comme l’a rappelé M. Desessard.
Concrétiser le droit à la nouvelle chance, c’est aussi augmenter les capacités d’accueil de l’Établissement pour l’insertion dans l’emploi, l’EPIDE : le budget pour 2016 dégage les moyens pour y accueillir 1 000 jeunes supplémentaires chaque année et poursuivre l’ouverture des deux nouveaux centres annoncés.
Il en va de même des écoles de la deuxième chance, les E2C : le budget pour 2016 consolide l’engagement de l’État en leur faveur, à hauteur de 24 millions d’euros, qui permettront d’accompagner le développement du réseau, notamment dans les régions aujourd’hui peu couvertes. Plusieurs projets d’écoles ou de nouveaux sites ont été lancés pour aboutir en 2016 ou au début de 2017 près de Caen, à Angoulême ou encore à Bergerac.
Je partage vos conclusions sur la nécessité d’une meilleure articulation des différents dispositifs : leur nombre est suffisant, mais il faut assurer la cohérence entre ceux qui existent déjà, en partant directement de leurs bénéficiaires et non de ceux qui les mettent en œuvre.
C’est notamment l’objet des plates-formes d’appui aux décrocheurs scolaires, pour organiser le repérage et le suivi individuel de ces jeunes, et proposer à chacun une solution adaptée. En effet, en France, le chômage touche les personnes peu ou pas qualifiées. Il est donc essentiel que cette logique de partenariat soit renforcée.
Les missions locales, vous l’avez dit, sont au cœur de l’effort pour l’insertion des jeunes : depuis 2012, l’État a renforcé leur rôle, qui sera essentiel pour assurer la généralisation de la garantie jeunes, ainsi que pour préparer les sorties positives des jeunes terminant leur contrat en emploi d’avenir en 2016.
À l’Assemblée nationale, les moyens des missions locales ont fait l’objet d’un débat. Grâce aux amendements adoptés par les députés, avec mon soutien, les crédits dédiés aux missions locales seront en progression globale de 2, 8 %, afin de prendre en compte le besoin spécifique d’accompagnement des emplois d’avenir et les enjeux de structuration des missions locales. Au total, près de 12 millions d’euros supplémentaires ont ainsi été dégagés pour les missions locales. Il ne me semble pas pertinent d’aller au-delà.
L’un des axes majeurs pour l’insertion professionnelle des jeunes est le développement de l’apprentissage. Vous l’avez tous évoqué, et je partage votre point de vue. Comme je l’ai indiqué devant la commission des affaires sociales, ma priorité est de faire reconnaître l’apprentissage comme une voie d’excellence, car 70 % des jeunes apprentis trouvent ensuite un emploi. En outre, les apprentis d’aujourd’hui dans les secteurs de l’artisanat et du petit commerce seront nos chefs d’entreprise de demain.
Le Gouvernement mène en la matière une politique globale qui mobilise l’ensemble des ministères autour de cette priorité, pour rendre l’apprentissage plus accessible et plus attractif.
En témoigne l’engagement exemplaire pris par l’État pour recruter 10 000 apprentis dans la fonction publique d’ici à 2017.
Pour 2015, nous avons déjà dépassé notre objectif, avec 4 500 contrats d’apprentissage. Je précise que deux apprentis ont été embauchés voilà deux semaines au sein de mon ministère, rue de Grenelle, l’ensemble des services du ministère accueillant plus de 150 apprentis. (Applaudissementssur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Le renforcement des moyens financiers fléchés pour l’apprentissage est également sans ambiguïté. L’apprentissage est affirmé comme une priorité budgétaire : l’effort financier total de l’État dans ce domaine s’élèvera à 2, 74 milliards d’euros en 2016, contre 2, 52 milliards d’euros en 2015, en raison notamment de la mise en place de l’aide « TPE jeunes apprentis ».
Depuis 2014, nous avons donc levé les freins financiers, puisque 382 millions d’euros supplémentaires ont été consacrés au développement de l’apprentissage. J’entends votre souhait d’avoir une vision plus directe de la répartition des financements entre l’État et les régions. Le Gouvernement fera bien évidemment un effort en la matière.
L’effort financier de l’État retrouvera en 2016 son niveau de 2013, avant la réforme des primes à l’apprentissage, tout en s’appuyant sur des dispositifs mieux ciblés. Il s’agit aussi de donner une plus grande visibilité aux entreprises.
Beaucoup d’actions ont été conduites pour adapter les conditions d’emploi des apprentis et les rendre plus attractives. Cette réflexion débouchera, à la rentrée de 2016 et à l’issue de la concertation actuellement en cours, sur la création d’un véritable statut non seulement de l’apprenti, avec un socle commun de droits pour l’accès à la mobilité ou l’hébergement, mais aussi des maîtres d’apprentissage, comme l’ont demandé Mme David ou M. Pellevat.
Au-delà, la question de l’articulation entre le monde de l’entreprise et l’éducation nationale a été soulevée. J’entends cette demande. La réussite et l’insertion professionnelle des jeunes exigent que les contenus de formation soient en adéquation avec les besoins du marché du travail.
C’est la raison pour laquelle je travaille avec Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, pour l’accélération de la rénovation des diplômes et l’implication des branches professionnelles dans l’adaptation du contenu des diplômes.
En outre, vous le savez, les questions de l’orientation professionnelle et de l’image de la voie professionnelle sont déterminantes dans le choix des familles et des jeunes. M. Barbier l’a signalé à juste titre.
L’industrie recrute actuellement au sein de certains bassins d’emplois, mais certaines places d’apprentissage restent encore vides. Nous devons prendre en compte le traumatisme de certains territoires marqués, dans le passé, par des licenciements massifs dans l’industrie. Il faut donc donner une autre image des métiers industriels. C’est essentiel, si nous voulons véritablement améliorer la situation.
Le deuxième axe fort de ce budget, c’est la poursuite de la mobilisation des outils de la politique de l’emploi en vue de favoriser le retour à l’emploi des personnes les plus éloignées du marché du travail.
Bien sûr, ce chantier suppose la consolidation du secteur de l’insertion par l’activité économique et des engagements financiers encore accrus en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés.
Le présent projet de loi de finances crée 295 000 nouveaux contrats aidés pour un montant total de 2, 4 milliards d’euros. Il s’agit là d’une programmation à la fois ambitieuse et cohérente, s’appuyant sur les perspectives de rebond de l’emploi marchand en 2016.
Face à un taux de chômage élevé, nous avons mené, depuis 2012, un travail de fond destiné à accroître la qualité des contrats aidés. De surcroît, nous avons pris des engagements pour étoffer la formation et améliorer le ciblage des publics. M. Jeansannetas l’a rappelé : dans ce contexte, les contrats aidés sont indispensables pour accéder à une première expérience ou pour éviter l’éloignement durable du marché du travail.
Au demeurant, je note que, dans ce domaine, nous sommes loin des records : en juin 1997, on recensait plus de 850 000 bénéficiaires de contrats aidés dans notre pays. Aujourd’hui, on en dénombre 450 000.
La programmation pour 2016 prévoit 60 000 nouveaux contrats dans le secteur marchand et 200 000 autres dans le secteur non marchand.
La plupart des orateurs ont mentionné une étude réalisée par la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES. Mais ce travail portait sur les contrats aidés en vigueur de 2005 à 2007. Depuis lors, les contrats aidés ont été réformés : les formations ont été rendues obligatoires, la durée des contrats a été étendue et un ciblage des publics a été assuré.
Les chiffres sont clairs : parmi les bénéficiaires des contrats d’accompagnement dans l’emploi, les CAE, 15 % sont des travailleurs en situation de handicap, 71 % sont des femmes, 30 % sont des seniors et 74 % sont des demandeurs d’emploi de longue durée.
Or, au titre des contrats initiative emploi, les CIE, le taux de travailleurs handicapés s’établit à 9 %. Il est donc bien moindre. Quant aux chômeurs de longue durée, on en dénombre 68 %. Ce taux est également moins élevé.
Je vous l’assure, avec un ciblage pertinent et avec une formation obligatoire, les contrats aidés bénéficient aux publics les plus en difficulté, notamment aux jeunes des quartiers populaires qui subissent des discriminations.
Mme Myriam El Khomri, ministre. Ces dispositifs offrent à ces jeunes une première expérience professionnelle !
Applaudissementssur les travées du groupe socialiste et républicain.
Je le répète, il faut tenir compte de la spécificité des contrats proposés dans le secteur non marchand.
Le budget pour 2016 assure un équilibre entre ces deux dispositifs, qui ont chacun leur intérêt propre. Avec les contrats aidés, il s’agit d’activer les dépenses pour l’emploi plutôt que de se contenter d’indemniser ou de verser une allocation.
Je m’opposerai donc radicalement à l’amendement de la commission des finances, …
… tendant à supprimer l’enveloppe destinée aux contrats aidés du secteur non marchand pour 2016.
Le troisième axe fort de ce budget, c’est le soutien au développement de l’emploi, en particulier dans les PME et les TPE.
L’aide à l’embauche d’un premier salarié pour les TPE, qui mobilise 85 millions d’euros au titre du projet de loi de finances pour 2016, s’inscrit dans une stratégie globale d’appui à la création et au développement des petites entreprises. Ce dispositif va de pair avec la création de l’agence France entrepreneur et avec l’augmentation, assurée lors des débats à l’Assemblée nationale, des moyens dédiés au microcrédit professionnel.
Actuellement, un tiers des créateurs d’entreprise sont d’anciens demandeurs d’emploi. La création d’entreprises est donc bien un vecteur essentiel de la lutte contre le chômage.
Dans le même but, le Gouvernement a décidé de geler les seuils fiscaux pour lever les freins à l’embauche dans les PME.
Le budget de l’emploi pour 2016 inclut également la mise en œuvre par les DIRECCTE d’une offre de service dédiée à l’appui de la gestion des ressources humaines dans les PME.
Bien sûr, je serai particulièrement attentive à ce que cette démarche se déploie sur l’ensemble du territoire, parallèlement à la réforme du code du travail, que j’ai évoquée il y a quelques instants. Cette réforme a pour but de rendre l’application du droit du travail plus lisible et plus accessible pour les petites entreprises, peut-être en leur ouvrant les accords types de branche.
En outre, M. Requier l’a relevé : les élections professionnelles au sein des TPE, prévues à la fin de l’année 2016, seront un moment extrêmement important pour faire vivre le dialogue social.
J’en viens à l’action que nous menons en faveur du développement de l’emploi.
Madame David, vous m’avez interrogée sur l’emploi saisonnier. Je vous remercie de me donner l’occasion de préciser l’action du Gouvernement dans ce domaine.
Le Conseil national de la montagne, qui s’est tenu en septembre dernier, a permis au Premier ministre de formuler, au titre du contrat saisonnier, de l’accès à l’emploi et de la formation, plusieurs engagements que nous tiendrons.
Je sais que vous vous êtes beaucoup investie sur ce dossier. À partir de vos propositions, j’engagerai une phase de concertation avec les partenaires sociaux. Il s’agira de distinguer les dispositions destinées à figurer dans le projet de loi « Travail », que je défendrai, et celles qui doivent faire l’objet d’une négociation ou d’une mobilisation du service public de l’emploi.
Seront ainsi examinées l’inscription dans le code du travail d’une définition claire de ce qu’est un emploi à caractère saisonnier
Mme Annie David acquiesce.
Sur l’ensemble de ces sujets, nous avancerons par la concertation, par la négociation et par la loi. Plusieurs centaines de milliers de contrats sont concernés chaque année et ils sont essentiels pour l’économie de notre pays. Au surplus, la sécurisation des parcours professionnels de tous les actifs est une priorité de ce gouvernement.
Enfin, je dirai quelques mots du service public de l’emploi.
Le budget pour 2016 traduit notre soutien à Pôle emploi et notre exigence envers cet opérateur, dont la subvention reste stable par rapport à 2015. Depuis 2012, nous avons renforcé les moyens de Pôle emploi : contrairement à nos prédécesseurs, nous avons créé, en son sein, 4 000 emplois à temps plein.
De surcroît, nous poursuivrons le redéploiement de près de 1 800 emplois à temps plein d’ici à 2018 pour améliorer l’accompagnement des demandeurs d’emploi.
Je ne peux pas laisser dire dans cet hémicycle que les agences de Pôle emploi seront dorénavant fermées l’après-midi.
En réalité, dans certains territoires, nous avons expérimenté l’ouverture au public de ces agences l’après-midi, sur rendez-vous.
Les bénéficiaires de ce service y ont vu une amélioration. En effet, grâce à cette organisation, ils peuvent être reçus à chacune de leurs visites par le même conseiller. Ils n’ont donc plus à récapituler systématiquement leur situation.
Ainsi, là où cette expérimentation est menée, les agences de Pôle emploi sont ouvertes au public aux mêmes horaires que précédemment, à ceci près que, l’après-midi, on ne peut y être admis que sur rendez-vous. Cela étant, les personnels de ces structures feront preuve de discernement : il va sans dire qu’un demandeur d’emploi qui vient de parcourir vingt kilomètres pour se présenter à l’agence sera reçu !
Je le répète, cette organisation a été saluée par les demandeurs d’emploi comme par le personnel de Pôle emploi. Je tenais à procéder à cette mise au point.
M. Jacques Chiron applaudit.
En la matière, l’enjeu majeur est de rapprocher plus efficacement l’offre et la demande d’emploi.
Monsieur Desessard, nous souscrivons bien entendu à la préoccupation que le Sénat a exprimée en adoptant une résolution pour un guide de pilotage statistique pour l’emploi. Nous nous rencontrerons prochainement pour évoquer cet outil permettant de référencer, aux niveaux local et national, les offres d’emploi non pourvues tout en déterminant les causes de cette situation. Il s’agit là d’une piste intéressante.
De surcroît, j’insiste sur le virage numérique que j’ai demandé à Pôle emploi d’effectuer. L’« emploi store » et diverses applications développées par des start-ups d’État seront mis en œuvre : j’ai confirmé ces décisions la semaine dernière. Ces outils permettront une meilleure diffusion des services.
Nous n’oublions pas non plus l’enjeu de l’accès au numérique. Il est essentiel d’aider véritablement les demandeurs d’emploi qui ont besoin de soutien face au numérique.
Enfin, nombre d’orateurs ont évoqué le rôle et les moyens des maisons de l’emploi.
En 2016, les crédits d’État s’établiront au niveau effectivement dépensé en 2015. Ce choix doit permettre d’engager une démarche de ciblage et d’évaluation pour mieux appuyer les maisons de l’emploi. Ces dernières jouent un rôle d’identification des besoins des territoires. Elles permettront de favoriser, au plus près des demandeurs d’emploi, le déploiement des plans de formation prioritaires. C’est précisément le souhait qu’a exprimé M. Lefèvre.
Enfin, madame David, je dirai un mot de la politique de santé au travail.
Le troisième plan Santé au travail, ou PST 3, dont les orientations ont été définies par les partenaires sociaux, sera bel et bien lancé ce mois-ci.
L’axe essentiel de ce plan est d’ériger en priorité la prévention des risques, en rompant avec une approche axée sur la réparation. Les réunions à venir nous permettront de déterminer comment assurer un meilleur accompagnement dans le cadre fixé par le présent projet de loi de finances.
Les moyens figurant au budget de l’emploi doivent permettre l’impulsion, mais la mobilisation doit être bien plus large. Les opérateurs auront les moyens nécessaires d’accompagner les politiques à mettre en œuvre, même si, comme pour l’ensemble des opérateurs de l’État, on exige d’eux une gestion rigoureuse.
Les crédits consacrés aux études permettant d’améliorer la connaissance des risques professionnels et l’appui aux entreprises sont, quant à eux, en hausse par rapport à la loi de finances initiales pour 2015. Depuis 2012, ils ont progressé de 20 %.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je le répète, 2016 sera une année importante, qui plus est dans la période difficile que nous traversons. Aider les entreprises à retrouver la confiance, grâce au projet de loi « Travail », relancer l’apprentissage et conforter tous les acteurs de l’emploi dans nos territoires : ces enjeux sont essentiels pour améliorer la situation sur le front de l’emploi.
Soyez-en assurés, je déploie toute mon énergie, au plus près du terrain, pour faire reculer durablement le nombre de demandeurs d’emploi et mettre en mouvement les acteurs de l’emploi, de l’insertion, de la formation et du développement économique. C’est avec cet écosystème vertueux que nous aboutirons à des résultats concrets.
Ce budget nous en donne les moyens. Je vous invite donc à voter les crédits de la mission « Travail et emploi »...
Mme Myriam El Khomri, ministre. … ainsi que du compte spécial « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ».
Applaudissementssur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Jean Desessard applaudit également.
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Travail et emploi », figurant à l’état B.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Travail et emploi
Accès et retour à l’emploi
Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi
Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail
Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail
Dont titre 2
624 241 017
624 241 017
L’amendement n° II-140, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Accès et retour à l’emploi
Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi
Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail
Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. le rapporteur général.
Nous proposons de réduire les crédits dédiés aux contrats aidés du secteur non marchand et, parallèlement, de majorer les crédits dédiés aux contrats aidés du secteur marchand.
Mme la ministre a évoqué des travaux de la DARES portant sur la période 2005 à 2007. Pour notre part, nous nous référons à une étude plus récente établie par cette direction, comparant les taux de sortie sur l’emploi durable de ces différents contrats pour l’année 2012.
Les conclusions sont claires : six mois après la fin de leur contrat, 36 % des personnes ayant bénéficié d’un CUI dans le secteur non marchand sont en emploi, soit environ un tiers, contre 66 % des bénéficiaires d’un CUI dans le secteur marchand, soit près de deux tiers. L’écart entre les deux chiffres est flagrant ! La proportion varie du simple au double.
Nous sommes donc naturellement incités à augmenter les possibilités d’accueil des jeunes dans le secteur marchand et à les diminuer dans le secteur non marchand, où, à l’évidence, ce dispositif ne fonctionne pas.
Au demeurant, j’insiste sur une véritable difficulté relative au secteur non marchand : dans ce domaine, les employeurs sont des associations ou des collectivités locales.
Or – nous en sommes particulièrement conscients au Sénat – les collectivités locales auront beaucoup de mal à accueillir des jeunes demain au titre de ces contrats. Pour trois années successives, elles vont devoir faire face à des baisses de dotations. Les collectivités sont perpétuellement invitées à réduire leurs coûts de fonctionnement : le Gouvernement nous répète sans cesse qu’elles disposent de marges de manœuvre en la matière.
Aussi, il ne serait pas raisonnable d’inciter les collectivités territoriales à engager davantage de jeunes au titre de ces contrats. En revanche, un certain nombre d’entreprises ont besoin de recruter. Nous préférons nettement concentrer ces contrats dans des sociétés privées, particulièrement là où ils déboucheront sur des embauches et des emplois durables.
J’ajoute que, par décret d’avance, le Gouvernement a créé 100 000 contrats supplémentaires en 2015. Les objectifs fixés au titre du précédent budget ont donc été très largement dépassés, mais les contrats aidés ne sauraient être réduits à un instrument de traitement statistique du chômage !
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.
Monsieur le rapporteur général, au nom de la commission des finances, vous demandez à la majorité sénatoriale de commettre une seconde mauvaise action.
Deux de vos amendements tendent, comme par hasard, à pénaliser les missions socio-économiques. C’est ainsi que vous espérez combler les déficits que l’adoption de vos amendements a créés, en réduisant les recettes de manière très significative – je ne reviendrai pas sur ce sujet, que j’ai déjà abordé au cours de la séance d’hier.
La première mauvaise action consistait à amputer la prime d’activité à hauteur de 650 millions d’euros. À présent, vous proposez une réduction de crédits de l’ordre de 457 millions d’euros.
Néanmoins, en exposant vos arguments, vous avez oublié un facteur distinctif essentiel entre les divers contrats aidés, selon qu’ils relèvent du secteur marchand ou du secteur non marchand. Mme la ministre l’a démontré très brillamment, chiffres à l’appui : ces deux types de dispositif ne visent pas les mêmes publics !
Toutes les statistiques depuis un an le prouvent : le chômage le plus difficile à résorber, c’est le chômage de longue durée, celui qui frappe les personnes les plus éloignées du travail. Or le secteur marchand n’est pas intéressé par ces profils. Je n’ai pas besoin de revenir sur la démonstration faite à l’instant par Mme la ministre.
Par ailleurs, vous oubliez, au passage, que le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, coûte quand même 41 milliards d’euros aux finances publiques jusqu’en 2017. Il a bien pour objectif de reconstituer les marges des entreprises, amputées par la crise, et de faire redémarrer la machine économique par l’investissement et par l’emploi.
Vous ne pouvez donc pas dire que vous êtes les seuls à aider le secteur marchand, car 41 milliards d’euros, ce n’est pas rien !
Pour terminer, je voudrais vous rappeler quelque chose à propos de l’année 2012, année dont vous avez parlé. Quand la nouvelle majorité a regardé ce qui restait dans les tiroirs, qu’a-t-elle constaté ? Vous aviez utilisé, lors du premier semestre, tous les crédits destinés aux contrats aidés. Tous ! Il ne restait plus un euro... À l’époque, ces contrats devaient bien servir à quelque chose ! Pourquoi ne permettraient-ils plus, aujourd’hui, d’aider et de soutenir l’économie ?
Vous ne pouvez pas l’avoir oublié, monsieur de Montgolfier ! Pour ma part, je m’en souviens très bien !
Nous ne voulons donc pas de votre amendement, pas plus que de celui sur la prime d’activité. Je le répète, vous commettez une bien mauvaise action !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Le groupe UDI-UC est particulièrement préoccupé par la situation de l’emploi dans notre pays.
De nombreux orateurs ont évoqué les dernières données chiffrées révélant la situation particulièrement dramatique de l’emploi.
Selon nous, cette situation résulte du fait que les propositions formulées par l’actuelle majorité ne répondent pas aux besoins de l’économie.
Vous l’avez dit, madame la ministre, inverser la courbe du chômage suppose, d’abord, le retour de la croissance et, ensuite, une création nette d’emplois. Je partage totalement ce constat, mais les propositions que vous formulez ne sont pas de nature à permettre cette inversion de la courbe du chômage.
L’amendement présenté par le rapporteur général de la commission des finances va justement dans le sens que vous indiquiez : privilégier l’action en faveur du secteur marchand. Favoriser l’attribution des contrats aidés à ce secteur plutôt qu’au secteur non marchand entre dans cette logique. Sinon, nous restons dans le traitement social du chômage, ce qui n’est pas à la hauteur des enjeux qui sont devant nous.
Le groupe UDI-UC ne peut donc que soutenir la proposition de la commission.
Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et du groupe Les Républicains.
Problème de société crucial touchant nos concitoyens, ce sujet doit être abordé avec beaucoup d’humilité.
Les différentes majorités recourent bien, à la base, au traitement social du chômage, car on ne peut pas rester les bras croisés devant le nombre de chômeurs.
En revanche, si je vous ai bien compris, madame la ministre, nous assistons au frémissement d’une reprise… Or, dans cette situation, il vaut vraiment la peine de réajuster les curseurs.
Élu d’un département où le nombre de bénéficiaires du RSA est important, je souhaite vous faire part, très modestement, de mon expérience de président du conseil général dans la période 2006-2007. À cette époque, nous avons connu une légère reprise économique et nous avons mis en place des actions d’insertion à visée beaucoup plus professionnelle que sociale.
En effet, la politique du RSA, comme celle des contrats aidés, dont le public est aussi difficile, est une politique contracyclique. Elle ne marche bien qu’en période de reprise économique, car les personnes en difficulté peuvent alors, grâce aux actions mises en place, trouver un emploi, ce qui ne peut pas arriver dans une période où le chômage est élevé. On a tendance à s’épuiser dans le traitement social, alors que c’est au moment de la reprise qu’il faut s’épuiser à développer une politique qui proposera une formation procurant véritablement un emploi.
Vous le voyez, il faut faire bouger les curseurs. C’est la raison pour laquelle je crois que l’amendement d’Albéric de Montgolfier est tout à fait pertinent. Si nous sommes dans une période de reprise économique, c’est le moment de mettre le paquet sur les contrats initiative emploi, les CIE. Ils visent un public différent, mais ils apportent une formation par alternance, qui se rapproche de l’apprentissage. On sait bien que les résultats de ces contrats sont nettement plus performants. Dès à présent, il faut donc infléchir la politique de l’emploi.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.
Ces derniers jours, nous nous sommes demandé, lors des réunions de la commission des finances, comment la majorité sénatoriale allait faire pour trouver les financements correspondant aux différents cadeaux consentis aux catégories les plus aisées : la baisse de l’impôt sur le revenu pour les 15 % de contribuables des tranches supérieures, l’ISF, le quotient familial, etc. Nous savons que ces cadeaux considérables s’adressent à une catégorie bien précise et nous commençons à voir les réponses que la majorité sénatoriale apporte pour trouver de l’argent !
Nicole Bricq a parlé de la prime d’activité. Elle a eu raison de le faire, puisqu’il s’agissait de s’attaquer aux moyens destinés aux travailleurs pauvres, en les diminuant de 650 millions d’euros.
Avec cet amendement, la cible à atteindre, ce sont les personnes en difficulté. Il vise en effet à diminuer – de près d’un milliard d’euros en autorisations d’engagement – les crédits destinés à l’insertion des personnes les plus éloignées de l’emploi.
Incontestablement, la stratégie politique est là ! On s’attaque à des publics parmi les plus fragiles, afin de dégager des moyens pour financer des cadeaux qui sont fléchés vers les catégories les plus aisées.
Mes chers collègues, je voudrais, par ailleurs, attirer votre attention sur le fait que le secteur non marchand ne comprend pas uniquement les collectivités territoriales, qui n’en représentent qu’environ 20 %. Il faut aussi penser aux associations, en particulier dans le secteur de l’aide à la personne, où il y a aujourd’hui beaucoup d’emplois à pourvoir. Je pourrais également citer les associations œuvrant dans des activités de loisirs, ainsi que l’économie sociale et solidaire.
N’oublions pas les auxiliaires de vie scolaire dans l’éducation nationale ! Ils permettent d’accompagner les enfants handicapés ou en grande difficulté.
S’insérer dans une structure de ce type permet de trouver un emploi ensuite, soit en interne, soit dans le secteur marchand grâce à l’acquisition de compétences.
Bref, les efforts doivent, incontestablement, être poursuivis, tant en ce qui concerne les publics concernés que les besoins importants qui se manifestent dans de nombreux organismes autres que les collectivités locales.
Nous devons y être attentifs, autant qu’à la nécessaire complémentarité entre les questions de formation et d’emploi. Soyons bien conscients que les structures du secteur non marchand dont je viens de parler sont justement soucieuses d’accorder une formation à tous ces jeunes, de les mettre en mouvement, de les préparer à l’emploi et ainsi de leur donner une possibilité de s’insérer.
Nous ne pouvons donc, en aucune façon, tolérer la mesure proposée par cet amendement. Nous la contestons et nous voterons, bien évidemment, contre.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
M. Jean Desessard. En faisant référence à l’intervention de Mme Bricq, on pourrait dire que l’ancienne majorité a créé beaucoup d’emplois aidés, début 2012, pour aider un sortant à retrouver un emploi ! Telle était alors la principale motivation !
Rires sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Mme Bricq a fait référence à la différence de publics et le rapporteur général a évoqué des emplois durables dans le secteur marchand. Madame la ministre, avez-vous des chiffres à ce sujet ? Combien de personnes restent dans l’emploi, en ce qui concerne le secteur marchand, une fois que cet emploi n’est plus aidé ?
Il serait intéressant de savoir si cet emploi aurait été créé en tout état de cause, ou non. Finalement, le contrat aidé a-t-il un effet de levier ou un effet d’aubaine ?
Monsieur Savary, il faut que vous soyez logique. M. Sarkozy, en tant que chef du parti Les Républicains, préconise de diminuer les aides et les allocations chômage pour inciter les gens à reprendre un emploi. Comme si c’était aussi simple ! Mais j’imagine que cette proposition est cohérente pour lui !
Vous dites, de votre côté, que la question n’est pas de retrouver un emploi dans une période de tension économique comme nous en connaissons aujourd’hui. Cela ne servirait à rien d’aider les gens à retrouver un emploi !
Mais si ! Je l’ai entendu : il ne servirait à rien d’aider aujourd’hui les gens qui sont dans les situations les plus désespérées, car ils ne pourraient pas trouver d’emploi ensuite.
M. Sarkozy a pourtant bien dit que, pour trouver un emploi, il suffit de le vouloir. Pour lui, couper les allocations chômage aide les gens à retrouver un emploi. Il faudrait tout de même que vous soyez cohérents.
Retrouver un emploi, est-ce simplement une question de volonté ou existe-t-il de réelles difficultés ?
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
J’ai écouté avec beaucoup d’attention M. de Montgolfier dans son vibrant hommage à la formation professionnelle, à l’apprentissage et à l’entreprise.
On peut en effet constater des résultats intéressants dans ce domaine et beaucoup de jeunes conservent effectivement un emploi dans l’entreprise lorsqu’ils y ont été formés.
Dans ce cas-là, je m’interroge. Ne pouvez-vous pas lancer un message aussi vibrant en direction des chefs d’entreprise ? Il faudrait qu’ils répondent en effet à l’appel désespéré d’un grand nombre de jeunes, qui souhaitent obtenir une formation en alternance et qui font le tour des entreprises de nos départements pour qu’elles les acceptent. Le département du Puy-de-Dôme ne doit pas constituer un cas particulier sur ce point.
Il faut créer les bonnes conditions. Elles n’existent pas aujourd’hui !
Combien de jeunes viennent régulièrement nous voir dans nos permanences et nous expliquent qu’ils ont rempli des dossiers pour une formation en alternance sans trouver d’écho favorable auprès des entreprises ? De ce fait, quelques emplois sont quand même créés pour dispenser la formation théorique complétant la formation pratique reçue dans l’entreprise…
Un certain nombre de jeunes sont désespérés et, plus grave, cette situation désespère aussi leurs parents, voire leurs grands-parents. C’est inacceptable !
Je vous appelle, monsieur de Montgolfier, à vous engager avec la même détermination, le même élan, pour convaincre les chefs d’entreprise de faire l’effort nécessaire de recruter ces jeunes qui ne demandent qu’une chose : se former en alternance.
Madame la ministre, j’ai envie de vous faire une proposition. Devant un problème social important, à savoir l’accueil des handicapés dans l’entreprise, nous avons su décider unanimement, à l’époque, d’imposer aux entreprises de faire un effort en recrutant 6 % de personnes porteuses d’un handicap.
Je ne sais pas s’il faut imposer de recruter 6 %, 5 %, 4 % ou 3 % de jeunes en alternance dans l’entreprise. Toutefois, puisque le Gouvernement a fait un effort important pour aider les entreprises avec le CICE, ne pourrait-on pas prévoir, …
… parmi les conditions requises pour bénéficier du CICE, l’obligation d’employer un certain pourcentage de jeunes suivant une formation en alternance ?
Je voudrais aborder trois points rapidement.
D’abord, s’agissant de l’apprentissage, je pense qu’il y a des entreprises qui ne demandent qu’à embaucher des apprentis, mais si leur carnet de commandes est vide, elles ne peuvent pas le faire, car elles ont besoin de visibilité.
Ensuite, madame la ministre, je suis d’accord, nous sommes tous remplis d’effroi face au nombre de demandeurs d’emploi. Seulement, j’aimerais bien que soit aussi évoqué un jour le nombre d’offres d’emploi qui ne sont pas pourvues. Il y a bien là une grave anomalie à laquelle il faudrait s’attaquer pour améliorer la situation.
Enfin, sur les contrats aidés, j’entends bien les collègues siégeant à ma droite, qui sont en fait plutôt à gauche – ils se reconnaîtront ! –, réclamer que les collectivités et l’État fassent un effort d’accompagnement et de formation des personnes éloignées de l’emploi.
Je partage tout à fait ce point de vue, et je pense pouvoir dire que nous consentons tous cet effort dans nos collectivités. En même temps, mes chers collègues, expliquez-moi comment faire, dans une période où les dotations aux collectivités locales subissent des baisses furieuses ? En effet, avec ces contrats aidés, qui sont temporaires, il va se créer des besoins structurels.
Je reprendrai l’exemple très juste des emplois d’auxiliaires de vie scolaire, cité par notre collègue. Il peut s’agir d’emplois aidés, mais, le jour où il n’y a plus d’aides, le besoin reste. Or la collectivité n’a plus les moyens de financer ces postes.
Madame la ministre, mes chers collègues, lorsque nous mettons en place un tel système, interrogeons-nous sur la sortie du dispositif et la pérennité des emplois.
Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et du groupe Les Républicains.
J’aurais voulu demander à Mme Bricq si elle pense sincèrement que c’est avec les contrats aidés, et uniquement avec les contrats aidés, que nous pouvons donner un avenir intéressant aux jeunes.
M. Michel Savin. Votre choix, madame la ministre, démontre l’échec de ce gouvernement dans sa politique à l’égard des jeunes qui veulent aller vers l’emploi.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Certes, il faut des contrats aidés pour une partie des jeunes, qui se trouvent dans une situation bien particulière, mais y consacrer des centaines de millions d’euros n’est pas de bonne politique.
Demain, nous allons débattre aussi des contrats de service civique, pour lesquels les sommes affectées vont passer de 150 millions à 300 millions d’euros. Nous devrions plutôt concentrer nos efforts, comme mon collègue l’a dit, non seulement sur les contrats du secteur privé, mais également sur les contrats d’apprentissage et la formation professionnelle.
Il y a aujourd’hui des pans entiers de l’économie qui attendent de jeunes salariés pour assurer la continuation de l’activité. Nous avons donc besoin de formation professionnelle.
Dans le même temps, des établissements scolaires et des écoles de production ont des difficultés à recruter et à boucler leur budget.
Voici la situation actuelle de la France : d’un côté, des artisans et des entreprises qui recherchent des gens qualifiés ; de l’autre, des écoles et des centres d’apprentissage qui ont des difficultés à recruter et la seule réponse que l’on propose, ce sont les contrats aidés. §Ce n’est pas possible ! Nous ne pouvons pas continuer ainsi ! Quelle perspective donnons-nous à notre jeunesse ?
À titre personnel, je soutiendrai l’amendement proposé par M. le rapporteur général de la commission des finances, qui a pour objet de réorienter ces financements. Les professionnels, les entreprises, mais aussi le monde de l’éducation, attendent une autre réponse de ce gouvernement.
Nous ne suivrons pas les auteurs de cet amendement et nous nous abstiendrons. Comme je l’ai dit dans mon intervention, à nos yeux, les crédits alloués à la mission, dans leur ensemble, sont insuffisants.
Avec cet amendement, vous nous proposez de prendre une part des crédits destinés à financer les contrats aidés du secteur non marchand pour l’affecter aux contrats aidés du secteur marchand. Au passage, on relève une déperdition, puisque la totalité de ce qui est enlevé d’un côté n’est pas transférée de l’autre. Comme le disait tout à l’heure Nicole Bricq – ou peut-être était-ce François Marc ? –, c’est une manière de compenser les cadeaux que vous avez faits dans d’autres missions, notamment à propos de l’impôt sur les grandes fortunes.
En l’occurrence, vous puisez dans la mission « Travail et emploi », alors que 5, 7 millions de personnes, toutes catégories confondues, sont aujourd’hui touchées par le chômage ! Nous ne pourrons donc pas vous suivre.
Cela étant, je suis toujours ébahie quand je vous entends dire que les entreprises doivent toucher des subventions pour embaucher aujourd’hui. Tout de même, les salariés embauchés font un travail, donc je ne comprends pas que les entreprises aient besoin qu’on les aide à recruter des salariés.
Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.
Eh oui, mes chers collègues, je ne peux pas le comprendre ! Pour moi, cela dépasse l’entendement. Comme vient de le dire M. Savin, quelles perspectives offrons-nous à nos jeunes ? Nous connaissons tous des jeunes bardés de diplômes, ayant pu se payer des études, qui ont des compétences, des connaissances, mais qui n’arrivent pas à trouver un emploi dans une entreprise, car, si les employeurs reconnaissent leur valeur, ils attendent que l’État leur donne de l’argent pour recruter.
Mes chers collègues, il y a véritablement une dérive, …
… une dérive libérale en matière d’emploi, qui n’est pas acceptable pour nous.
Nous ne voterons pas cette mission, car elle n’est pas suffisamment dotée de notre point de vue, comme je l’ai expliqué, mais nous ne vous suivrons pas non plus sur cet amendement, car vous allez aggraver encore la situation en supprimant des budgets qui sont déjà insuffisants.
Nous ne pouvons pas voter cet amendement en l’état. Monsieur Savary, vous avez eu raison de dire qu’il fallait aborder ce sujet avec beaucoup d’humilité.
Il n’empêche qu’en votant cet amendement, nous écarterons du chemin de l’emploi 200 000 personnes, qui, sans cela, ne trouveront pas de solution. Or il nous faut remobiliser et redynamiser ces personnes.
Mme la ministre a été claire dans sa démonstration : ce dispositif est très ciblé, puisqu’il s’adresse à des chômeurs de longue durée, à des seniors, et pas seulement à des jeunes. Nous avons focalisé le débat sur les jeunes, mais ces derniers bénéficient aussi d’autres dispositifs, tels que l’aide à l’embauche d’un premier salarié, qui peut être un déclencheur pour le recrutement d’un jeune, mais aussi la garantie jeunes.
En l’occurrence, le dispositif des contrats aidés dont nous parlons touche principalement les personnes, hommes ou femmes, les plus éloignées de l’emploi, et qui ne trouveraient sans doute pas de solution, comme M. Gabouty l’a indiqué, avec les autres dispositifs d’aide aux entreprises.
Nous avons tous recruté dans nos collectivités, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, des personnes qui n’auraient pu être recrutées dans le secteur marchand. Nous le savons, et ce n’est pas la peine de nous cacher derrière notre petit doigt. Cela s’appelle, comme M. Savary l’a rappelé, le traitement social du chômage. Dans notre pays, des hommes et des femmes ont besoin de ces contrats aidés pour retrouver ne serait-ce que le chemin de la dignité, celui que l’on emprunte en se levant le matin pour aller accomplir une tâche utile à la société.
À mes yeux, cet amendement est quasi scélérat pour le public ciblé par ce dispositif.
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Je voterai l’amendement, même si, en ce qui me concerne, je l’aurais rédigé de manière moins brutale, afin que ses effets soient plus progressifs.
Il est un peu gênant d’opposer les emplois du secteur marchand et ceux du secteur non marchand. Même si les problématiques sont effectivement différentes, il s’agit de rendre service non pas aux collectivités locales ou aux entreprises, mais bel et bien aux demandeurs d’emploi qui sont éloignés du monde du travail. Peu importe, donc, que l’on adopte l’approche des collectivités locales ou celle des entreprises.
Je fais rarement état de ma vie personnelle, mais il se trouve que je suis à la fois maire et chef d’entreprise. J’ai recruté dans le secteur public, en tant que maire, des personnes que je n’aurais jamais embauchées en entreprise. Il faut être franc et clair sur ce point !
N’opposons pas les deux domaines, même si les publics sont effectivement un peu différents.
Pour autant, aujourd’hui, cette réorientation des crédits est souhaitable, car on sent bien que les collectivités locales et même le milieu associatif, qui est subventionné par les collectivités, sont arrivés à saturation, à bout de souffle. Ne poussons donc pas le curseur plus loin dans cette direction.
Le système marche, mais je suis d’accord avec Mme David pour dire que le secteur privé, les entreprises, n’ont pas à demander de subventions pour embaucher.
Quand on a du travail, on embauche ! En revanche, si on n’a pas de travail, on n’embauchera jamais, même des contrats aidés.
Pour les collectivités locales, c’est un peu différent, mais, compte tenu du contexte économique, utilisons au mieux cette réorientation, même si j’estime qu’elle pourrait être moins massive. Néanmoins, elle va dans la bonne direction. Pour le détail, je vous conseille de vous référer à l’intervention de mon collègue René-Paul Savary, qui a expliqué comment le système marchait en fonction de la conjoncture.
Je le redis, n’opposons pas les dispositifs, car il s’agit toujours de rendre service à des personnes qui sont éloignées de l’emploi. Il ne faut pas non plus demander de contreparties aux entreprises privées…
Laissez-moi expliquer ma position !
Il faut être efficace, sans se réfugier derrière des arguments qui ne sont parfois pas adaptés à la cause que l’on défend.
Je souhaite apporter quelques éléments après ce riche débat.
Il est important de ne pas tomber dans la caricature. Vous dites qu’aujourd’hui la seule réponse du Gouvernement réside dans ces contrats aidés. Je rappelle qu’ils ne représentent que 2, 4 milliards d’euros sur un budget de près de 11, 5 milliards d’euros. Vous voyez donc que ce n’est pas la seule réponse donnée par le Gouvernement. Il était important de le rappeler.
Vous nous demandez de privilégier l’entreprise, mais il ne vous aura pas échappé que nous avons aussi mis en place le CICE, l’aide à la première embauche et le pacte de responsabilité, grâce auquel les branches professionnelles se sont engagées sur la création d’un certain nombre d’emplois et le recrutement d’apprentis. J’ai eu l’occasion de le rappeler aux signataires du pacte, la semaine dernière, alors que j’assistais à une conférence sur l’emploi dans l’agroalimentaire et l’agriculture avec Stéphane Le Foll. Nous avons demandé à ces branches professionnelles où elles en étaient de l’engagement qu’elles avaient pris en échange d’exonérations de charges. Par ailleurs, le CICE est bien une réalité, qui permet aux entreprises de retrouver des marges, d’investir et de créer de l’emploi.
Le sujet abordé par cet amendement est particulier. Comme je l’ai dit tout à l’heure, le public des CAE n’est pas le public des contrats aidés dans le secteur marchand. Cette distinction est essentielle.
Dans vos départements, sans ce dispositif, près de 2 000 personnes auraient perdu leur emploi.
Lors du débat qui vient de se dérouler, vous avez donné l’impression que les personnes en contrat aidé dans le secteur non marchand occupaient en quelque sorte des emplois fictifs. C’est oublier que 38 % des bénéficiaires de ces contrats se trouvent dans les collèges et les lycées, 21 % dans les collectivités locales et 36 % dans les associations.
Je puis vous dire que, dans les quartiers populaires et ailleurs, au sein des clubs de football, par exemple, ces personnes font vivre la citoyenneté ; elles ont de vraies missions utiles pour la société. §Ne l’oublions pas, ces emplois ne sont pas vides de sens : ils sont essentiels, et ce ne sont pas des emplois fictifs !
Il me semble important de le rappeler, les contrats aidés dans le secteur marchand ne posent pas de problème idéologique. Pour ma part, j’ai milité en faveur du contrat CIE-starter, dont le 13 000e vient d’être signé aujourd'hui. J’ai agi pour qu’il soit proposé aux jeunes des quartiers populaires qui sont diplômés, par exemple au niveau bac+2, et qui n’arrivent pas à trouver un emploi ou à avoir une première expérience professionnelle. L’on se situe dans le secteur marchand, puisque ces contrats sont pris en charge à hauteur de 45 % par les entreprises.
Bien sûr qu’il y a un enjeu ! Et il est réel, car les entreprises qui recrutent sur des contrats aidés le font pour pourvoir des postes vacants. Par la suite, les taux d’insertion des jeunes recrutés sur des contrats aidés dans le secteur marchand sont plus élevés que ceux des jeunes qui sont recrutés par des contrats aidés dans le secteur non marchand. C’est évident, parce que le public n’est pas le même – ce n’est pas le public le plus éloigné de l’emploi – et parce que le poste était vacant. La réalité, elle est aussi là !
Je le répète, supprimer 200 000 contrats aidés dans le secteur non marchand n’est vraiment pas une bonne solution.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Je mets aux voix l'amendement n° II-140.
J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe Les Républicains, l'autre, du groupe socialiste et républicain.
Exclamations.
Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 85 :
Le Sénat a adopté.
L'amendement n° II-326, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
en euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Accès et retour à l’emploi
Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi
Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail
Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail
dont titre 2
1 140 000
1 140 000
TOTAL
SOLDE
La parole est à Mme la ministre.
L’Assemblée nationale a adopté, lors de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances, un amendement du Gouvernement tendant à mettre en œuvre les mesures prévues par le protocole relatif à l’avenir de la fonction publique et à la modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations, porté par la ministre de la fonction publique.
Le présent amendement vise à procéder à une majoration de 1 140 000 euros sur les crédits du titre II de la mission « travail et emploi », destinés à réintégrer dans l’assiette de calcul les contrôleurs du travail, soit 2 732 agents supplémentaires. Ces crédits viennent s’ajouter aux 250 000 euros décidés par voie d’amendement à l’Assemblée nationale.
Je vous invite donc, mesdames, messieurs les sénateurs, à voter cet amendement de conséquence.
Cet amendement vise à majorer les crédits de ce programme à hauteur d’environ 1 140 000 euros. L’Assemblée nationale, qui a voté un amendement visant à appliquer le protocole évoqué par Mme la ministre, a omis d’intégrer certains fonctionnaires touchés par cette mesure. Il s’agit, en l’espèce, des contrôleurs du travail, donc de fonctionnaires de catégorie B. Pour réparer cet oubli, il faut rajouter 1 140 000 euros.
J’émets, au nom de la commission, un avis favorable.
On nous explique qu’il s’agit simplement de réparer un oubli de l’Assemblée nationale. Pourquoi pas ? Toutefois, nous avons pour le moins une interrogation sur la mise en œuvre de l’accord concernant la fonction publique.
On nous avait initialement expliqué que ce protocole n’aurait aucune incidence budgétaire en 2016, ni pour l’État ni pour les collectivités locales. Je me réfère à des déclarations très précises sur le sujet. Puis, nous apprenons progressivement que, dès 2016, il y aura un coût pour les collectivités locales. Leurs nombreux représentants qui siègent ici le savent : par construction, cet accord s’appliquera également à l’échelon de la fonction publique territoriale. Nous sommes donc pour le moins interrogatifs sur cette question.
Contrairement à ce qui avait été annoncé, on le voit, l’accord aura d’ores et déjà des incidences financières importantes sur 2016 et sur les années suivantes !
Mes chers collègues, j’appelle votre attention sur le fait que, l’autre jour, la baisse des dotations a été minorée pour tenir compte des normes qui nous étaient imposées. Nous n’avons pas tenu compte des mesures prévues par le protocole relatif à l’avenir de la fonction publique et à la modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations. Pour des calculs tout à fait justes, il aurait fallu aller au-delà et tenir compte des conséquences des décisions prises par l’État, qui s’imposent directement à la fonction publique territoriale, alors que les collectivités ne sont pas autour de la table des négociations.
Au-delà de l’amendement qui, pour l’instant, est relativement modeste – il vise à réparer un oubli –, une vraie question se pose. En effet, s’agissant des décisions en matière de fonction publique, la négociation est toujours menée par le Gouvernement et elle emporte des conséquences tout à fait directes sur la fonction publique, y compris territoriale.
Ensuite, il est facile de donner des leçons de gestion aux collectivités locales ! Lorsqu’il y a revalorisation de la catégorie C, lorsqu’il y a revalorisation des carrières, toutes ces mesures s’imposent à nos collectivités locales et augmentent leur masse salariale. Il est très facile ensuite de venir donner des leçons aux collectivités en leur disant qu’elles dépensent trop, notamment en matière de personnels ! Il faut être extrêmement prudent sur ce genre d’annonce. En tout cas, nous sommes très loin de ce qui avait été annoncé initialement, c'est-à-dire l’absence de coût en 2016.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° II-416, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
en euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Accès et retour à l’emploi
Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi
Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail
Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail
dont titre 2
25 695
25 695
TOTAL
SOLDE
La parole est à Mme la ministre.
Dans le cadre du transfert aux régions de la gestion d’une partie du Fonds social européen, les crédits du ministère sont réduits à hauteur des dépenses transférées aux régions. Il convient d’ajuster les montants de ces dépenses transférées.
La mesure proposée est donc une réduction des crédits du programme support de 51 924 euros.
M. Jean-Claude Requier, rapporteur spécial. Cet amendement tend à procéder à une correction technique, pour prendre en compte le transfert aux régions de la gestion des fonds européens à compter du 1er juillet 2015. Il faut minorer les crédits de 51 924 euros. Je ne pense pas qu’il y ait un loup derrière !
Sourires.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° II-331 rectifié, présenté par MM. Canevet, Guerriau, Cadic, Kern et Longeot, Mme Férat, MM. L. Hervé, Marseille, Détraigne, Lasserre, Cigolotti, Tandonnet et Bockel et Mme Jouanno, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
en euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Accès et retour à l’emploi
Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi
Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail
Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Michel Canevet.
Tout à l’heure, il a été souligné que, dans notre pays, l’apprentissage n’est pas au niveau de l’objectif de 500 000 contrats annoncé par le Président de la République. Lors de la discussion de l’amendement de M. le rapporteur général, l’on a évoqué la nécessité d’agir pour l’emploi des jeunes. Or, parmi les moyens d’insertion des jeunes, la formation par alternance permet d’acquérir une compétence professionnelle et d’obtenir une bonne formation, à la fois théorique et professionnelle.
Je pense que, sur toutes les travées, nous sommes convaincus de l’intérêt de soutenir le développement de l’apprentissage. Or, l’on constate, là aussi, comme pour les chiffres du chômage, que l’on est loin des objectifs qui avaient été fixés. Il faut tout mettre en œuvre afin d’améliorer les chiffres, en particulier pour permettre aux jeunes qui recherchent un emploi en apprentissage de trouver une place.
Parmi les outils pour y parvenir, il y a l’accompagnement des jeunes. Cet amendement vise à doter les missions locales en charge de l’accompagnement des jeunes de moins de 26 ans de crédits supplémentaires, en les fléchant en direction de l’orientation vers l’apprentissage.
Aujourd'hui, de nombreuses places dans les centres de formation d’apprentis ne sont pas pourvues, et il est absolument indispensable qu’elles le soient. Il ne s’agit pas de donner des subventions aux entreprises, comme l’indiquait tout à l’heure la représentante du groupe CRC. Ce que nous proposons, c’est bien de doter l’action publique de moyens pour permettre l’insertion des jeunes et l’aboutissement des contrats d’apprentissage.
Nous connaissons bien les missions locales. Pour ma part, j’en ai présidé une pendant plus de dix ans. Le projet de loi de finances prévoyait 188 millions d'euros pour leur fonctionnement et 15 millions d’euros pour leur accompagnement. L’Assemblée nationale a ajouté 12 millions d'euros : 10 millions d'euros pour l’accompagnement et 2 millions d'euros pour le fonctionnement.
Aujourd'hui, compte tenu des tâches difficiles qu’elles remplissent avec beaucoup d’efficacité, il ne me semble pas nécessaire d’ajouter 6 millions d'euros supplémentaires. Je me demande quand cette assemblée, qui ne cesse de réclamer des crédits supplémentaires, trouvera le moment de faire quelques économies !
Je sollicite donc, au nom de la commission, le retrait de cet amendement.
Je considère en effet que nous avons fait, après la discussion à l’Assemblée nationale, un effort suffisant en direction des missions locales. Nous avons augmenté leur budget de près de 2, 8 %. Il faut y ajouter près de 255 millions d'euros pour la garantie jeunes, sans oublier près de 280 millions d'euros supplémentaires prévus dans ce projet de loi de finances pour l’apprentissage, en vue de répondre véritablement à votre souci, monsieur Canevet.
Je ne considère pas que les missions locales, auxquelles je demande de faire bénéficier les jeunes de la garantie jeunes, soient en première ligne sur la question de l’apprentissage.
S’agissant du fonctionnement des missions locales, je crois que nous avons fait un effort important. Je demande donc le retrait de cet amendement.
Monsieur le rapporteur spécial, il ne s’agit pas d’ajouter des dépenses supplémentaires. C’est bien un redéploiement qui est proposé au travers de cet amendement.
Par cet amendement, je souhaitais appeler l’attention de notre assemblée sur la nécessité d’en faire plus pour l’apprentissage, car il est impératif que nous soyons particulièrement proactifs dans la lutte contre le chômage.
Cela étant, j’entends la remarque du Gouvernement et du rapporteur spécial et je retire donc mon amendement, monsieur le président.
L'amendement n° II-331 rectifié est retiré.
Nous allons procéder au vote des crédits, modifiés, de la mission « Travail et emploi », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 86 :
Le Sénat a adopté.
Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage », figurant à l’état D.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage
Répartition régionale de la ressource consacrée au développement de l’apprentissage
Correction financière des disparités régionales de taxe d’apprentissage et incitations au développement de l’apprentissage
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ».
Ces crédits sont adoptés.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Travail et emploi » et du compte d'affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage ».
La commission des affaires économiques a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.
La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.
En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame Mme Anne-Catherine Loisier membre titulaire du Conseil supérieur de la forêt et du bois.
En application de l’article 50 ter de notre règlement, j’informe le Sénat que M. François Zocchetto, président du groupe UDI-UC, a demandé, par lettre en date du 30 novembre 2015, l’inscription à l’ordre du jour de la proposition de résolution n° 198, présentée en application de l’article 34-1 de la Constitution, tendant à limiter le poids de la réglementation applicable aux collectivités territoriales et à simplifier certaines normes réglementaires relatives à l’urbanisme et à la construction, et déposée le 25 novembre 2015.
Cette demande a été communiquée au Gouvernement dans la perspective de la prochaine réunion de notre conférence des présidents, qui se tiendra le mercredi 9 décembre.
Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le mercredi 2 décembre 2015, que, en application de l’article 61-1 de la constitution, la Cour de cassation avait adressé au Conseil constitutionnel un arrêt de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article L. 3141-26 du code du travail relatif à l’indemnité compensatrice de congés payés non due en cas de faute lourde (2015-523 QPC).
Le texte de cet arrêt de renvoi est disponible à la direction de la séance.
Acte est donné de cette communication.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures cinquante.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à vingt heures vingt, est reprise à vingt-et-une heures cinquante, sous la présidence de Mme Françoise Cartron.