Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, le budget de la mission « Travail et emploi » pour 2016 est, comme celui voté l’année dernière, un budget de reconduction, relativement stable dans ses engagements financiers.
Dans le contexte actuel, il convenait évidemment de maîtriser ce budget en termes de crédits ; tel est le cas, puisque les crédits de paiements sont ouverts, comme l’an dernier, à hauteur de 11, 4 milliards d’euros. Il traduit cependant une approche un peu trop statique dans ses orientations : une démarche plus novatrice et plus ambitieuse aurait pu être suivie à montant budgétaire équivalent. La mission « Travail et emploi » doit traduire la volonté du Gouvernement d’adapter un certain nombre de structures et de dispositifs afin de peser de manière efficace sur la politique de l’emploi.
Le contexte général économique et social, à défaut d’être favorable, est intéressant.
Il n’est bien évidemment pas très favorable, dans la mesure où nous venons de battre un nouveau record pour le nombre de chômeurs, quel que soit le périmètre considéré. Ainsi, le nombre de demandeurs d’emploi de catégorie A a augmenté de quelque 220 000 personnes en un an, avec comme point noir la destruction en un an de 30 000 emplois dans l’industrie et, surtout, de 50 000 emplois dans le secteur de la construction. L’inversion de la courbe du chômage n’est donc pas d’actualité, même si, paradoxalement, nous allons bien finir par nous en approcher ; en tout cas, nous en sommes forcément plus près qu’il y a deux ans…
Cette évolution décevante est presque spécifique à notre pays. En effet, le taux de chômage au sein de la zone euro a baissé de près de 7 % en un an, passant de 11, 5 % à 10, 7 % de la population active, tandis que, en France, il a progressé de 3 %, passant de 10, 5 % à 10, 8 %. Nous sommes, avec la Finlande et la Belgique, l’un des trois seuls pays parmi les dix-neuf de la zone euro qui ont vu leur taux de chômage progresser au cours de la dernière année.
Malgré tout, le contexte comporte aussi des éléments intéressants et encourageants. Ainsi, l’environnement international est favorable ; songeons au prix du pétrole, à la parité dollar-euro, aux taux d’intérêt et à la faible inflation. Ces paramètres ont sans doute largement contribué à un léger regain de notre taux de croissance : il est attendu à 1, 1 % en 2015, ce qui permet d’espérer atteindre 1, 5 % en 2016. Cette évolution est essentielle, puisque la corrélation est directe entre croissance et création d’emplois.
De fait, notre économie a donné quelques signes de reprise, certes encore très fragiles, sur la voie qui mène au solde net positif de création d’emplois, c’est-à-dire à une augmentation effective du nombre d’actifs ayant un emploi. Un certain volume d’augmentation d’emplois nous est en effet nécessaire pour réduire le chômage, vu que ceux qui arrivent sur le marché du travail sont plus nombreux que ceux qui le quittent – l’Allemagne se trouve de ce point de vue dans une situation assez différente, du fait de sa structure démographique.
Nous arrivons donc à un point d’équilibre où la pertinence des politiques menées dans différents domaines, en matière aussi bien fiscale que sociale, peut nous faire basculer du bon côté : celui de la reprise. C’est en gardant présente à l’esprit cette analyse que nous devons apprécier, madame la ministre, le budget que vous nous présentez.
Les actions du service public de l’emploi et les dispositifs en faveur des personnes les plus éloignées du marché du travail concentrent près des deux tiers des crédits de paiement ouverts pour 2016. Outre les frais de personnel et la contribution versée à Pôle emploi, ces crédits couvrent l’ensemble des dispositifs d’accompagnement des jeunes vers l’emploi, ainsi que, bien évidemment, les emplois aidés.
Pour les jeunes, le Gouvernement a décidé de faire porter son effort sur la garantie jeunes, ce qui paraît une orientation opportune, et les crédits de l’école de la deuxième chance ont été maintenus, à un niveau, il est vrai, relativement modeste.
Quant à l’enveloppe allouée aux emplois aidés, elle est en recul de 536 millions d’euros par rapport à 2015 pour les crédits de paiement.
L’ensemble de ces mesures constitue un dispositif d’accompagnement utile en matière d’insertion ou de retour à l’emploi, même si le traitement social du chômage a une incidence relativement faible sur la création nette d’emplois dans la durée. En effet, lorsque les bénéficiaires de ces contrats aidés trouvent un emploi ou voient leur poste pérennisé, ils viennent alors se substituer à des demandeurs d’emploi n’ayant pas suivi le même parcours ou à des intérimaires.
Cependant, il ne faut pas minimiser les effets positifs de ces contrats, car ils favorisent l’insertion professionnelle et le recrutement par anticipation des chômeurs : les collectivités territoriales – notamment – et les entreprises privées, dans une certaine mesure, procèdent souvent à ces recrutements par anticipation, c’est-à-dire deux ans plus tôt que pour un remplacement normal.
S’agissant de la répartition des contrats aidés entre secteur marchand et secteur non marchand, la proposition formulée par la commission des finances dans son amendement nous paraît tout à fait fondée. Pour le groupe UDI-UC, son adoption sera déterminante pour le vote du budget de la mission « Travail et emploi ».