Or je n’ai pas le souvenir que les traitements des enseignants, notamment ceux du premier degré, aient été significativement améliorés ! Pis, en guise de « revalorisation » du métier, vous avez supprimé la formation initiale ! Nous voterons donc contre les amendements déposés par la majorité sénatoriale de droite.
Oui, il faut recruter plus d’enseignants et les former davantage, et même aller au-delà de ce que le Gouvernement fait aujourd’hui, car les moyens mobilisés depuis le PLF 2013 n’ont pas permis de répondre à de nombreux autres besoins sur le terrain.
J’évoquerai tout d’abord les moyens de remplacement. Dans certaines académies de région parisienne par exemple, le volant de remplaçants était déjà épuisé quelques semaines seulement après la rentrée pour pourvoir des postes de titulaires. Je pourrais citer une école maternelle, que je connais bien, dans laquelle une classe de petite section a vu se succéder trois enseignants en deux mois !
Autre point noir : les moyens consacrés à la formation continue des personnels restent très insuffisants. Ainsi, pour le premier degré, les crédits de l’action n° 4 diminuent légèrement par rapport à 2015, passant de 18, 5 millions d’euros à 17, 8 millions d’euros.
S’agissant du second degré, les moyens pour la formation continue des personnels, à l’action n° 10 du programme 141, augmentent certes de 20 millions d’euros par rapport à 2015 – 49, 5 millions d’euros en 2016, contre 29, 5 millions d’euros l’année précédente –, mais ces 20 millions d’euros supplémentaires sont destinés à financer un plan de formation pour « bâtir une culture commune sur le numérique ». S’il est indispensable, cet effort ne peut cependant répondre à lui seul aux besoins de formation nécessaires pour permettre à tous les enseignants d’appréhender et de déjouer les mécanismes de l’échec scolaire. Or, excepté cette dotation, les crédits sont identiques à ceux de 2015.
Pourtant, la rentrée de 2016 verra entrer en vigueur les nouveaux programmes du primaire et du collège. Je m’inquiète donc du peu de moyens consacrés et des modalités retenues actuellement pour préparer les enseignants à ces changements pédagogiques considérables.
Je crains une nouvelle fois que la formation continue ne soit cantonnée à de la prescription, pour présenter les réformes ou décrypter les dispositifs nouveaux, et ne permette pas l’émergence de véritables collectifs enseignants, qui permettraient à ces derniers de réfléchir entre eux sur leur métier, hors des injonctions et des prescriptions de l’institution.
L’expérience de tels collectifs d’enseignants, menée sous la houlette de l’équipe de clinique de l’activité du Conservatoire national des arts et métiers, le CNAM, avait offert des perspectives intéressantes ; ces groupes de pairs échangeant sur leur travail, sans aucun regard hiérarchique en surplomb, ont le mérite de « dépsychologiser » les difficultés rencontrées par les participants dans leurs classes, car les problèmes individuels sont réinterprétés comme des problèmes généraux, liés à l’organisation du travail et non à la personne de l’enseignant lui-même.
Une démarche à rebours de la tendance à diffuser des « guides de bonnes pratiques » formatées et stéréotypées, qui visent la standardisation des pratiques enseignantes pour en faciliter le contrôle, sans améliorer leur efficacité pédagogique. Ce chantier, monsieur le secrétaire d’État, est donc toujours au point mort.
Enfin, j’aborderai rapidement la question des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, les ESPE. En l’absence d’un fléchage des moyens, certaines ESPE éprouvent des difficultés pour accueillir et former l’ensemble de leurs stagiaires dans les meilleures conditions. Le Comité de suivi sur la loi d’orientation, dont je fais partie, rendra dans quelques jours son premier rapport. Il pointera cette question des ESPE, avec un état des lieux et des propositions très utiles.
Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, vous le voyez, nous portons un regard critique sur ce budget. Toutefois, notre vote dépendra du rejet ou non des amendements défendus par la majorité sénatoriale de droite.