Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux tout d'abord vous remercier de l’intensité de ces débats, des désaccords que vous avez parfois exprimés, des visions que nous avons parfois partagées et, surtout, de la passion que ce sujet appelle.
Les crédits de l’enseignement scolaire pour 2016 traduisent le cap que nous fixons pour l’année en matière d’éducation. Vous l’avez tous relevé, il s’agit du premier budget de la nation. Nous comptons sur l’éducation nationale pour éduquer nos jeunes enfants, mais aussi, plus généralement, pour fixer un point de repère dans la société de la République.
Ce budget important atteint 65, 72 milliards d’euros, auxquels s’ajoutent près de 2 milliards d’euros consacrés à l’enseignement agricole. Il est en augmentation de 694 millions d’euros, conformément à la volonté du Gouvernement de placer l’école au cœur des valeurs républicaines, en mettant en place le financement des mesures issues de la « grande mobilisation de l’école pour les valeurs de la République ».
Quelques jours après les attentats dramatiques de Paris et de la Seine-Saint-Denis, je veux d'ailleurs, au nom de la ministre de l’éducation nationale, saluer ici la mobilisation extraordinaire de la communauté éducative, des enseignants et de tous les personnels, pour assurer l’accueil des élèves et organiser des temps d’échanges et de recueillement, avec une haute conscience de leur mission, un professionnalisme et un dévouement qui sont l’honneur de l’éducation nationale et, plus largement, de notre République, dont tous ceux qui font profession d’enseigner sont les artisans quotidiens.
L’école ne peut pas tout, bien sûr, mais elle a un rôle à jouer. L’école de la République transmet aux élèves une culture commune de la tolérance et du respect. Chaque élève y apprend à refuser l’intolérance, la haine et la violence sous toutes leurs formes. C’est ce que nous essayons de promouvoir avec toute une batterie de mesures prises dans le cadre de la « grande mobilisation de l’éducation nationale pour les valeurs de la République », à laquelle a été associée la représentation nationale, après les tragiques événements de janvier dernier.
La transmission du sens et de la portée du principe de la laïcité est une priorité de cette année. Le plan de formation des personnels, engagé en février dernier avec l’instruction de 1 000 premiers formateurs, sera poursuivi et accompagnera l’entrée en vigueur des nouveaux programmes d’enseignement moral et civique de l’école élémentaire jusqu’au lycée à cette rentrée. Il est bon de rappeler ces progrès, réclamés depuis très longtemps et qui, une fois qu’ils sont mis en place, apparaissent comme des évidences.
La capacité des candidats à « expliquer et à faire partager les valeurs de la République » sera désormais évaluée systématiquement dans les concours de recrutement. Les parents d’élèves seront invités à signer la charte de la laïcité à l’école et un « livret laïcité » sera diffusé dans l’ensemble des établissements scolaires.
De plus, le parcours citoyen sera mis en place, avec pour objectif de faire connaitre aux élèves les valeurs de la République et de les amener à devenir des citoyens responsables et libres. Ce parcours s’appuie sur l’enseignement moral et civique, ainsi que l’éducation aux médias et à l’information, et doit favoriser la conscience citoyenne et la culture de l’engagement.
La réserve citoyenne de l’éducation nationale offre également à tous les citoyens la possibilité de s’engager bénévolement pour transmettre et faire vivre les valeurs de la République, au côté des enseignants. Quelque 4 660 personnes se sont ainsi préinscrites depuis le début de l’année. Ces volontaires seront mobilisables dans les écoles durant l’année scolaire.
Nous affirmons les valeurs qui font l’école républicaine et nous garantissons les moyens de les consolider. Ce budget permet également la mise en place de la réforme des collèges, en nous appuyant sur des personnels plus nombreux et mieux formés.
Quelque 4 000 postes sont ainsi dédiés à cette réforme. L’année scolaire 2015-2016 sera marquée par un effort important de formation et d’accompagnement des équipes pédagogiques à la nouvelle organisation du collège, qui entrera en vigueur à la rentrée 2016. Cette réforme, nous la menons avec les enseignants.
La mise en œuvre des enseignements pratiques interdisciplinaires, celle de l’accompagnement personnalisé, l’utilisation de la dotation d’heures professeurs pour le travail en petits groupes ne se feront pas sans l’avis du conseil pédagogique.
Cette réforme s’accompagne de la refonte des programmes de la scolarité obligatoire, et c’est l’un des piliers essentiels de la refondation de l’école de la République. Les programmes actuels de l’école primaire et du collège, vous le savez, manquent de progressivité et de cohérence, et sont considérés par de nombreux enseignants comme trop lourds et trop longs.
C’est pourquoi le Gouvernement a souhaité qu’ils soient repensés, et cela – c’est une première – pour toute la scolarité obligatoire.
Pour la première fois, les programmes de la scolarité obligatoire sont conçus par cycles de trois ans. Pour la première fois, ils ne sont plus la simple juxtaposition de programmes disciplinaires annuels. Pour la première fois, ils sont articulés avec le socle commun pour garantir son acquisition.
Ces nouveaux programmes permettront de rendre les apprentissages solides, car ils sont fondés sur une pédagogie de l’entraînement et de la répétition. Ils donnent la priorité, longtemps réclamée dans cet hémicycle, à la maîtrise du langage écrit, à la lecture et à la compréhension orale, en imposant aux élèves des entraînements quotidiens, notamment des travaux d’écriture et de dictée.
L’entrée en vigueur des nouveaux programmes d’enseignement à la rentrée de 2016 pour tous les élèves des cycles 3 et 4 entraîne le renouvellement des manuels scolaires qui sera échelonné sur deux années en fonction des disciplines. L’effort total de l’État en faveur du renouvellement des manuels scolaires s’élève à 150 millions d’euros, ce qui est considérable.
Cette réforme du collège et des programmes s’accompagne aussi d’une modernisation de notre école, avec le lancement du « grand plan numérique ». Il s’agit d’élever le niveau de compétences numériques des élèves et d’accompagner la généralisation des pratiques du numérique dans les classes et les établissements scolaires.
Le déploiement de ce plan numérique coûtera 192 millions d’euros, avec l’objectif de toucher 40 % des collèges dès 2016. Il entre dans sa phase opérationnelle, qui se déroulera en deux temps : une phase de préfiguration dès la rentrée de 2015, avec plus de cinq cents établissements pilotes adossée à un plan exceptionnel de formation des enseignants, au développement de l’offre de ressources numériques et à la valorisation et au partage de projets pédagogiques innovants ; et une phase de déploiement à grande échelle de 2016 à 2018.
Ce budget est également marqué par la pérennisation effective du soutien financier de l’État aux communes pour la mise en place des activités périscolaires associées aux nouveaux rythmes scolaires. Cette pérennisation était réclamée à juste titre par le Sénat.
Cette rentrée est celle de la deuxième année de la généralisation des nouveaux rythmes scolaires. Nous ne devons pas oublier pourquoi nous avons mené cette réforme essentielle, et pourquoi elle s’inscrit dans la priorité que nous avons voulu donner, au plan pédagogique comme au plan financier, à l’école primaire. En effet, l’action de ces dernières années a centré l’effort sur l’école primaire, comme certains parmi vous l’ont réclamé.
Les cinq matinées retrouvées permettent de mieux rythmer la journée et de favoriser les apprentissages, en particulier les apprentissages fondamentaux, qui sont positionnés aux moments où la capacité d’attention des élèves est la plus grande.
S’agissant des activités périscolaires, vous le savez, elles relèvent de la compétence des communes. Toutefois, cette réforme, parce qu’elle est fondamentale pour notre système éducatif, est accompagnée depuis 2013 par le fonds de soutien au développement des activités périscolaires.
Nous avons pris cet été les mesures nécessaires pour rendre ce fonds pérenne, et avons ainsi garanti dans le temps le montant des aides perçues par les communes, à hauteur de 50 euros par élève, et de 90 euros par élève pour les communes les plus en difficulté.
L’attribution de ces aides est liée à la signature du projet éducatif territorial, le PEDT. Néanmoins, ce dernier doit être vécu comme non pas une contrainte, mais une chance pour la mise en place d’activités périscolaires de qualité. Les élus locaux ne s’y sont pas trompés. Bénéficiant de l’accompagnement mis en place par les services de l’éducation nationale et de la jeunesse et des sports, ils se sont investis pour la généralisation des PEDT, si bien que, à la rentrée de 2015, quelque 82 % des communes étaient déjà couvertes.
C’est ce taux de couverture que nous avons utilisé dans ce projet de loi de finances 2016 pour évaluer le montant du fonds. Toutefois, nous avons eu l’occasion de le dire lors du comité interministériel aux ruralités du 14 septembre dernier, notre ambition politique est que, à terme, quelque 100 % des communes soient engagées dans un PEDT. Nous nous en donnons d’ailleurs les moyens, puisque Najat Vallaud-Belkacem et Patrick Kanner ont mobilisé leurs services pour converger vers cet objectif en apportant un conseil et un accompagnement aux communes, notamment rurales.
Si nous atteignons cet objectif, le Gouvernement débloquera les budgets nécessaires, afin que chacune des communes puisse bénéficier de cette aide. À ce titre, je veux souligner que le Premier ministre a confié à la vice-présidente Françoise Cartron, que je salue, la mission d’établir un bilan des initiatives prises par les élus locaux.