Intervention de Ivan Renar

Réunion du 16 mars 2006 à 10h00
Loi de programme pour la recherche — Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire

Photo de Ivan RenarIvan Renar :

L'action du Comité national sera réduite à la seule gestion des carrières des chercheurs, sachant que les postes de directeur de recherches sont d'ores et déjà insuffisants pour permettre l'évolution de carrière des chercheurs au sein du CNRS. La refonte du système de recherche telle qu'inscrite dans le projet gouvernemental affaiblit ainsi considérablement cet organisme prestigieux dont la qualité des travaux est pourtant reconnue au niveau international.

Un rééquilibrage de la répartition des moyens entre les opérateurs traditionnels - c'est-à-dire les universités et les organismes - et l'ANR est donc impératif, sauf à confier l'ensemble de la politique scientifique à cette agence. Celle-ci pourrait à terme se borner à jouer un rôle de coordination entre les différents opérateurs de recherche et reprendre ainsi les missions dévolues au Comité de financement des programmes scientifiques, tel qu'il avait été défini par les états généraux de Grenoble.

Mais, si la grande majorité, voire la totalité, des augmentations de crédits était à l'avenir confiée à l'Agence, ce serait une réelle catastrophe pour la recherche française. Car chacun sait qu'une stratégie de laboratoire, d'université ou d'organisme, c'est bien plus qu'une somme de projets financés par l'ANR !

Il est par ailleurs indispensable que l'État respecte l'autonomie des divers acteurs du système national de recherche. Les récents changements intervenus au niveau de la direction du CNRS, le limogeage de son directeur général, contribuent à affaiblir l'organisme et ne peuvent donc se reproduire. Car les changements de cap qui se sont multipliés ces dernières années fragilisent le CNRS, tant en interne qu'auprès de ses partenaires étrangers qui ne comprennent pas ces bouleversements intempestifs.

Pour que le CNRS continue à jouer un rôle majeur dans le système de recherche français, monsieur le ministre, l'État doit cesser d'interférer dans les affaires internes de l'organisme et s'engager au contraire à assurer la continuité de la politique scientifique définie en concertation avec sa direction et les représentants de ses personnels.

Garantir la continuité tant des orientations scientifiques que des équipes, assurer les moyens nécessaires à la poursuite des travaux de recherche dans toutes les disciplines et à l'émergence de nouveaux champs d'investigation, associer l'ensemble de la communauté scientifique à la définition des grands axes de la recherche de demain, c'est ainsi que l'État devrait permettre au CNRS, comme aux universités et aux autres organismes de recherche, d'aller de l'avant. La recherche privée suivra. Nous l'avons vu dans bon nombre de pays étrangers, notamment aux États-Unis.

Privilégier l'innovation et la recherche appliquée à finalité industrielle au détriment de la recherche fondamentale s'avérera à l'inverse dévastateur pour la recherche de notre pays. C'est ce que les chercheurs, les directeurs de laboratoire ou d'organisme, les présidents d'université n'ont cessé de dire depuis deux ans, en vain !

Monsieur le ministre, la recherche est une entité complexe, allant de l'élaboration des connaissances à leurs retombées les plus concrètes, qui doit être examinée dans le cadre de ses interactions avec les diverses activités économiques et sociales, la transmission des connaissances notamment.

C'est sans doute le grand mérite du mouvement des scientifiques de 2004 d'avoir fait de la recherche un aspect du débat politique, au meilleur sens du terme. Il a aussi permis aux scientifiques, lors des états généraux de Grenoble, de proposer une réforme d'ensemble de la recherche française, dont on pouvait penser qu'elle ferait l'objet d'un consensus national. Hélas, « le pacte pour la recherche » du Gouvernement prend en tous points le contre-pied de leurs propositions !

Vous l'aurez compris, monsieur le ministre, le groupe communiste républicain et citoyen ne peut voter ce projet de loi, ...

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion