Intervention de David Assouline

Réunion du 3 décembre 2015 à 9h30
Loi de finances pour 2016 — Compte de concours financiers : avances à l'audiovisuel public

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Médias, livre et industries culturelles » est composée de trois programmes qui n’ont pas grand-chose à voir les uns avec les autres. Aussi, il serait bon que Bercy mette en place une nomenclature plus cohérente, au service du vote des assemblées parlementaires. Car il est souhaitable que les choses soient claires et lisibles. Comment faire œuvre de pédagogie dans nos débats et auprès de nos concitoyens quand nous avons nous-mêmes du mal à comprendre les budgets ? Pourtant, ce sont nos concitoyens qui doivent comprendre.

Les crédits alloués à l’ensemble de la mission progressent de 0, 46 %, ce dont nous nous félicitons. Cette progression est à l’image de celle du budget de la culture dans son ensemble : après deux premières années de baisse – nous l’avions déploré, et le Gouvernement a reconnu qu’il s’agissait d’une erreur ! – et une année de stabilisation, c’est reparti à la hausse. Bravo !

Cela est d’autant plus important que la culture, comme l’ont souligné d’autres orateurs, ainsi que, de manière générale, tout ce qui a trait aux médias et à l’industrie culturelle, est au cœur de la riposte que nous engageons sur le plan sécuritaire, mais aussi sur le plan culturel, qui est ô combien fondamental. Car c’est bien cela qui est menacé, attaqué. Nous devons donc être les premiers à faire rempart.

Mes collègues ont souligné les aspects positifs de cette mission : coup de pouce aux médias de proximité, aides à la lecture, un sujet que développera ma collègue Sylvie Robert, augmentation des aides en faveur du pluralisme de la presse.

À cet égard, permettez-moi d’évoquer le contexte.

Il faudra légiférer et prendre des mesures concernant les médias en général et la presse en particulier. On le dit depuis un moment, un mouvement de forte concentration détruit peu à peu le pluralisme fondamental de la presse. Je pense notamment à la multitude de titres de la presse quotidienne régionale, un acquis depuis la Libération, qui offrait non seulement un pluralisme d’idées et d’approches, mais aussi un maillage territorial, qui était à l’honneur de la France.

Cette concentration fait que de grands groupes possèdent plusieurs titres, mais le masquent – les lignes éditoriales, voire les articles, sont les mêmes ! – pour créer une illusion de pluralisme. Il n’est plus possible de rester sans rien faire : il faut assurer l’indépendance des rédactions, nous sommes revenus sur ce point plusieurs fois déjà.

Concernant l’Agence France-Presse, l’AFP, on note plusieurs points positifs.

Des efforts en faveur de la réduction des dépenses sont demandés, notamment dans l’audiovisuel, cela a été souligné par François Baroin.

S’agissant du Centre national du cinéma et de l’image animée, une critique récurrente se fait entendre dans notre assemblée. À l’inverse de ce que vous avez dit, monsieur Baroin, et de ce qui est parfois défendu ici par la commission des finances, le financement du cinéma français est vertueux. Il est ce qu’il est pour la France et le monde en vertu précisément de son mode de financement.

Le financement de cet organisme repose sur trois taxes affectées : la taxe spéciale additionnelle sur le prix des places de cinéma, la taxe sur les diffuseurs télévisuels et la taxe sur l’édition vidéo. Elles permettent un financement harmonieux d’un nombre de films toujours important, qui contribuent au rayonnement du cinéma français dans le monde. C’est l’un des atouts de notre pays, reconnu dans le monde, alors que, dans le reste de l’Europe, la production cinématographique s’est effondrée. Sur le marché mondial, nous sommes le deuxième pays dans ce secteur, si l’on exclut l’Inde, qui possède un marché intérieur particulièrement important. Aussi, je ne crois pas qu’il faille continuer à affaiblir, y compris politiquement, la promotion du cinéma français. C’est pourquoi je défends ici le fonctionnement de notre industrie cinématographique.

M. Baroin et d’autres intervenants ont expliqué qu’ils avaient décidé de voter contre ces crédits – pour ma part, vous l’aurez compris, je préconise, au nom du groupe socialiste, leur adoption – parce que le financement de France Télévisions n’est pas assuré et que la réforme a été reportée.

Franchement, ne parions pas sur l’amnésie de nos collègues ! M. Leleux l’a dit, la crise du financement de France Télévisions remonte non pas à 2012, mais à la réforme de 2009, menée sous le précédent gouvernement, à un moment où ce groupe ne connaissait aucun problème de financement grâce aux ressources tirées, d’une part, de la publicité et, d’autre part, de la redevance. En une réforme, on a décidé de priver l’audiovisuel public de 400 millions d’euros de ressources ! Les taxes, notamment la taxe Copé, que vous ne voulez pas augmenter un petit peu aujourd’hui, n’ont pas permis de compenser une telle perte. À compter de cette date, on a augmenté cette taxe tous les ans de deux euros, voire quatre euros, afin de permettre un financement stable et harmonieux. Sinon, il aurait fallu réformer l’assiette de la taxe, ce que je préconise depuis trois ans.

Si vous rejetez ces crédits parce que cette réforme n’est pas en cours, pourquoi n’avez-vous pas proposé un amendement visant à remédier à la situation ?

Ayons un débat de vérité : si vous voulez élargir l’assiette de cette taxe cette année, pourquoi n’amendez-vous pas ce projet de loi de finances ? En réalité, vous ne voulez pas assumer vos choix devant nos concitoyens.

Pour ma part, je suis prêt à le faire, à condition qu’il n’y ait pas de francs-tireurs embusqués dans les coins ! Près d’un million de nos concitoyens devront de nouveau être assujettis à la CAP, la contribution à l’audiovisuel public.

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