Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, dans ce contexte budgétaire contraint, on ne peut qu’apprécier que les crédits de la mission outre-mer soient préservés.
Ce budget présente plusieurs avancées notables que je tiens à saluer.
D’abord, ce projet de budget stabilise les crédits de paiement consacrés au service militaire adapté, qui permet de former 600 jeunes chaque année en Guyane.
Ensuite, les dispositifs de soutien à l’investissement sont maintenus : le contrat de plan État-région, le Fonds exceptionnel d’investissement, mais également les dotations qui financent les constructions scolaires en Guyane, à Mayotte et en Polynésie.
Enfin, concernant l’Agence de l'outre-mer pour la mobilité, LADOM, l’augmentation des moyens pour la formation en mobilité est une bonne chose. Nous devons toutefois veiller à accompagner ces jeunes, qui rencontrent souvent de grandes difficultés dans leur installation.
Vous vous en doutez, des réserves existent néanmoins.
Tout d’abord, à la différence des crédits de paiement, les autorisations d’engagement diminuent, de 13 millions d’euros. Je crains que cela ne nuise, dans un avenir proche, au budget de la mission.
Nous le savons tous, les écarts se creusent chaque jour un peu plus entre les outre-mer et la France hexagonale. Le PIB par habitant est nettement inférieur outre-mer, quel que soit le territoire ; le taux de chômage y atteint plus de 50 % chez les jeunes ; le taux de pauvreté y est trois fois plus élevé.
En Guyane, la démographie galopante nous pose un défi de taille : développer un territoire dont le retard en infrastructures est encore considérable.
Alors que, à Paris, nous votons des lois pour la transition énergétique et que nous nous engageons à réduire la fracture numérique, bon nombre de Guyanais vivent quant à eux en plein cœur de zones blanches ou n’ont tout simplement pas accès à l’électricité, ni même à l’eau potable…
Face à ces besoins patents, je ne peux que regretter la légère diminution des crédits alloués à la Guyane : cette baisse est de 1, 4 % sur les autorisations d’engagement et de 1, 8 % sur les crédits de paiement.
Je concentrerai maintenant mon propos sur deux points directement en lien avec cette mission.
En premier lieu, j’évoquerai la nouvelle réforme des exonérations de charges.
En Guyane, les indicateurs ne sont pas bons et l’heure est au pessimisme. Tout au long de cette année, syndicats et chefs d’entreprise sont descendus dans la rue pour exprimer leur mécontentement. Nous, élus de Guyane, ne pouvons rester insensibles à la détresse de ceux qui sont en première ligne du développement économique.
Or, dans un contexte de chômage élevé, cette réforme affaiblit nos entreprises. Si nous entendons bien que cette mesure devrait être compensée par la montée en puissance des dispositifs du pacte de stabilité, les entreprises réclament, d’une part, une évaluation approfondie des politiques publiques et, d’autre part, de la stabilité dans les mesures.
Pouvez-vous, madame la ministre, les rassurer sur la pertinence de cette nouvelle réforme ainsi que sur ce besoin de stabilité qu’elles réclament ?
J’en viens, en second lieu, à la question du logement.
L’augmentation de la ligne budgétaire unique pour la Guyane et l’objectif de 10 000 logements construits ou réhabilités par an sont louables, mais force est de constater que nous sommes encore loin du compte.
Le plus important est aujourd’hui de donner à la LBU les moyens de ses ambitions. On dénombre plus de 11 000 logements insalubres et, chaque année, près de 1 000 logements spontanés voient le jour.
Ce phénomène représente d’importantes dépenses pour la collectivité lorsqu’il faut monter des opérations de résorption de l’habitat insalubre, ou RHI, et apporter les services et les réseaux dans des secteurs isolés.
L’étude d’opportunité et de faisabilité d’une opération d'intérêt national, ou OIN, menée en 2013 le mettait clairement en exergue : la résorption de l’habitat insalubre prend chaque année plus d’importance dans la ligne budgétaire unique et se révèle de plus en plus coûteuse. En effet, sur des terrains déjà occupés, un logement traité via une RHI a un coût global de viabilisation d’environ 32 000 euros, alors qu’une opération d’aménagement coûte 23 000 euros en moyenne.
Il y a urgence à basculer d’une logique peu durable d’interventions sporadiques vers une logique où l’État accompagne le territoire dans ses choix.
Au regard de ces enjeux, le plan logement outre-mer 2015-2020 apparaît bienvenu. Néanmoins, professionnels et élus attendent aujourd’hui davantage et misent beaucoup sur l’OIN annoncée en juin dernier.
Madame la ministre, pouvez-vous justement nous confirmer votre volonté que cette opération d'intérêt national intervienne dans les meilleurs délais et qu’elle soit à la hauteur de nos attentes ?
Madame la ministre, mon signal d’alerte se veut ici constructif. Au-delà des problèmes que je soulève, c’est pour un changement de méthode que je plaide. Reprenons à notre compte le dicton : mieux vaut prévenir que guérir ! Et, afin d’éviter que les conflits ne finissent systématiquement dans la rue, travaillons ensemble à des mesures fortes et durables qui permettent de redonner confiance à la population comme aux entreprises !
En dépit de ces remarques, le présent projet de budget de la mission « Outre-mer » pour 2016 est globalement satisfaisant. Je suis donc favorable à son adoption.