La séance, suspendue à treize heures trente-cinq, est reprise à quinze heures cinq.
Le Sénat va examiner les crédits des missions « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » et « Crédits non répartis » (et articles 57 à 57 quater), ainsi que les crédits du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ».
La parole est à M. Thierry Carcenac, rapporteur spécial.
Madame la présidente, madame la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, mes chers collègues, Michel Bouvard, corapporteur, et moi-même vous présenterons successivement les enjeux budgétaires pour l’année 2016 de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », qui est la principale mission du pôle économique et financier de l’État. Elle porte principalement les crédits de deux administrations de réseaux que sont la DGFIP, la Direction générale des finances publiques, et les douanes, ainsi que les moyens de plusieurs structures et politiques transversales qui relèvent de Bercy.
Les équilibres de cette mission ont été quelque peu remis en cause par les annonces du Président de la République qui ont fait suite aux terribles attentats du 13 novembre dernier.
Les crédits de la mission devaient baisser de 317 millions d'euros en 2016, soit une diminution de 2, 8 %, pour s’établir à environ 11 milliards d’euros, marquant, cette année encore, la forte contribution des ministères économiques et financiers à la réduction des dépenses publiques. L’amendement présenté par le Gouvernement vise à majorer de 42 millions d'euros les crédits de la mission, afin de financer la création nette de 267 équivalents temps plein travaillé, ou ETPT, à la douane. Il efface la baisse du plafond d’emplois de 233 ETPT. Sur deux ans, 1 000 postes supplémentaires seront ainsi créés. Les douaniers seront en priorité affectés à des missions de sécurité. D’après les informations dont nous disposons, les écoles de Tourcoing et de La Rochelle devraient être en mesure de former ces nouveaux agents.
En réalité, deux priorités coexistent, sans contradiction : une réduction des effectifs correspondant aux gains d’efficience et une hausse des effectifs consacrés à la sécurité, qui sont plus que jamais nécessaires. De fait, les dépenses de personnel, qui représentent 79 % des crédits de la mission, demeurent un levier d’économies incontournable. L’effort serait finalement de 94 millions d'euros. La DGFIP en portera l’essentiel, avec une réduction de 2 130 ETPT en 2016, soit près de 7 400 agents en trois ans. Sans réforme de structure, cette baisse ne pourra pas être poursuivie si l’on veut garantir le recouvrement des impôts et lutter efficacement contre la fraude et l’évasion fiscales.
L’autre « volet » de l’effort de la mission est une réduction nette de 190 millions d'euros des dépenses hors personnel. En réalité, ce chiffre est loin de correspondre seulement à des économies sur le fonctionnement courant, les gisements d’économies de fonctionnement se faisant de plus en plus rares. Une partie de la baisse tient à la réduction de 63 millions d'euros des aides aux buralistes, qui est sans rapport avec la modernisation de l’administration, et à la contraction, cette année encore, des investissements, qui diminuent de 33 millions d'euros. Heureusement, les investissements informatiques sont préservés et même renforcés dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.
Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite vous faire part de quelques interrogations.
L’un des principaux chantiers de modernisation est en fait la rationalisation du réseau territorial de la DGFIP. Avec 4 000 points de contact, seule La Poste dispose d’un réseau supérieur. Dès lors, quel niveau de services devons-nous assurer à nos concitoyens et élus locaux ?
Le Premier ministre a demandé aux préfets d’engager une démarche permettant d’anticiper et de coordonner les modifications d’implantations territoriales des services de l’État et d’éventuelles fermetures de sites. Quelle est votre orientation en la matière ? Les services de la DGFIP consacrent beaucoup de temps à l’accueil, alors que l’essentiel des missions devrait concerner le recouvrement et le contrôle. Et que dire des petites recettes locales !
Du côté de la douane, la réorganisation du réseau se poursuit sans porter atteinte aux résultats des différentes saisies. On peut notamment saluer la reconversion du centre de Metz, initialement prévu pour la gestion de l’écotaxe, qui centralisera finalement les services chargés de la fiscalité des transports.
Monsieur le secrétaire d’État, pensez-vous que l’impact des mesures prises pour lutter contre le terrorisme modifiera la mise en œuvre du projet stratégique Douane 2018 ?
Dans ces réorganisations, le contrôle fiscal ne doit pas être oublié. Le Gouvernement a fait à juste titre de la lutte contre la fraude et l’optimisation fiscales une priorité, qui d’ailleurs porte ses fruits puisque le service de traitement des déclarations fiscales rectificatives devrait rapporter 2, 1 milliards d'euros en 2016, après 2, 5 milliards d'euros en 2015. Les progrès sont également notables en matière de fiscalité internationale, notamment grâce à l’action de l’OCDE.
Sur le terrain, la DGFIP ne doit pas être seulement une administration de service respectant des délais de remboursement de TVA et de CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi ; elle doit également être une administration du respect des obligations déclaratives et de contrôle. Pour tenir compte des évolutions démographiques et économiques, il pourrait être envisagé de mettre en place un « indice de couverture du tissu fiscal », pour vérifier qu’il n’existe pas de territoires oubliés.
Enfin, je voudrais souligner l’opportunité que représente le numérique pour les administrations de Bercy.
Je conclus, madame la présidente.
Le numérique doit nous conduire à repenser le recouvrement de l’impôt lui-même. Le prélèvement à la source devrait être une priorité. En ce qui concerne les revenus des particuliers sur des plateformes internet, il faudrait également faire en sorte que ces plateformes puissent les déclarer automatiquement.
L’économie numérique et participative se développe et n’attend pas que nous légiférions.
En conclusion, mes chers collègues, je vous engage à voter les crédits de cette mission tels qu’ils ont été présentés dans le projet initial et amendés par le Gouvernement.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Michel Bouvard, rapporteur spécial, et M. André Gattolin applaudissent également.
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, la politique immobilière de l’État repose sur deux outils, au-delà des budgets ministériels.
Le premier est le programme 309, « Entretien des bâtiments de l’État », qui est rattaché à la mission que vient de présenter Thierry Carcenac. Il finance les travaux d’entretien lourd de l’État propriétaire. Il est doté de 145 millions d'euros en 2016, en légère baisse. Dans le détail, les crédits alloués à la « maintenance corrective » baissent au profit de la « maintenance préventive », ce qui est de bonne politique.
Le second, le compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État », finance les travaux structurants de reconversion.
Ce compte est financé par les produits de cession des immeubles de l’État, évalués à 500 millions d'euros pour 2016. L’objectif paraît réaliste, mais, à moyen terme, monsieur le secrétaire d’État, les choses sont plus inquiétantes : la raréfaction progressive des biens cessibles de qualité pourrait bientôt remettre en cause l’équilibre économique du CAS. La liste des cessions à venir et les délais pour les réaliser témoignent de ce tarissement, sans parler du caractère incongru de certaines ventes prévues en 2016, comme le terrain de Palmyre, qui, pour être anecdotique, n’en est pas moins le reflet du peu d’attention portée aux documents remis au Parlement.
Il est donc urgent de trouver un moyen de valoriser au mieux ce qui reste à céder – pourquoi toujours céder des bâtiments, souvent en mauvais état, quand une rénovation pourrait en augmenter la valeur ? Faut-il d’ailleurs toujours vendre ? France Domaine devrait étudier les multiples possibilités de valorisation locative, quitte à déléguer la gestion à un tiers.
L’épuisement du « réservoir » des cessions est d’autant plus alarmant que le CAS finance aujourd’hui des politiques qui se font concurrence.
Il contribue d’abord au désendettement de l’État – programme 721 –, au taux théorique de 30 % des produits de cessions. En pratique, celui-ci ne sera que de 16 % en 2016, soit 80 millions d’euros. Le taux de 30 % n’a d’ailleurs jamais été atteint en raison de multiples exonérations. Ces dérogations nuisent à la lisibilité et à la soutenabilité du CAS. Pour preuve, cette année, l’équilibre est porté à bout de bras par une « contribution exceptionnelle » de 75 millions d’euros du ministère des affaires étrangères, alors même que celui-ci bénéficie théoriquement d’une exonération…
Il finance ensuite la modernisation du parc immobilier de l’État – programme 723. Aujourd’hui, les recettes sont clairement insuffisantes pour faire face aux dépenses nécessaires, d’autant que l’État doit honorer ses engagements en matière de mise en accessibilité.
Le CAS finance aussi, indirectement, la loi de programmation militaire, au travers du régime d’exonération dont bénéficie le ministère de la défense.
Enfin, depuis 2013, il finance la politique du logement social au moyen des décotes « Duflot ». Celles-ci permettent de céder un immeuble en dessous de sa valeur vénale, jusqu’à la gratuité. Cette décote a même remis en cause le droit de retour du ministère de la défense, créant une exception à l’exception.
Nous avons obtenu le bilan de ces cessions : depuis 2013, les décotes représentent 75 millions d’euros, soit 61 % de la valeur des biens. Sans préjuger le bien-fondé de cette politique, qui a permis de construire 2 889 logements sociaux, celle-ci ne correspond pas à la vocation du CAS, qui est de contribuer au désendettement et à la modernisation du parc immobilier de l’État. La commission des finances a adopté deux amendements de clarification, qui tendent, d’une part, à imputer les décotes « Duflot » sur le budget général et, d’autre part, à inscrire celles-ci en annexe de la loi de finances, au même titre que les dépenses fiscales.
Monsieur le secrétaire d’État, nous ne pouvons financer avec une seule recette quatre politiques. La politique immobilière de l’État a donc besoin d’une opération vérité. En effet, outre que les cessions vont diminuer, elles se voient assigner des objectifs de plus en plus contradictoires, aucun d’entre eux n’étant véritablement atteint. C’est à cette clarification que le Sénat est prêt à travailler, dans un esprit constructif.
La bonne diffusion des principes de la politique immobilière de l’État est par ailleurs freinée par la faiblesse de France Domaine. En pratique, les ministères gardent la main sur l’essentiel des dépenses et des décisions, par exemple le choix du régime d’occupation des immeubles – achat, location, etc. L’autorité hiérarchique appartient aux préfets dans les régions, et non aux responsables régionaux de la politique immobilière de l’État. En Île-de-France, la coordination des administrations centrales et déconcentrées reste insuffisante et entrave les projets de mutualisation, malgré la volonté de l’exécutif.
Si l’estimation du patrimoine immobilier de l’État ne fait plus l’objet de réserves de la part de la Cour des comptes à l’occasion de la certification des comptes 2014, le travail n’est pas pour autant achevé : les incertitudes concernent encore près de 12 % du parc !
Enfin, les opérateurs constituent le véritable « angle mort » de cette politique immobilière. Leurs dépenses sont mal estimées et mal pilotées. Sept ans après les circulaires du Premier ministre, leur patrimoine n’est toujours pas connu ! Selon le rapport de la Cour des comptes précité, 52 opérateurs n’ont toujours pas achevé leur processus de fiabilisation et, parmi ceux qui sont censés l’avoir terminé, 49 ne l’auraient en réalité pas finalisé, si l’on en croit les contrôles opérés.
Cette situation est regrettable, car les possibilités de cession ou de valorisation sont réelles pour les opérateurs. Il reste donc un travail considérable à réaliser.
Enfin, s’agissant de la mission « Crédits non répartis », anciennement appelée « Provisions », destinée à couvrir les dépenses indéterminées, ses crédits sont en nette augmentation, notamment ceux du programme « Provision relative aux rémunérations publiques », qui anticipent les mesures d’accompagnement de réorganisations des services liées à la nouvelle organisation territoriale de l’État. Quant au programme « Dépenses accidentelles et imprévisibles », doté de 324 millions d’euros en autorisations d’engagement, je redis, comme l’an dernier, que la doctrine d’emploi de ces crédits mériterait d’être clarifiée. Dans le passé, la Cour des comptes a déjà critiqué la gestion de ce programme. Cette année, le montant des crédits a été revu à la baisse dès l’examen du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale, pour contribuer au financement des dépenses supplémentaires votées par les députés.
Je reviendrai sur les articles rattachés à la mission à l’occasion de l’examen des amendements.
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, sur un plan très général, le projet de loi de finances pour 2016 prévoit une légère hausse des effectifs dans la fonction publique de l’État, qui comprend 2, 4 millions d’agents, pour respecter l’objectif de créations de postes dans l’enseignement, la justice et la sécurité, secteurs identifiés comme prioritaires. Cette hausse sera cependant plus importante, le Président de la République ayant annoncé, lors du récent Congrès réuni à Versailles, la création de 5 000 emplois dans la police et la gendarmerie, 2 500 au sein de la justice et 1 000 aux douanes.
Le programme 148, « Fonction publique », est intégré au sein de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines ». Il regroupe les crédits consacrés à l’action interministérielle pour l’action sociale – chèques-vacances, allocation pour la garde d’enfants, par exemple – et à la formation des fonctionnaires – dotation allouée à l’ENA et aux IRA, notamment. Je ferai, un peu plus loin dans mon intervention, un focus sur deux secteurs particuliers de formation : l’apprentissage et les classes préparatoires intégrées.
Ces crédits sont stables par rapport à 2015 : ils s’élèvent à 126 millions d’euros pour l’action sociale et à 78 millions d’euros pour la formation des fonctionnaires de la fonction publique de l’État. En revanche, ils augmentent de 30 millions d’euros pour développer l’apprentissage dans la fonction publique de l’État, conformément à l’engagement du Gouvernement de recruter 4 000 apprentis à la rentrée de 2015 – cet objectif serait atteint – et 6 000 apprentis à la rentrée de 2016.
L’apprentissage dans les trois versants de la fonction publique représente moins de 3 % du total de l’apprentissage en France. Il semble nécessaire de le développer pour contribuer à la formation des jeunes et lutter contre le chômage. Ce développement se heurte toutefois à plusieurs obstacles.
Le premier reste l’absence de débouchés, les apprentis devant passer un concours de la fonction publique, sauf s’ils exercent un emploi de catégorie C. Toutefois, la création de voies d’accès à la fonction publique réservées aux anciens apprentis pourrait aller à l’encontre du principe constitutionnel d’égal accès à l’emploi public.
Le deuxième obstacle est financier : les coûts salariaux de l’apprenti sont doublés par rapport au privé, les employeurs publics n’étant pas éligibles aux incitations fiscales prévues pour les entreprises.
Enfin, le troisième obstacle est administratif : les apprentis mineurs de la fonction publique ne sont pas autorisés à exercer une activité dite « réglementée », à l’inverse du privé. Les collectivités territoriales sont toujours en attente des décrets répondant à cette difficulté, madame la ministre.
Autre secteur de formation intéressant : les classes préparatoires intégrées, ou CPI. Elles s’adressent aux étudiants et demandeurs d’emploi de condition modeste pour les aider dans la préparation des concours externes. À ce jour, 476 élèves sont accueillis dans 25 CPI, le Gouvernement s’étant fixé comme objectif de doubler ce nombre d’ici à 2016, pour un coût non provisionné, qui pourrait atteindre 7 millions d’euros.
Aussi, pour développer le nombre des CPI sans remettre en cause leur modèle pédagogique, la meilleure stratégie consisterait à créer de nouvelles classes préparatoires dans des domaines ou des zones géographiques non couverts. Il conviendrait également de mutualiser les démarches de toutes les CPI pour mieux faire connaître le dispositif et ne pas s’interdire d’avoir recours à des fonds privés.
Mes chers collègues, la commission des lois, notamment au regard des efforts constatés sur l’apprentissage, a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits du programme 148 de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » du projet de loi de finances pour 2016.
Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Michel Canevet.
Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC.
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous aurions tendance à considérer ce budget comme exemplaire, tant il est vrai que des efforts de maîtrise de la dépense publique ont été effectués ces dernières années en ce qui concerne les personnels du ministère de l’économie et des finances.
À la Direction générale des finances publiques, qui est issue du regroupement du Trésor public et de l’ancienne direction générale des impôts, l’effort a été extrêmement important, en particulier en raison de la révolution numérique. Aujourd’hui, de plus en plus de contribuables effectuent leur déclaration par internet. Ils étaient 15, 5 millions en 2013, 16, 3 millions en 2014 et ils devraient être 17, 4 millions en 2015. Vous pourrez peut-être nous confirmer ce chiffre, monsieur le secrétaire d’État.
Vous envisagez de généraliser la dématérialisation. Encore faudrait-il que l’ensemble du territoire soit correctement couvert et que tous les contribuables sachent se servir d’internet, ce qui n’est pas encore le cas, en particulier dans les secteurs ruraux. Il est donc important, là aussi, de prendre un peu de temps.
Si, d’un côté, l’augmentation des déclarations par internet a entraîné une diminution extrêmement importante des effectifs, il semblerait que, de l’autre, la gestion du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi mobilise 285 personnes. C’est aussi l’une des raisons qui fait dire aux membres du groupe UDI-UC qu’une baisse généralisée des charges sociales, compensée par une augmentation de la TVA à due proportion, aurait été plus intéressante que le dispositif retenu par le Gouvernement.
Je vous rappelle par ailleurs que le groupe de travail du Sénat a avancé des pistes concernant le prélèvement de la TVA dans le cadre du e-commerce et la déclaration des revenus perçus dans le cadre de l’économie collaborative. Il nous semble extrêmement important que le Gouvernement prenne en compte ces propositions, parce qu’il y a là des gisements de ressources pour l’État.
En ce qui concerne les douanes, autre sujet en lien avec cette mission, je voudrais tout d’abord avoir une pensée pour Pascal Robinson, cet agent des douanes mort dans l’exercice de ses fonctions, aux obsèques duquel vous vous êtes rendu, monsieur le secrétaire d’État.
Nous soutenons le plan annoncé par le Président de la République à Versailles, qui vise à doter les douanes de moyens supplémentaires. Nous constatons simplement que, pour 2016, ces engagements ne se traduiront que par 267 créations nettes d’emplois, puisqu’il faut déduire des 500 créations de postes annoncées les baisses d’effectifs qui étaient déjà intervenues.
Sur la question des bâtiments, il est impératif que l’État puisse avancer, notamment pour atteindre l’objectif de surface utile nette de douze mètres carrés par poste de travail, en particulier pour le millier d’agences qui ont été créées ici et là.
Je conclurai mon propos en évoquant la question du personnel. Nous sommes très inquiets des évolutions en cours. C’est pourquoi nous avons déposé des amendements. Je veux aussi dénoncer, madame la ministre, le maquis des primes dans la fonction publique : il y en a plus de 2 500 ! Il est temps d’y mettre bon ordre.
Au final, notre vote sera conditionné par la position du Gouvernement sur les amendements que nous avons déposés.
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, selon une tradition déjà bien ancrée s’agissant de gains de productivité autorisés par l’usage des technologies nouvelles, la Direction générale des finances publiques, comme l’ensemble des services du ministère de l’économie et des finances, subit de nouveau une sensible réduction de ses effectifs. Ce sont en effet 2 130 emplois budgétaires qui seront supprimés l’an prochain, faisant suite à des coupes claires équivalentes dans les effectifs lors des années 2015 et 2014, mais également depuis plusieurs décennies désormais.
Tout se passe comme si, depuis le grand mouvement revendicatif qui avait animé les services financiers de l’État à la fin des années quatre-vingt, les gouvernements successifs n’avaient eu de cesse de faire du ministère des finances et de ses fonctionnaires les victimes « privilégiées » de sa politique de ressources humaines, qu’elle se soit appelée révision générale des politiques publiques ou modernisation de l’action publique.
Nous en connaissons tous les effets : ce sont ces multiples perceptions qui ont fermé dans les territoires, ces files d’attente interminables devant les centres des finances publiques lorsque se déroulent les campagnes « impôt sur le revenu » ou « impôts locaux ».
Notons à ce propos que la dernière période, avec l’inscription, parmi les contribuables des impositions locales, de plusieurs dizaines de milliers de foyers qui en étaient jusqu’ici dispensés – nous reparlerons de cette situation lors de l’examen de l’article 33 octies –, a confiné de ce point de vue à l’asphyxie même des nouvelles méthodes de gestion des moyens matériels et humains de la DGFIP.
L’expérience nous a rappelé de fait que, en dernière instance, lorsque l’on vote des dispositions législatives et fiscales à effets secondaires ou systémiques, il se trouve à la fois des contribuables pour en subir les conséquences sans comprendre et des fonctionnaires pour essayer de les aider à s’en sortir... Nous devrions de temps en temps, je pense, réfléchir un peu plus avant à la complexité de notre droit fiscal – de mon point de vue bien plus illisible, par exemple, que le droit du travail – et aux trésors d’imagination que nous développons parfois pour accroître cette complexité.
De manière plus générale, et sans revenir au fond sur l’ensemble des sujets, notre groupe ne peut se satisfaire du traitement imposé aux services financiers de l’État.
La mission essentielle d’instruction, de collecte et de recouvrement de l’impôt ne peut être confiée qu’à la seule administration fiscale. En effet, c’est celle qui dispose de la neutralité, de la compétence, de l’expérience, du sens de l’intérêt général nécessaires, et même indispensables, pour accomplir cette mission déterminante dans tout pays civilisé. On ne saurait oublier, d’ailleurs, que les deux prélèvements fiscaux et sociaux qui souffrent de la façon la plus évidente des effets de la fraude sont la taxe sur la valeur ajoutée et les cotisations sociales, c’est-à-dire des prélèvements pour lesquels le rôle de l’entreprise n’est pas secondaire en termes de collecte et de recouvrement. On aura également observé que la fraude à l’impôt sur le revenu et celle touchant l’impôt de solidarité sur la fortune concernent, de manière générale, les éléments de revenu et de patrimoine dont la valeur ou le montant ne peuvent être fondés que sur la bonne foi du redevable.
La lutte contre la fraude fiscale, dont nous considérons plus que jamais qu’elle doit constituer une priorité de l’action publique, nécessite, de mon point de vue, des moyens matériels et humains significatifs. Or je doute que ces moyens soient forcément laissés à disposition, en raison de la logique de réduction des effectifs qui affecte depuis trop longtemps les services déconcentrés du ministère des finances.
Les montages de plus en plus complexes des très grands groupes pour tenter d’éluder l’impôt appellent au renforcement de la technicité et de la compétence des services. Ils appellent, de même, la prise de mesures particulières pour protéger ceux qui agissent en « lanceurs d’alerte » face à certaines pratiques se situant au-delà des limites de la légalité.
Pour lutter contre ces montages, nous devons enfin, sans rien céder de notre détermination, mettre en œuvre, toutes les mesures favorisant la transparence dans les gestions privées et publiques.
Permettez-moi de souligner une étrangeté : personne ne soutient la fraude fiscale, mais certains pensent tout de même que le reporting pays par pays des activités de nos banques et de nos grands groupes est une mesure qui créerait une distorsion de concurrence défavorable pour les entreprises françaises...
Pour l’heure, nous ne voterons pas les crédits de cette mission, et ce d’autant moins que les amendements déposés par la majorité de la commission des finances ne risquent aucunement de les rendre plus acceptables.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
d’État, mes chers collègues, la gestion de l’État est perfectible. Nous en sommes tous ici, je crois, convaincus. Pour autant, derrière ce truisme se cache un arbitrage délicat : offrir le meilleur service public à nos concitoyens n’est pas nécessairement corrélé à la réduction des effectifs...
Après les quelque 5 000 suppressions d’emplois de 2014 et 2015, l’année 2016 verra encore la disparition de plus de 2 000 postes supplémentaires dans la mission. Certes, l’informatisation et la rationalisation croissante des procédures permettent de ne pas renouveler un certain nombre de postes. Par ailleurs, l’augmentation du produit de la lutte contre la fraude pourrait, à première vue, être interprétée comme un accroissement de la productivité des services dédiés à ces activités. En réalité, nonobstant la qualité de ces fonctionnaires, les succès récents de la lutte contre la fraude s’expliquent largement par les évolutions législatives en matière d’échanges d’informations, qui font peser sur les fraudeurs des menaces de plus en plus précises.
Il ne faudrait donc pas en déduire hâtivement que les services dédiés à cette action sont surnuméraires, d’autant plus que certains agents peuvent être, provisoirement ou partiellement, affectés à d’autres tâches, comme par exemple l’instruction des dossiers du CICE. Sur ce sujet, pourrait-on, monsieur le secrétaire d’État, connaître le nombre des équivalents temps plein travaillé dédiés spécifiquement à la lutte contre la fraude et son évolution au cours des dernières années ? Ce chiffre ne figure pas dans le « bleu » budgétaire.
Je souhaite également évoquer, dans le court temps qui m’est imparti, ce que les Anglo-Saxons appellent les « portes à tambour », système qui consiste, pour les décideurs de haut niveau, à alterner les fonctions dans la haute administration et dans le secteur privé.
Selon une étude très récente, les énarques qui passent dans le monde de l’entreprise se recrutent en grande majorité chez les inspecteurs des finances, tandis que les énarques d’origine plus « modeste » restent davantage dans le giron administratif. Cette « collusion », pour appeler les choses par leur nom, a montré, et montre encore, ses effets sur certaines orientations prises, par exemple, en matière de réforme des activités bancaires ou de taxe sur les transactions financières.
Ce problème ne concerne toutefois pas seulement les énarques. On peut trouver, sur la place de Paris, des cabinets de conseil en optimisation fiscale, dont l’expertise repose sur le recrutement d’anciens fonctionnaires spécialisés de Bercy.
À cet égard, les règles actuelles de déontologie ne semblent pas suffisantes. Et la réforme examinée il y a peu par nos collègues de l’Assemblée nationale sur la refonte des droits et obligations des fonctionnaires est bien insuffisante sur ce point !
Je rejoins, à ce sujet, les propositions formulées par notre collègue Jacques Mézard dans son récent rapport sur les autorités administratives indépendantes et que nous pourrions assez facilement étendre à la haute fonction publique.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons les crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », dans laquelle, il faut bien le dire, ne figurent que de trop maigres économies budgétaires.
Certes, il y a des sujets sur lesquels nous approuvons l’action du Gouvernement, par exemple en matière de lutte contre la fraude, de dématérialisation des procédures, de mutualisation des achats et de rationalisation du patrimoine de l’État, d’autant plus que ces mesures s’inscrivent dans le droit fil de celles engagées par la précédente majorité. Nous pensons d’ailleurs qu’il y a encore, dans ces domaines, des marges de progression substantielles. Nous vous avouons cependant regretter le manque de courage du Gouvernement concernant les politiques de recrutement et d’évolution de la masse salariale de l’État.
Nous souhaitons, madame la ministre, que ce débat permette au Parlement d’être parfaitement éclairé sur les intentions réelles du Gouvernement en matière d’évolution du point d’indice de la fonction publique. Il y a quelques jours – je crois que c’était le 25 novembre –, vous avez laissé entendre que la valeur du point pourrait être dégelée en 2016 et, en tous les cas, que le sujet serait mis sur la table des négociations avec les syndicats en tout début d’année prochaine. Même si chacun comprend bien que, à quelques jours des élections régionales, cette déclaration peut avoir un intérêt particulier, il n’en reste pas moins vrai qu’une telle décision pourrait avoir un impact budgétaire dès l’année prochaine : imaginons que vous acceptiez le dégel du point en septembre ou en octobre, cela aura forcément des conséquences en 2016.
Absolument !
Il est surprenant que le Parlement en soit réduit à lire la presse pour tenter d’évaluer la sincérité des crédits de la mission. Et que dire des collectivités locales qui apprendront peut-être, une fois leurs budgets votés, que leurs charges progresseront de manière substantielle l’année prochaine...
Madame la ministre, que la question de la rémunération des fonctionnaires soit posée, nous en sommes tout à fait d’accord, mais nous voulons que cela soit fait dans la transparence. Le plan de revalorisation des carrières que vous avez annoncé est estimé à 5 milliards d’euros, et sa montée en charge devrait commencer en 2017. Est-ce toujours le cas ? Faute de le savoir, je ne peux donc que m’en tenir aux chiffres qui nous sont présentés ici pour dire que les mesures d’économies projetées par l’exécutif restent d’une ampleur trop faible pour endiguer véritablement le coût de la masse salariale, lequel, je le rappelle, représente 40 % du budget général de l’État.
Le groupe Les Républicains soutiendra donc, dans le cadre de l’examen de la présente mission et des articles rattachés, un amendement, présenté par le rapporteur général de la commission des finances, visant à ralentir le GVT, le glissement vieillesse-technicité. Il s’agit là d’un enjeu fondamental pour la maîtrise de la masse salariale de l’État et donc, par ricochet, pour l’assainissement de nos finances publiques.
Nous soutiendrons également un amendement, adopté par la commission des finances, tendant à diminuer le niveau d’emplois des opérateurs, dont la masse salariale a considérablement crû ces dernières années. Nous entendons substituer à la stabilisation des effectifs prévue par l’actuelle loi de programmation la norme de baisse des effectifs des opérateurs prévue par la précédente loi de programmation 2011-2014. La maîtrise de la masse salariale ne saurait en effet se cantonner à l’État.
Autre levier important d’économies, volontairement négligé par le Gouvernement : la politique de recrutement de l’État. Nous soutiendrons, à cet égard, un amendement de notre rapporteur général qui tend à proposer le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite dans les secteurs non régaliens.
Toujours afin de mieux maîtriser la masse salariale et de dégager des marges d’économies, le groupe Les Républicains appuiera un amendement de la commission des finances visant à instaurer trois jours de carence dans la fonction publique, comme cela existe pour les salariés du secteur privé.
Ce serait là une mesure d’équité bienvenue par rapport au secteur privé.
Comment expliquer, en effet, une telle disparité entre fonctionnaires et salariés du privé, qui veut que seuls les premiers soient indemnisés dès le premier jour ? Sans doute objecterez-vous comme l’année dernière, madame la ministre, que les salariés du secteur privé bénéficient, grâce à leur complémentaire santé privée, d’une prise en charge des jours de carence.
Ce serait pourtant oublier que tous les salariés du secteur privé ne sont pas couverts par des assurances privées, un tiers d’entre eux ne bénéficiant d’aucune prise en charge. Ce serait oublier également que ceux qui jouissent d’une couverture privée paient, afin d’en bénéficier, une cotisation supplémentaire... Je rappelle en outre que, dans la fonction publique territoriale, de nombreux fonctionnaires s’assurent également contre les pertes de salaires.
Il faut au surplus, cette année encore, insister sur l’efficacité qui était celle du jour de carence avant sa suppression, voilà maintenant deux ans, par votre majorité. Cette efficacité s’est notamment révélée décisive concernant les arrêts maladie d’une journée. Ainsi, selon une étude réalisée par le groupe Sofaxis en 2013, les arrêts d’un jour auraient, sous l’effet du jour de carence, reculé de 40 % dans la fonction publique hospitalière, étiage porté à 43 % dans les collectivités territoriales.
Au vu de ces différentes considérations, l’abrogation du jour de carence, décidée par l’actuelle majorité présidentielle pour compenser le gel prolongé de la rémunération des fonctionnaires – c’est en tout cas ainsi que cela fut perçu –, a donc été tout à la fois inefficace financièrement et injuste socialement.
Vous l’aurez compris, le groupe Les Républicains, en concertation avec le rapporteur général de la commission des finances, propose en conséquence de généraliser la règle des trois jours de carence. Répétons-le : il s’agit là d’un impératif d’équité entre agents publics et salariés du privé, qui améliorerait également l’organisation des fonctions publiques hospitalière, territoriale et de l’État.
Nous proposons également une diminution des crédits du programme 156, « Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local ». Cette économie pourrait se traduire, dans un souci de cohérence et, encore une fois, d’équité, par l’extinction de certains régimes dérogatoires à la durée légale du travail. Dans sa précieuse enquête sur la masse salariale de l’État, la Cour des comptes a notamment fait observer que seuls 500 000 équivalents temps plein sur 1, 9 million étaient soumis au régime de droit commun dans les ministères. Il y a en ce domaine, comme dans maints autres, d’importants efforts de rationalisation à fournir.
C’est donc sous réserve de l’adoption de leurs amendements que les membres du groupe Les Républicains voteront les crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », conformément au souhait du rapporteur spécial Michel Bouvard, que nous tenons du reste à féliciter pour la très grande qualité du rapport qu’il a présenté avec Thierry Carcenac.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, compte tenu du temps de parole qui nous est imparti, je serai bref, quitte à être plus précis lors de l’examen des amendements.
Vous êtes nombreux à avoir mis en avant les réductions d’effectifs et l’adéquation de ceux-ci par rapport aux missions qui nous sont confiées, notamment l’adaptation des réseaux au sein de la DGFIP et de la DGDDI, la Direction générale des douanes et droits indirects. Il est vrai que l’on m’interroge souvent à propos des restructurations de réseaux. Mais, comme certains d’entre vous l’ont mis en évidence à juste titre, les techniques de l’internet ont beaucoup évolué, même s’il reste des progrès à faire.
Si le nombre des télédéclarations a progressé, il commence toutefois à plafonner. Pour cette raison, le Gouvernement vous proposera de généraliser cette possibilité, mais de façon progressive, comme vous l’avez souhaité, monsieur Canevet, et non coercitive, en prévoyant des exceptions pour certains redevables.
Les télépaiements sont, eux aussi, en voie de généralisation, ce qui permet de réaliser des économies très importantes, y compris en termes d’effectifs.
Pour ce qui concerne la question relative à la douane, vous permettrez que j’y réponde durant la présentation de l’amendement du Gouvernement, afin de laisser le temps à Marylise Lebranchu de s’exprimer sur les sujets qui la concernent directement.
Je souhaite m’attarder sur le sujet, que vous connaissez bien, monsieur Bouvard, de France Domaine et de la gestion de l’immobilier de l’État.
Il nous faut reconnaître, vous l’avez fait, monsieur le rapporteur spécial, la progression de la qualité des services de France Domaine. Celle-ci est notamment due à une professionnalisation des recrutements, lesquels sont désormais mieux adaptés aux missions, parfois très techniques, de gestion immobilière et de maîtrise d’ouvrage.
Les inquiétudes à propos de la mobilisation des crédits, notamment au ministère de la défense, n’ont pas lieu d’être : les crédits ont toujours été mobilisés. Et, s’il y a eu des doutes – je pense à la vente des fréquences, même si elles ne relèvent pas du patrimoine immobilier de l’État –, ils doivent être levés. Le Gouvernement s’est engagé à utiliser les recettes, parfois en les transformant en crédits budgétaires.
La priorité, le Président de la République l’a rappelé à Versailles, est bien entendu d’assurer les moyens nécessaires à la sécurité extérieure tant qu’intérieure, sécurité à laquelle nos armées participent.
Le vrai problème est de placer France Domaine ou, en tout cas, le service chargé de la gestion de l’immobilier, au centre des ministères.
Trop d’occasions de mutualisation ou d’optimisation sont manquées, mais nous progressons. Nous avons, par exemple, généraliser les SDIR, les schémas directeurs immobiliers régionaux. L’organisation des nouvelles régions nous donnera d’ailleurs probablement la possibilité d’améliorer à terme la gestion de l’immobilier à cette échelle.
Nous aurons l’occasion de revenir sur la structuration de l’ensemble, actuellement à l’étude avec le Premier ministre, mais des progrès considérables ont également été faits en matière budgétaire, notamment – vous n’y avez pas fait allusion – au niveau du service des achats de l’État, la direction nouvellement créée enregistrant des résultats extrêmement intéressants.
J’avais, mesdames, messieurs, les sénateurs, préparé une intervention plus structurée que ces quelques réflexions, mais dix minutes seulement sont accordées au Gouvernement ; à deux, ça fait cinq minutes chacun. Replaçons cependant ce débat dans l’ensemble de la discussion budgétaire.
Lors de l’examen de la première partie, la majorité sénatoriale a diminué les crédits de 4, 2 milliards d’euros. Nous avions dit que nous nous reverrions en fin de seconde partie pour faire le bilan et, si je puis dire, l’état du solde, solde qui au demeurant n’aura formellement que peu de signification, car j’ai bien observé que certains crédits de mission avaient été repoussés. Mais les diminutions de crédits proposées ici me paraissent extrêmement massives... Un des amendements vise à diminuer de 2, 2 milliards d’euros la masse salariale des fonctionnaires. Ils sont à peine un peu plus de 2, 4 millions : on parle donc de près de 10 000 euros en moins par fonctionnaire ! Sauf à dire, mesdames, messieurs les sénateurs de la majorité sénatoriale, que vous voulez supprimer des postes, mais il faudra nous dire lesquels ! Dans les armées ?
Vous allez avoir la parole, monsieur le rapporteur général, et je serai très attentif, car je ne comprends pas très bien comment vous pouvez demander plus de militaires, plus de policiers, plus de douaniers, tout en voulant diminuer le nombre de fonctionnaires ou alors, par l’application d’une espèce de règle de trois sur le temps de travail, réduire de 10 000 euros leur salaire ! Mais nous verrons cela à l’occasion de l’examen des amendements…
Pardon d’avoir dépassé mon temps de parole, Marylise ; nous ne ferons pas part égale, mais peut-être est-ce proportionnel au poids !
Rires.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je commencerai par l’apprentissage dans la fonction publique, sujet abordé par Mme Di Folco.
Il y avait 700 apprentis en 2014. Ils étaient 4 390 en novembre 2015, et il est prévu qu’ils soient 10 000 en novembre 2016. Il s’agit donc d’un effort important.
Je partage l’analyse selon laquelle ce n’est pas une voie qui permettrait d’échapper aux règles de la fonction publique. C’est un point sur lequel il faut être extrêmement attentif. La discussion avec les organisations syndicales s’est très bien passée à cette condition.
En revanche, on a tendance à oublier qu’il y a divers métiers dans la fonction publique, et c’est une bonne voie pour apprendre certains de ces métiers. En ce moment même, nous discutons avec l’éducation nationale d’une licence professionnelle administrative par alternance, perspective intéressante pour l’avenir.
Le décret pour la fonction publique de l’État est en cours de publication ; celui pour la fonction publique territoriale paraîtra au premier trimestre de 2016.
Je suis d’accord pour simplifier le « maquis des primes », comme le dit M. Canevet. La première simplification que j’ai engagée a été difficile à faire passer. L’indemnité qui a remplacé la PFR, la prime de fonctions et de résultats, devrait nous permettre de progresser. Surtout, le protocole, qui n’a pas été signé par la majorité des organisations syndicales mais que le Premier ministre a décidé d’adopter et d’appliquer, sera une bonne chose pour les parcours et les carrières : c’est un chemin vers l’introduction de l’indemnitaire dans l’indiciaire, un petit chemin, certes, mais il mène à la construction d’un autre système de rémunération des fonctionnaires.
Le système indemnitaire, dont la genèse tient à la difficulté de rémunérer correctement des personnels bien formés, est peu à peu devenu, si vous me permettez l’expression, une variable d’ajustement salariale injuste puisqu’il représente de 2 % à 71 % du salaire selon les ministères. Nous avançons sur ce sujet, avec difficulté, certes, mais le régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel – le fameux RIFSEEP –, au-delà de son terrible nom, c’est aussi ça. Nous espérons arriver, et je pense que vous nous suivrez, à un régime unique, au moins par pilier, mais cela se fera sur plusieurs années, petit à petit et en regardant comment les choses vont évoluer.
J’en viens au point d’indice.
Il est évident que l’on n’ouvre pas une négociation en disant : « Je vais vous inviter à la table des négociations, mais il n’y a rien à négocier ! » Je l’ai dit très clairement aux organisations syndicales, et je n’ai aucune peine à le redire ici, la question est posée de savoir s’il va ou non être mis un terme au gel absolu du point d’indice, mais la décision n’est bien évidemment pas prise. Il est d’ailleurs heureux que nous n’ayons pris aucun engagement compte tenu de l’énorme drame qui s’est produit et des dépenses supplémentaires que nous avons devant nous. Les fonctionnaires le comprennent parfaitement. Il y a peut-être un problème de symbole, c’est tout. Je le dis comme je le pense, en dehors de tout arbitrage.
Dire que le point d’indice va être gelé ad vitam aeternam provoque d’autres types de demandes, y compris à propos du jour de carence.
L’enquête de la Sofaxis a été réalisée auprès de personnels de la fonction publique territoriale qui relevaient de son régime de protection, lequel prenait en compte la suppression du jour de carence – raison pour laquelle on ne peut s’appuyer sur ses chiffres, puisque les autres fonctionnaires n’en bénéficiaient pas –, ce qui représentait de 8 à 12 euros par salarié et par mois.
Rien d’étonnant dès lors à ce que nous subissions une forte pression d’un certain nombre de groupes d’assureurs, les mutualistes à bas bruit, les autres à grand renfort de lobbying, pour que nous revenions sur la suppression du jour de carence, leur grand espoir étant de toucher des millions de « clients » potentiels, avec une part patronale qu’il faudrait donc assurer entre 8 et 12 euros par mois. Ils voudraient nous faire croire que ce serait une très grande économie pour les trois employeurs publics…
Pour ma part, je souhaiterais qu’une véritable étude sur cette question puisse être faite, à l’échelle du Parlement, entrecroisant les chiffres que nous avons et ceux que vous avez. Je suis à la disposition, je l’ai déjà dit, de la commission des finances comme de tout organe du Parlement, pour venir en discuter, et en discuter longuement, car le sujet mérite des échanges approfondis.
Nous en parlons d’ailleurs aussi beaucoup entre nous : c’est même un « marronnier », si je peux me permettre cette expression. Et il ne s’agit pas du tout de faire des annonces à la veille des élections régionales !
Enfin, monsieur Dallier, à force de répéter que les fonctionnaires ne travaillent pas assez, qu’il faut geler leur salaire, ne pas leur donner de prime, ne pas leur accorder le glissement vieillesse-technicité, on crée des sentiments d’indignité qui conduisent, d’après les sondages en tout cas, 32 % de nos personnels à envisager de voter pour des gens sans scrupules qui leur promettent un meilleur GVT, le dégel du point d’indice, l’augmentation du nombre de postes, et qui, dimanche, obtiendront peut-être des scores qui nous effrayeront vous et moi.
MM. Bernard Lalande et André Gattolin applaudissent.
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », figurant à l’état B.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Gestion des finances publiques et des ressources humaines
Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local
Dont titre 2
6 941 697 212
6 941 697 212
Conduite et pilotage des politiques économiques et financières
Dont titre 2
499 560 483
499 560 483
Facilitation et sécurisation des échanges
Dont titre 2
1 142 948 997
1 142 948 997
Entretien des bâtiments de l’État
Fonction publique
Dont titre 2
30 249 143
30 249 143
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-151, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local
dont titre 2
2 200 000 000
2 200 000 000
Conduite et pilotage des politiques économiques et financières
dont titre 2
Facilitation et sécurisation des échanges
dont titre 2
Entretien des bâtiments de l’État
Fonction publique
d ont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. le rapporteur général.
Cet amendement a trait à la durée du travail dans la fonction publique.
Je rappelle que la commission des finances avait commandé à la Cour des comptes une enquête aux résultats fort intéressants, qui a donné lieu au rapport d’information intitulé La maîtrise de la masse salariale de l’État.
L’enjeu est considérable, puisqu’il s’agit de 40 % des dépenses de l’État, avec environ 80 milliards d’euros de salaires et 40 milliards d’euros inscrits au compte d’affectation spéciale « Pensions », soit 120 milliards d’euros de dépenses.
Un certain nombre de pistes d’économies nous ont été suggérées par la Cour des comptes, dont le Premier président nous avait fait une restitution très intéressante. Celle-ci avait donné lieu à un débat passionnant sur cette masse salariale qui constitue donc le premier poste du budget de l’État et dans laquelle il nous semble qu’il y a des effets de levier.
La Cour des comptes s’était notamment intéressée, comme la commission des finances, à la question du temps de travail dans la fonction publique. Son rapport mettait en évidence le fait qu’un quart des 1, 9 million de fonctionnaires de l’État étaient à la durée « légale » du travail, ce qui signifie concrètement que les trois quarts des fonctionnaires sont à des durées dérogatoires.
La Cour des comptes a souligné l’enjeu en termes financiers de cette situation : elle a estimé qu’une augmentation de 1 % seulement du temps de travail des 5, 4 millions d’agents de l’ensemble des trois fonctions publiques représenterait un gain de 700 millions d’euros.
L’amendement n° II-151 permet de mesurer l’importance de l’enjeu, même rapporté à la seule fonction publique de l’État. Son objet est tout simplement d’aligner la durée du travail de la fonction publique de l’État, non pas sur les 39 heures – ce n’est pas l’objet du débat aujourd'hui –, mais sur la durée moyenne habituelle du travail dans le secteur privé, laquelle s’élève à 37, 5 heures. Le gain serait considérable : 2, 2 milliards d’euros !
L'amendement n° II-487, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local
dont titre 2
311 110 000
311 110 000
Conduite et pilotage des politiques économiques et financières
dont titre 2
Facilitation et sécurisation des échanges
dont titre 2
Entretien des bâtiments de l’État
Fonction publique
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. le rapporteur général.
J’entends par avance le Gouvernement nous dire à propos de l’amendement n° II-151 que nous avons trop d’ambition, et l’on peut en effet s’interroger sur la faisabilité dès l’année 2016 de l’alignement de l’ensemble de la fonction publique de l’État sur la durée habituelle du travail dans le secteur privé.
L’amendement n° II-487 porte sur le même sujet, mais il est sans doute plus réaliste : il pourrait être d’application immédiate, alors que le précédent relève davantage du long terme. Son objet est de ramener la durée du travail dans la fonction publique non pas à la durée moyenne du secteur privé mais à la durée légale annuelle, soit 1 607 heures.
Je rappelle l’estimation de la Cour des comptes : une augmentation de 1 % du temps de travail se traduirait par une économie de 700 millions d’euros pour l’ensemble de la fonction publique. L’amendement porte sur 311, 11 millions d’euros : nous avons donc des marges. Je rappelle par ailleurs que les heures supplémentaires représentent 1, 2 milliard d’euros chaque année.
J’entends par avance les cris d’effroi du Gouvernement sur ce premier amendement ! J’ai présenté aussi un second amendement, qui tend à réaliser une économie d’environ 300 millions d’euros sur les 120 milliards que représente la masse salariale de l’État, ce qui me paraît être du domaine du supportable.
Les collectivités qui subissent en ce moment des baisses de DGF de 10 % sont, quant à elles, bien obligées de faire des économies de ce type.
Pour la seule fonction publique d’État, la mesure proposée correspond à peu près à un tiers des heures supplémentaires. Si nous prenions en considération l’ensemble des fonctions publiques, le gain serait évidemment bien plus considérable, de l’ordre de 1, 9 milliard d’euros.
Nous avons déjà eu cette discussion à plusieurs reprises. Pour échapper aux clichés, j’ai confié une mission – fidèle à la méthode que j’applique depuis longtemps – à Philippe Laurent, le président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, qui sera entouré d’un certain nombre d’inspecteurs, sur le temps de travail des fonctionnaires dans les trois fonctions publiques. Ce travail nous est absolument utile pour éviter que nous n’ayons un débat déconnecté des réalités.
Par exemple, l’un des plus gros contingents d’heures supplémentaires actuellement est celui de la police : on doit jusqu’à trois ans d’heures supplémentaires par policier ! Pour autant, il est hors de question d’augmenter le temps de travail de ces personnels – cela ressort clairement des discussions que j’ai pu avoir avec mon collègue ministre de l’intérieur –, car ils font un travail extrêmement dur. Il faut veiller à ne pas augmenter, en particulier, le travail posté.
Nous connaissons aussi d’énormes problèmes avec les personnels de santé qui effectuent des tâches difficiles – je pense notamment à ceux qui exercent leur activité dans un service d’urgence. Leur temps de travail n’est effectivement pas de 35 heures, mais il faut tenir compte des récupérations de RTT qui ont lieu tous les ans en raison des épidémies survenues. Nous n’avons pas collectivement intérêt à modifier le temps de travail, sinon nous ne pourrons pas faire face aux demandes très fortes en période d’épidémies.
Il y a donc de nombreuses situations particulières. S’agissant de la fonction publique territoriale, beaucoup de maires et de présidents de département ont déjà rectifié les choses.
Je préfère attendre le résultat de l’étude susvisée, et je fais confiance à notre très cher Philippe Laurent pour s’intéresser notamment aux personnels de surveillance des centrales nucléaires, aux contrôleurs aériens, et aux personnels armés, dont le temps de travail est inférieur à la durée légale.
Il va de soi que je m’oppose au premier amendement. D’autant que, si je regarde les chiffres mentionnés, les économies attendues sont de 2, 2 milliards d’euros pour l’ensemble des fonctionnaires, ce qui revient à environ 10 000 euros par agent. Cela fait 300 euros l’heure supplémentaire ! Personnellement, je ne connais aucune profession dans laquelle on facture les heures à un tel tarif.
Il faudrait revoir tous les chiffres qui sont avancés, car rapportés au nombre de fonctionnaires, y compris ceux qui travaillent 35 heures, la démonstration ne fonctionne pas. Nous vous donnerons avec plaisir un certain nombre d’éléments sur ces points, mesdames, messieurs les sénateurs.
La mission de Philippe Laurent portera surtout sur les écarts par rapport à la règle des 1 607 heures et sur les faits générateurs expliquant chaque écart. De telles situations se rencontrent d’ailleurs aussi à la Haute Assemblée : est-ce plus difficile de travailler au Sénat qu’à l’Assemblée nationale ou dans une collectivité territoriale ? Certains travaux de nuit comptent double, voire triple, et donnent lieu à des indemnités, ici comme ailleurs.
À partir de là, vous disposerez d’éléments précis, et on ne se retrouvera pas avec des heures supplémentaires rémunérées 300 euros de l’heure – si tel était le cas, je serais d’accord avec vous, monsieur le rapporteur général, ce serait beaucoup trop cher payé pour qui que ce soit !
Comment faisions-nous dans ce pays avant l’instauration des 35 heures ? On peut se le demander quand on entend les arguments qui viennent d’être avancés. On a l’impression que tout a été décidé il y a trois siècles, qu’on ne peut rien remettre en cause et qu’on est définitivement condamné à ne plus avoir le droit de se poser la question du temps de travail dans la fonction publique. C’est quelque peu étonnant ! Au contraire, je pense qu’il faut se poser cette question.
Madame la ministre, j’ai trouvé votre réponse un peu caricaturale. Soulever cette question, ce n’est pas nécessairement dire que tous les fonctionnaires ne font rien, qu’ils sont des fainéants. Je n’ai entendu personne sur ces travées tenir de tels propos !
Mais puisque l’État connaît des difficultés budgétaires très importantes et que la masse salariale représente 40 % de son budget, il va bien falloir trouver des solutions ! Il faut être un tant soit peu cohérent. Vous incitez fortement les collectivités locales, dont la masse salariale représente 60 % en moyenne de leur budget, à faire des économies sur ce point en réduisant cette masse salariale. Elles ont bien du mal ! Et, lorsqu’il s’agit de la fonction publique d’État, vous ne cessez de nous répéter qu’il ne faut rien toucher, que tout est définitivement figé. Mais non !
Le rapporteur général fait des propositions au travers de deux amendements : le premier va très loin, le second est plus mesuré. On peut, me semble-t-il, adopter ce dernier pour marquer une intention.
Nous sommes à quelques jours d’une échéance électorale, puis il y aura l’élection présidentielle : on sait bien que ce ne sont pas des périodes où l’on peut mettre ce genre de sujet sur la table. Mais, quelle que soit la prochaine majorité, je suis absolument certain qu’elle sera bien obligée de revenir sur cette question, car ce n’est pas soutenable budgétairement. Il faudrait que nous parvenions au moins à partager ce constat, qui devrait normalement faire consensus.
Très sincèrement, je suis très étonné de la position de Philippe Dallier. Il voit de la caricature là où il n’y en a pas et n’en voit pas alors qu’il y en a !
Pour ma part, j’ai trouvé la réponse de Mme la ministre pertinente et argumentée – j’ai d’ailleurs appris des choses, comme c'est souvent le cas lors de l’examen de missions budgétaires. Elle nous a renvoyés à un travail qui a été demandé à Philippe Laurent. Attendons donc les conclusions !
Le sujet est sérieux. En tant qu’employeurs, nous devons tous prendre en compte ces questions, de manière raisonnable et sur la base d’informations appropriées. Pour ce qui me concerne, je m’en remettrai aux termes du rapport de Philippe Laurent. Ensuite, nous pourrons avoir une discussion.
En lisant l’objet de l’amendement n° II-151, j’ai appris une nouvelle notion. Je connaissais la durée légale et la durée contractuelle de travail. Là, je découvre la durée « habituelle » de travail. Cette invention, monsieur le rapporteur général, est extraordinaire !
Vous qui êtes avocat, j’aimerais savoir ce que vous entendez par cette expression. Nous n’en savons rien !
Vous l’avez dit, et Philippe Dallier l’a confirmé, cet amendement relève du pur affichage. C'est un amendement de long terme, un amendement d’appel destiné à susciter la discussion. Mme la ministre vous a répondu ; il y aura un rapport de Philippe Laurent sur la base duquel nous pourrons travailler.
Je crois surtout, et nous le savons tous, que vous avez un problème de solde, comme l’a rappelé Christian Eckert. Vous essayez d’améliorer le solde de 2, 2 milliards d’euros à partir de chiffres qui ne tiennent pas la route une seconde.
J’en viens au second amendement de la commission des finances. Pour ce qui concerne la fonction publique d’État, on parle d’un temps de travail de 1 594 heures. L’écart avec les 1 607 heures est relativement limité. Je ne dis pas pour autant que les agents ne doivent pas faire 1607 heures, tant s’en faut !
Puisqu’on a évoqué les collectivités territoriales, j’aimerais savoir si, dans les communes gérées par des maires Les Républicains depuis de longues années – je ne parle pas des mairies « prises » en 2014 –, on atteint ce type de niveau horaire. À mon avis, l’écart est bien plus important. Commençons donc ensemble à travailler sur cette question avant de porter le débat au niveau de l’État !
Personne ne dit que les fonctionnaires ne travaillent pas assez, mais il y a un message subliminal, un certain non-dit derrière tous ces propos. Il ne faut pas se cacher les choses !
À en croire les dispositions de ces deux amendements, les fonctionnaires ne travailleraient pas assez, seraient un peu trop facilement promus, certains profiteraient même de leur statut pour être malades à moindres frais…
Je ne sais pas si ces sous-entendus s’adressent aux fonctionnaires de police qui sont sur la brèche depuis plus de deux semaines pour rechercher, interpeller et mettre hors d’état de nuire des individus dangereux.
Je ne sais pas non plus s’il faut jeter la pierre aux agents hospitaliers, aux infirmières, aux médecins qui ont renoncé à leurs congés le 13 novembre pour secourir les centaines de blessés des attentats.
Enfin, j’ai quelques scrupules à mettre en cause la qualité des fonctionnaires de l’éducation nationale qui ont choisi, au mois de janvier dernier, après l’attentat contre Charlie Hebdo, comme aujourd’hui de parler avec leurs élèves et leurs étudiants et de les faire réfléchir à la situation.
Nous rejetons donc, bien évidemment, ces amendements.
Les membres du groupe UDI-UC pensent, et nous en débattons depuis quelques jours, que des effectifs supplémentaires sont nécessaires dans la fonction publique, en particulier d’État, pour répondre aux missions régaliennes de celui-ci.
Mais il est bien clair que nous ne pouvons pas continuer à fonctionner tel que nous le faisons depuis un certain nombre d’années, c’est-à-dire à coups de déficit. Ce n’est pas sérieux de reporter sur les générations futures le coût des décisions prises aujourd'hui. Qu’est-ce que cela signifie ? Très concrètement, il faut prendre des mesures pour que la fonction publique soit la plus productive possible, en agissant à la fois sur le temps de travail et sur les évolutions de carrière.
Nous devons avancer sur ces sujets. Il n’est pas possible de continuer à admettre des différences de statut entre les travailleurs du privé et ceux du public.
Nous connaissons tous les contraintes du service public, en particulier la rigidité du statut qui empêche les employeurs locaux d’organiser le travail dans les collectivités comme ils le souhaiteraient. Il faut en tenir compte. Nous ne sommes pas pour une baisse des effectifs dans le secteur public. Nous souhaitons une optimisation des moyens et une gestion qui ne se fasse pas à crédit indéfiniment.
Nous soutenons donc ardemment les deux amendements.
Je remercie M. le rapporteur général de nous avoir présenté ces amendements, au nom de la commission des finances. Enfin, on peut évoquer ces sujets qui ne doivent pas être tabous !
À chaque fois qu’on parle des fonctionnaires, cela hérisse le poil de certains. Or je ne vois pas pourquoi on n’aurait pas le droit de le faire ! Dès qu’on évoque le temps de travail, on a tout de suite l’impression de s’attaquer à une forteresse inexpugnable… Pour ma part, je suis content que l’on puisse débattre véritablement de cette question.
On nous dit qu’un rapport va être réalisé par Philippe Laurent. Soit, mais n’attendons pas trop et essayons d’avancer assez vite. Il ne faut pas toucher aux policiers, ce que je comprends. Il ne faut pas toucher aux personnels médicaux, ce que je comprends. Il ne faut pas toucher aux pompiers, ce que je comprends. Bref, il ne faut toucher à personne !
Personnellement, mes chers collègues, j’estime que nous devrions examiner de près la situation de toutes ces catégories de personnel. Nous sommes capables de le faire – pas forcément dans cet hémicycle d’ailleurs –, pour essayer d’avancer un certain nombre de propositions.
Si je prends l’exemple des pompiers, qui ne sont pas des fonctionnaires d’État, on me reprochera de m’attaquer à des professionnels plébiscités par 98 % des Français. Certaines professions, mises en valeur dans des feuilletons télévisés, ont une bonne image. Du coup, on n’ose pas y toucher ! Il n’empêche, certains se demandent si les pompiers doivent accomplir 90 gardes de 24 heures par an, ou moins, ou plus. Il faut qu’ils puissent suivre des formations, mais il faut garantir le fonctionnement du service de secours.
Il faut traiter des problèmes de fond qui ont d’importantes répercussions financières difficilement supportables pour les collectivités.
J’approuve, par principe, les amendements qui ont été présentés – je suis content que M. le rapporteur général les ait déposés – parce qu’ils nous obligent à réfléchir et à avancer probablement plus vite qu’on ne le fait habituellement sur ces sujets qui font peur à tout le monde. Je ne crains pas pour ma part d’aborder ces questions. Je suis persuadé que, dans les semaines ou les mois qui viennent, on trouvera des gisements financiers intéressants.
Vous avez dit tout à l’heure, monsieur le secrétaire d’État, que nous avions un problème de solde budgétaire. Mais ce problème nous est commun et nous devons arriver à le régler ensemble.
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
L’orientation est claire et nette, presque brutale. En effet, la totalité des économies visées dans les amendements de M. le rapporteur général dépasse 5 milliards d’euros, sur l’unique fondement de la gestion de la fonction publique. Cela me semble donc assez caricatural ; cela correspond à peu près à la perte de recettes, mais je ne veux pas me concentrer sur cet aspect.
Pour reprendre ce que disait M. Doligé, je crois effectivement que tout le monde souhaite une meilleure gestion de la fonction publique. Il s’agit d’argent collectif, il n’est pas question de le dépenser inconsidérément, de le gaspiller. Néanmoins, on ne peut aborder ce sujet d’une manière si caricaturale, si approximative.
À propos de l’amendement n° II-151 tendant à porter la durée hebdomadaire du travail des fonctionnaires à 37, 5 heures, je signale simplement que, en l’état actuel du droit, il faudrait engager des dépenses supplémentaires permettant de financer 110 heures de travail en plus par an pour chacun des 2, 5 millions de fonctionnaires de l’État. Quel serait le coût représenté par cette dépense supplémentaire ? Peut-être un montant aussi important que l’économie que vous visez, monsieur le rapporteur général…
Vous constatez bien, mes chers collègues, qu’il s’agit d’une posture, d’une caricature. Nous ne pouvons évidemment pas entrer dans le débat de cette façon. J’ai commencé mon propos en disant que je comprenais la logique générale de ces amendements ; cela étant, le premier d’entre eux ne contient pas une mesure, mais un subterfuge, que nous ne pouvons que contester. Claude Raynal l’a déjà dit, nous ne le voterons pas.
Je souhaite simplement aller dans le sens de M. le rapporteur général.
Pour cela, je m’appuie sur la référence, que nous avions longuement étudiée en commission des finances, que constitue l’analyse de la Cour des comptes. Les préconisations et suggestions de cette institution sont à prendre en considération puisque, selon elle, une augmentation de 1 % du temps de travail entraînerait une économie de 700 millions d’euros.
Il faut se poser les bonnes questions. C’est pourquoi je voterai, moi aussi, en faveur des amendements de M. le rapporteur général.
Je ne veux pas allonger le débat, mais je souhaite simplement apporter un ou deux éléments.
Tout d’abord, la notion de « durée habituelle de travail » n’est pas une invention de ma part : elle émane de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques du ministère du travail, la DARES.
Elle ne provient pas de la direction générale de l’administration et de la fonction publique !
Mais elle vient bien du ministère du travail, madame la ministre ! Les données sont disponibles sur le site de la DARES ; c’est issu des statistiques de l’INSEE. Je n’ai donc pas beaucoup d’imagination…
Ensuite, je veux fournir un éclairage sur le coût des heures supplémentaires et des astreintes qui a représenté en 2013, compte tenu des indemnités pour travaux supplémentaires, 1, 534 milliard d’euros dans la fonction publique de l’État.
Le montant d’environ 311 millions d’euros faisant l’objet de l’amendement n° II-487 est donc largement supportable.
Par ailleurs, il est dit qu’on ne doit pas toucher au système, mais il s’agit tout de même de 40 % du budget de l’État ! On n’aurait pas le droit de parler de 40 % du budget de l’État ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Eh bien, que le Sénat adopte cet amendement !
Souriressur les travées du groupe socialiste et républicain.
Cela dit, à votre grand regret, monsieur le secrétaire d’État, je retire l’amendement n° II-151.
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Ah ! quel renoncement !
Exclamations amusées sur les mêmes travées.
Vous annoncez une grande étude à ce sujet, madame la ministre. Pourtant, la Cour des comptes a produit un rapport, que vous n’avez sans doute pas lu, tout comme M. le secrétaire d’État, qui est extrêmement complet et qui souligne bien les enjeux en présence. On peut sans doute confier des missions à Philippe Laurent ou à qui que ce soit, mais la Cour des comptes me semble bien légitime.
Bref, nous retirons cet amendement parce que nous sommes tout à fait conscients que la mesure qu’il vise ne peut être mise en œuvre dès 2016. En revanche, l’amendement n° II-487, portant sur 311 millions d’euros – qu’il faut mettre en regard d’une dépense de 140 milliards d’euros – est maintenu, parce qu’il s’agit d’une dépense tout à fait supportable.
Enfin, sur 40 % du budget de l’État, on peut tout à fait faire quelques économies !
Vous déposez un amendement, vous le retirez… Votre liberté en la matière est naturellement totale, loin de moi l’idée de porter un jugement !
Je vous ferai tout de même remarquer, monsieur le rapporteur général, que ce débat existe depuis des années, depuis l’instauration des 35 heures, et je suis assez fière d’être la première à avoir le courage de confier une mission à quelqu’un qui n’est pas de mon parti politique. Ainsi, les choses seront beaucoup plus claires.
Nous en avons discuté avec les organisations syndicales, qui étaient tout à fait désireuses non seulement que ce rapport soit confié à une personne considérée comme neutre, si j’ose dire, par rapport à toute forme d’excès – quelle qu’en soit l’origine –, mais également qu’il soit très précis.
Il faut, par exemple, que l’analyse soit détaillée par catégorie de salariés, car, on le sait bien, les cadres de la fonction publique, notamment de l’État – peut-être pas ceux de toutes les organisations publiques ni de tous les opérateurs –, ne perçoivent pas de rémunération pour leurs heures supplémentaires, et ce depuis bien longtemps. Il conviendrait d’ailleurs de les saluer parfois pour cela, car ils ont des salaires bien inférieurs à ceux du secteur privé, en particulier les cadres intermédiaires. Cela est également vrai dans les mairies, les conseils départementaux ou régionaux
M. Jacques Chiron acquiesce
Par ailleurs, il convient de tenir compte des métiers difficiles. Je pense, par exemple, à l’étude menée sur les ripeurs ; ce métier est à ce point compliqué que les entreprises privées titulaires des marchés de certaines collectivités territoriales ont dû mettre un genou en terre pour fixer leur prix, parce que leur personnel d’une certaine ancienneté ne pouvait plus l’exercer. Nous avons ainsi pu étudier plusieurs cas intéressants de demande à la collectivité de prise en charge d’importantes indemnités pour inaptitude. Il y a donc beaucoup d’éléments à considérer de façon précise.
Les organisations syndicales et les fonctionnaires demandent de la précision justement pour prévenir les caricatures et les clichés et éviter que l’on n’insiste trop sur les heures supplémentaires. Vous avez raison, monsieur le sénateur, la masse d’heures supplémentaires est énorme, mais quand on doit à un policier ou à un agent des services de santé jusqu’à trois ans d’heures supplémentaires, cela pose un vrai problème ! Personne, sur aucune travée, ne demande d’augmenter le temps de travail de ces types de personnel !
Monsieur le rapporteur général, vous évoquez une durée de 37, 5 heures payée comme une durée de 35 heures – c’est bien de cela qu’il s’agit –, mais il faudrait organiser un vrai débat avec les organisations syndicales. En outre, si vous ne tenez pas compte de l’accord relatif à la modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations, dit « PPCR », au 1er janvier 2018, un enseignant – qui a un master et une formation – sera embauché au SMIC.
Il existe donc de vrais enjeux collectifs d’attractivité des professions, de personnel formé, ou encore d’heures supplémentaires – qui sont d’ailleurs très nombreuses aussi au sein de l’éducation nationale. Bref, je préfère que l’on se fonde sur des données écrites, factuelles et acceptées, et que l’on s’accorde sur un diagnostic, avant de faire évoluer les choses.
Je maintiens mon avis défavorable sur l’amendement n° II-487. Ayant dit tout ce que j’avais à dire sur ces sujets, je ne m’exprimerai plus.
Personnellement, je n’ai pas de tabou sur la question du nombre de fonctionnaires ; notre société évolue, elle a de nouveaux besoins, ses demandes anciennes ne sont peut-être plus d’actualité. C’est le principe même de l’État et de sa stratification.
Néanmoins, quand on veut supprimer un certain nombre de fonctionnaires, il faut être précis. Pour faire référence à une citation qui n’appartient ni à ma culture ni à celle de M. le rapporteur général, Paul Quilès affirmait au congrès du parti socialiste de Valence en 1981 qu’il ne faut pas se contenter de dire que des têtes doivent tomber, mais qu’il faut dire lesquelles et rapidement.
Sourires. – MM. Alain Gournac et Philippe Dallier s’esclaffent.
Or j’ai l’impression que certains ici veulent le changement sans dire où couper. Il est mentionné dans l’objet de l’amendement n° II-488 – cela m’évitera de reprendre la parole lorsqu’on l’examinera – qu’« il n’est pas question de revenir sur les créations de postes dans les secteurs prioritaires : justice, défense, etc. ».
Soyons précis ! Regardons au cas par cas, à l’intérieur même des ministères ! Peut-être y a-t-il dans les ministères que l’on dit aujourd’hui « régaliens » des postes qui n’ont pas leur justification. Je constate d’ailleurs que, en matière d’écologie, on y arrive très bien – je rappelle que 7 500 postes ont été supprimés en trois ans dans la mission « Écologie, développement et mobilité durables », domaine pourtant prioritaire. Bref, les choses évoluent !
Je ne comprends donc pas : il y a des secteurs que l’on peut toucher, d’autres non. Surtout, on ne sait pas, on n’ose pas dire quels personnels toucher. Si des têtes doivent tomber, dites-nous précisément lesquelles, quand et comment.
L’amendement est adopté.
L’amendement n° II-488, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local
dont titre 2
Conduite et pilotage des politiques économiques et financières
dont titre 2
Facilitation et sécurisation des échanges
dont titre 2
Entretien des bâtiments de l’État
Fonction publique
dont titre 2
Total
Solde
La parole est à M. le rapporteur général.
Cet amendement tend à ne pas remplacer tous les fonctionnaires qui partent à la retraite et à revenir sur les créations d’emplois, en dehors des missions prioritaires, c’est-à-dire évidemment celles qui ont été évoquées récemment – d’ailleurs, le groupe auquel j’appartiens a totalement approuvé les mesures concernant la police, la gendarmerie, les douanes, la justice.
Il me semble en effet que, dès lors que l’on définit des priorités – c’est tout à fait légitime –, il faut que celles-ci soient compensées par ailleurs. À cet égard, je vous rappelle que les effectifs sont repartis à la hausse cette année – la Cour des comptes l’a souligné –, ce qui est à contre-courant de ce qui se passe dans l’ensemble des autres pays d’Europe qui ont réussi à contenir leur masse salariale et leurs effectifs de fonctionnaires.
André Gattolin me demande comment agir. Eh bien, quand des missions font doublon avec celles des collectivités…
Très concrètement, les routes ! Pourquoi l’État conserve-t-il des routes nationales ?
Par exemple, 168 kilomètres dans le département de l’Eure-et-Loir, alors même que les collectivités assurent l’essentiel de l’entretien du réseau routier. De même, pourquoi l’État assure-t-il des missions dans le domaine social en doublon avec des missions exercées par le département ? Ainsi de l’allocation aux adultes handicapés et de la prestation de compensation du handicap. Pourquoi y a-t-il des missions supplémentaires dans les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement ?
Concrètement combien ? Eh bien, 22 192 postes sur 1, 9 million de fonctionnaires. Il y a donc de la marge…
Mais nous ne disposons pas du détail !
Avis habituel : défavorable.
Pour ce qui concerne les doublons, dans le domaine social par exemple, les négociations entre l’Assemblée des départements de France, l’ADF, et le Gouvernement n’aboutissent pas du tout aux mêmes conclusions. Il faudra, monsieur le rapporteur général, qu’on rapporte votre proposition à l’ADF, parce que celle-ci demande au contraire que l’État dépense davantage et crée des postes pour soulager les départements en matière de revenu de solidarité active, d’allocation personnalisée d’autonomie et de prestation de compensation du handicap. Il conviendrait donc que tout le monde participe à ce groupe de travail.
Cet amendement est un retour à une histoire un peu dépassée, quand même ! L’idée de non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite… Il faudrait peut-être changer le disque, réfléchir autrement ! Votre position est un peu systématique !
Votre majorité, monsieur le rapporteur général, a employé cette stratégie pendant quelques années et vous avez vu les résultats ; ils étaient peut-être convenables pour partie, mais pas en totalité. Par exemple, vous le savez bien – Alain Juppé l’a lui-même reconnu en employant ce terme –, ce fut une erreur de diminuer pendant des années les postes de gendarmes et de policiers sur ce simple critère de non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux. Il faut être un peu plus fin sur ces questions.
D'ailleurs, je remarque que, dans nos collectivités, nous faisons preuve de beaucoup plus de finesse : nous passons tous les postes au crible et nous nous interrogeons sur la nécessité de chacun pour la collectivité.
Cependant, vous voudriez, au niveau de l’État, revenir à cette règle un peu imbécile – excusez-moi de le dire – du « un sur deux » ! Il faut désormais changer de disque et faire preuve d’un peu plus de réalisme !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Nous en sommes tous d’accord, il faut réduire la masse salariale de l’État.
Effectivement, il existe des doublons à certains endroits ; le rapporteur général en a donné de bons exemples. Attention toutefois à ne pas déshabiller certaines administrations sur le terrain.
Pour prendre l’exemple de l’administration du ministère des finances, dont je suis issu, les trésoreries manquent tellement de personnel aujourd'hui qu’elles n’arrivent plus à assurer à la fois le recouvrement des impôts et leurs missions d’assistance aux collectivités.
En revanche, en centrale, on trouve pléthore d’administrateurs, qui coûtent beaucoup plus cher que le personnel des trésoreries…
M. Jacques Genest. Ne pourrait-on pas plutôt supprimer des postes à ce niveau ?
Sourires.
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-135, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local
dont titre 2
1 180 413 217
1 180 413 217
Conduite et pilotage des politiques économiques et financières
dont titre 2
Facilitation et sécurisation des échanges
dont titre 2
Entretien des bâtiments de l’État
Fonction publique
dont titre 2
Total
Solde
La parole est à M. le rapporteur général.
Nous allons maintenant aborder un sujet bien connu : le glissement vieillesse-technicité, le GVT. L’année dernière, nous avions déjà présenté un amendement sur cette question.
Je me réfère de nouveau au travail extrêmement approfondi qui a été réalisé par la Cour des comptes, à la demande du Sénat, au titre de l’article 58, alinéa 3, de la LOLF.
Très concrètement, la Cour rappelle, dans son rapport, l’enjeu considérable que constitue le GVT. Elle évoque également le maquis du régime des primes et des rémunérations, point sur lequel vous avez estimé, madame la ministre, qu’un travail devrait être réalisé.
Je rappelle qu’il existe 1 500 primes, dont certaines n’ont pas de base légale : pour environ 400 d’entre elles, la Cour des comptes n’a pas retrouvé le texte qui fonde la prime…
Dans ce contexte, on ne peut pas, encore une fois, ne pas poser la question du GVT, qui s’impose à l’État et, d'ailleurs, aux collectivités territoriales. C’est un vrai sujet !
Cet amendement vise tout simplement à ralentir le GVT. L’enjeu budgétaire est considérable, puisqu’il y va de 1, 180 milliard d’euros par an.
L'amendement n° II-351 rectifié, présenté par MM. Canevet et Guerriau, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local
dont titre 2
Conduite et pilotage des politiques économiques et financières
dont titre 2
Facilitation et sécurisation des échanges
dont titre 2
Entretien des bâtiments de l’État
Fonction publique
dont titre 2
Total
Solde
La parole est à M. Michel Canevet.
Cet amendement tend lui aussi à ralentir le GVT ainsi que l’évolution de l’ensemble des dispositifs de prime qui contribuent à alourdir le coût de la masse salariale.
Comme nous l’avons évoqué à l’occasion de l’examen des amendements précédents, ce ralentissement est impératif, car les sommes en question sont financées à crédit, par l’emprunt.
Nous devons nous astreindre à des objectifs de réduction des dépenses publiques. Parmi ceux-ci, nous devons, bien évidemment, viser la masse salariale, qui, comme le rapporteur général l’a expliqué tout à l'heure, représente une part prépondérante des dépenses de l’État chaque année.
Nous proposons non pas de supprimer l’ensemble des dispositifs de promotion, mais simplement de réduire ces avancements, de façon à dégager des économies pour aujourd'hui, mais aussi pour les années suivantes. Il est indispensable d’engager ces réformes, dont les effets s’étaleront sur plusieurs années, le plus rapidement possible.
Bien entendu, il ne faut pas non plus oublier de supprimer un certain nombre de mesures, comme l’indemnité de garantie individuelle du pouvoir d’achat, la GIPA. Quel est, aujourd'hui, le fondement de la GIPA ? Quel est son intérêt ?
La GIPA fait partie des dépenses profondément inéquitables qu’il faudrait supprimer et auxquelles sont également astreintes les collectivités locales. N’oublions pas, en effet, que celles-ci sont obligées de se conformer à un certain nombre de décisions de l’État, l’ensemble des mesures relatives au personnel décidées par la ministre chargée de la fonction publique s’imposant également aux fonctions publiques autres que la fonction publique d’État.
Tout cela pèse sur la dépense publique de manière globale, au-delà du budget de l’État que nous examinons aujourd'hui. Le coût pour la sphère publique en est largement démultiplié, alors que l’on impose par ailleurs aux collectivités des restrictions de dépenses et de recettes – je vous renvoie à la diminution de la dotation globale de fonctionnement. Comment peut-on gérer correctement les budgets locaux lorsque l’on n’a pas de moyens ni de prise sur l’ensemble des décisions ?
La commission n’a pas approuvé cet amendement, qui n’est pas compatible avec celui du rapporteur général qu’elle a adopté. Elle en demande donc le retrait, au bénéfice de ce dernier.
Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements n° II-135 et II-351 rectifié ?
Supprimer le GVT, sans expliquer comment d'ailleurs, relève d’un véritable tour de force !
Il faut savoir que le gel du point d’indice depuis 2010 a « rapporté », si vous me permettez ce terme, 7 milliards d’euros, somme que les fonctionnaires ont en quelque sorte « rendue ». Les fonctionnaires doivent être à peu près les seuls à avoir contribué à ce niveau à la baisse de la dépense publique dans notre pays. Nous devons leur rendre hommage pour cet effort, qui n’a pas été facile à supporter.
J’en viens au GVT et au nombre de primes.
Pour ce qui concerne le nombre de primes, il est intéressant de voir que la baisse du nombre de fonctionnaires, dans le contexte de la fameuse RGPP et du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, a été compensée par la création de 500 millions d’euros de primes par an. D’ailleurs, la répartition de cette somme n’a pas été une réussite, parce qu’il était extrêmement difficile d’être juste dans cet exercice.
L’idée était de compenser la quasi-totalité de la « non-dépense » par un régime indemnitaire, afin d’avoir moins de fonctionnaires mieux payés.
D’ailleurs, tous les fonctionnaires ne se plaignent pas des primes qui ont été créées ! Vous le savez, ils se plaignent davantage du nombre de postes qui ont été supprimés, en particulier, je le répète, dans certaines administrations qui ont largement contribué à la baisse du nombre de fonctionnaires. Je répète que la création des postes dans l’éducation nationale n’a pas conduit à une augmentation du nombre total de postes de fonctionnaires !
La totalité des postes évoqués tout à l'heure a découlé d’un certain nombre de décisions prises en matière de sécurité, que personne, à ma connaissance, n’a critiquées.
D’après le compte rendu des travaux de la commission, vous ne semblez plus vouloir du protocole PPCR, que, d'ailleurs, la majorité des fonctionnaires n’a pas accepté – si ce n’est dans la fonction publique d’État, où il a recueilli 51 % d’avis favorables. Sachez toutefois que, dans le cadre de ce protocole, nous travaillons à des carrières plus intéressantes, mais plus longues – ce qui, in fine, vous convient ! En effet, il faut bien avoir en tête que, si l’on ne s’attaque pas à l’attractivité des carrières, les effectifs finiront par manquer : les personnels préféreront travailler dans des entités privées qui rémunèrent beaucoup mieux leur personnel à niveau égal.
Il faut tenir compte du fait que, travaillant plus, l’agent peut avoir une carrière plus longue. C’est d’autant plus important que les fonctionnaires arrivent au faîte de leur carrière à quarante ou quarante-deux ans ! Comment motiver un fonctionnaire de quarante-deux ans quand celui-ci n’a plus aucune perspective d’avancement ?
Nous vous proposons de faire bouger les choses en la matière. Curieusement, vous vous y opposez… Il était important de le rappeler.
Pour ce qui concerne les collectivités territoriales, je reste absolument sereine face à la critique que m’adressent les sénateurs qui siègent à la droite de cet hémicycle. En effet, la droite, elle, n’a pas supprimé l’avancement d’échelon à la durée minimale dans la fonction publique territoriale, dont je viens de faire voter la suppression ! Personne ne voulait aborder ce sujet. Personne ne voulait prendre en compte la réalité, celle d’un avancement « au minimum » qui s’était soudainement généralisé, alors que les propositions d’avancement se faisaient jusque-là au mérite, pour un coût important. C’est essentiellement en raison de cette suppression que les organisations syndicales n’ont pas signé le protocole.
Je veux bien entendre la critique, mais je veux aussi rappeler que cette suppression avait été différée pendant des années. C’est désormais chose faite, et cela n’a pas été facile. Je peux en témoigner.
Bien évidemment, il faut, en contrepartie, proposer des carrières plus attractives et donner de l’espoir aux fonctionnaires, qui assurent la solidité de la nation.
Comme d’habitude, je trouve que les choses vont loin…
Le gel du point d’indice pendant cinq ans n’est quand même pas une mesure tout à fait anodine ; cela faisait longtemps que l’on n’avait pas pris une telle décision. Le Gouvernement a malheureusement été obligé d’y recourir, compte tenu de la situation des comptes publics. C’est donc un effort extrêmement important qui a été consenti.
Pour connaître la manière dont se déroulent les négociations salariales dans nos collectivités, vous savez, chers collègues, les difficultés que pose cette décision ! Or vous nous proposez maintenant de ralentir le GVT. Quelle sera la prochaine étape ? Avec vous, c’est toujours plus !
M. Éric Doligé s’exclame.
Surtout, monsieur le rapporteur général, vous avez comparé, lors de la discussion des amendements précédents, les horaires de travail dans le public et dans le privé. En revanche, sur la question des salaires, vous vous êtes bien abstenu de faire la même comparaison ! Elle serait pourtant intéressante, quand on sait que, dans le privé, les salaires ont augmenté, ces cinq dernières années, plus vite que l’inflation. Tâchons de faire preuve d’honnêteté intellectuelle !
Enfin, mes chers collègues, depuis le 13 novembre dernier, nous avons tous dit, à cette tribune, le plus grand bien de l’ensemble des personnels des services publics, qu’il s’agisse des policiers, des gendarmes, des magistrats ou des personnels soignants. N’aurait-on aujourd'hui d’autre message à leur faire passer que la nécessité de ralentir le GVT ?
M. Claude Raynal. Très sincèrement, il me semble que nous ne sommes pas à la hauteur des événements !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Brigitte Gonthier-Maurin applaudit également.
Moi qui en suis issu, je me garderai bien d’exprimer la moindre critique sur la fonction publique en général.
Cependant, je dois dire que je suis extrêmement surpris par la tonalité du débat.
Alors que le secteur privé est confronté aux pires difficultés, que le chômage explose, que les chômeurs ne retrouvent pas d’emploi et doivent parfois quitter leur région, si ce n’est leur pays, nous fermerions les yeux sur ces problèmes, pourvu que l’on ne touche pas à la fonction publique ?
Actuellement, nous nous interrogeons tous sur les conséquences de la numérisation de l’économie et de la société, sur la révolution numérique, qui change la nature de l’emploi, sur la réaction à avoir face à l’« Uberisation »… Ces phénomènes ne concernent pas le seul secteur privé ! Il est bien évident qu’ils appellent aussi une réflexion sur ce qu’est le service public et sur ce qu’est la fonction publique.
Monsieur Raynal, il est vrai que, traditionnellement, on est mieux payé dans le secteur privé que dans le secteur public, mais je vous rappelle que, en contrepartie, l’État, et c’était bien normal dans les périodes fastes, versait à ses anciens fonctionnaires une pension de retraite équivalant à 75 % de leur salaire de fin de carrière, ce qui n’a évidemment jamais été le cas dans le privé.
Ne cherchons pas à opposer les uns et les autres.
Le contexte actuel est problématique. Le taux de chômage, dans notre pays, se situe entre 10 et 11 %. Les jeunes ont de plus en plus de mal à entrer dans l’activité. Le Gouvernement a de plus en plus de difficultés à maintenir l’économie à l’équilibre. Les déficits s’accumulent.
On ne peut, d’un côté, demander au secteur privé de se débrouiller seul et, de l’autre, continuer de ne pas toucher au secteur public. Il faut mettre tout à plat et faire en sorte d’arriver à un équilibre.
Il ne s’agit pas de dire que le secteur public et les fonctionnaires ne font pas le « boulot », ce n’est pas le sujet. Le sujet, c’est de savoir comment l’État et les collectivités locales, désargentés et endettés, peuvent continuer de payer. La réponse ne peut être trouvée que dans la recherche d’un équilibre.
Quand le rapporteur général s’efforce de parvenir à cet équilibre, pourquoi le faire passer pour une sorte d’apprenti sorcier ? Je ne suis pas d’accord !
Encore une fois, nous devons nous efforcer de trouver cet équilibre entre privé et public.
Puisque Mme la ministre nous invite très justement à la précision, je voudrais simplement citer l’étude très complète que le Premier président de la Cour des comptes nous a présentée : « Le revenu salarial annuel moyen est supérieur de 13 % dans le secteur public par rapport au secteur privé […]. Les salaires sont en moyenne plus attractifs dans la fonction publique pour les emplois moins qualifiés (en particulier pour la catégorie C de la FPE), alors qu’au contraire les cadres (y compris hors enseignants) ont des salaires nets moyens inférieurs à ceux du secteur privé. »
C’est factuel ! À moins de vouloir contester les affirmations de la Cour, le revenu salarial annuel moyen de la fonction publique est supérieur de 13 % à celui du secteur privé.
La question de l’automaticité de la progression de la masse salariale à travers le GVT ne doit pas rester un sujet tabou. Il est ici question – peut-être trop brièvement – de 40 % du budget de l’État ! Quand on traite d’une masse de 120 milliards d’euros, de 40 milliards d’euros de salaires et de 40 milliards d’euros au titre du compte d’affectation spéciale « Pensions », on a le droit de poser la question des effets de levier ! Tel est l’objet de cet amendement.
Madame la ministre, vous avez dit que les fonctionnaires avaient « rendu » 7 milliards d’euros au cours des cinq dernières années. Ils n’ont rien rendu du tout !
Il s’agissait d’une image, monsieur Doligé !
Il faut être précis : le point d’indice n’a pas augmenté durant cinq ans, mais ils n’ont rien rendu.
Ils ont pu cependant bénéficier du GVT. Et l’on voit bien, dans nos collectivités, que le glissement de ce dispositif n’est pas tout à fait nul dans l’augmentation de la masse salariale, à nombre de personnes égal.
Enfin, madame la ministre, je pense que les 600 000 personnes supplémentaires au chômage depuis quelques années auraient bien aimé pouvoir rendre quelque chose !
Je suis très intéressé par cette discussion. Les représentants des Français de l’étranger ont l’occasion de voir ce qui se passe dans les autres pays. C'est la raison pour laquelle je suis parfois un peu surpris de l’ampleur de ce débat sur la question de savoir si les fonctionnaires sont privilégiés par rapport aux salariés du secteur privé. Car ce débat a aussi cours dans d’autres pays.
En Suisse, par exemple, c’est au nom de la solidarité que l’on a réformé le statut des fonctionnaires. Les fonctionnaires, rémunérés par de l’argent public, bénéficiaient, de mémoire, de contrats à durée indéterminée. C’est pour être solidaires avec le reste de la population qu’ils sont dorénavant engagés en contrat à durée déterminée de quatre ans, renouvelable une fois. Je ne dis pas qu’il s’agit de la solution appropriée pour la France.
Mais parlons de cette question, réfléchissons-y, sans nous affoler. Et puis, pourquoi pas ?
J’entends certains d’entre vous, chers collègues de droite, nous expliquer qu’il serait tabou de parler de la fonction publique et de remettre en cause certains de ses aspects. Mais il est un autre tabou sur lequel vous intervenez plus difficilement, celui des recettes. Car au moment où endettement et déficit vous servent d’arguments pour justifier une baisse du nombre de fonctionnaires, une diminution de leur traitement et une hausse de leur temps de travail, entre 60 et 80 milliards d’euros échappent à l’État en raison de la fraude fiscale, ce que personne ne conteste.
S’il y a autant d’heures supplémentaires dans la fonction publique, c’est tout simplement parce qu’il n’y a pas suffisamment de fonctionnaires. Un agent hospitalier, ou un policier, ne quitte pas son poste si personne ne vient le remplacer, raison pour laquelle il est obligé de faire des heures supplémentaires.
Continuons de supprimer des emplois, alors même que le chômage augmente, comme cela vient d’être rappelé !
Oui, nous avons besoin de plus de fonctionnaires ! Nous avons besoin de plus de services publics et de biens communs dans ce pays !
Les moyens permettant de rémunérer les fonctionnaires correctement existent, y compris à travers le GVT. Il faut rappeler que ce sont les accords Durafour qui sont à l’origine de ce régime indemnitaire devenu un fourre-tout auquel personne ne comprend rien. Il s’agissait déjà, à l’époque, de justifier de non-augmentations du point d’indice. Ce système a abouti à ce cirque incroyable dans lequel deux fonctionnaires du même grade et occupant un même poste ne perçoivent pas le même salaire en raison du jeu des primes.
Parlons aussi du tabou de la fraude fiscale et de l’argent que l’on pourrait faire rentrer !
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Je mets aux voix l'amendement n° II-135.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 91 :
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l'amendement n° II-351 rectifié n'a plus d'objet.
L'amendement n° II-150, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local
dont titre 2
200 000 000
200 000 000
Conduite et pilotage des politiques économiques et financières
dont titre 2
Facilitation et sécurisation des échanges
dont titre 2
Entretien des bâtiments de l’État
Fonction publique
dont titre 2
Total
Solde
La parole est à M. le rapporteur général.
Mme la ministre a en quelque sorte déjà émis son avis sur cet amendement, qui concerne les jours de carence.
Je ne vais pas m’étendre sur ce sujet à la fois connu et identifié. Philippe Dallier a aussi abordé cette question.
Il s’agit d’une mesure d’équité par rapport au secteur privé. Lorsque le jour de carence avait été supprimé, Philipe Dallier et moi-même avions procédé à des auditions. La Fédération hospitalière privée nous avait alors indiqué, de manière très précise, qu’une hausse de l’absentéisme avait suivi la suppression de ce jour de carence. Aujourd’hui, tous les éléments montrent que ces deux éléments sont corrélés.
Si cet amendement était adopté, le dispositif proposé, qui concerne la seule fonction publique d’état, aurait un effet positif de 200 millions d’euros sur le solde budgétaire. Si l’ensemble des trois fonctions publiques était visé, cet effet serait de l’ordre de 500 millions d’euros.
Je ne reprendrai pas les arguments que j’ai déjà développés voilà quelques instants.
J’ai déjà indiqué quel serait le coût d’une telle mesure pour l’employeur public en termes de prise en charge de la protection sociale. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Le rapporteur général a rappelé que nous avions rencontré, l’année dernière, les représentants de la Fédération hospitalière privée.
Cette année, nous évoquons un rapport que vous contestez. C'est la raison pour laquelle j’ai décidé de diversifier mes sources et de vous parler d’une expérience intéressante, conduite à Florensac, une commune du sud de la France dont le maire, M. Vincent Gaudy, est encarté non pas au parti Les Républicains, mais au parti socialiste. Vous constatez, mes chers collègues, que je fais des efforts dans le choix de mes références…
Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.
Pour lutter contre le taux d’absentéisme élevé des agents municipaux de sa commune, ce maire a instauré une prime de cinquante euros par mois qui est supprimée au premier jour d’absence – nous sommes donc vraiment dans l’esprit du jour de carence. Et que s’est-il produit ? Le taux d’absentéisme est passé de 18 % à 4 % ! Plusieurs médias, dont RTL et beaucoup de journaux, s’étaient l’écho de ce dispositif.
Je comprendrais que cette nouvelle référence ne vous convienne pas non plus. Toujours est-il que, selon moi, soutenir qu’il n’existe aucun lien entre jour de carence et absentéisme des agents est une erreur. C'est la raison pour laquelle nous soutenons cet amendement.
Je mets aux voix l'amendement n° II-150.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 92 :
Le Sénat a adopté.
L'amendement n° II-137, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local
dont titre 2
Conduite et pilotage des politiques économiques et financières
dont titre 2
Facilitation et sécurisation des échanges
dont titre 2
Entretien des bâtiments de l’État
Fonction publique
dont titre 2
Total
Solde
La parole est à M. le rapporteur général.
Reprenant une préconisation de la Cour des comptes, dont je vous invite à relire le rapport sur la masse salariale, le présent amendement prévoit une diminution des effectifs des opérateurs conforme à la norme prévue par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 par la suppression de 5 805 équivalents temps plein par an.
Je le rappelle, dans son enquête sur la masse salariale, la Cour avait souligné que les effectifs des opérateurs avaient crû fortement, de 50 %, entre 2009 et 2013.
L’État et les collectivités ont fait des efforts. Les opérateurs ne peuvent donc s’y soustraire. Il est normal de prévoir une maîtrise de leur masse salariale.
Je souhaiterais, avant d’émettre un avis, savoir quels opérateurs seraient concernés.
Pour combien d’emplois, monsieur le rapporteur général ?
Très bien, il n’en reste donc plus que 3 300 !
Il ne me semble pas très sérieux de proposer un tel volume de suppression d’emplois, sans dire très précisément quels opérateurs sont concernés.
Je vais vous envoyer copie des lettres de tous les sénateurs qui m’ont écrit pour me demander qu’on ne ferme pas telle ou telle trésorerie, qu’on renforce tel ou tel poste de douane. Ainsi, ceux-là mêmes qui proposent, en cet instant, de supprimer des emplois saisissent à chaque fois un ministre lorsqu’il s’agit de supprimer deux postes dans une trésorerie. Cela devient un véritable scandale !
Pour notre part, nous avons demandé chaque année une diminution du nombre d’effectifs de tous les opérateurs, excepté Pôle emploi, compte tenu de la situation de l’emploi, et les universités. Ces baisses, qui ont été réalisées, représentent 1, 5 % à 2 % des effectifs par an.
Vous proposez en l’espèce, par voie d’amendement, d’en supprimer 6 % en une seule année ! C’est tout ce que j’ai à dire sur cet amendement démagogique, populiste §et mal chiffré !
Vous le comprendrez, le Gouvernement appelle à la responsabilité. Nous nous sommes fixé des objectifs ambitieux en termes de maîtrise du nombre de fonctionnaires. Certes, nous ne les avons pas tenus, eu égard aux emplois qui seront créés dans les domaines de la défense, de l’intérieur et des douanes.
Toutefois, les objectifs de diminution d’emplois, en particulier chez les opérateurs, ont été respectés, alors qu’ils étaient difficiles à mettre en œuvre. Pourtant, vous proposez, par ce simple amendement, d’en faire quatre fois plus !
Vous l’avez compris, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Cette explication de vote vaut pour les amendements n° II-137 et II-487 – je n’étais pas intervenu précédemment –, qui sont de la même veine.
J’appelle la Haute Assemblée à la cohérence. J’ai écouté attentivement les propos de certains de mes collègues ces derniers jours, en particulier ceux qui siègent sur les travées situées en face de moi. J’ai entendu, à maintes reprises, à tel point que j’ai parfois eu l’impression d’entendre de véritables lamentations : « Les moyens baissent, c’est scandaleux, comment voulez-vous qu’on fasse ? »
Or, si l’on veut préserver ou augmenter les moyens d’action, on ne peut pas parallèlement demander la suppression de milliers d’emplois. Il y a là une incohérence majeure !
J’irai plus loin, monsieur le rapporteur général. Je suis surpris par la formulation de cet amendement qui donne carte blanche au Gouvernement pour décider de la répartition des suppressions des 28 000 emplois, soit 5 800 ou 6 000 emplois pour les opérateurs, la commission se déchargeant ainsi de tout arbitrage.
Tout d’abord, une telle proposition est en contradiction totale avec l’esprit de la LOLF, selon laquelle le Parlement doit se saisir dans le détail de l’ensemble des attributions de moyens et du contrôle associé.
Ensuite, elle est également en contradiction totale avec l’esprit du travail de la commission des finances. Nous avons débattu pendant des semaines de quelques dizaines de postes concernant tel ministère, telle mission ou tel opérateur de l’État. C’est le travail normal, que nous avons, je crois, bien fait.
Avec cet amendement, en revanche, il s’agit de milliers de postes. Je suggère donc un renvoi en commission des finances de cette question, afin que ce travail soit conduit par les parlementaires – la tâche leur incombe –, dans l’esprit de la LOLF. À défaut, on signe un chèque en blanc. Ce serait tout à fait inacceptable !
Dans ces conditions, cet amendement ne peut être que rejeté.
Je comprends bien ce que vient de dire François Marc. Je ne dis pas que l’amendement présenté par le rapporteur général est parfait, dans la mesure où il n’est pas détaillé. Toutefois, il a le mérite de poser le problème, d’abord, de la croissance des effectifs des opérateurs depuis quelques années, effectifs qui ont été multipliés par deux. Or une partie seulement de cette hausse est liée à l’externalisation d’un certain nombre de services par les ministères.
Je donne volontiers acte à M. Christian Eckert et au Gouvernement d’avoir engagé le processus de réduction des effectifs auprès des opérateurs. Cela étant, la question qu’il faudra se poser, si on veut aller plus loin – et chaque rapporteur spécial devra s’interroger sur ce point pour la mission dont il a la charge –, c’est celle de l’utilité de tous les opérateurs. Les gisements d’économies en termes d’emplois et de dépenses affectées sont là. Les deux sujets sont liés.
La commission a justement adopté cet amendement pour indiquer qu’elle souhaitait aller plus loin en la matière.
Certains opérateurs regroupent des milliers d’emplois. Ainsi, remettre en cause l’existence d’un opérateur est un acte difficile. C’est sans doute la raison pour laquelle les quelques propositions de suppression que nous avons faites ont toujours été refusées à ce jour.
Je relève tout l’intérêt de la proposition formulée par M. François Marc. Il est vrai qu’un travail plus approfondi pourrait être fait en commission, si M. le rapporteur général l’accepte. Toutefois, sur ce point, j’aimerais connaître le sentiment du Gouvernement.
En effet, si nous sommes prêts à consacrer beaucoup de temps à ce sujet, dans la mesure où nous avons nous-mêmes envoyé ce signal au Gouvernement, ce dernier doit consentir à respecter le travail de la commission.
Je mets aux voix l'amendement n° II-137.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 93 :
Le Sénat a adopté.
L'amendement n° II-323, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local
dont titre 2
Conduite et pilotage des politiques économiques et financières
dont titre 2
Facilitation et sécurisation des échanges
dont titre 2
Entretien des bâtiments de l’État
Fonction publique
dont titre 2
Total
Solde
La parole est à M. le secrétaire d'État.
Lors de son discours devant le Congrès prononcé à Versailles, le 16 novembre dernier, le Président de la République a annoncé le renforcement de l’administration des douanes en vue d’assurer notamment le contrôle aux frontières, à chaque fois que celui-ci sera mis en place.
Le présent amendement vise à doter le programme 302, « Facilitation et sécurisation des échanges », relatif au financement de la DGDDI, la direction générale des douanes et des droits indirects, des crédits correspondants à la satisfaction de cet objectif.
La douane recrutera ainsi, sur les deux années à venir, 1 700 agents, au lieu des 700 initialement prévus. Pour la seule année 2016, toutes catégories confondues, A, B et C, 864 recrutements sont programmés.
Les élèves, à la sortie d’école, seront prioritairement affectés à des postes ayant vocation à remplir les missions définies par le Président de la République, plus particulièrement la sécurisation des échanges et le contrôle aux frontières.
Les écoles nationales des douanes se mettent dès à présent en mesure d'offrir les formations requises, afin de permettre une première vague d’affectations complémentaires, dès le mois de juillet 2016, dans les services opérationnels.
J’ai bien entendu tout à l’heure les interrogations portant sur la cohérence des chiffres avancés ici ou là ; j’ai d’ailleurs reçu hier, à ce propos, l’intersyndicale des douanes.
Il était prévu, pour 2016, de réduire les effectifs des douanes d’environ 230 agents. L’engagement du Président de la République nous conduit à majorer les effectifs de 500 agents par rapport à la trajectoire fixée. Le solde programmé avant cette annonce étant négatif, le solde net après majoration sera bel et bien positif, mais ne sera pas de 500 postes supplémentaires : chacun peut le comprendre.
Il nous est arrivé de réaliser des opérations analogues – par exemple, pour les armées ou pour le ministère de l’intérieur –, mais dans des cas de figure où la trajectoire d’évolution des effectifs était déjà, au départ, à la hausse. Nous avons alors annoncé la création de 200 ou de 500 postes supplémentaires, mais sans comptabiliser les augmentations déjà programmées, donc en prenant pour base de comparaison la trajectoire initialement prévue.
J’entends bien les interrogations, parfois les critiques, qui ponctuent la mise en œuvre de cette annonce du Président de la République ; celle-ci, néanmoins, est totalement cohérente : une trajectoire était annoncée, elle est désormais revue à la hausse, de 500 embauches en 2016, et de même en 2017.
Le Gouvernement vous propose également des ouvertures de crédits hors titre 2, à hauteur de 29, 7 millions d’euros. Pourquoi ? Parce qu’il nous faut naturellement doter en équipements les nouveaux personnels recrutés, et adapter ces équipements à l’évolution des conditions d’exercice du métier de douanier.
Les effectifs en uniforme présents sur le terrain sont au nombre de 16 000 environ ; ils représentent une cible potentielle pour ceux qui visent notamment les agents de l’État, comme l’actualité récente et dramatique, à Toulon, nous l’a malheureusement une nouvelle fois rappelé.
Ces crédits supplémentaires seront destinés à équiper les douaniers de gilets pare-balles, de matériel d’armement, de moyens de communication, et à doter les ports et aéroports de portiques de contrôle. Il s’agit de rendre à notre douane une efficacité que chacun attend d’elle.
Voilà, dans ses grandes lignes, le contenu du présent amendement : priorité est bien entendu donnée à la sécurité, et donc aux moyens tant humains que matériels correspondants.
Je dirai un mot encore sur l’intégration de la douane dans notre système global de surveillance et de sécurité, point qui est souvent au cœur des interrogations des douaniers.
Je ne peux pas en donner les détails, mais nous avons pu constater, lors des tragiques événements survenus à la mi-novembre, une étroite collaboration, en matière de communication de renseignements, entre les services de la douane, qui disposent en la matière de moyens importants, et les autres services de renseignement de notre pays.
Ces échanges d’informations, qui vont dans les deux sens, ont lieu non seulement au moment des crises elles-mêmes, mais aussi, plus largement, dans le cadre des enquêtes conduites, la plupart du temps avec des résultats très positifs, à l’occasion de ces drames humains.
La commission émet un avis favorable sur cet amendement, qui vise à tirer les conséquences de l’annonce par le Président de la République, devant le Congrès, de la création de 1 000 postes de douaniers supplémentaires sur deux ans.
Je remercie M. le secrétaire d’État des précisions qu’il a apportées concernant les 500 emplois créés : compte tenu des 233 postes qui devaient être supprimés, la trajectoire nette est bien, au total, de 267 postes supplémentaires. Je pense que ces précisions lèvent les doutes de ceux qui s’interrogeaient sur la réalité de ces recrutements.
Selon les informations que nous avons obtenues, les personnels supplémentaires renforceront les points de passage aux frontières.
Quant aux crédits ouverts hors titre 2, vous avez raison, monsieur le secrétaire d’État, de préciser que les besoins de financement concernent aussi les coûts des équipements, notamment de la modernisation des applications informatiques.
Les crédits supplémentaires dédiés à financer cette modernisation s’élèvent à 6, 4 millions d’euros sur un total de 29, 7 millions d’euros de crédits hors titre 2. Ils permettront, là encore, d’améliorer la qualité du travail de suivi du financement du terrorisme. C’est une bonne chose.
Le groupe écologiste est favorable, sur le principe, à cette mesure, et s’apprête à voter en faveur de cet amendement.
J’aimerais néanmoins que M. le secrétaire d’État nous apporte quelques précisions sur la mise en perspective de cette augmentation de la population douanière.
Notre pays appartient à l’Union européenne et fait partie de l’espace Schengen, qui est un espace de libre circulation des personnes. L’accord de Schengen fixe d’ailleurs des possibilités exceptionnelles, qui s’appliquent à la présente situation, de rétablissement des contrôles aux frontières.
Ma question est la suivante : les postes qui vont être créés ont-ils vocation à s’intégrer à un réseau européen de douanes mobiles, « volantes » ?
Nous ne disposons pas actuellement, à l’intérieur de l’espace intracommunautaire, ni même à l’intérieur de l’espace Schengen, de douanes européennes volantes ; une telle perspective me paraît cependant inéluctable. C’est d’ailleurs ce dont nous avons besoin à l’échelle de l’Union européenne.
L’exemple récent des frontières franco-belge et franco-allemande semble commander la création de structures de nouveau fixes. Je pense cependant, au vu des enquêtes récentes sur le terrorisme, qu’il serait inutile de déterminer une trop grande fixité de l’objet des postes nouvellement créés.
Par conséquent, nous préparons-nous à revenir d’un état d’urgence à un état normal en anticipant l’intégration de ces futures recrues à la possible émergence d’une dynamique européenne sur ce sujet ?
La question est également celle de la qualification des douaniers qui vont être recrutés, dont on pourrait exiger, par exemple, qu’ils parlent au moins une deuxième langue européenne.
D’abord, j’ai été interrogé tout à l’heure sur l’avenir du PSD, le projet stratégique de la douane. Ce projet est mis en œuvre. Devra-t-il être abandonné ? Non ! Devra-t-il être infléchi ? Oui !
J’ai demandé hier à l’intersyndicale et à la direction générale des douanes qu’elles travaillent ensemble à une adaptation ou à une « mise en perspective » – c’est l’expression que vous avez utilisée, monsieur Gattolin – du PSD, en tout cas à l’élaboration d’un volet complémentaire relatif à la sécurité.
Posons les questions que se posent nombre de nos concitoyens, ainsi que la plupart d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs. Faut-il autoriser le port d’armes en dehors des heures de service ? Faut-il doter les douaniers d’armes de long calibre ? Dans quelles conditions, dans quelles proportions ?
Nous devons réfléchir ensemble à ces questions. Mais le Gouvernement n’entend pas le faire seul : il souhaite le faire dans le dialogue. Le dialogue social n’est pas toujours facile à la douane – c’est un fait assez connu, qu’il faut savoir reconnaître. Nous avons passé du temps hier, avec les représentants des personnels, à aborder ces différentes questions.
Deuxième point sur lequel je souhaite vous répondre – il n’est d’ailleurs pas sans lien avec le premier : il s’agit de la question du format de nos actions de contrôle des frontières et de celle des infrastructures afférentes.
On peut en penser du bien, ou pas : le fait est que nous nous sommes adaptés à Schengen, ce qui veut dire que nous avons supprimé des postes de douane.
Je cite souvent cet exemple : il existe, entre Thionville et Luxembourg – le flux y est énorme –, un poste-frontière très important, situé à Zoufftgen. Nous avons pendant des années discuté avec le Grand-Duché de Luxembourg – ces problèmes doivent par définition se régler à l’échelon international – afin de détruire les bâtiments qui étaient utilisés par les douanes. Il s’agissait d’éviter les ralentissements pour les 85 000 frontaliers qui y passent tous les jours.
Nous avons fini par le faire. Aujourd’hui, lorsque l’on assigne soit des douaniers soit des agents de la police aux frontières, à cet endroit, ils n’ont plus rien : pas d’infrastructures, pas d’aire de dégagement pour isoler et contrôler une voiture, un poids lourd, par exemple.
J’ai moi-même visité, deux jours après les attentats, des postes-frontières situés à la frontière franco-belge, sans d’ailleurs que ces visites donnent lieu à médiatisation. J’ai pu constater, en discutant avec les personnels présents, que les plus jeunes d’entre eux ignoraient parfois jusqu’au lieu exact de la frontière ! Les anciens savent où ils ont le droit d’aller ; ils connaissent les lieux où, à cinquante mètres près, ils ont le droit, ou pas, d’engager une procédure judiciaire. Mais ce n’est pas toujours le cas des plus jeunes.
C’est l’ensemble de cette problématique qu’il nous faut donc revoir. Et c’est précisément ce que nos concitoyens ont parfois des difficultés à comprendre. Ils notent que, en définitive, nous effectuons des contrôles, mais que nous ne contrôlons pas tout le monde, et que les frontières ne sont pas non plus fermées. D’autres se plaignent que nous les embêtons, qu’ils passent la frontière tous les jours pour aller travailler et perdent une demi-heure, à l’aller comme au retour, dans les ralentissements.
Au nom de la sécurité, beaucoup le comprennent ; mais beaucoup aussi sont ceux qui nous renvoient aux reportages de journalistes qui sont parvenus à passer cinq fois la frontière, avec une grosse valise dans le coffre de leur voiture, sans que personne les contrôle – vous en avez sans doute entendu parler.
La réalité, c’est qu’il s’agit là, pour nous, d’une véritable priorité : nous y mettons des moyens supplémentaires, matériels et humains, et le plus de sérieux possible.
Mais nous refusons de nous laisser aller à des propos qui seraient irresponsables : nous renforçons massivement les contrôles, mais les frontières ne sont pas hermétiquement fermées. Elles ne l’ont d’ailleurs jamais été, y compris avant Schengen.
L'amendement est adopté.
Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Nous allons procéder au vote des crédits, modifiés, de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », figurant à l’état B
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
Ces crédits ne sont pas adoptés.
J’appelle en discussion les articles 57 à 57 quater et les amendements qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines ».
Gestion des finances publiques et des ressources humaines
I. – Les fonctionnaires et les agents contractuels de droit public reconnus atteints, au titre de leur activité au sein de la fonction publique de l’État, de la fonction publique territoriale ou de la fonction publique hospitalière, d’une maladie professionnelle provoquée par l’amiante figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail et de la sécurité sociale peuvent demander à bénéficier d’une cessation anticipée d’activité et à percevoir à ce titre une allocation spécifique.
Cette allocation peut se cumuler avec une pension militaire de retraite, une allocation temporaire d’invalidité ou une rente d’accident du travail ou de maladie professionnelle.
La durée de la cessation anticipée d’activité est prise en compte pour la constitution et la liquidation des droits à pension des fonctionnaires qui sont exonérés du versement des cotisations pour pension.
Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent I, notamment les conditions d’âge et de cessation d’activité ainsi que les modalités d’affiliation au régime de sécurité sociale.
II. – A. – Au premier alinéa de l’article 96 de la loi de finances rectificative pour 2003 (n° 2003-1312 du 30 décembre 2003), les mots : «, ainsi que les fonctionnaires et agents non titulaires relevant du ministère de la défense reconnus atteints de certaines maladies professionnelles provoquées par l’amiante, » sont supprimés.
B. – L’article 120 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 est abrogé. –
Adopté.
L'amendement n° II-148, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 57
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Hormis les cas de congé de longue maladie, de congé de longue durée ou si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions, les agents publics civils et militaires en congé de maladie, ainsi que les salariés dont l'indemnisation du congé de maladie n'est pas assurée par un régime obligatoire de sécurité sociale, ne perçoivent pas leur rémunération au titre des trois premiers jours de ce congé.
La parole est à M. le rapporteur général.
Il s’agit d’un amendement de cohérence. La disposition que nous avons adoptée tout à l’heure sur les jours de carence représente une économie d’environ 200 millions d’euros.
Le taux d’absentéisme dans la fonction publique reste stable, à 3, 8 % entre 2006 et 2012. Il est plus élevé dans la fonction publique territoriale, et s’établit à 4, 5 %, contre respectivement 4 % et 2, 9 % dans la fonction publique hospitalière et la fonction publique d’État. À application égale, une même mesure peut avoir des résultats très différents.
Il faut considérer les conditions de travail et le rapport au nombre d’heures travaillées. Nous avons des progrès à faire en matière de ressources humaines.
Avec M. le Premier ministre, nous avons décidé de créer une direction des ressources humaines pour l’État au sein de la direction générale de l’administration et de la fonction publique, la DGAFP. Je pense que c’était important.
Certaines absences sont liées à l’organisation et à la cohérence des équipes : les missions, les personnes, les lieux, les encadrements intermédiaires ne sont pas forcément adéquats. D’ailleurs, c’est vrai aussi pour les collectivités territoriales.
Nous ne disposons pas d’une étude plus approfondie, qui se justifierait pourtant.
Le débat ne se pose pas dans les mêmes termes entre fonction publique hospitalière et fonction publique d’État. Il y a des problèmes d’organisation des équipes dans la première et de gestion des ressources humaines dans la seconde. Et l’organisation des ressources humaines au sein de nos collectivités territoriales a parfois pris un peu de retard, notamment lors de la création des établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, avec des distorsions d’équipes. Il y a donc beaucoup de sujets sur la table.
À mon avis, ces différences de taux d’absentéisme doivent être examinées de près, peut-être par structure.
Aujourd'hui, 77 % des salariés du privé ne sont pas soumis au jour de carence. Nous avons demandé aux organisations patronales s’il y avait des différences notables entre les grands groupes, dans lesquels le régime de protection sociale prend en charge le jour de carence, et d’autres sociétés moins protectrices. Ce n’est pas le cas !
Le jour de carence n’est donc probablement pas le sujet.
Je ne pense pas que l’on puisse ouvrir un débat sur une protection sociale particulière des fonctionnaires. D’ailleurs, ils le regrettent. Il est vrai que la protection supplémentaire, dont le montant est entre huit euros et douze euros par mois, coûte très cher à l’employeur !
Nous allons agir sur les ressources humaines ; je regrette que n’ait pas été abordé l’accord-cadre sur la qualité de vie au travail, car cela fait partie du sujet.
Nous devons travailler sur l’organisation des équipes dans la fonction publique hospitalière qui a créé beaucoup de problèmes. Dans les services très tendus, le taux d’absentéisme progresse souvent, en raison des surcharges de travail et des grandes difficultés, que nous avons comprises, après avoir visité plusieurs services hospitaliers.
Je ne pense pas que l’instauration de jours de carence soit la réponse. C’est une solution de facilité. Il est beaucoup plus difficile de traiter les problèmes au fond.
La direction des ressources humaines pour l’État sera à la disposition des collectivités territoriales et des autres opérateurs pour améliorer les conditions de travail et lutter contre l’absentéisme, même si celui-ci n’est pas plus important dans la fonction publique que dans le secteur privé.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Je mets aux voix l'amendement n° II-148.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 94 :
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 57.
À la fin de la première phrase du IV de l’article 91 de la loi n° 2009-1646 du 24 décembre 2009 de financement de la sécurité sociale pour 2010, l’année : « 2015 » est remplacée par l’année : « 2018 ».
L'article 57 bis n'est pas adopté.
I. – A. – Il est appliqué un abattement sur tout ou partie des indemnités effectivement perçues par les fonctionnaires civils, en position d’activité ou de détachement dans un corps, un cadre d’emplois ou un emploi conduisant à pension civile ayant fait l’objet d’une revalorisation indiciaire visant à la modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations et à l’avenir de la fonction publique.
B. – Le montant annuel de l’abattement prévu au A correspond aux montants annuels bruts des indemnités perçues par le fonctionnaire civil, dans la limite des plafonds forfaitaires annuels suivants :
1° Pour les fonctionnaires appartenant à un corps ou cadre d’emplois relevant de la catégorie A ou de même niveau : 389 € ;
2° Pour les fonctionnaires appartenant à un corps ou cadre d’emplois relevant de la catégorie B ou de même niveau : 278 € ;
3° Pour les fonctionnaires appartenant à un corps ou cadre d’emplois relevant de la catégorie C ou de même niveau : 167 €.
Le montant de l’abattement est, le cas échéant, réduit dans les mêmes proportions que le traitement perçu par l’agent au cours de la même année.
C. – Le montant des indemnités prises en compte dans les assiettes des contributions de sécurité sociale et de la cotisation au régime public de retraite additionnel et obligatoire institué par l’article 76 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites tient compte de l’abattement prévu au A du présent I.
D. – La liste des indemnités non prises en compte pour le calcul de l’abattement, ainsi que les montants, les modalités et le calendrier de mise en œuvre de l’abattement sont déterminés par décret.
II. – L’article 57 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État est ainsi rédigé :
« Art. 57. – L’avancement d’échelon est accordé de plein droit. Il a lieu de façon continue d’un échelon à l’échelon immédiatement supérieur.
« Il est fonction de l’ancienneté. Toutefois, lorsque les statuts particuliers le prévoient, et selon des modalités de contingentement définies par décret en Conseil d’État, il peut être également fonction de la valeur professionnelle. Les statuts particuliers peuvent en outre prévoir des échelons spéciaux dont l’accès peut être contingenté selon des conditions et des modalités spécifiques.
« Il se traduit par une augmentation de traitement. »
III. – L’article 78 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est ainsi rédigé :
« Art. 78. – L’avancement d’échelon est accordé de plein droit. Il a lieu de façon continue d’un échelon à l’échelon immédiatement supérieur.
« Il est fonction de l’ancienneté.
« Toutefois, lorsque les statuts particuliers le prévoient, et selon des modalités de contingentement définies par décret en Conseil d’État, il peut être également fonction de la valeur professionnelle. L’avancement d’échelon est prononcé par l’autorité territoriale et se traduit par une augmentation de traitement. »
IV. – L’article 67 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière est ainsi rédigé :
« Art. 67. – L’avancement d’échelon est accordé de plein droit. Il a lieu de façon continue d’un échelon à l’échelon immédiatement supérieur.
« Il est fonction de l’ancienneté.
« Toutefois, lorsque les statuts particuliers le prévoient, et selon des modalités de contingentement définies par décret en Conseil d’État, il peut être également fonction de la valeur professionnelle.
« Les statuts particuliers peuvent en outre prévoir des échelons spéciaux dont l’accès peut être contingenté selon des conditions et des modalités spécifiques.
« Il se traduit par une augmentation de traitement. »
V. – Toutefois, l’avancement d’échelon reste fonction, dans le corps ou le cadre d’emplois considéré, de l’ancienneté et de la valeur professionnelle, conformément aux dispositions statutaires applicables avant l’entrée en vigueur de la présente loi, jusqu’aux dates suivantes :
1° Au 1er janvier 2016 pour les corps et cadres d’emplois de catégorie B et ceux, relevant de la catégorie A, d’infirmiers et de personnels paramédicaux et des cadres de santé ainsi que ceux de la filière sociale dont l’indice brut terminal est au plus égal à 801 ;
2° Au 1er janvier 2017 pour les autres corps et cadres d’emplois ainsi que pour les personnels sous statut spécial.
VI. – Les I, III, V et VII sont applicables aux fonctionnaires relevant de la commune et du département de Paris ainsi que de leurs établissements publics.
VII. – Entre 2016 et 2020, les dispositions statutaires, indiciaires et indemnitaires visant à la modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations des fonctionnaires de catégories A, B et C ou de même niveau relevant de la fonction publique de l’État, de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière peuvent, au plus tôt, rétroagir aux dates d’effet suivantes :
1° Au 1er janvier 2016 pour les corps et cadres d’emplois de catégorie B et ceux, relevant de la catégorie A, d’infirmiers et de personnels paramédicaux et des cadres de santé ainsi que ceux de la filière sociale dont l’indice brut terminal est au plus égal à 801 ;
2° Au 1er janvier 2017 pour les autres corps et cadres d’emplois ainsi que pour les personnels sous statut spécial.
L'amendement n° II-138, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
Mme la ministre nous reprochait tout à l’heure de ne pas détailler les économies mission par mission…
Le Gouvernement a annoncé un certain nombre de mesures à la suite des accords salariaux. L’article 57 ter, qui a été introduit par le Gouvernement, met en œuvre les dispositions de revalorisation des différents régimes indemnitaires prévues par le protocole d’accord relatif à la modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations. J’observe qu’il tire simplement des conséquences pour l’ensemble, sans détailler mission par mission. Selon votre logique, madame la ministre, il aurait fallu nous préciser le coût par mission de ces mesures… Ayant dressé ce constat, la commission a appliqué la même méthode !
Dans un premier temps, on nous avait annoncé que les accords n’auraient aucun effet en 2016. Puis, l’autre jour, vous avez déclaré qu’il y aurait une revalorisation du point d’indice en 2016. Nous avons un peu de mal à suivre…
Nous n’avons aucune évaluation de ces différentes mesures, qui auront d’ailleurs des conséquences sur la fonction publique territoriale. Nous proposons donc de supprimer l’article 57 ter.
Mme Marylise Lebranchu, ministre. M. le rapporteur général, qui me reproche de ne pas détailler mission par mission, invoque la Cour des comptes, dont le rapport… ne détaille pas non plus !
Souriressur les travées du groupe socialiste et républicain.
Comme nous nous y étions engagés, nous avons communiqué les chiffres pour l’année 216. D’ailleurs, ils sont mentionnés dans l’objet de l’amendement.
Je souhaite rappeler ce qu’est le protocole PPCR. Je l’ai juste esquissé tout à l’heure. Certains fonctionnaires, en particulier parmi les moins bien payés – cela concerne les agents de la catégorie C, mais aussi certains de catégorie B –, sont régulièrement « rattrapés » par le SMIC. C’est particulièrement le cas dans la fonction publique territoriale, dont 75 % des agents relèvent de la catégorie C. Cela nous a conduits à engager une revalorisation générale des grilles de rémunération des agents de cette catégorie en 2014, puis en 2015.
Un resserrement de l’échelle des rémunérations dans la fonction publique s’opère depuis dix ans. Si nous ne faisons rien d’ici là, en 2018, les enseignants et les infirmières seront recrutés au SMIC ! Certes, cela réduirait effectivement les dépenses, ce qui pourrait vous satisfaire, monsieur le rapporteur général. Mais, à mon avis, nous serions vite confrontés à des carences de personnels !
Nous avons pris acte d’une situation absolument insupportable et proposé ce protocole PPCR, qui revoit toutes les grilles de rémunération. Pour pouvoir l’appliquer, 300 ou 400 textes devront être adoptés. Le dispositif bénéficiera à tous les fonctionnaires, quelles que soient leur catégorie et leur fonction publique d’appartenance, à partir du 1er janvier 2017 dans la plupart des cas, mais aussi, parfois, de manière étalée sur plusieurs années, certaines mesures ne s’appliquant qu’à partir d’un changement d’échelon ou de grade.
Il est donc extrêmement difficile de détailler mission par mission, ligne par ligne. Il faudrait que je connaisse la position, l’âge, le grade, l’échelon de chaque fonctionnaire, dans chaque service, au sein de chaque mission ! Cela supposerait d’embaucher beaucoup de fonctionnaires…
Je préfère retenir l’idée de la Cour des comptes : utiliser les merveilles mathématiques issues de nos grandes écoles, en particulier l’École nationale de la statistique et de l’administration économique, l’ENSAE, pour procéder à des calculs, à partir de moyennes.
Les chiffres que nous vous avons communiqués pour 2016 sont les bons. Il est difficile de faire des projections pour 2017, mais nous le ferons.
À mon sens, le protocole PPCR répond à la plupart des demandes des parlementaires ; je ne parle pas des organisations syndicales.
Il s’agit de commencer à mettre de l’indemnitaire dans l’indiciaire et de revenir sur un système dont le nombre de primes est exponentiel. Ce système servant à corriger tout et n’importe quoi, on ne s’y retrouve plus ! Nous avançons lentement mais sûrement, jusqu’à ce que nous ayons un régime à peu près équilibré entre l’indiciaire, qui correspondra véritablement au traitement, et l’indemnitaire, qui doit être réservé à des sujétions particulières.
Je termine en disant que les quelques points qui doivent basculer de l’indemnitaire vers l’indiciaire avec l’accord PPCR entraînent une dépense. À cet égard, monsieur de Montgolfier, vous avez raison : ni vous ni la Cour des comptes n’êtes parvenus à en évaluer le montant. Ceux qui partiront à la retraite un an après l’entrée en vigueur de l’accord bénéficieront d’une augmentation de 5 ou 10 euros pour certains, ce qui est peu, alors que d’autres percevront un peu plus. Compte tenu de la faiblesse des pensions de retraite qui ne sont calculées que sur la base du traitement, ce geste était nécessaire.
Je ne reprendrai pas la parole, madame la présidente, sur l’ensemble de ces sujets. Je ne peux que suivre ma position initiale, qui n’est pas celle qu’ont retenue M. de Montgolfier et le Sénat.
Je mets aux voix l'amendement n° II-138.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 95 :
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l'article 57 ter est supprimé.
Avant le 1er juillet 2016, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les conséquences des suppressions de postes dans les services des douanes, en prenant en compte, d’une part, l’économie réalisée en frais de fonctionnement et, d’autre part, l’impact sur les récupérations de taxes et le contrôle des marchandises, l’impact sur la fraude, les contrefaçons et la compétitivité des entreprises travaillant sur le territoire national.
L'amendement n° II-136, présenté par MM. Bouvard et Carcenac, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Thierry Carcenac, rapporteur spécial.
Cet amendement vise à supprimer l’article 57 quater, qui prévoit la remise d’un rapport – nous sommes tous d’accord pour réaliser des économies en la matière – dès lors qu’il y a eu création de postes.
L'amendement est adopté.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Crédits non répartis », figurant à l’état B.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Crédits non répartis
Provision relative aux rémunérations publiques
Dont titre 2
11 445 751
11 445 751
Dépenses accidentelles et imprévisibles
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
Ces crédits sont adoptés.
Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État », figurant à l’état D.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Gestion du patrimoine immobilier de l’État
Contribution au désendettement de l’État
Contribution aux dépenses immobilières
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ».
Ces crédits sont adoptés.
J’appelle en discussion les amendements tendant à insérer des articles additionnels qui sont rattachés pour leur examen aux crédits du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ».
L'amendement n° II-173, présenté par M. Bouvard, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I.- Après l’article 63
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 47 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l’État procède à l’aliénation d’un terrain de son domaine privé à un prix inférieur à sa valeur vénale en application de l’article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques, les dépenses d’investissement et de fonctionnement prévues aux a et b du 2° du présent article affectées au ministère occupant de ce terrain sont réduites d’un montant égal à la différence entre le prix de cession effectif et la valeur vénale de ce terrain. »
II.- En conséquence, faire précéder cet article de la mention :
Gestion du patrimoine immobilier de l'État
La parole est à M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.
J’ai déjà présenté cet amendement au cours de la discussion générale. Il s’agit de répercuter sur le budget de chacun des ministères l’effet de la décote de la loi Duflot pour consolider le compte d’affectation spéciale.
Cet amendement, sur ma proposition, a été adopté par la commission, même si Thierry Carcenac n’a pas souhaité le cosigner. Je suis conscient des problèmes qu’il pose, monsieur le secrétaire d'État, car son adoption aurait pour conséquence de diminuer les budgets d’un certain nombre de ministères. Il s’agit donc plutôt d’un amendement d’appel, permettant d’avoir une véritable transparence à l’avenir sur le coût réel de la décote de la loi Duflot.
Le compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État », dit « CAS immobilier », perçoit en recettes les produits de la cession des biens immobiliers de l’État. Ces recettes permettent de financer, d’une part, le désendettement de l’État pour une faible part – reconnaissons-le – et, d’autre part, les projets immobiliers des ministères.
Vous proposez, monsieur le rapporteur spécial, dans le cas où les cessions sont affectées d’une décote, de diminuer le montant des dépenses qui peuvent être effectuées par les ministères utilisateurs du bien cédé.
L’objectif visé au travers de cet amendement, à savoir la limitation de la capacité à dépenser du ministère cédant, pour tenir compte de l’existence d’une décote sur le prix de cession, est d’ores et déjà assuré du fait du fonctionnement du CAS. En effet, seuls les produits de cession effectivement encaissés sur le CAS peuvent donner lieu à une dépense immobilière ultérieure.
Ce principe assure donc déjà que les différents ministères assumeront, d’un point de vue budgétaire, les moindres recettes liées à la politique en faveur du logement social.
L’adoption de cet amendement aboutirait, dès lors, à diminuer deux fois la capacité d’engagement des ministères : une fois, car la recette est moindre qu’en l’absence de décote ; puis une seconde fois, lors de la délégation des crédits à chaque ministère. Ce ne serait ni logique budgétairement ni pertinent du point de vue de la politique immobilière.
Certes, il s’agit d’un amendement d’appel. J’ai précisé que les choses seraient probablement amenées à évoluer dans un avenir assez proche. Dans la mesure où cet appel a été entendu, je demande le retrait de l’amendement. À défaut, j’y serai défavorable.
Monsieur le rapporteur spécial, l'amendement n° II-173 est-il maintenu ?
L’idée était de faire apparaître le manque à gagner. Techniquement, dans la mécanique de la loi de finances, nous ne pouvons imputer cette décote sur les crédits du ministère du logement. Sinon, nous l’aurions fait.
Dans la mesure où l’adoption de cet amendement, tel qu’il est rédigé, aboutirait notamment à une réduction des crédits du budget de la défense et qu’il a été déposé avant les événements malheureux qui ont touché notre pays, j’accepte de le retirer.
L'amendement n° II-173 est retiré.
L'amendement n° II-149, présenté par MM. Bouvard et Carcenac, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I.- Après l’article 63
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement élabore chaque année un rapport relatif aux décotes consenties par l’État en application de l’article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques, sur les cinq dernières années. Ce rapport constitue une annexe générale au projet de loi de finances au sens du 7° de l’article 51 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.
Ce rapport présente, pour chaque opération, le site concerné, le ministère occupant, le nombre de logements et de logements sociaux programmés, la date de cession effective, la valeur vénale, le prix de cession, le montant et le taux de la décote, ainsi que le zonage de la politique du logement.
II.- En conséquence, faire précéder cet article de la mention :
Gestion du patrimoine immobilier de l'État
La parole est à M. Michel Bouvard, rapporteur spécial.
Cet amendement, que j’ai déposé avec Thierry Carcenac, vise à éclairer le Parlement sur le coût réel de la politique du logement, dans lequel il faut intégrer les recettes perdues en raison des décotes. Le dispositif est ici équivalent à de la dépense fiscale, puisqu’il entraîne une moindre recette.
Le présent amendement prévoit que ces décotes figurent en annexe au projet de loi de finances de chaque année, par analogie avec les dépenses fiscales, qui sont retracées dans le tome II de l’annexe « Voies et moyens ».
Une telle mesure est d’autant plus nécessaire que l’article 21 bis du présent projet de loi de finances, adopté par l’Assemblée nationale, sur l’initiative du Gouvernement, prévoit d’étendre le champ de la décote à l’ensemble des programmes de logement, et non plus seulement aux programmes de construction et de restructuration lourde.
Le Gouvernement a mis en place en 2013 une politique de soutien à la construction de logements, en particulier de logements sociaux, par la mobilisation de foncier de l’État et de certains de ses établissements publics à des conditions financières adaptées pour les collectivités et les porteurs de projets.
La loi qui a instauré ce dispositif de décote a prévu, dès le départ, que la Commission nationale de l’aménagement, de l’urbanisme et du foncier, la CNAUF, soit notamment chargée du suivi de cette politique. Cette commission est aujourd’hui présidée par Thierry Repentin.
Chaque année, elle remet un rapport au Parlement sur la mise en œuvre du dispositif. Ce rapport fait l’objet d’un débat devant les commissions permanentes. Il contient les informations que vous demandez, monsieur le rapporteur spécial, notamment, pour chaque opération, le site concerné, le ministère occupant, le nombre de logements et de logements sociaux programmés, la date de cession effective, la valeur vénale, le prix de cession, le montant et le taux de la décote, ainsi que le zonage de la politique du logement.
Le Parlement dispose donc déjà de l’information à laquelle vous souhaitez légitimement pouvoir accéder. À ce titre, je vous invite à retirer votre amendement.
Monsieur le rapporteur spécial, l’amendement n° II-149 est-il maintenu ?
Oui, madame la présidente.
Monsieur le secrétaire d'État, les informations demandées sont certes consignées dans un rapport. Mais nous souhaitons, dès lors qu’il s’agit de pertes de recettes pour l’État, que celles-ci figurent dans l’annexe « Voies et moyens » au même titre que les autres dépenses fiscales.
Cette non-recette n’apparaît pas dans le budget de l’État. Or il s’agit bien d’une perte de moyens. En réalité, il existe une dépense, puisqu’il y a minoration de recettes pour favoriser la production de logements.
J’ajoute que la plupart de ces logements sont réalisés à Paris. Les décotes sont donc très importantes. Par exemple, pour la bibliothèque interuniversitaire des langues orientales, elles atteignent même 263 000 euros par logement. Bref, c’est une subvention accordée à la ville de Paris pour produire des logements sociaux. Il convient que cette somme apparaisse dans les documents budgétaires, dans un souci de transparence et conformément à l’esprit de la LOLF.
Que cette somme figure dans un rapport n’est pas la même chose que de l’inscrire dans des documents budgétaires. Par ailleurs, il s’agit d’une mesure de transparence qui ne coûte rien à l’État et n’entraînera pas non plus de travail supplémentaire.
Nous partageons la position de la commission et nous voterons en faveur de cet amendement : une information doit, en effet, être donnée au Parlement sur ces sujets.
Permettez-moi, mes chers collègues, de profiter de mon intervention pour tirer un bilan de notre après-midi. Car nos discussions peuvent paraître surréalistes. Nous avons débattu de la durée du travail dans le secteur public, du non-remplacement de fonctionnaires, de la diminution de moitié du GVT. Les amendements déposés sur ces différents points par la majorité sénatoriale ont été adoptés parfois par scrutin public, avant que les crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » soient rejetés…
Certes, mais, du coup, tous vos amendements passent à la trappe !
C’était donc un après-midi quelque peu particulier : nous n’en sommes plus à des amendements d’appel, monsieur le rapporteur général, nous en sommes au débat d’appel ! En tout cas, on constatera qu’il n’y a pas aujourd’hui de rétablissement des comptes de la mission. Je voudrais vraiment que ce fait soit pris en considération.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 63.
Nous avons achevé l’examen des crédits des missions « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » et « Crédits non répartis », ainsi que du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ».
Le Sénat va maintenant procéder à l’examen des crédits de la mission « Outre-mer (et article 57 quinquies).
La parole est à M. Nuihau Laurey, rapporteur spécial.
Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission des finances, mes chers collègues, la mission que nous allons examiner regroupe les interventions spécifiques de l’État dans l’ensemble des collectivités d’outre-mer.
Cette mission présente deux particularités.
La première est celle de concerner des territoires très éloignés, très différents les uns des autres, caractérisés par des histoires, des évolutions statutaires et des problématiques de développement diverses. L’évolution institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie n’est en rien comparable à celle de Mayotte et la Guyane, le plus grand département français avec une superficie terrestre de près de 84 000 kilomètres carrés, est tout sauf comparable à la Polynésie française, dont l’étendue océanique est aussi vaste que l’Europe.
Au-delà de cette diversité, la seconde particularité de cette mission relève de la pluralité de ses modalités d’intervention. En effet, les crédits de la mission « Outre-mer » sont affectés à des opérations toutes plus variées les unes que les autres : la baisse du coût du travail, la continuité territoriale, le logement social, la formation professionnelle ou encore le financement des investissements publics.
Cette double particularité de la mission « Outre-mer » témoigne d’une gestion spécifique, un peu à part, de ces territoires de la France éparpillés sur tous les océans.
Comme je l’ai indiqué, chacun de ces territoires a une histoire, un cheminement statutaire, une situation économique et sociale qui lui sont propres. Mais tous nos territoires d’outre-mer connaissent aujourd’hui un retard économique et social important, voire très important avec l’Hexagone. C’est un fait qui n’est contesté par personne. Tous les indicateurs objectifs, que ce soit le PIB par habitant ou encore l’indice de développement humain, pointent du doigt le décalage de niveau de développement existant avec l’Hexagone.
C’est ce contexte qu’il est nécessaire d’avoir présent à l’esprit à l’occasion de l’examen des crédits de la mission « Outre-mer ».
C’est un budget classique, pour ne pas dire traditionnel qui nous est proposé.
Dans un contexte budgétaire toujours tendu, l’outre-mer, comme d’autres missions, participe à l’effort national de maîtrise de nos dépenses publiques. Ainsi, pour 2016, les crédits de la mission enregistrent, en autorisations d’engagement, une diminution de 3, 1 %, pour s’établir à 2, 079 milliards d’euros, alors que les crédits de paiement progressent très légèrement, de 0, 3 %, et s’élèvent à 2, 062 milliards d’euros.
Par-delà ce relatif maintien des crédits, plusieurs évolutions ou réformes méritent d’être plus précisément analysées.
Le premier point concerne la poursuite de la réforme du dispositif d’exonérations de charges sociales, principale intervention de la mission, pesant pour plus de la moitié des crédits.
Cela fait suite à une première réforme intervenue en 2014 avec un recentrage du dispositif sur les bas salaires. Bien que compréhensible dans sa philosophie, cette nouvelle modification du dispositif est ressentie comme un « coup de rabot » supplémentaire, alors que l’emploi présente une situation singulièrement dégradée dans l’ensemble des territoires d’outre-mer, avec des taux de chômage particulièrement élevés, supérieurs à 20 %, notamment s’agissant des plus jeunes.
Une stabilisation de ce dispositif est aujourd’hui impérative pour permettre aux entreprises d’avoir une visibilité suffisante dans leur politique de recrutement.
Dans le domaine de la formation professionnelle, l’objectif fixé en 2009 de 6 000 places en service militaire adapté, ou SMA, ne sera pas atteint en 2016, mais plutôt en 2017. Ce léger retard n’entame en rien la qualité et l’efficacité d’un dispositif d’insertion professionnelle au terme duquel les trois quarts des volontaires obtiennent un contrat de travail ou un stage qualifiant.
La mise en place des nouveaux contrats de plan État-région, ou des contrats de projets pour les collectivités d’outre-mer, est une nécessité. Ils sont essentiels à la modernisation des équipements en outre-mer. Néanmoins, une sous-dotation de ces nouveaux contrats est déjà constatée. En Polynésie française notamment, le nouveau contrat de projets signé en 2015 a été doté de 22, 7 millions d’euros en autorisations d’engagement, au lieu des 30 millions d’euros prévus au contrat. Pour 2016, une même sous-dotation de plus de 25 % est constatée, remettant en cause les projets prévus et planifiés parfois de longue date.
Il sera donc absolument nécessaire, madame la ministre, de compléter les crédits prévus cette année et les années suivantes pour respecter la signature de l’État et donner de la visibilité à ces projets.
Toujours sur la question des dotations, il est impossible pour un parlementaire de la Polynésie française de ne pas évoquer la baisse de la dotation globale d’autonomie de 4 millions d’euros prévue dans le PLF pour 2016.
Cette baisse de la DGA, la troisième en trois ans, constitue un reniement de la signature de l’État et, en tout état de cause, une mesure inacceptable pour les élus polynésiens s’agissant d’une dotation très symbolique de l’après-nucléaire, tout particulièrement à la veille des cinquante ans du premier tir atomique, effectué le 2 juillet 1966.
Cette décision budgétaire inique, faisant fi de l’engagement de l’État pris à l’issue des essais et du caractère particulièrement sensible du sujet, est clairement une erreur. Je vous remercie, madame la ministre, consciente du trouble provoqué, d’avoir courageusement pris l’engagement devant l’Assemblée nationale d’effectuer une compensation équivalente sur vos crédits de gestion, sans altérer les équilibres budgétaires de la mission. Un amendement visant à supprimer la fixation de ce nouveau montant dans l’article 57 quinquies rattaché à la présente mission sera proposé par cohérence avec l’engagement que vous avez pris.
Enfin, l’objectif de doter le fonds exceptionnel d’investissement de 500 millions d’euros d’ici à 2017, objectif initialement fixé par le Président de la République, semble désormais impossible à atteindre, compte tenu des crédits prévus pour 2016.
Les rapporteurs spéciaux de la mission « Outre-mer » qui ont effectué récemment à La Réunion un contrôle budgétaire sur ce dispositif rappellent l’importance de ce fonds exceptionnel d’investissement, qui constitue souvent un complément de financement essentiel aux collectivités pour concrétiser des projets publics de toute nature.
Au-delà de ces crédits purement budgétaires, il importe de rappeler que les dépenses fiscales, au travers des mécanismes de défiscalisation, constituent aujourd’hui le principal levier d’investissement en faveur du développement économique de l’outre-mer.
Le choix initial du Gouvernement d’aménager sous conditions le terme prévu de ces dispositifs était nécessaire mais insuffisant, de l’avis unanime des acteurs économiques et de nombreux élus. Je me félicite donc que l’Assemblée nationale, grâce à une mobilisation de nombreux parlementaires, et avec l’accord du Gouvernement, ait procédé à une modification de l’article 43 du projet de loi de finances afin de porter ces dispositifs jusqu’en 2020 pour les départements d’outre-mer, et 2025 pour les collectivités d’outre-mer.
Mes chers collègues, l’écart de développement économique et social entre les outre-mer et la métropole est un sujet fondamental dont nous devons impérativement nous emparer pour réduire ces inégalités qui sont tout simplement contraires à l’esprit de la République.
Mais, dans le cadre de cette mission, et dans un contexte budgétaire toujours difficile, la relative stabilité des crédits qui sont proposés et les inflexions positives adoptées s’agissant du dispositif de défiscalisation, essentiel à nos collectivités, plaident pour une adoption des crédits de la mission « Outre-mer » – sous réserve, pour ce qui me concerne, de l’adoption de l’amendement relatif à l’article 57 quinquies visant au maintien du niveau de la dotation globale d’autonomie, pour les raisons que j’ai développées précédemment.
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains, ainsi que sur certaines travées du RDSE, du groupe écologiste et du groupe socialiste et républicain.
Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission des finances, mes chers collègues, la mission « Outre-mer » comporte deux programmes, dont les intitulés résument bien ses principaux objectifs. Le programme 138 concerne le maintien et la création d’emplois ainsi que l’amélioration de l’employabilité des populations ultramarines. Le programme 123 a pour finalité d’améliorer les conditions de vie outre-mer en facilitant l’accès au logement, à la santé et à l’éducation. Deux priorités du Gouvernement, tant les données socioéconomiques sont pour le moins inquiétantes dans ces domaines !
Les écarts sont, en effet, très significatifs avec la métropole, avec un PIB très nettement inférieur et la persistance d’un fort taux de chômage, puisque 24, 1 % des actifs sont au chômage dans les départements d’outre-mer, contre 9, 9 % en métropole, les jeunes étant les principales victimes. En effet, plus de la moitié des actifs de moins de vingt-cinq ans sont au chômage. Autres données, on assiste, dans bon nombre de départements d’outre-mer, à une augmentation de la mortalité infantile et l’on constate des retards scolaires toujours aussi importants.
Nous sommes donc encore bien loin de l’égalité réelle, alors que l’on a trop souvent tendance à considérer les outre-mer comme les enfants gâtés de la République.
Le coût des outre-mer, puisqu’il est chiffré exceptionnellement dans un document de politique transversale, ce qui n’est pas le cas pour les régions métropolitaines, est de 14, 5 milliards d’euros. Il représente 3, 9 % des dépenses prévues pour l’ensemble du budget de l’État, alors qu’il concerne 4, 05 % de la population française.
Certes, les crédits de la mission qui nous sont présentés sont relativement stables par rapport à l’an dernier : 2 milliards d’euros, soit 14, 5 % de l’effort budgétaire global de l’État pour les outre-mer, avec une ventilation peu différente au niveau des programmes et des actions.
Il s’agit donc d’un budget dans la continuité, mais qui ne traduit pas de réelle et forte volonté de doter les outre-mer d’un véritable développement économique, notamment grâce à des mesures de soutien à la compétitivité des entreprises.
Il y a pourtant urgence à dynamiser très fortement notre développement et à veiller à la création d’emplois, afin d’éviter les crises sociales à répétition.
Il est ainsi regrettable que la principale mesure d’économie de ce budget résulte d’une nouvelle réforme du dispositif d’exonérations de charges, découlant de l’article 9 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.
Dans ce contexte de persistance d’un très haut niveau de chômage, cette réforme, qui fait déjà suite à un premier recentrage de ce dispositif sur les bas salaires intervenu en 2014, n’est pas pertinente.
Certes, vous souhaitez compenser cette mesure par la montée en charge des dispositifs du pacte de stabilité et de sa déclinaison spécifique outre-mer, en particulier grâce à un crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi majoré à 9 %, mais il me semble que le choix de la stabilité aurait été préférable.
Madame la ministre, il est encore temps pour le Gouvernement d’agir dans le bon sens, en répondant positivement à des amendements que mes collègues et moi-même déposerons dans le but de préserver et sanctuariser les dispositifs spécifiques aux entreprises ultramarines.
En ce qui concerne plus particulièrement mon département d’origine, la Guyane, il continue d’avoir, en dépit de ses importantes ressources, le PIB le plus faible des quatre vieilles colonies.
J’insisterai, une fois de plus, sur notre impatience de voir enfin sortir le « pacte Guyane », annoncé par le Président de la République lors de sa venue, à la fin de l’année 2013. Récemment, le Premier ministre l’a annoncé pour janvier 2016 Mais comment est-il élaboré ? Y aura-t-il une implication des acteurs locaux ? La réflexion sur une demande d’attribution à la Guyane d’un statut de zone franche sociale est-elle menée ? Sera-t-elle prise en compte ?
S’agissant du logement, là encore, les avancées sont modestes dans votre budget. Le plan logement outre-mer 2015-2020, qui fixe un objectif annuel de 10 000 logements construits ou réhabilités, est certes une initiative louable, mais on peine à en voir la traduction budgétaire pour 2016, alors que les autorisations d’engagement consacrées à la ligne budgétaire unique sont maintenues à leur niveau de 2015 et que les crédits de paiement sont en diminution.
Se pose également la question de la répartition de cet instrument par collectivité : alors que des sous-consommations peuvent être constatées dans certains territoires, des situations de très grande tension existent dans d’autres... C’est le cas en Guyane, où les opérateurs peinent, pour cause d’insuffisance de crédits sur la LBU, à satisfaire une demande exponentielle.
Je regrette également que, hors mesures de périmètre, les dotations spécifiques destinées à certaines collectivités soient en baisse de 4, 7 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 5, 6 millions d’euros en crédits de paiement. Ces dotations permettent, pourtant, des investissements importants dans les infrastructures scolaires en Guyane et à Mayotte et sont indispensables pour le fonctionnement de la collectivité de Polynésie.
Pour autant, le tableau que je viens de dresser ne doit pas masquer certains points positifs.
Tout d’abord, on ne peut que se féliciter de la stabilisation des crédits de paiement consacrés au service militaire adapté, le SMA, dont on connaît les résultats très positifs en matière d’insertion professionnelle. Ces crédits permettront l’accueil de 6 000 jeunes volontaires d’ici à 2017. C’est une bonne nouvelle, qui mérite d’être rappelée.
S’agissant des contrats de plan État-régions et des contrats de projets et de développement, la stabilisation des autorisations d’engagement et l’augmentation des crédits de paiement devraient permettre d’accompagner la montée en puissance de la nouvelle génération de contrats.
Enfin, l’augmentation des moyens consacrés à la formation en mobilité, dont les autorisations d’engagement s’élèveront à près de 42 millions d’euros et les crédits de paiement à près de 37 millions d’euros, permettra à davantage d’étudiants et de salariés d’avoir accès à des formations qui ne sont pas dispensées chez eux.
En définitive, ces crédits ne permettront certes pas aux outre-mer de rattraper leur retard économique et social vis-à-vis de l’Hexagone, mais ils ont le mérite de préserver l’essentiel.
Aussi, c’est en responsabilité, eu égard à la situation financière contrainte que nous connaissons, que je proposerai d’adopter les crédits de la mission « Outre-mer » sans modification.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE, ainsi que sur certaines travées de l’UDI-UC et du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, si je déplore de ne disposer que de trois petites minutes pour parler des outre-mer, je me réjouis cependant de pouvoir vous présenter l’avis de la commission des affaires économiques sur les crédits de cette mission.
Première bonne nouvelle, les crédits de paiement pour 2016 sont sauvegardés, malgré le contexte budgétaire que l’on connaît. Je note tout de même un signal inquiétant pour l’avenir : la diminution des autorisations d’engagement.
S’agissant des défis à relever, il suffit d’ouvrir les yeux pour constater que les démocraties se fragilisent quand les taux de chômage dépassent certains seuils. De ce point de vue, si la situation est critique dans l’Hexagone, elle est explosive dans les outre-mer avec, en particulier, un taux de chômage des jeunes de plus de 50 %.
Sur ces bases, je formule trois suggestions.
Tout d’abord, face aux critiques, nos institutions n’ont plus guère de droit à l’erreur. Très concrètement, madame la ministre, la fusion des départements et des régions en Guyane et en Martinique est une opération délicate. Pour que les deux nouvelles collectivités uniques prennent un bon départ, je souhaite la création d’une dotation spécifique d’amorçage.
Ensuite, sous l’angle économique, ce budget est la traduction d’une tendance à la concentration des allégements de charges sur les bas salaires.
Certes, à court terme, ce choix est le plus efficace pour créer des emplois, mais notre commission des affaires économiques n’a pas oublié le message de Louis Gallois sur la compétitivité à long terme. À force de favoriser les bas salaires, on risque d’entraver la montée en gamme. Dans nos outre-mer, il faut contribuer à rendre le secteur marchand aussi attractif que peut l’être la fonction publique aujourd’hui pour les jeunes diplômés.
Enfin, les entreprises ultramarines ont démontré leurs aptitudes à la performance. On peut d’ailleurs réussir sans imiter le modèle allemand : c’est le cas de l’Italie du Nord, qui dégage des excédents considérables avec des micro-entreprises travaillant en réseau.
Encore faut-il surmonter les difficultés de financement en général, et de préfinancement du CICE en particulier.
La visibilité est ici essentielle s’agissant d’incitations fiscales à l’investissement. Les outre-mer participent à la rigueur budgétaire, mais subissent aussi les effets pervers de l’instabilité législative, qui insinue le doute dans l’esprit des investisseurs et dans les plans de financement.
J’approuve donc la prorogation jusqu’à 2025 des dispositifs de défiscalisation dans les collectivités d’outre-mer et j’estime que rien n’interdit d’aller au-delà de 2020 dans les départements d’outre-mer.
Au-delà des normes et des financements, il y a aussi les procédures. Elles sont nécessaires, mais il faut tirer la sonnette d’alarme quand les opérateurs ont l’impression que les formalités prennent le pas sur leur cœur de métier. Le Gouvernement y est attentif, et il a raison : le temps, c’est de l’argent et on peut en gagner encore beaucoup dans nos outre-mer !
En conclusion, je vous indique que la commission des affaires économiques a émis, à l’unanimité, un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Outre-mer ».
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE, ainsi que sur certaines travées de l’UDI-UC et du groupe Les Républicains.
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, en remplacement de M. Didier Robert, rapporteur pour avis.
Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission des finances, mes chers collègues, permettez-moi d’excuser notre collègue Didier Robert, empêché, que je vais tenter de suppléer en résumant son excellent rapport.
Je souhaite tout d’abord vous exprimer ma grande fierté de réaliser cet exercice, car mes racines plongent en partie à Baie-Mahault, Marie-Galante et au Lamentin !
La commission des affaires sociales a constaté que la mission « Outre-mer » fait partie de celles que l’on peut considérer comme relativement préservées. S’élevant à 2, 06 milliards d’euros, ses crédits sont quasi stables.
La commission a cependant souligné la situation critique des outre-mer sur plusieurs sujets qui l’intéressent particulièrement.
D’abord, l’emploi. Les taux de chômage culminent à des niveaux insoutenables, en dépit de dispositifs intéressants, comme le SMA. On peut d’ailleurs relever que les outre-mer font figure de pionniers, puisque le SMA trouve désormais son application en métropole.
Ensuite, le logement. On constate notamment la permanence intolérable de l’habitat insalubre. Au-delà des programmes neufs, il faut donc « mettre le paquet » sur la réhabilitation.
Enfin, la santé. Nos récents débats sur la loi « santé » ont permis de mesurer les écarts avec l’Hexagone, écarts qui continuent de se creuser encore.
En réalité, nous savons tous que les crédits de la mission, quoique préservés, ne suffiront pas à couvrir les besoins, qui sont immenses.
Les principales observations et réserves formulées par notre rapporteur pour avis, Didier Robert, ont porté sur trois points.
En premier lieu, à propos du nouveau coup de rabot porté aux exonérations de cotisations sociales outre-mer, il a rappelé que les mécanismes de défiscalisation et d’exonération de charges, loin de constituer des cadeaux faits aux entreprises ultramarines, sont devenus absolument indispensables. Il a, dès lors, regretté que le Gouvernement reprenne d’une main ce qu’il donne de l’autre, avec la mise en place du CICE renforcé.
Il a ensuite tiré un premier bilan de la réforme de la continuité territoriale, sur laquelle le Sénat avait, l’année dernière, exprimé ses fortes inquiétudes. Il a constaté la perte définitive de près de 20 % des crédits alloués à cette politique en 2014, ainsi que l’effondrement du recours à l’aide « tout public » sur les huit premiers mois de l’année. Un sérieux coup a ainsi été porté à l’universalité de ce dispositif, pourtant supposé traduire l’égalité de tous les citoyens sur le territoire de la République.
La commission des affaires sociales a cependant salué la mise en place d’une aide à la continuité funéraire.
Ses observations ont enfin porté, au-delà de la présente mission, sur la mise en place d’un plan pour la santé pour les outre-mer. C’est une bonne nouvelle, et une mesure bienvenue sur laquelle la commission, madame la ministre, souhaiterait recueillir quelques précisions.
Au total, relevant l’effort du Gouvernement, la commission des affaires sociales a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission.
Le rapporteur pour avis a cependant regretté que ce budget n’ait qu’une ambition réduite, celle de continuer à garantir un niveau minimal de ressources aux outre-mer, sans proposer une véritable politique de nature à encourager l’investissement et l’emploi dans des territoires qui en ont pourtant tant besoin, cette politique qui est seule à même de nous permettre de parvenir à une véritable égalité des chances dans l’ensemble de la République.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il me revient de vous présenter, brièvement, l’avis de la commission des lois sur les crédits de la mission « Outre-mer ».
La commission s’est tout d’abord félicitée, malgré un léger repli en 2016, de la pérennité des crédits dévolus aux outre-mer, qui témoigne de l’effort budgétaire de l’État en faveur des territoires ultramarins. C’est d’autant plus notable dans le contexte actuel de redressement des comptes publics.
Compte tenu de ce constat, votre commission des lois a émis un avis favorable à l’adoption de ces crédits.
Malgré cette remarque générale positive, on ne peut que constater l’inégalité des territoires ultramarins en termes de dotations budgétaires.
À titre d’exemple, la dotation globale de fonctionnement ne représente que 136 euros par habitant pour Mayotte contre 446 euros pour La Réunion ou 410 euros pour la Martinique. Mayotte est donc budgétairement sous-dotée, alors qu’elle exerce également des compétences régionales, sans pour autant bénéficier de la DGF des régions.
Cette situation n’apparaît ni équitable ni juste, compte tenu du contexte budgétaire et financier difficile de ce département.
Madame la ministre, pourquoi ne pas envisager, pour le calcul de la DGF, une prise en compte a minima de la double compétence de Mayotte, comme ce sera la règle pour les futures collectivités uniques de Guyane et de Martinique ?
Au-delà de ce cadrage budgétaire, j’ai souhaité m’intéresser à la politique menée outre-mer en matière de sécurité et, plus particulièrement, à l’action des forces de l’ordre auxquelles l’actualité invite, une nouvelle fois, à rendre hommage.
Ayant engagé ces travaux avant les récents attentats, j’ai pu constater que les phénomènes de radicalisation n’épargnent pas les collectivités ultramarines.
À cet égard, loin des a priori, la radicalisation n’est pas forcément en lien avec la composante religieuse du territoire. J’en veux pour preuve que les comportements de radicalisation, notamment issus de l’islamisme radical, ne sont pas constatés principalement à Mayotte, un territoire où pourtant la population est majoritairement de confession musulmane, mais dans d’autres départements d’outre-mer. Cela doit nous inviter à aborder cette question avec le sens de la nuance.
Par ailleurs, en voulant souligner le décalage dans la population entre le niveau constaté de faits de criminalité et de délinquance et le sentiment d’insécurité exprimé, j’ai relevé – avec surprise – que l’enquête nationale de victimisation, qui permet de saisir la représentation des populations sur le niveau de sécurité, n’est pas réalisée sur l’ensemble des collectivités ultramarines, alors même que l’on peut constater dans ces territoires un profil de délinquance et de criminalité particulier. Pour l’instant, seule La Réunion est concernée, et depuis 2011. Madame la ministre, le Gouvernement songe-t-il à remédier à cette situation ?
J’ai toutefois constaté des efforts, pas toujours aboutis, pour prendre en compte des spécificités ultramarines en matière de sécurité. C’est le cas avec un début de coordination des différents services de sécurité, ainsi que le démontre l’opération « Harpie » en Guyane, ou encore avec le développement de stratégies partenariales avec les collectivités territoriales ou avec des États et des pouvoirs locaux étrangers. Je songe, dans ce dernier cas, à la lutte contre l’immigration en Guyane et à Mayotte, mais aussi à la sécurité à Saint-Martin.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE, ainsi que sur certaines travées de l’UDI-UC et du groupe Les Républicains.
Madame la ministre, mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Éliane Assassi.
Madame la présidente, madame la ministre, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les crédits de cette mission « Outre-mer » ont été « protégés », comme on dit. Soit !
Pour être complet, il convient aussi de regarder l’effort financier consacré par l’État aux territoires ultramarins : plus de 18 milliards d’euros, dont près de la moitié consacrés aux dépenses de personnel.
Les dépenses fiscales atteignent presque 4 milliards d’euros, les crédits de la mission s’élevant à 2, 1 milliards d’euros.
Ces chiffres, à mon sens, sont révélateurs du mode de développement imposé aux outre-mer depuis des années. Dans bien des territoires, élus, syndicats, socioprofessionnels, populations, s’accordent pour dire qu’il faut changer de logiciel et emprunter les voies d’un réel développement durable. Nous ne sommes pas sûrs que nous prenions ce chemin.
Cet effort de l’État va-t-il permettre aux outre-mer d’atteindre un indice de développement humain, ou IDH, comparable à celui de la France métropolitaine ?
L’Agence française de développement, dans un rapport de 2013, indique que, pour atteindre l’IDH moyen de France métropolitaine, il faudra 28 ans à la Polynésie française, 27 ans à la Guyane, 21 ans à La Réunion, 18 ans à la Nouvelle-Calédonie, 13 ans à la Martinique et 12 ans à la Guadeloupe. Je ne dispose pas de chiffres pour les autres outre-mer.
L’approche en termes d’emploi, ou plutôt de chômage, est tout aussi édifiante. Au début du mois de novembre, l’INSEE confirmait que, outre-mer, 24, 1 % des actifs sont au chômage, soit plus du double de la moyenne en France métropolitaine. La Réunion connaît le taux le plus important, avec 26, 8 %, puis viennent la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique. Dans les outre-mer, 52, 3 % des jeunes de moins de vingt-cinq ans sont privés d’emploi.
J’ai tendance à penser que la situation ne va pas s’améliorer, en premier lieu à cause de la progression démographique que connaissent, par exemple, La Réunion, Mayotte et la Guyane, en second lieu parce que les changements climatiques auront un impact : ainsi, à Wallis-et-Futuna, la population est confrontée à une incroyable érosion des sols et reste largement privée d’alimentation en eau potable.
L’élévation du niveau des mers et des océans va avoir des conséquences dramatiques dans les outre-mer : à La Réunion comme dans les autres départements et régions d’outre-mer, l’urbanisation s’étant faite sur le littoral, l’élévation du niveau de l’océan mettra en danger les populations, les habitations et toutes les infrastructures.
Il faut donc s’adapter aux changements climatiques. Les réponses techniques sont là, mais il reste la question du financement. Nous devons prendre conscience que ce qui est vrai pour l’ensemble des territoires côtiers en France métropolitaine l’est encore plus dans les outre-mer, « sentinelles du climat ».
Autre menace : la mondialisation de l’économie. Ainsi, la Nouvelle-Calédonie subit la baisse des cours mondiaux du nickel. L’État détenait 26 % du capital d’ERAMET, mais la société s’interroge quant au maintien de sa présence sur le « Caillou ». Les conséquences de cette disparition seraient considérables.
Aux Antilles et à La Réunion, la filière canne-sucre-rhum-bagasse est menacée, ce qui est de nature à entraîner la disparition d’emplois et une baisse de la balance commerciale, déjà fortement déséquilibrée, sans compter les glissements de terrain, mais je n’entrerai pas dans les détails.
Concernant le logement, les crédits de la LBU sont globalement maintenus, mais, à eux seuls, ils ne couvriront pas les besoins, qui sont immenses. Le recours à la défiscalisation est une réponse, mais sera-t-elle suffisante et pérenne pour permettre de produire 10 000 logements sociaux par an au moins pendant dix ans ?
J’aurais pu également évoquer la question de la vie chère outre-mer. Malgré les dispositifs, cet état de fait va perdurer encore et encore.
La question est donc de savoir si nous continuons à traiter les symptômes ou si nous voulons nous attaquer aux racines de ces maux.
Pourtant, chacun le sait ici, les outre-mer ont des atouts à faire valoir.
Tout d’abord, il y a leur positionnement géostratégique. Mais ces territoires en tirent-ils profit ? Les ports d’outre-mer sont au cœur des grandes routes maritimes mondiales et le secteur du transport maritime est sans doute le plus libéralisé. Dans le cadre de la réforme en profondeur des services portuaires qu’envisage l’Europe, que vont devenir les ports ultramarins ?
Le récent rapport du CESE n’apporte malheureusement aucune réponse satisfaisante et reste muet sur l’ouverture probable de la route du nord-est, qui permettra, dans moins d’une génération, de relier l’Europe à l’Orient via les eaux arctiques.
Les outre-mer ont un rôle stratégique à jouer en matière de gestion et d’exploitation des ressources naturelles, ainsi que de protection de l’environnement, affirme le Gouvernement. Seulement, à Saint-Pierre-et-Miquelon, une autorisation de prospection en hydrocarbures vient d’être signée. Il y a là une contradiction flagrante : on parle de transition écologique en prônant l’utilisation des énergies propres et, dans le même temps, on continue l’exploitation d’énergies fossiles et polluantes ! La question est aussi de savoir si et comment les populations de ces îles tireront avantage de ces forages.
Les territoires ultramarins sont reconnus pour leur action volontaire dans la transition énergétique. Il aurait été souhaitable que la France mette réellement en avant ces réalisations dans le cadre de la COP 21.
L’objectif de leur autonomie énergétique en 2030 reste plus que jamais pertinent, mais il convient de lever certaines incertitudes. Je pense notamment à la pérennisation de la contribution au service public de l’électricité, la CSPE, et au maintien des tarifs d’achat d’électricité spécifiques outre-mer. Bien évidemment, toute évolution, indispensable par ailleurs, ne devra se faire que progressivement, sous peine de voir le secteur s’effondrer.
La question de la pérennité des autres dispositifs mis en place, notamment dans le domaine fiscal, est également posée.
Cela m’amène à parler de la défiscalisation et du CICE, avec le glissement progressif de la première vers le second. Madame la ministre, vous connaissez notre position sur cette question. Nous sommes certes tout à fait conscients de l’importance de ces dispositifs pour les territoires ultramarins, mais nous regrettons qu’aucune étude ne fournisse d’indication sur le nombre d’emplois qu’ils ont permis de créer.
Pour conclure, j’ai plusieurs questions à vous poser.
Ce budget outre-mer est-il le dernier que nous votons de la sorte ? En clair, le prochain budget prendra-t-il en compte certaines pistes avancées en son temps par votre prédécesseur rue Oudinot dans sa mission sur l’égalité réelle ? En termes encore plus clairs, les crédits des outre-mer feront-ils l’objet d’une loi pluriannuelle ? De manière plus générale, où en est le dossier ? Le calendrier initialement prévu sera-t-il tenu ? L’idée de plans de développement par territoire est-elle toujours d’actualité ?
De nouvelles perspectives de développement pourraient s’ouvrir pour les outre-mer, et contribuer à modifier une réalité économique et sociale dramatique, mais elles supposent, bien évidemment, une volonté politique, qui, malheureusement, n’est pas au rendez-vous.
Pour l’heure, si nous reconnaissons que cette mission est protégée, il n’en demeure pas moins que ses crédits sont loin de répondre à bon nombre de problématiques en outre-mer. C’est la raison pour laquelle les élus du CRC s’abstiendront.
Madame la présidente, madame la ministre, chers collègues hexagonaux et ultramarins, j’interviens en lieu et place de ma collègue Aline Archimbaud, qui ne peut être présente en raison du retard pris dans nos débats. Je vous prie de bien vouloir l’en excuser.
Le budget de cette mission pour 2016 est globalement stable sur deux grands axes essentiels : aide à l’investissement et politiques de l’emploi.
Cependant, la situation sociale et économique de ces territoires est, comme les travaux en commission des affaires sociales ont permis de le rappeler, préoccupante à plusieurs titres.
D’abord, l’accès à la santé est très inégal, et les écarts se creusent entre l’outre-mer et l’Hexagone, ainsi que l’a souligné la Cour des comptes en 2014. À cet égard, madame la ministre, je m’interroge sur la date de sortie du décret limitant le taux de sucre dans les produits fabriqués en outre-mer, qui est attendu de longue date. Qu’en est-il ? Vous le savez, la prévalence du surpoids, de l’obésité et du diabète dans les populations ultramarines est plus élevée que dans l’Hexagone, notamment chez les femmes et les enfants.
Sur le plan du développement économique, ensuite, la situation est difficile. Les taux de chômage sont très élevés, celui des jeunes dépassant 50 % dans la plupart des territoires. Le coût de la vie est bien plus important qu’en métropole, en raison de l’insularité et de l’isolement de beaucoup de ces territoires, et les balances commerciales des départements d’outre-mer sont déséquilibrées. En 2011, le total des soldes de la balance commerciale de chaque département d’outre-mer représentait un déficit de plus de 10 milliards d’euros !
À cet égard, les mesures prises pour le développement économique et pour l’emploi en outre-mer sont les bienvenues, mais ne répondent que partiellement à ces défis très préoccupants.
Les écologistes souhaiteraient que l’aide à l’investissement soit beaucoup plus nettement, beaucoup plus fortement, et avec beaucoup plus de volontarisme, orientée sur deux secteurs.
Premièrement, il conviendrait d’encourager et de dynamiser l’ouverture des marchés locaux aux produits locaux, afin de leur offrir davantage de débouchés de proximité. Il s’agirait donc de promouvoir les filières courtes en matière d’agriculture, de pêche, d’aquaculture ou de valorisation de la forêt, par exemple. Une telle évolution serait source d’emplois durables dans de nombreuses filières comme les énergies renouvelables, l’écotourisme, les services aux personnes. Madame la ministre, le Gouvernement compte-t-il agir dans ce domaine, et comment ?
Deuxièmement, nous devrions tirer profit du fait que ces territoires bénéficient d’une biodiversité marine et terrestre souvent exceptionnelle, laquelle peut être une source durable d’emploi et d’activité économique, mais qui reste très fragile. Il faut donc la protéger.
Je souhaiterais à ce sujet dire un mot sur l’utilisation de produits chimiques, notamment dans les cultures.
Malgré le lancement du plan Écophyto, en 2008, les Français sont non seulement toujours dans le duo de tête des plus grands consommateurs de pesticides en Europe, mais la consommation a augmenté en moyenne de 5 % par an entre 2009 et 2013. Les territoires ultramarins ne sont pas épargnés, loin de là : les Antilles consomment, par exemple, trois fois plus de pesticides par unité de surface qu’en métropole !
Nous espérons que le plan Écophyto II, présenté à la fin du mois d’octobre 2015, et qui fixe des objectifs de réduction des pesticides de 50 % à dix ans, sera plus efficace.
L’utilisation massive de ces produits chimiques est source de problèmes sanitaires et environnementaux, à court, moyen et long terme. On connaît les effets catastrophiques, encore aujourd’hui, du chlordécone, pourtant interdit voilà plus de vingt ans. Non content d’être cancérigène, perturbateur endocrinien et neurotoxique, ce pesticide a de surcroît entraîné une pollution des sols et des eaux aux conséquences dramatiques sur l’agriculture, l’élevage, la chasse et la pêche locale, et ce pour plusieurs siècles si nous ne faisons rien.
Maladie de Parkinson, cancer de la prostate, fausses couches, malformations congénitales, leucémies, tumeurs cérébrales : la liste des troubles présumés liés aux pesticides est longue, et doit appeler les responsables politiques à la plus grande vigilance.
Il est urgent que l’État mette les moyens pour trouver des substituts à ces produits hautement nocifs à tous les niveaux, et investisse dans la recherche sur ces sujets. Madame la ministre, quelle action le Gouvernement envisage-t-il en la matière ?
Enfin, je souhaite parler plus spécifiquement de la Guyane. Ma collègue Aline Archimbaud a eu l’occasion de travailler ces derniers mois sur les problématiques socioéconomiques de ce département à l’occasion d’une mission parlementaire, dont les conclusions seront rendues publiques très prochainement.
La situation sur place est malheureusement très difficile pour beaucoup de Guyanais. Or le budget de ce département est en baisse ! Je constate qu’ont été prévues des mesures pour lutter contre l’orpaillage illégal ou pour développer l’accès aux équipements scolaires en faveur d’un nombre d’élèves en forte augmentation d’année en année. C’est une bonne chose, mais, madame la ministre, pourquoi ce budget est-il en baisse ? Il faut trouver un moyen de rattraper cet écart qui n’est pas logique, compte tenu des difficultés rencontrées par la Guyane.
En conclusion, je constate au nom de mon groupe que, si les mesures prises ne sont pas mauvaises, elles sont encore insuffisantes. J’espère que nous serons entendus sur les deux séries de propositions que nous faisons et, forts de cet espoir, nous voterons ce budget.
M. Serge Larcher, rapporteur pour avis, applaudit.
Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission des finances, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, sans doute considérerez-vous que je manque d’originalité en saluant la mission « Outre-mer ». Pour l’essentiel, elle conserve son périmètre, ainsi que son niveau de crédits. C’est à souligner en ces temps budgétaires contraints, comme nous le savons tous.
J’ai par ailleurs bien en tête que cette mission ne constitue qu’une partie de la dépense publique au bénéfice des outre-mer.
En outre, la dépense ne reste que l’un des instruments de la politique publique. Il s’agit sans doute d’une évidence, mais il est parfois bon de le rappeler.
Ainsi, la mission « outre-mer » ou, plus généralement, le budget pour 2016 a modifié les règles de financement des investissements.
Néanmoins, que ce soit pour tenir compte de l’entrée en vigueur du pacte de compétitivité et du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi ou pour intégrer les contraintes budgétaires, il n’en demeure pas moins que le cadre économique ultramarin évolue régulièrement, voire trop régulièrement ! La remarque pourrait valoir pour tous les gouvernements.
La demande de stabilité du cadre juridique, qu’il soit national ou, d’ailleurs, européen – je le dis en passant – qui est, à cet égard, récurrente de la part des acteurs économiques me paraît légitime.
En ma qualité de président de la délégation sénatoriale à l’outre-mer, j’ai eu également à connaître cette année de plusieurs questions relatives à l’action économique, allant du règlement général d’exemption par catégorie, le RGEC, à la problématique des accords européens sur les sucres spéciaux, plus récemment.
Concernant plus directement le budget pour 2016, il est notamment marqué par la préparation du passage de la défiscalisation à la généralisation du crédit d’impôt, dans l’optique de la maîtrise de la dépense.
Sur ce point, je note avec satisfaction une première prise en compte de la question du préfinancement par l’Assemblée nationale.
En effet, les économies ultramarines manquent cruellement de capital, ce qui fait du préfinancement, dans la perspective du passage au crédit d’impôt, un point nodal si l’on ne veut pas que cette mesure devienne contre-productive pour l’économie.
Je me permets donc d’insister sur la nécessité de consolider cet aspect en renforçant notamment l’intervention et le rôle de la Banque publique d’investissement. La BPI est un acteur public qui doit donc, en tant que tel, pleinement jouer son rôle au service des économies ultramarines.
Au-delà du budget, je ne peux m’empêcher de revenir sur l’initiative que vous avez prise, madame la ministre, avec la loi d’actualisation du droit pour insister sur la nécessité qu’elle se répète régulièrement.
La visibilité et la stabilité sont indispensables pour l’économie. Il en va de même pour l’ensemble du droit applicable en outre-mer.
Par ailleurs, l’article 43 du projet de loi de finances, qui, je le sais, ne relève pas de votre mission, a largement refondu le cadre de l’intervention publique dans les investissements, autrement dit le cadre de la défiscalisation.
J’ai déposé pour ma part quelques amendements.
Conscient que tous les sujets ne pourront trouver de réponse dans l’immédiat, je plaide pour que ceux qui n’auront pas été considérés comme prioritaires cette année puissent être rediscutés l’année prochaine.
Ne voulant pas préjuger du sort qui sera réservé aux amendements déposés sur les articles non rattachés, je ne me risque pas à énumérer ces questions, mais je vous serais reconnaissant, madame la ministre, de m’indiquer si cette proposition vous agrée.
J’en terminerai par quelques mots qui concernent plus particulièrement la collectivité de Saint-Barthélemy.
Plusieurs dispositions qui la concernent ont été adoptées cette année, y compris dans le cadre du projet de loi de finances. Son article 11 bis entérine en effet l’accord sur la dotation globale de compensation des charges, annoncé par le Président de la République le 8 mai dernier.
Il vient s’ajouter à l’examen de la proposition de loi organique portant diverses dispositions relatives à la collectivité de Saint-Barthélemy, à la création d’une caisse locale de prévoyance sociale ou encore à l’extension du régime d’exonérations de cotisation pour les secteurs prioritaires ou exposés à Saint-Barthélemy.
Madame la ministre, permettez que je salue votre implication sans laquelle ces projets n’auraient pu aboutir, de même que votre disponibilité. Il m’est agréable de vous en remercier devant la Haute Assemblée !
Mes chers collègues, vous aurez compris que je voterai les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, de l'UDI-UC et du RDSE, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, j’ai l’honneur de m’exprimer, au nom du groupe UDI-UC, sur la mission « outre-mer » du projet de loi de finances pour 2016.
Pour résumer les données budgétaires en faveur de l’outre-mer, il est constaté une diminution des autorisations d’engagement de 13, 9 millions d’euros, alors que les crédits de paiement augmentent de plus de 1, 1 million d’euros.
On note donc une stabilité des crédits pour l’outre-mer, et ce malgré un contexte budgétaire national difficile.
Néanmoins, il convient de rappeler que la situation économique et sociale de l’ensemble des collectivités d’outre-mer est de plus en plus fragile, au même titre que la situation métropolitaine.
M. Laurey a mis en exergue le fait que le niveau de vie de nos concitoyens ultramarins reste structurellement bien plus faible qu’en métropole : le taux de chômage des outre-mer y est plus élevé, soit 20 % contre 10 %. Chez les 15-24 ans, le taux est supérieur à 50 % dans la plupart des départements d’outre-mer. C’est énorme ! De même, le nombre de bénéficiaires du RSA pour 1 000 habitants de 25 à 64 ans est plus de trois fois supérieur dans les outre-mer.
Cet écart de développement demeure une injustice, que nous devrons corriger au nom de la République française, laquelle est une et indivisible !
En ma qualité de membre de la commission des lois, je ne peux que rappeler les termes de l’article 72-3 de la Constitution : « La République reconnaît, au sein du peuple français, les populations d’outre-mer, dans un idéal commun de liberté, d’égalité et de fraternité ».
Nous devons malgré tout remercier le Gouvernement du maintien d’un effort substantiel à l’égard de l’outre-mer dans son ensemble. Les crédits restent stables, alors que les montants alloués aux dépenses de fonctionnement du ministère de l’outre-mer enregistrent une diminution de 5 % par rapport à l’exercice 2015. L’effort est réel, il faut donc le reconnaître.
Il convient aussi de relever que les crédits du programme 123, « Conditions de vie outre-mer», s’élèvent à 702 millions d’euros, ce qui constitue une augmentation de près de 20 millions d’euros par rapport à 2015, soit une hausse de 18, 4 %. Ces crédits sont principalement destinés à l’accès au logement, l’aménagement des territoires et la mise en œuvre du principe de continuité territoriale.
La principale augmentation de ce volet concerne l’action n° 4, Sanitaire, social, culture, jeunesse et sport, dont les crédits progressent de 98 %, en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, et qui résulte de la participation de l’État au financement du régime de solidarité de la Polynésie française, et ce conformément à la convention signée le 16 avril dernier avec M. le Premier ministre, Manuel Valls. Nous le remercions encore aujourd’hui de vive voix.
Nous avons également enregistré l’objectif de formation des jeunes ultra-marins, soit 6 000 formés pour l’exercice 2016, et ce par le biais du dispositif original, et très satisfaisant en termes de résultats, que représente le service militaire adapté, le SMA.
Madame le ministre, la formation des jeunes générations est capitale, et nous souhaitons, à ce titre, développer de nouvelles structures en concertation avec le ministère de la défense.
C’est un vœu qui, nous l’espérons, sera entendu madame la ministre, et relayé auprès de votre collègue chargé de la défense.
Toutefois, vu l’ensemble des données économiques et sociales actuelles, je crains que cet effort ne soit pas suffisant pour faire face aux défis qui nous attendent à moyen et long terme.
Nous espérons donc beaucoup des travaux de la COP 21, mais nous souhaitons tous un soutien plus important de l’État dès maintenant, pour anticiper et prévoir.
L’ensemble des territoires d’outre-mer souffrent d’une carence en matière d’investissement, et cela devrait être encore plus vrai demain, avec les données climatiques qui pourraient conduire à la disparition de certaines îles.
Pour répondre aux besoins, les investissements productifs seront de plus en plus nécessaires, d’autant que le réchauffement climatique pourrait entraîner d’importants mouvements de populations et bouleverser ainsi nos équilibres économiques, actuellement si fragiles.
En ma qualité de représentante de la Polynésie française, je me fais ici le relais de nombreux élus locaux qui s’interrogent et s’inquiètent de cette absence de perspective stratégique de long terme.
Par ailleurs, et compte tenu de l’actualité, l’outre-mer apparaît comme le parent pauvre de la lutte contre le terrorisme. Aucune des mesures nouvelles annoncées par le Président de la République lors du récent congrès, à Versailles, ne nous semble prendre en compte les spécificités insulaires et ultramarines.
Les amendements du Gouvernement déposés sur les missions « Défense », « Sécurités » et « Immigration » ne prennent pas l’outre-mer en compte. Au demeurant, aucune mesure de risques de radicalisation dans nos territoires n’a été constatée, alors que les mêmes craintes existent d’un côté de la mer comme de l’autre.
Enfin, madame la ministre, nous ne pouvons pas accepter que l’outre-mer devienne une variable d’ajustement financière, à l’encontre du lien historique qui nous lie à la métropole.
Pour évoquer directement ma collectivité d’origine, la Polynésie française, je tiens à rappeler que nous vivons la baisse de la dotation globale d’autonomie comme un reniement.
Nous avons fait beaucoup de sacrifices pour aider la France à consolider sa souveraineté.
Cette DGA, allouée en compensation des pertes économiques liées à l’arrêt des essais nucléaires et actée par le Président de la République Jacques Chirac, devait être pérenne. Or, depuis trois ans, cette dotation diminue au détriment du développement économique de la Polynésie.
Ainsi, je souhaite d’ores et déjà apporter mon soutien à la démarche de clarification budgétaire entreprise par notre collègue Nuihau Laurey, qui a déposé un amendement permettant de conserver les crédits actuels de la dotation globale d’autonomie en Polynésie.
Cette situation n’est confortable pour personne, de telle sorte que nous souhaiterions, madame la ministre, avoir davantage de visibilité et de garantie pour l’avenir de notre pays.
Au regard de l’importance dans le débat que cet amendement revêt, les sénateurs du groupe UDI-UC soutiendront l’adoption de cette mission « Outre-mer » à la condition que nos propositions soient entendues.
En dernier lieu, et au nom de tous les élus communaux de la Polynésie française, je tiens à vous remercier, madame la ministre, d’avoir maintenu les dotations en fonctionnement pour l’ensemble de nos communes polynésiennes.
Vifs applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et sur c ertaines travées du groupe Les R épublicains .
Madame la ministre, vous avez su, dans un contexte général très difficile, maintenir une certaine stabilité au budget de la mission « Outre-mer ».
En tant que membre du conseil du service militaire adapté, je salue le maintien de l’effort sur un dispositif qui fonctionne bien et contribue à offrir des perspectives à notre jeunesse, très souvent exclue de l’emploi. Je salue aussi votre souci d’encourager les investissements structurants par le biais de la commande publique, que nous savons essentielle pour l’économie de nos territoires.
En ce qui concerne le logement, où les besoins restent considérables, vous vous êtes battue pour sauvegarder les efforts en autorisations d’engagement, ce qui préserve, pour le moment, la ligne budgétaire unique. La baisse de 9 millions d’euros des crédits de paiement laisse cependant craindre un désengagement de l’État qui, je l’espère, sera compensé par le plan quinquennal que vous avez engagé.
Quant aux exonérations sociales, vous avez décidé de les centrer sur les bas salaires de façon générale et de les renforcer dans les secteurs prioritaires définis par la loi pour le développement économique des outre-mer, la LODEOM, certes, au détriment des salaires élevés d’autres secteurs, qui bénéficieront toutefois du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, un CICE dont on ignore encore l’impact !
Il faut faire des choix, madame la ministre, et les outre-mer prennent toute leur part à l’impératif de maîtrise des dépenses publiques.
Vous avez eu le souci de préserver le plus possible les outils indispensables au soutien de l’activité outre-mer, où 24 % des actifs – soit bien plus du double de la moyenne hexagonale – sont au chômage et où la confiance des entreprises nécessite un dispositif fiscal pour le moins stable.
Je voterai donc les crédits de cette mission « Outre-mer ».
Cependant, madame la ministre, je reste inquiet pour l’un des secteurs clés de l’économie antillaise : le tourisme.
En Guadeloupe, la haute saison a commencé et beaucoup de nos plages ne sont pas accessibles à la baignade. Certaines sont même interdites au public.
Les algues en décomposition, l’odeur et les gaz qu’elles dégagent font fuir les touristes des plages, des marinas et des commerces du bord de l’eau. L’impact sur notre économie touristique pourra être considérable.
Les Antillais, eux, souffrent quotidiennement de ces nuisances. On ne sait pas quelles sont les conséquences à long terme sur leur santé. Leurs biens, notamment leurs matériels électroniques et informatiques, sont dégradés. Je souhaiterais savoir, à ce propos, madame la ministre, où en sont les discussions avec les compagnies d’assurances.
Vous vous êtes déplacée récemment pour constater les dégâts. Les moyens mis par l’État pour cofinancer des « brigades vertes » et favoriser une ingénierie adaptée sont-ils à la hauteur de la catastrophe ? Les communes ont besoin d’une aide importante, car elles n’ont absolument pas les capacités financières pour faire face à un phénomène d’une telle ampleur – je rappelle qu’il concerne tout l’arc des Caraïbes, et même les États-Unis et le Mexique.
En mai, Mme Ségolène Royal, ministre de l’environnement, avait annoncé un plan d’action. À la fin du mois de novembre, vous nous avez confirmé la mise en place d’une mission interministérielle composée d’experts de l’Inspection générale de l’administration, du ministère de l’écologie et du ministère de l’agriculture. Il était temps, les premières alertes remontent à 2011 !
Est-ce adapté à une situation devenue insupportable ? Certes, les solutions ne sont pas faciles, mais il faut à présent agir vite. Il faut aussi comprendre l’origine du phénomène. La coopération avec les États concernés est indispensable. Elle a été annoncée, mais est-elle concrètement en place ?
Nous sommes en pleine COP 21. Madame la ministre, le Gouvernement nous dit souvent que nos territoires fragiles sont un avant-poste pour l’observation et l’innovation dans la lutte contre les changements climatiques et pour la préservation de l’environnement. Le combat contre l’invasion exponentielle des sargasses y participe. Or il ne peut être gagné que par une mobilisation à grande échelle !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, cela fait de très nombreuses années que je suis avec grand intérêt la mission « Outre-mer ». Je dois dire que ma déception est constante eu égard aux attentes qui sont les miennes. Mon agacement n’est pas dirigé contre vous, madame la ministre : j’en veux au système, qui ne prend pas en compte la réalité des outre-mer.
Nous votons régulièrement les crédits de l’outre-mer, mais nous le faisons uniquement parce qu’ils permettent de maintenir à flot nos territoires. Néanmoins, progressivement, leur situation régresse et s’aggrave. Une lecture attentive des observations rédigées par les rapporteurs spéciaux, nos collègues Nuihau Laurey et Georges Patient, fait apparaître leur légitime inquiétude.
Naturellement, madame la ministre, vous expliquez la baisse de 3, 1 % des autorisations d’engagement de cette mission par la nécessité de contribuer à l’effort national.
On peut également constater que le programme « Emploi outre-mer », qui mobilise les deux tiers des crédits, voit ses autorisations d’engagement baisser de 2, 2 %. Est-ce que la situation de l’emploi est satisfaisante outre-mer ? La réponse est clairement négative. Le taux de chômage, notamment des jeunes, y est dramatique ; il va nécessairement empirer. Nos amis d’outre-mer nous parlent régulièrement de ce problème du chômage des jeunes.
Je rappelle à mon tour, après plusieurs collègues qui sont intervenus ce matin dans le débat consacré à la jeunesse, que le Président de la République a fait de celle-ci la priorité de son quinquennat. Au travers de ce que nous constatons dans nos outre-mer, nous voyons clairement que cette priorité n’est pas à l’œuvre.
Pouvez-vous, madame la ministre, nous donner des éléments sur l’évolution de la situation de l’emploi des jeunes ? Pouvez-vous nous expliquer comment sont inclus dans la courbe nationale du chômage les chiffres de l’outre-mer ? J’ai le sentiment que, là encore, on isole les outre-mer. Il y a 260 000 chômeurs de catégorie A qui sont très souvent oubliés dans les statistiques nationales…
Après l’emploi, passons au logement. Les engagements dans ce domaine ne sont jamais tenus ; les objectifs ambitieux annoncés ne sont jamais atteints. La dette vis-à-vis des bailleurs sociaux ne sera naturellement pas apurée, en raison de la baisse de la ligne budgétaire unique.
Dans un autre domaine, l’objectif fixé par le Président de la République de doter le Fonds exceptionnel d’investissement ne pourra être atteint si l’on en juge par les chiffres annoncés. C’est, là aussi, une déception, et c’est encore un engagement qui ne pourra être tenu.
Autre sujet majeur, la défiscalisation, qui représente une dépense fiscale de 3, 8 milliards d’euros. Ce levier essentiel pour l’investissement privé outre-mer est à nouveau mis à mal. Le Gouvernement va encore introduire de l’insécurité en modifiant le terme des différents dispositifs. Je sais bien que quelques ouvertures ont été faites à l’Assemblée nationale. Il faut impérativement donner un horizon clair aux investisseurs et reporter à 2025 les évolutions, même si une révision des règles européennes doit avoir lieu en 2020.
Il faut surtout tenir compte des délais réels d’étude et de réalisation des projets. Chacun sait, sauf, peut-être, l’administration centrale, que, si le délai est court – ici, le terme est fixé à 2017 –, l’investisseur ne prend pas le risque. En effet, l’investissement qu’il serait prêt à accompagner ne peut être ni étudié ni réalisé en raison du long cheminement des dossiers et de l’accumulation des délais administratifs. La prorogation d’une année seulement, telle que vous la proposez, est donc incompatible avec l’utilisation du dispositif pour la majorité des projets.
J’ai déjà évoqué ici l’aspect ubuesque du fonctionnement des agréments et de leur bureau parisien. Cela mériterait une mission de contrôle de la commission des finances. Il faut que les agréments puissent se faire localement, de manière à bien « coller » aux réalités. Savez-vous que les investissements productifs ont baissé de 60 % entre 2011 et 2015, en conséquence des incertitudes permanentes sur la pérennité des règlements ?
Permettez-moi, madame la ministre, de changer de thème et de dire ici quelques mots de l’accord conclu entre l’Union européenne et le Vietnam sur le sucre. Vous avez dû, comme Stéphane Le Foll et Matthias Fekl, recevoir un courrier à ce sujet de Michel Magras, président de notre délégation à l’outre-mer.
Comme beaucoup de mes collègues ultramarins, je suis en colère. Nous sommes à l’aube d’accepter de sacrifier tout un pan d’une filière qui permet à nos économies de La Réunion et des Antilles de maintenir la tête hors de l’eau. Si les sucres spéciaux sont soumis à la concurrence du fait d’un mauvais accord, nous participerons à la destruction de trois économies insulaires. Nous attendons de connaître votre action sur ce dossier et vos attentes à l’échelon européen.
Une des raisons pour lesquelles nos outre-mer souffrent tient à la complexité normative qu’ils doivent subir au quotidien. Comment voulez-vous que nos territoires, qui sont en compétition avec ceux de leur zone géographique, à plusieurs milliers de kilomètres de l’Europe, puissent être compétitifs ? Les normes européennes qui leur sont appliquées sont autant de boulets et n’ont bien souvent aucun sens. Elles freinent les programmes de construction. Le prix du logement social est trop élevé. Les contraintes foncières et topographiques liées à l’insularité entraînent un surcoût dans les investissements en termes de voirie, de réseau et d’aménagement.
Madame la ministre, faites comprendre à nos administrations que les normes nationales doivent être adaptées aux territoires. Le traitement des eaux usées ne peut être soumis aux mêmes normes en Polynésie qu’en métropole. Nous allons mener un travail de fond sur ce sujet des normes, en espérant que nous serons entendus.
Madame la ministre, nos territoires ultramarins sont très divers.
M. Éric Doligé. Pour ne pas pénaliser encore plus nos outre-mer, malgré mon mécontentement naturel, non pas contre vous, madame la ministre, mais contre un système qui me déplaît fortement, et en dépit donc de cette situation d’insatisfaction totale, je voterai tout de même les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du RDSE, ainsi que sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, dans ce contexte budgétaire contraint, on ne peut qu’apprécier que les crédits de la mission outre-mer soient préservés.
Ce budget présente plusieurs avancées notables que je tiens à saluer.
D’abord, ce projet de budget stabilise les crédits de paiement consacrés au service militaire adapté, qui permet de former 600 jeunes chaque année en Guyane.
Ensuite, les dispositifs de soutien à l’investissement sont maintenus : le contrat de plan État-région, le Fonds exceptionnel d’investissement, mais également les dotations qui financent les constructions scolaires en Guyane, à Mayotte et en Polynésie.
Enfin, concernant l’Agence de l'outre-mer pour la mobilité, LADOM, l’augmentation des moyens pour la formation en mobilité est une bonne chose. Nous devons toutefois veiller à accompagner ces jeunes, qui rencontrent souvent de grandes difficultés dans leur installation.
Vous vous en doutez, des réserves existent néanmoins.
Tout d’abord, à la différence des crédits de paiement, les autorisations d’engagement diminuent, de 13 millions d’euros. Je crains que cela ne nuise, dans un avenir proche, au budget de la mission.
Nous le savons tous, les écarts se creusent chaque jour un peu plus entre les outre-mer et la France hexagonale. Le PIB par habitant est nettement inférieur outre-mer, quel que soit le territoire ; le taux de chômage y atteint plus de 50 % chez les jeunes ; le taux de pauvreté y est trois fois plus élevé.
En Guyane, la démographie galopante nous pose un défi de taille : développer un territoire dont le retard en infrastructures est encore considérable.
Alors que, à Paris, nous votons des lois pour la transition énergétique et que nous nous engageons à réduire la fracture numérique, bon nombre de Guyanais vivent quant à eux en plein cœur de zones blanches ou n’ont tout simplement pas accès à l’électricité, ni même à l’eau potable…
Face à ces besoins patents, je ne peux que regretter la légère diminution des crédits alloués à la Guyane : cette baisse est de 1, 4 % sur les autorisations d’engagement et de 1, 8 % sur les crédits de paiement.
Je concentrerai maintenant mon propos sur deux points directement en lien avec cette mission.
En premier lieu, j’évoquerai la nouvelle réforme des exonérations de charges.
En Guyane, les indicateurs ne sont pas bons et l’heure est au pessimisme. Tout au long de cette année, syndicats et chefs d’entreprise sont descendus dans la rue pour exprimer leur mécontentement. Nous, élus de Guyane, ne pouvons rester insensibles à la détresse de ceux qui sont en première ligne du développement économique.
Or, dans un contexte de chômage élevé, cette réforme affaiblit nos entreprises. Si nous entendons bien que cette mesure devrait être compensée par la montée en puissance des dispositifs du pacte de stabilité, les entreprises réclament, d’une part, une évaluation approfondie des politiques publiques et, d’autre part, de la stabilité dans les mesures.
Pouvez-vous, madame la ministre, les rassurer sur la pertinence de cette nouvelle réforme ainsi que sur ce besoin de stabilité qu’elles réclament ?
J’en viens, en second lieu, à la question du logement.
L’augmentation de la ligne budgétaire unique pour la Guyane et l’objectif de 10 000 logements construits ou réhabilités par an sont louables, mais force est de constater que nous sommes encore loin du compte.
Le plus important est aujourd’hui de donner à la LBU les moyens de ses ambitions. On dénombre plus de 11 000 logements insalubres et, chaque année, près de 1 000 logements spontanés voient le jour.
Ce phénomène représente d’importantes dépenses pour la collectivité lorsqu’il faut monter des opérations de résorption de l’habitat insalubre, ou RHI, et apporter les services et les réseaux dans des secteurs isolés.
L’étude d’opportunité et de faisabilité d’une opération d'intérêt national, ou OIN, menée en 2013 le mettait clairement en exergue : la résorption de l’habitat insalubre prend chaque année plus d’importance dans la ligne budgétaire unique et se révèle de plus en plus coûteuse. En effet, sur des terrains déjà occupés, un logement traité via une RHI a un coût global de viabilisation d’environ 32 000 euros, alors qu’une opération d’aménagement coûte 23 000 euros en moyenne.
Il y a urgence à basculer d’une logique peu durable d’interventions sporadiques vers une logique où l’État accompagne le territoire dans ses choix.
Au regard de ces enjeux, le plan logement outre-mer 2015-2020 apparaît bienvenu. Néanmoins, professionnels et élus attendent aujourd’hui davantage et misent beaucoup sur l’OIN annoncée en juin dernier.
Madame la ministre, pouvez-vous justement nous confirmer votre volonté que cette opération d'intérêt national intervienne dans les meilleurs délais et qu’elle soit à la hauteur de nos attentes ?
Madame la ministre, mon signal d’alerte se veut ici constructif. Au-delà des problèmes que je soulève, c’est pour un changement de méthode que je plaide. Reprenons à notre compte le dicton : mieux vaut prévenir que guérir ! Et, afin d’éviter que les conflits ne finissent systématiquement dans la rue, travaillons ensemble à des mesures fortes et durables qui permettent de redonner confiance à la population comme aux entreprises !
En dépit de ces remarques, le présent projet de budget de la mission « Outre-mer » pour 2016 est globalement satisfaisant. Je suis donc favorable à son adoption.
Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous nous exprimons aujourd’hui sur les crédits de la mission « Outre-mer » du projet de loi de finances pour 2016. À travers ce budget, madame la ministre, le Gouvernement affirme avec la même vigueur dont il fait preuve depuis 2012 son engagement aux côtés des territoires ultramarins, qui se trouvent tous dans une situation d’urgence tant économique que sociale.
Cet attachement, s’il peut être loué, reste indispensable au vu du réel retard économique de nos territoires par rapport à la France métropolitaine.
Aussi, dans un contexte de finances publiques très contraintes, je salue l’une des quelques missions du présent projet de loi de finances dont les crédits sont en très légère augmentation, de 0, 3 % par rapport à l’année dernière. Les crédits de paiement s’élèvent à plus de 2 milliards d’euros, répartis entre deux programmes : le programme 123, « Conditions de vie outre-mer » et le programme 138, « Emploi outre-mer ». C’est tout naturellement à ce dernier programme que je consacrerai la majeure partie de mon intervention.
Madame la ministre, vous en êtes consciente, l’emploi est un défi récurrent dans les outre-mer, le taux de chômage y étant presque deux fois supérieur à celui de la métropole. Les causes en sont multiples : isolement des territoires, manque de formation et autres handicaps structurels.
La jeunesse est la principale victime de ce retard économique. Le taux de chômage des 15-24 ans atteint ainsi des records : plus d’un jeune sur deux est sans emploi en Guadeloupe et à Saint-Martin, ce qui constitue le taux le plus élevé des territoires ultra-marins.
À ce titre, cette mission présente tout de même des éléments de satisfaction, notamment, les crédits alloués aux contrats de développement, à la continuité territoriale, à l’insertion dans l’emploi et à la formation des jeunes via la LADOM.
De fait, l’objectif « SMA 6 000 », visant à porter à 6 000 le nombre de volontaires bénéficiaires du service militaire adapté à l’horizon 2017, est significatif. Cette mesure en faveur de la formation professionnelle est déterminante ; elle doit être mise en œuvre le plus rapidement possible, dans un souci constant d’adéquation avec les spécificités des territoires ultramarins.
Par ailleurs, il faut saluer l’effort gouvernemental en faveur d’une évolution du dispositif des aides fiscales à l’investissement au-delà de leur terme actuel, effort qui s’est notamment concrétisé par l’amendement que le Gouvernement a déposé à l’Assemblée nationale sur l’article 43.
Nous prenons acte, madame la ministre, d’un tel engagement, indispensable au soutien du secteur productif ultramarin. Précisons toutefois qu’il doit être nécessairement maintenu sur le long terme.
En effet, si cet effort constitue un message fort en direction des investisseurs, seul un engagement durable de la part de l’exécutif permettra l’aboutissement de projets structurants, générateurs d’emplois.
Les dispositifs de défiscalisation et d’exonérations de charges ne peuvent faire davantage l’objet de nouvelles annonces, au risque de décourager les investisseurs et les entreprises quant à la stabilité du climat économique sur nos territoires. La lisibilité est ici le maître mot. Or il apparaît aujourd’hui que certains dispositifs existants gagneraient à être recentrés plus encore sur les secteurs productifs locaux.
Madame la ministre, votre engagement en faveur d’un « CICE renforcé » va bien entendu dans ce sens. Néanmoins, en tant que représentant d’une collectivité fiscalement autonome, je me dois de vous alerter sur la distorsion concurrentielle entre les entreprises basées à Saint-Martin et celles qui bénéficient du dispositif CICE tout en ayant accès au marché local. Notre capacité budgétaire ne nous permettant pas l’instauration de mécanismes équivalents, seul l’État peut prévoir des dispositifs de compensation afin de contrer le développement de situations discriminantes.
Le tourisme étant le secteur clé de l’économie saint-martinoise, j’ai déposé un amendement visant à élargir la politique de défiscalisation à l’ensemble des investissements réalisés à Saint-Martin dans le secteur du tourisme et de l’hôtellerie, à un taux de 45, 9 %, majoré à 53, 55 %, sur le modèle de ce qui se pratique à Mayotte ou à Saint-Pierre-et-Miquelon. Cela permettrait de rétablir un certain équilibre de compétitivité entre nos entreprises locales et celles de notre environnement régional.
Madame la ministre, je partage votre position, Saint-Martin doit pleinement assumer les compétences attribuées par la loi organique, et nous nous y attelons. Néanmoins, il est également légitime de notre part d’attendre que les moyens correspondant à la mise en œuvre de notre autonomie fiscale soient justement alloués.
En effet, le rétablissement durable de notre situation financière ne peut se limiter à une seule politique volontariste de hausses d’impôts et de taxes ; elle implique également une participation accrue de l’administration fiscale de l’État à l’amélioration du niveau des recettes fiscales de la collectivité. Ainsi, le cadastre date du début des années soixante-dix et ne correspond plus à aucune réalité.
De telles mesures figurent parmi les engagements du Président de la République formulés à l’occasion de son déplacement dans les collectivités d’outre-mer. Parlementaires ultramarins, nous nous devons de veiller à la bonne exécution des annonces présidentielles.
Concernant Saint-Martin, le Président de la République s’est engagé sur divers points de fiscalité, affirmant notamment qu’il était normal de faire évaluer la fiscalité en la matière.
Par ailleurs, de nombreux dossiers restent en suspens.
Depuis la promulgation du statut actuel, en 2007, la compensation des charges fixée par le législateur n’a toujours pas abouti.
Cependant, madame la ministre, malgré notre inquiétude s’agissant de ces dossiers, dans la conjoncture, les crédits de la mission « Outre-mer » semblent à la hauteur des enjeux propres à nos territoires. Aussi, j’approuverai, et avec moi le groupe du RDSE, les crédits de la mission « Outre-mer ».
Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste et républicain.
Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission des finances, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, malgré le contexte de forte contrainte budgétaire que connaît notre pays, le Gouvernement a montré une nouvelle fois, s’il en était besoin, son attachement à nos territoires ultramarins et sa pleine conscience des difficultés qu’ils rencontrent au quotidien, en maintenant un budget quasi stable pour la mission « Outre-mer », de l’ordre de 2, 093 milliards d'euros, soit une hausse de 0, 7 %. C’est pourquoi le parlementaire ultramarin que je suis tient, au nom de nos territoires, à remercier la Nation de cet effort.
Cette enveloppe permettra de continuer à financer le développement économique des collectivités ultramarines à travers plusieurs dispositions, à commencer par les exonérations de charges et les mesures de défiscalisation.
Est-il encore utile de souligner qu’exonérations de charges et mesures de défiscalisation sont des dispositifs indispensables à l’investissement dans les économies d’outre-mer ? Est-il encore utile de souligner qu’encourager l’investissement, c’est encourager la création de richesses, donc la création d’emplois, et qu’en ce sens la défiscalisation constitue un instrument d’aménagement du territoire ?
C’est pourquoi je soutiens indéfectiblement l’initiative du Gouvernement, qui a décidé de maintenir la défiscalisation jusqu’en 2020.
Je note également la décision du Gouvernement de soutenir une politique volontariste en matière de logement, à travers le maintien des crédits de la ligne budgétaire unique à hauteur de 247 millions d’euros en autorisations d’engagement au titre de 2016. Cela montre que les moyens consacrés au logement social sur nos territoires sont importants.
Cependant, afin de pouvoir construire plus de logements sociaux, ne serait-il pas envisageable de faire évoluer la législation en permettant une extension de la délégation du droit de préemption en faveur des organismes privés d’habitations à loyer modéré pour que la société délégataire puisse acheter le bien en lieu et place de la collectivité ?
Cette modification législative permettrait d’améliorer l’exercice du droit de préemption par les communes – petites et moyennes –, en évitant la mobilisation de fonds communaux dans un contexte financier difficile, et favoriserait la promotion de la création de logements. Pour avoir rédigé une proposition de loi dans ce sens, j’aimerais connaître, madame la ministre, votre position sur ce point.
Comme l’a par ailleurs souligné mon collègue Serge Letchimy à l'Assemblée nationale, il faudrait également étendre aux logements privés le dispositif de réhabilitation fonctionnant pour les logements sociaux.
Concernant la politique de continuité territoriale, les crédits sont en augmentation, puisqu’ils passent de 41, 1 millions d’euros à 43, 2 millions d’euros. Je profite tout particulièrement de cette occasion – je suis sûr que la population ultramarine dans son ensemble s’associe à mon propos – pour vous remercier, madame la ministre : merci d’avoir ôté ce fardeau aux familles déjà meurtries par la disparition d’un être cher en élargissant le champ de la politique de continuité territoriale aux rapatriements des dépouilles de nos concitoyens ultramarins décédés dans l’Hexagone. Cette initiative permettra d’éviter que des difficultés financières ne viennent s’ajouter à la douleur des familles.
Je terminerai en évoquant les dispositions concernant les crédits affectés à la formation professionnelle et à l’apprentissage.
Si les crédits du programme 138 « Emploi outre-mer » connaissent logiquement une diminution, de 26 millions d'euros, par rapport à 2015 – conséquence de la nouvelle réforme prévue par l’article 9 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 –, l’action Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle bénéficie, en revanche, d’une légère augmentation en crédits de paiement, de l’ordre de 3, 67 %. Pour rappel, cette action finance une partie des crédits affectés à LADOM, notamment le « passeport-mobilité formation professionnelle ».
Néanmoins, je souligne, d’une part, que les territoires ultramarins se caractérisent par une plus forte proportion de personnes de plus de 15 ans ne possédant aucun diplôme – entre 35 % et 50 % selon les territoires, contre 17 % dans l’Hexagone –, d’autre part, que le tissu économique de la plupart des territoires ultramarins comprend de très petites entreprises. Ces dernières ne sont pas nécessairement outillées pour accueillir en alternance ou embaucher un jeune, d’autant que leur perception des jeunes, notamment des moins qualifiés, n’est pas toujours positive.
Il faudrait donc à la fois travailler sur l’image des jeunes auprès de ces TPE et vice-versa, sensibiliser les jeunes à une démarche d’embauche citoyenne et les accompagner dans les différentes phases : définition de leurs besoins en termes de qualification, préparation des dossiers pour recevoir les aides éventuelles tout en évitant les effets d’aubaine, suivi dans l’entreprise...
Dans ce cadre-là, ne pourrait-on pas subordonner certaines exonérations de charges sociales à l’intégration d’apprentis ou à des contrats en alternance aussi bien pour les TPE que les PME ?
Madame la ministre, je souhaite savoir quelles mesures sont envisagées par le Gouvernement pour inciter les entreprises à accueillir beaucoup plus, et plus facilement.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission des finances, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, à l’heure où la Nation est en deuil, il peut paraître bien dérisoire de discuter de dotations et de lignes budgétaires. Je voudrais exprimer ici la part prise par Wallis-et-Futuna à la peine des familles de ceux qui ont été tués et à la douleur des blessés ; je voudrais exprimer, une fois encore, notre fierté d’être Français, notre attachement à la patrie, exprimer enfin notre reconnaissance à la Nation pour la solidarité nationale.
En ces temps d’austérité budgétaire, les territoires ultramarins n’ont pas été sacrifiés et cela mérite d’être souligné.
Que le Gouvernement, Mme la ministre en particulier, en soit remercié.
Madame la ministre, pouvez-vous me confirmer, même si la tutelle n’appartient plus à votre ministère, que le prêt de l’Agence française de développement permettant à l’agence régionale de santé d’apurer sa dette auprès de la Nouvelle-Calédonie sera bientôt versé ?
Par ailleurs, je profite de cette intervention pour redire à quel point il est important que le remboursement de l’emprunt figurant au sein de la même mission soit inscrit sur une ligne budgétaire différente de celle de l’Agence proprement dite.
Concernant la mission « Outre-mer », quelques points soulèvent notre inquiétude.
Il s’agit tout d’abord du service militaire adapté.
Le SMA a fait ses preuves. On nous a longtemps fait miroiter la possibilité d’en obtenir un à Futuna, notamment dans le cadre du plan SMA 6 000 ; puis on nous a promis des places réservées dans d’autres SMA, notamment à Périgueux ou en Nouvelle-Calédonie. Nous sommes au regret de constater qu’actuellement aucun jeune du territoire ne bénéficie de ce formidable tremplin d’intégration et de formation.
Madame la ministre, lors de votre visite sur le territoire, vous avez déclaré que vous alliez trouver une solution pour remédier à cette injustice. Pouvez-vous m’indiquer quelle suite vous comptez donner à cette annonce ?
Il s’agit ensuite du dispositif Cadres de Wallis-et-Futuna inscrit sur la même ligne budgétaire que le dispositif Cadres avenir de la Nouvelle-Calédonie. Cela aboutit souvent à une confusion budgétaire à notre détriment et je pense que c’est un point qu’il faudrait clarifier. Sur le suivi des stagiaires de ce dispositif, le ministère n’a pas encore donné sa réponse à notre demande de son transfert de LADOM à Campus France. Madame la ministre, pourriez-vous nous apporter quelques éclaircissements sur ce point ?
Par ailleurs, pouvez-vous me garantir le montant de 300 000 euros destiné à ce programme, comme entendu dans la convention récemment signée entre l’assemblée territoriale et le ministère ?
Il s’agit encore de l’avenant au contrat de développement 2012-2016. Il était question d’une augmentation des crédits alloués à Wallis-et-Futuna pour 2016. Madame la ministre, un engagement oral a été pris par votre cabinet auprès de M. Polutélé, député de Wallis-et-Futuna ; je souhaite que vous puissiez m’en confirmer le montant.
Il s’agit enfin de l’aide au fret, un dispositif très intéressant pour Wallis-et-Futuna, mais difficilement applicable. Nous en souhaiterions une adaptation pour que son efficacité soit réelle.
Je conclurai en soulignant l’appréciation entendue de la part de pays ayant participé au sommet France-Océanie, nos voisins. Elle témoigne d’une belle considération à notre égard. Sans doute aurai-je l’occasion d’y revenir très prochainement, et plus longuement.
J’en aurai tout à fait terminé quand je vous aurai dit que je voterai les crédits de la mission « Outre-mer ».
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Je vous remercie d’avoir respecté votre temps de parole, mon cher collègue.
La parole est à Mme la ministre.
Madame la présidente, madame la présidente de la commission des finances, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, alors que tous les Français sont appelés à consentir des efforts pour que le budget de la Nation puisse être bouclé, le Gouvernement a fait le choix de la réforme pour sauvegarder l’essentiel de la mission « Outre-mer », à savoir les axes prioritaires du programme 123 : le soutien à la commande publique, l’investissement des entreprises, la formation des jeunes, la mobilité.
Je vous remercie non seulement de vos observations, mais aussi du vote que vous allez émettre majoritairement en faveur des crédits de la mission « Outre-mer », conscients que le budget que nous vous présentons aujourd’hui est le meilleur possible dans les circonstances actuelles.
Ainsi, bien que la réduction de 1 milliard d’euros des dépenses prévue dans le présent projet de loi de finances s’applique à l’ensemble des ministères, vous avez pu constater, pour la mission « Outre-mer » plus particulièrement, que nous sommes parvenus à sauvegarder l’essentiel, notamment en crédits de paiement. Le budget du ministère a été intégralement préservé en CP pour 2016, et fait même l’objet d’une progression, certes modeste, puisque les crédits de paiement passent de 2, 017 milliards d’euros en 2015 à 2, 018 milliards d’euros en 2016.
Nous avons donc fait le choix de préserver les priorités essentielles de notre action en faveur des outre-mer.
À cet égard, le budget pour 2016 est, en premier lieu, celui de la relance de la commande publique. Pour être régulièrement interpellés sur ce thème – je le suis moi-même en Guyane –, nous savons bien que la commande publique joue un rôle primordial dans les outre-mer, pour le secteur du BTP, notamment.
Aussi avons-nous pris des mesures en faveur du logement.
Premièrement, nous avons maintenu les crédits de la LBU à 247 millions d’euros en autorisations d’engagement au titre de 2016.
Deuxièmement, nous avons obtenu l’extension du nouveau crédit d’impôt pour la défiscalisation dans le logement social aux opérations de rénovation des logements locatifs sociaux de plus de vingt ans situés en zone éligible à la politique de la ville. Le champ d’application de cette mesure est vaste, puisqu’il couvre la remise aux normes techniques des bâtiments, la protection antisismique, ainsi que le désamiantage.
Certains d’entre vous ont attiré mon attention sur le plafonnement du crédit d’impôt : aujourd’hui fixée à 20 000 euros, l’aide de l’État serait trop faible. Bien entendu, nous sommes prêts à étudier ce dispositif avant d’envisager toute évolution des curseurs.
Troisièmement, une modification du cadre législatif a été votée à l’Assemblée nationale pour lever l’obligation de financer par la LBU la construction d’immeubles destinés au prêt locatif social : il s’agit de pouvoir désormais utiliser l’aide fiscale à l’investissement pour ces opérations. Autrement dit, nous avons assoupli de manière significative les critères de mobilisation de l’aide fiscale dans le secteur du logement social.
Ensuite, nous avons mis en place en 2015 une réforme importante en matière de continuité territoriale : nous donnons la priorité au passeport-mobilité études et au passeport-mobilité formation professionnelle, face à la progression incontrôlée des dépenses de continuité tout public.
Cette réforme, qui est maintenant entrée en application, est en effet dans l’intérêt des populations. L’exemple de La Réunion n’est pas significatif : si les dépenses de l’État en faveur de la continuité territoriale ont sensiblement diminué là-bas, cela s’explique simplement par la mise en place d’un dispositif beaucoup plus favorable par la région.
Pour sa part, le Gouvernement considère qu’allouer des crédits à la formation professionnelle et aux personnes les plus fragiles est plus judicieux que de permettre à chacun de voyager à sa guise !
Tout cela se fera naturellement sans diminuer l’ensemble des prestations de la continuité territoriale, politique dont les crédits s’élèveront en 2016 à plus de 33 millions d’euros.
Le budget des outre-mer assure aussi le maintien des enveloppes consacrées à la politique contractuelle, avec plus de 260 millions d’euros en autorisations d’engagement. Les contrats de plan État-région, comme vous le savez, ont été signés ou sont en bonne voie de l’être. Je réaffirme ici la volonté du Gouvernement d’accompagner les collectivités dans cette voie. J’en profite pour rassurer les élus de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française : il n’y aura pas d’année blanche dans l’exécution des contrats de développement.
Deux autres outils d’accompagnement des collectivités figurent aujourd’hui dans le programme 123 « Conditions de vie outre-mer » : le Fonds exceptionnel d'investissement, le FEI, et les crédits consacrés à la bonification des prêts accordés par l’AFD, l’Agence française pour le développement. Là encore, nous pouvons nous réjouir d’arbitrages qui ont été favorables à l’outre-mer, avec le maintien des autorisations d’engagement et la progression des crédits de paiement pour ces deux instruments.
Le soutien à la commande publique, c’est également l’appui apporté par l’État à la construction des équipements scolaires. Les enveloppes de crédits pour la Guyane et Mayotte seront là encore maintenues, tout comme seront maintenus les crédits affectés aux constructions scolaires dans le second degré en Nouvelle-Calédonie.
Pour rester dans le Pacifique, j’ai bien entendu les réserves émises par M. Nuihau Laurey. Il faut néanmoins observer que 12 millions d’euros de mesures nouvelles seront consacrés au soutien de la politique de protection sociale en Polynésie française. Ces crédits manifestent un retour de l’État dans un secteur où il n’intervenait plus depuis plusieurs années.
Plusieurs d’entre vous ont abordé le problème du traitement de l’aide fiscale à l’investissement. Nous nous sommes vraiment battus sur ce point, car nous connaissons l’importance de ces dépenses fiscales pour les économies des outre-mer : cette aide contribue en effet au financement d’environ 2 milliards d’euros d’investissements dans les départements et les collectivités d’outre-mer.
Le dispositif est prorogé jusqu’au 31 décembre 2020 dans les départements d’outre-mer et jusqu’en 2025 dans les pays et territoires d’outre-mer. Cette différence de délais entre les PTOM et les DOM tient au fait que seuls les départements d’outre-mer sont dans l’obligation de respecter un règlement communautaire qui n’est applicable que jusqu’en 2020. On peut toujours proposer plus, mais nous devons continuer de nous inscrire dans le strict respect des règlements européens. Aujourd’hui, je considère qu’il s’agit de la bonne formule.
En revanche, nous avons déposé un amendement pour que la prorogation jusqu’à 2025 applicable aux PTOM vaille de façon généralisée pour l’investissement productif et le logement social.
S’agissant des crédits du programme 138 « Emploi outre-mer », nous avons préservé les moyens du service militaire adapté. Tous les élus s’accordent pour se féliciter des bons résultats du SMA sur nos jeunes « décrocheurs ». Je vous indique d’ailleurs, monsieur Laufoaulu, que le Gouvernement a pris des mesures pour réserver un contingent du SMA aux jeunes wallisiens. Vous avez donc été entendu, et votre souhait prouve que ce service est partout plébiscité.
L’année 2016 sera aussi celle du changement de statut de LADOM, l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité : ce changement permettra de mettre en cohérence la forme juridique de LADOM et ses missions. Cette agence est le principal outil pour lutter contre le chômage des jeunes ultramarins, et nous y tenons.
Puisque vous avez évoqué le soutien aux entreprises et défendu la nécessaire stabilité des aides qui leur sont versées, j’insiste sur le fait que le Gouvernement poursuit sa politique d’accompagnement des TPE. En 2016, nous prendrons des initiatives en matière d’aides au premier emploi, grâce à la signature d’une convention avec la Caisse des dépôts et consignations. Nous chercherons également à mobiliser les réseaux au service de la création d’emplois, notamment pour les TPE.
J’en viens maintenant à la réforme des exonérations de charges sociales : il est vrai que l’enveloppe de la compensation de ces exonérations a diminué de 3 % mais, compte tenu des efforts demandés à chacun et de la mise en place du CICE, j’estime que cette très faible baisse peut être largement supportée par les entreprises.
Cela est d’autant plus vrai que le taux du CICE passera à 9 % en 2016 et que les entreprises de moins de 11 salariés conserveront l’intégralité de l’aide pour les salariés qui perçoivent jusqu’à 1, 4 SMIC, avec un régime de taux progressivement dégressifs jusqu’à 2, 3 SMIC.
Parler, dans ces conditions de « trappe » à bas salaires, c’est porter une appréciation assez originale : un salaire de 3 000 euros n’est pas un bas salaire, mais un salaire raisonnable, qui se situe plutôt dans la fourchette haute des salaires perçus par nos concitoyens. Je récuse donc l’argument.
Comme nous l’avons rappelé, pour les secteurs exposés, nous comptons encore améliorer le dispositif. Ce sont donc au total plus de 200 millions d’euros d’allégements du coût du travail qui profiteront aux entreprises ultramarines en 2016.
J’entends beaucoup plaider pour la stabilité des aides et leur reconduction d’une année sur l’autre. Mais quand on modifie un dispositif pour l’améliorer – comme c’est le cas ici –, les entreprises devraient plutôt se féliciter du changement !
J’ai également entendu les inquiétudes exprimées par plusieurs d’entre vous sur l’évolution de la DGF. Je considère pourtant que nous avons su limiter les dégâts. Aujourd’hui, on demande un effort financier à toutes les collectivités. Or il me semble que la progression sensible de l’enveloppe consacrée à la péréquation, au sein du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC, est de nature à compenser la baisse de la DGF pour les communes ultramarines.
S’appuyant sur le rapport du sénateur Georges Patient, le Gouvernement a par ailleurs décidé d'exclure l’octroi de mer des recettes réelles de fonctionnement des 112 communes des quatre DOM qui supportent la contribution au redressement des finances publiques. Cette mesure représente un allégement de 13 millions d’euros pour ces communes, ce qui est, là encore, une manière d’atténuer l’effort exigé des communes en outre-mer.
Nous ne pouvons pas totalement exclure les départements et collectivités outre-mer de l’effort de solidarité exigé des autres collectivités, même si tout le monde peut comprendre que les outre-mer, compte tenu de leur situation, sont en droit de fournir un effort moins important.
Monsieur Laurey, je partage votre sentiment : il est plus que temps de lutter contre les retards qui perdurent entre les outre-mer et la métropole. C’est d’ailleurs le fil conducteur de la politique que mène mon ministère. Ainsi, monsieur le rapporteur spécial, nous avons tenu compte de la nécessité d’un rattrapage quand nous avons élaboré les contrats de plan État-régions, dont vous avez souligné l’importance pour le développement économique des outre-mer.
Par ailleurs, j’ai bien compris que vous n’étiez pas d’accord avec ma proposition de compenser en gestion l’écart de 4 millions d’euros sur la DGA. Je m’en suis pourtant déjà expliquée plusieurs fois. Votre collègue Lana Tetuanui m’a interrogée ici même sur le sujet, il y a peu.
À ce jour, le Gouvernement a pourtant toujours tenu parole lorsqu’il a été question de prendre en considération la situation de la Polynésie française : nous avons fourni plus d’efforts pour cette collectivité que ne l’ont fait les gouvernements précédents. Nous avons même tenté de rétablir tout ce que ces gouvernements avaient défait !
Je vous l’ai déjà expliqué, monsieur Laurey : si nous prenions ces 4 millions d’euros non pas sur les crédits de la DGA, mais sur ceux du contrat de projets de la Polynésie française, ce ne sont pas 4 millions d’euros en CP qui seraient supprimés, mais 16 millions d’euros en AE ! Il n’est pas dans l’intérêt de la Polynésie française de choisir cette option : ce serait pour elle renoncer à un certain nombre d’opérations qui lui seraient pourtant utiles.
Cela étant dit, monsieur le rapporteur spécial, si vous tenez absolument à procéder ainsi, faites-le ! Seulement, vous perdrez 16 millions d’euros. La solution préconisée par le Gouvernement, je le répète, est dans votre intérêt. Si vous n’êtes pas d’accord avec cela, supprimons 16 millions d’euros de crédit et n’en parlons plus !
Exclamations amusées sur certaines travées.
Monsieur Patient, je me félicite du vote de la commission des finances en faveur du budget des outre-mer. Vous avez regretté le recentrage des aides aux entreprises sur les bas salaires. Vous savez ce que je pense de ces bas salaires à 3 000 euros et je n’y reviens pas, sinon pour dire qu’il me semble au contraire normal de concentrer les efforts sur les salaires vraiment les moins élevés.
S’agissant du pacte d’avenir pour la Guyane, je vous confirme, monsieur Patient, que les discussions interministérielles se poursuivent et que nous progressons. Je réunirai les parlementaires et les grands élus au début de l’année 2016 sur la base d’un document arbitré.
Vous avez enfin évoqué, monsieur le rapporteur spécial, l’idée d’une zone franche « sociale » au profit de la Guyane. Nous avons déjà pris en compte la situation particulière de la Guyane ou des Hauts à La Réunion, puisque ces territoires bénéficient d’un niveau supplémentaire d’abattement pour leurs zones franches d’activité. Vous le savez, nous allons devoir retravailler ce dispositif.
Je remercie également M. Serge Larcher, rapporteur pour avis, d’avoir annoncé que la commission des affaires économiques était favorable à ce budget. Je ne répéterai pas ce que j’ai dit sur les exonérations de charges, sinon pour souligner le caractère progressif de la diminution.
Quant à l’idée d’une dotation spécifique d’amorçage, et bien que consciente des difficultés rencontrées pour la mise en place d’une collectivité unique, je fais remarquer que les crédits de l’outre-mer ne sont pas extensibles. J’ajoute qu’outre la Guyane et la Martinique d’autres collectivités sont concernées, et confrontées aux mêmes problèmes.
Le Gouvernement va donc regarder les mesures qu’il pourrait adopter pour être au plus près des difficultés réellement rencontrées. La création de collectivités uniques est l’une des solutions pour rationaliser la gestion des outre-mer. Il faudra donc que les outre-mer y viennent.
Monsieur Lemoyne, vous avez souligné, au nom de M. Didier Robert, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, l’importance des attentes de nos concitoyens en matière d’emploi, de logement et de santé : ce sont autant de priorités pour mon ministère.
Vous avez proposé que l’on travaille davantage sur le plan Santé. Nous avons mené un travail approfondi avec le ministère de la santé et je me tiens à la disposition de M. Robert pour échanger avec lui, lors d’une séance de travail dédiée à ce sujet.
Monsieur Thani Mohamed Soilihi, je ne partage pas totalement votre interprétation des chiffres. Contrairement à vous, je ne pense pas que Mayotte soit lésée. Le montant de la dotation forfaitaire est de 152 euros à Mayotte, contre 197 euros à La Réunion. À Mayotte, les besoins sont extrêmement importants, c’est pourquoi nous consentons actuellement, pour ce département, des efforts considérables en termes de rattrapage. Il faut même être vigilant et faire en sorte que la société mahoraise puisse supporter les évolutions rapides que nous lui imposons.
J’ajoute que, sur la question de la sécurité, une mission d’inspection est prévue à Mayotte prochainement.
Madame Assassi, vous avez évoqué les ports. Aujourd'hui, un gros travail est effectué afin de permettre aux collectivités ultramarines de profiter des évolutions du transport maritime, que ce soit Panama, que ce soit la route du Nord. Nous y travaillons et nous aménageons les ports afin d’intégrer ce mouvement planétaire.
Sur le réchauffement climatique, vous savez que nous avons organisé des réunions particulières consacrées à la situation dans les outre-mer. Un sommet France-Océanie a notamment eu lieu afin de tenir compte des incidences terribles pour les petits États, notamment océaniens, du réchauffement climatique. Nous sommes donc attentifs à cette question et nous nous efforçons d’accompagner, notamment par la défiscalisation, ceux qui ont le plus de besoins en ce domaine.
Monsieur Gattolin, je partage votre préoccupation devant un certain nombre de déséquilibres commerciaux. Je salue le travail qui a été réalisé par Mme Archimbaud sur les populations de la Guyane. S’agissant du sucre, le décret est actuellement notifié à la Commission européenne ; nous espérons qu’il pourra être publié prochainement.
Monsieur Magras, je vous remercie de la tonalité très positive de vos propos sur ce budget, reflet d’un travail que nous avons mené ensemble à Saint-Barthélemy lui-même extrêmement positif. Nous sommes prêts à apporter, en partenariat avec la Banque publique d’investissement, un préfinancement du crédit d’impôt, qui est indispensable.
Madame Tetuanui, vous avez évoqué la signature du RSPF, je n’y reviens pas. Sur la dotation globale d’autonomie, je répondrai de façon plus globale.
En ce qui concerne la prorogation de l’aide fiscale jusqu’en 2025, je pense que nous sommes parvenus à une réponse satisfaisante.
Monsieur Desplan, je ne reviens pas sur le logement, action que vous avez évoquée.
S’agissant des sargasses et de l’incidence sur le tourisme de la prolifération de ces algues, vous savez que l’État a mis sur pied un plan très important. Nous avons consacré 5 millions d'euros à ce dossier cette année. Nous avons pris en charge les frais de paiement des personnels qui sont amenés à ramasser ces algues et nous sommes conscients des désagréments qu’elles occasionnent pour les populations.
Toutefois, les élus doivent être comme nous conscients de la nécessité de s’attaquer tous ensemble au problème du ramassage de ces sargasses. Si elles sont ramassées régulièrement, grâce aux personnels que nous payons – et grâce aux entreprises que nous sommes prêts à payer –, il n’y a pas de dégagement d’odeurs nauséabondes, et la saison touristique est sauvée. Par conséquent, il n’y a pas de raison que ces sargasses ne soient pas ramassées aujourd'hui. Les moyens sont là !
J’ai entendu les observations formulées par M. Doligé. Sur la question des sucres spéciaux, je travaille sur la base des conditions dont j’ai hérité. Au moment où l’accord a été négocié, notamment avec le Vietnam, l’actuel gouvernement n’était pas encore en place. Apparemment, le précédent gouvernement n’a pas préparé les évolutions et personne n’a fait le nécessaire pour prendre en compte le sucre dans les accords internationaux. Je me bats, mais, bien évidemment, je ne peux pas renégocier un traité qui a été négocié avant que je prenne mes fonctions. Nous y travaillons, mais, malheureusement, il n’est pas toujours possible de rattraper ce qui n’a pas été fait en temps utile.
Monsieur Karam, je souscris à un grand nombre de vos propos. Je vous précise simplement que, s’agissant de l’OIN, nous allons aboutir très prochainement ; nous réunirons les élus pour en discuter avec eux.
Monsieur Arnell, je vous remercie d’avoir annoncé que vous alliez voter les crédits de la mission « Outre-mer ».
Pour ce qui est de l’emploi, nous y travaillons. Nous mettons en place un certain nombre d’aides. Toutefois, votre soutien est également nécessaire, car certains de ces dispositifs de contrats aidés ne sont malheureusement pas suffisamment utilisés.
Monsieur Laufoaulu, je vous remercie également de votre vote.
Nous avons récemment réglé une crise assez grave à Wallis, et je m’en félicite.
Nous travaillons sur le dispositif Cadres, ainsi que sur l’aide au fret. S’agissant du cofinancement, nous serons attentifs à ce que le taux, plafonné par le décret d’application de la loi de 2009, demeure adapté aux besoins exprimés.
Monsieur Antiste, je vous remercie de vos encouragements. Je partage votre avis sur l’importance des besoins en matière de logement, sur le travail à mener avec les petites entreprises qui, souvent, sont celles qui pourvoient à l’emploi des jeunes. J’ai bien noté dans vos propos un engagement moral de tous les élus à travailler de concert avec nous pour remédier à ce véritable cancer qu’est le chômage, notamment le chômage des jeunes.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.
outre-mer
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Outre-mer », figurant à l’état B.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Outre-mer
Emploi outre-mer
Dont titre 2
144 468 089
144 468 089
Conditions de vie outre-mer
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
Ces crédits sont adoptés.
J’appelle en discussion l’article 57 quinquies, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Outre-mer ».
Outre-mer
(Intitulé nouveau)
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Le troisième alinéa de l’article L. 2573-54-1 est ainsi rédigé :
« Son montant est fixé par la loi de finances. » ;
2° À la fin de la première phrase du second alinéa de l’article L. 6500, les mots : « 84 547 668 € pour l’année 2015 » sont remplacés par les mots : « 80 547 668 € pour l’année 2016 ».
L'amendement n° II-141, présenté par M. Laurey, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Nuihau Laurey, rapporteur spécial.
Madame la ministre, vous avez indiqué que vous teniez vos engagements. Nous tenons aussi les nôtres, puisque le groupe UDI-UC a voté les crédits de la mission.
Cet amendement, adopté en commission des finances, vise à supprimer l’alinéa 4 de l’article 57 quinquies, qui redéfinit le montant de la dotation globale d’autonomie.
Je ne partage pas tout à fait l’analyse que vous faites quant à la nécessité de trouver 16 millions d'euros en compensation. Manifestement, vous avez mal saisi mon propos. Nous considérons, comme j’ai pris soin de l’indiquer, que votre proposition était bonne. Nous souhaitons la compléter afin de la mettre en cohérence avec la suppression du nouveau montant de référence figurant à l’article L.6500 du code général des collectivités territoriales, d’où cet amendement.
Monsieur Laurey, nous avons déjà longuement évoqué cette question, mais je ne vous ai visiblement pas convaincu.
Je me suis engagée auprès de vous, comme je l’ai fait en publiquement à l’Assemblée nationale, à vous redonner en gestion les 4 millions d'euros qui ne figurent pas aujourd’hui dans le montant de la DGA prévu pour 2016.
Je ne peux pas vous obliger à me faire confiance, mais vous n’ignorez pas que, pour 4 millions d'euros en crédits de paiement, il faudra, en compensation, supprimer beaucoup plus d’autorisations d’engagement. Procéder comme vous le faites au travers de cet amendement n’est pas raisonnable, car, en faisant un tel choix, vous allez à l’encontre de l’intérêt de votre collectivité.
Ce sujet est important et il faut que tout le monde comprenne bien de quoi il s’agit.
D’abord, je pense que cet amendement est, budgétairement, bancal.
Ensuite, ce qu’a dit Mme la ministre est juste : lorsque l’on inscrit x millions d’euros en crédits de paiement, il faut, en vertu des règles budgétaires, multiplier par trois le montant global : 4 millions d’euros multipliés par trois, cela fait 12 millions d’euros.
Donc, dans l’intérêt de la Polynésie française – nous sommes là pour essayer d’arranger les choses, chacun prendra ensuite ses responsabilités –, je voudrais que les propos de la ministre soient bien compris.
Mme la ministre semble dire que, si cet amendement était adopté, les 4 millions d'euros viendraient en fait en débit, ce qui constituerait une difficulté pour la Polynésie française. À l’inverse, si cet amendement est retiré, la ministre s’étant engagée publiquement à redonner en gestion 4 millions d'euros supplémentaires, pourquoi nos collègues s’obstinent-ils ? Vous excuserez le Béotien que je suis, mais je ne comprends pas.
En tout état de cause, si l’amendement est maintenu, nous voterons contre.
Le groupe de l’UDI-UC va demander un scrutin public sur cet amendement, parce que l’outre-mer intéresse beaucoup la majorité du Sénat, on s’en est aperçu. Nous pensons que la proposition de la ministre est intéressante, elle ne pose pas de problème de crédits budgétaires et permet à la Polynésie française, notamment par rapport au nucléaire, de récupérer ces 4 millions d'euros.
Je suis assez stupéfaite de ce que j’entends dans cet hémicycle !
Le premier tir nucléaire en Polynésie a eu lieu en 1966, voilà donc cinquante ans. Actuellement se tient la COP 21, mais il faut rappeler haut et fort les conséquences environnementales des essais de Mururoa. Nous avons du respect pour la France, notre mère patrie, mais la DGA était inscrite dans le marbre de la République. Or, voilà trois ans que l’on ampute cette dotation. Allez faire des économies ailleurs, pas sur la DGA, qui traduit la reconnaissance de la dette nucléaire de la France à l’égard de la Polynésie française ! On n’a pas fait d’essais dans les autres collectivités d’outre-mer ; en Polynésie, si ! Nous avons payé le prix fort, en termes d’environnement et de santé, pour la grandeur de notre mère patrie ! Les séquelles des essais nucléaires se font encore sentir aujourd’hui. J’en appelle à votre conscience, mes chers collègues. Le sujet est explosif !
Applaudissements sur les travées de l'UDI -UC et du groupe Les Républicains.
Si quelqu’un a le plus grand respect pour ce qu’ont enduré les Polynésiens, c’est bien moi ! J’appartiens à une frange de l’opinion qui s’était opposée à la reprise des essais nucléaires. Ce n’est donc pas à nous qu’il faut adresser ce genre d’observations, madame la sénatrice !
Je rappelle que la dotation globale d’autonomie allouée à la Polynésie était indexée sur la DGF. Celle-ci ayant été significativement réduite, au titre des efforts demandés à toutes les collectivités, la DGA de la Polynésie devait l’être également. C’est ce gouvernement qui a fait en sorte que cette dotation soit désindexée, de manière qu’elle n’accuse pas une diminution aussi importante que la DGF. Nous avons consenti là un effort significatif.
Je rappelle aussi que, l’an dernier, en gestion, nous avons dégagé 7 millions d’euros pour compléter les crédits alloués à la Polynésie et que nous avons réglé la question du régime de protection sociale de la Polynésie, le RSPF, auquel le gouvernement précédent avait décidé de ne plus apporter la participation de l’État.
Vos propos, madame la sénatrice, ne me semblent donc pas très justes eu égard à la manière dont ce gouvernement s’est intéressé à la Polynésie et a essayé d’aider le gouvernement de M. Fritch à régler les problèmes.
Je le répète, la solution que nous proposons est raisonnable. Je me suis engagée à ce que les 84 millions d’euros non affichés dans le projet de budget vous soient restitués en exécution, comme cela a été fait l’année précédente.
Si vous ne voulez pas de cette solution, nous n’insisterons pas, mais l’adoption de cet amendement n’irait pas selon moi dans le sens des intérêts de la Polynésie. Ce serait dommage, mais c’est à vous de choisir !
Je mets aux voix l'amendement n° II-141.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe de l’UDI-UC.
Je rappelle que l’avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 96 :
Nombre de votants344Nombre de suffrages exprimés344Pour l’adoption208Contre 136Le Sénat a adopté.
Applaudissements sur les travées de l'UDI -UC.
L’article 57 quinquies est adopté.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Outre-mer ».
La parole est à Mme la présidente de la commission.
J’indique aux membres de la commission des finances que nous allons nous réunir pour examiner les amendements déposés sur les articles non rattachés.
Nous allons interrompre maintenant nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de M. Jean-Pierre Caffet.