Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous nous exprimons aujourd’hui sur les crédits de la mission « Outre-mer » du projet de loi de finances pour 2016. À travers ce budget, madame la ministre, le Gouvernement affirme avec la même vigueur dont il fait preuve depuis 2012 son engagement aux côtés des territoires ultramarins, qui se trouvent tous dans une situation d’urgence tant économique que sociale.
Cet attachement, s’il peut être loué, reste indispensable au vu du réel retard économique de nos territoires par rapport à la France métropolitaine.
Aussi, dans un contexte de finances publiques très contraintes, je salue l’une des quelques missions du présent projet de loi de finances dont les crédits sont en très légère augmentation, de 0, 3 % par rapport à l’année dernière. Les crédits de paiement s’élèvent à plus de 2 milliards d’euros, répartis entre deux programmes : le programme 123, « Conditions de vie outre-mer » et le programme 138, « Emploi outre-mer ». C’est tout naturellement à ce dernier programme que je consacrerai la majeure partie de mon intervention.
Madame la ministre, vous en êtes consciente, l’emploi est un défi récurrent dans les outre-mer, le taux de chômage y étant presque deux fois supérieur à celui de la métropole. Les causes en sont multiples : isolement des territoires, manque de formation et autres handicaps structurels.
La jeunesse est la principale victime de ce retard économique. Le taux de chômage des 15-24 ans atteint ainsi des records : plus d’un jeune sur deux est sans emploi en Guadeloupe et à Saint-Martin, ce qui constitue le taux le plus élevé des territoires ultra-marins.
À ce titre, cette mission présente tout de même des éléments de satisfaction, notamment, les crédits alloués aux contrats de développement, à la continuité territoriale, à l’insertion dans l’emploi et à la formation des jeunes via la LADOM.
De fait, l’objectif « SMA 6 000 », visant à porter à 6 000 le nombre de volontaires bénéficiaires du service militaire adapté à l’horizon 2017, est significatif. Cette mesure en faveur de la formation professionnelle est déterminante ; elle doit être mise en œuvre le plus rapidement possible, dans un souci constant d’adéquation avec les spécificités des territoires ultramarins.
Par ailleurs, il faut saluer l’effort gouvernemental en faveur d’une évolution du dispositif des aides fiscales à l’investissement au-delà de leur terme actuel, effort qui s’est notamment concrétisé par l’amendement que le Gouvernement a déposé à l’Assemblée nationale sur l’article 43.
Nous prenons acte, madame la ministre, d’un tel engagement, indispensable au soutien du secteur productif ultramarin. Précisons toutefois qu’il doit être nécessairement maintenu sur le long terme.
En effet, si cet effort constitue un message fort en direction des investisseurs, seul un engagement durable de la part de l’exécutif permettra l’aboutissement de projets structurants, générateurs d’emplois.
Les dispositifs de défiscalisation et d’exonérations de charges ne peuvent faire davantage l’objet de nouvelles annonces, au risque de décourager les investisseurs et les entreprises quant à la stabilité du climat économique sur nos territoires. La lisibilité est ici le maître mot. Or il apparaît aujourd’hui que certains dispositifs existants gagneraient à être recentrés plus encore sur les secteurs productifs locaux.
Madame la ministre, votre engagement en faveur d’un « CICE renforcé » va bien entendu dans ce sens. Néanmoins, en tant que représentant d’une collectivité fiscalement autonome, je me dois de vous alerter sur la distorsion concurrentielle entre les entreprises basées à Saint-Martin et celles qui bénéficient du dispositif CICE tout en ayant accès au marché local. Notre capacité budgétaire ne nous permettant pas l’instauration de mécanismes équivalents, seul l’État peut prévoir des dispositifs de compensation afin de contrer le développement de situations discriminantes.
Le tourisme étant le secteur clé de l’économie saint-martinoise, j’ai déposé un amendement visant à élargir la politique de défiscalisation à l’ensemble des investissements réalisés à Saint-Martin dans le secteur du tourisme et de l’hôtellerie, à un taux de 45, 9 %, majoré à 53, 55 %, sur le modèle de ce qui se pratique à Mayotte ou à Saint-Pierre-et-Miquelon. Cela permettrait de rétablir un certain équilibre de compétitivité entre nos entreprises locales et celles de notre environnement régional.
Madame la ministre, je partage votre position, Saint-Martin doit pleinement assumer les compétences attribuées par la loi organique, et nous nous y attelons. Néanmoins, il est également légitime de notre part d’attendre que les moyens correspondant à la mise en œuvre de notre autonomie fiscale soient justement alloués.
En effet, le rétablissement durable de notre situation financière ne peut se limiter à une seule politique volontariste de hausses d’impôts et de taxes ; elle implique également une participation accrue de l’administration fiscale de l’État à l’amélioration du niveau des recettes fiscales de la collectivité. Ainsi, le cadastre date du début des années soixante-dix et ne correspond plus à aucune réalité.
De telles mesures figurent parmi les engagements du Président de la République formulés à l’occasion de son déplacement dans les collectivités d’outre-mer. Parlementaires ultramarins, nous nous devons de veiller à la bonne exécution des annonces présidentielles.
Concernant Saint-Martin, le Président de la République s’est engagé sur divers points de fiscalité, affirmant notamment qu’il était normal de faire évaluer la fiscalité en la matière.
Par ailleurs, de nombreux dossiers restent en suspens.
Depuis la promulgation du statut actuel, en 2007, la compensation des charges fixée par le législateur n’a toujours pas abouti.
Cependant, madame la ministre, malgré notre inquiétude s’agissant de ces dossiers, dans la conjoncture, les crédits de la mission « Outre-mer » semblent à la hauteur des enjeux propres à nos territoires. Aussi, j’approuverai, et avec moi le groupe du RDSE, les crédits de la mission « Outre-mer ».