Intervention de Pascal Allizard

Réunion du 3 décembre 2015 à 22h00
Loi de finances pour 2016 — Anciens combattants mémoire et liens avec la nation

Photo de Pascal AllizardPascal Allizard :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, après la chute du mur de Berlin, beaucoup ont cru en une paix définitive, pariant sur la réduction de l’effort de défense et la diminution mécanique et progressive des politiques en faveur des anciens combattants.

Dans nos communes, nous avons tous constaté la baisse de fréquentation des commémorations. Finalement, nous n’assistions à rien d’autre qu’à l’une des manifestations du délitement du lien entre armée et nation.

Pourtant, jamais depuis plus de cinquante ans nos armées n’auront été engagées simultanément sur autant de théâtres extérieurs : le Sahel, le Levant, la Centrafrique, après les dures années passées en Afghanistan… Aujourd’hui, elles sont également engagées sur le sol national, devenu un front intérieur dans la lutte contre le terrorisme.

Nos concitoyens redécouvrent, dans des circonstances tragiques, ce besoin de communion et de solidarité, de partage d’idéaux pour la défense desquels s’engagent nos soldats, dans nos rues comme dans les montagnes des Ifoghas.

Au nom de mon groupe, je veux rendre un hommage solennel à ceux, toutes générations du feu confondues, qui ont fait le sacrifice de leur vie pour la France.

En cette année tragique, nos soldats ont en quelque sorte réintégré le quotidien des Français. Ils leur rappellent à quel point la paix et la sécurité sont des biens précieux. Dans ce contexte, nous devons faire preuve d’un esprit de responsabilité encore plus grand, car les militaires d’aujourd’hui sont les anciens combattants de demain.

Le lien entre armée et nation constitue, à mes yeux, l’un des éléments du pacte républicain. Aussi devons-nous impérativement trouver les moyens de le réaffirmer, de le développer. L’heure est à la réappropriation.

À cet égard, la journée défense et citoyenneté représente un défi. Je tiens à saluer l’implication personnelle, sur ce dossier, de notre rapporteur pour avis, Jean-Baptiste Lemoyne. À mon sens, cette journée doit être repensée. En effet, en dépit du professionnalisme des intervenants militaires, elle ne saurait répondre efficacement aux nombreux objectifs qui lui sont assignés : diffuser l’esprit de défense chez les jeunes, les initier aux questions stratégiques, détecter les cas d’échec scolaire, la désocialisation, la radicalisation… le tout en moins de vingt-quatre heures ! N’est-ce pas trop ?

Si l’on veut renforcer la citoyenneté et l’esprit de défense et lutter en amont contre la radicalisation, comme l’a très justement suggéré notre rapporteur pour avis, il faut trouver un format adapté. Pour certains de ces objectifs, il me semble que l’éducation nationale devrait également prendre sa part.

Je profiterai de cette intervention pour remercier les associations du monde combattant du travail remarquable qu’elles réalisent en faveur de la transmission de la mémoire et de la défense des droits de ceux qui se sont battus pour notre pays.

Je tiens à saluer l’avancement de l’érection du monument dédié aux soldats morts en opérations extérieures, dont la construction fut décidée en 2011. La France doit honorer la mémoire de ces soldats. À cet égard, j’espère que des actions pédagogiques seront menées auprès des jeunes pour qu’ils comprennent l’engagement de nos militaires.

Les années 2014 et 2015 ont été marquées par un cycle mémoriel très dense. En tant qu’élu du département du Calvados, où les sites de mémoire sont nombreux, j’y suis très attentif. Pour les collectivités locales, le tourisme de mémoire est aussi un levier de croissance économique, c’est vrai, mais c’est avant tout un moyen de transmission de notre héritage historique.

Monsieur le secrétaire d'État, les cérémonies de commémoration ont été de véritables succès. Nous nous en félicitons.

Avant de conclure, je souhaite attirer votre attention sur des problèmes précis, qui méritent que nous leur donnions des solutions rapidement.

Je veux d'abord évoquer la situation de l’Institution nationale des invalides, dont le renouvellement du contrat d’objectifs et de performance est urgent. Je souligne l’intérêt que lui porte notre rapporteur spécial, Marc Laménie, qui a engagé une mission de contrôle sur le sujet. Cette institution est « la maison des combattants âgés, malades ou blessés au service de la patrie ». La prise en charge physique et psychologique et l’accompagnement des nombreux soldats blessés lors des OPEX sont des nécessités absolues.

Je rappelle que, en 2013, lors de l’examen du projet de loi de programmation militaire, l’amendement de notre collègue André Trillard visant à la mise en place d’une politique de détection, de prise en charge et de suivi des symptômes post-traumatiques chez les soldats revenus d’OPEX avait été adopté à l’unanimité.

Monsieur le secrétaire d'État, je sais que vous êtes très sensible à cette problématique. Pouvez-vous nous dire quelques mots au sujet des retours d’expérience, très inquiétants, de Centrafrique et, dans un autre contexte, d’Afghanistan ?

Devant la commission des affaires sociales, vous avez regretté la longueur excessive des délais de traitement des demandes de pension militaire d’invalidité. Je tiens à saluer votre engagement sur ce sujet et la priorité accordée aux blessés graves en OPEX. Mais, nous le savons tous ici, les concernant, les délais sont encore trop longs.

S’agissant des restructurations de l’ONACVG, les associations d’anciens combattants craignent un affaiblissement de l’établissement et une perte de lien avec le territoire. Je sais notre rapporteur spécial et notre rapporteur pour avis très mobilisés sur ce dossier.

Enfin, si le contingent de médailles militaires a été augmenté, il concerne autant l’armée d’active que les anciens combattants. Un effort supplémentaire serait souhaitable.

En conclusion, monsieur le secrétaire d'État, vous l’aurez compris, les membres du groupe Les Républicains voteront en faveur de l’adoption des crédits de la mission. Toutefois, ils souhaiteraient que puisse être organisé un débat sur la délicate question du statut des troupes supplétives en Algérie.

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