Intervention de Guy-Dominique Kennel

Réunion du 9 décembre 2015 à 14h30
Accès à la restauration scolaire — Rejet d'une proposition de loi

Photo de Guy-Dominique KennelGuy-Dominique Kennel :

En effet, dans cette proposition de loi, l’intention de départ, certes généreuse, peut se transformer en d’insurmontables contraintes.

La déferlante des textes nouveaux – accessibilité, encadrement, rythmes scolaires, nouveaux manuels… – étouffe littéralement les élus locaux. Là où il devrait y avoir de la confiance, il y a de l’oppression. Nous représentons les élus de terrain qui gèrent au mieux et au quotidien leurs compétences pour construire une offre de service public répondant, quasiment, au cas par cas. J’aimerais que nous soyons tous vigilants sur ce point et que l’on fasse davantage confiance aux élus de proximité, sans légiférer systématiquement.

Plus précisément, sur le contenu du texte, je souhaite pointer plusieurs conséquences induites. Toutefois, au préalable, je tiens à féliciter notre rapporteur de son excellent travail et à le remercier de l’éclairage qu’il a apporté sur cette question.

En premier lieu, le texte instaure une ambiguïté notable entre, d’une part, le droit d’accès à la restauration scolaire pour tous les enfants scolarisés en maternelle et en primaire, et, d’autre part, l’obligation de fait liée à la création de ce nouveau droit par la loi.

Je tiens à rappeler que, contrairement au collège et au lycée, qui relèvent respectivement du département et de la région, la restauration scolaire en école primaire et maternelle revêt un caractère facultatif de service public. Cela permet aux communes d’être entièrement libres de créer un tel service et de l’être tout autant pour ce qui concerne son organisation, dans le respect, bien entendu, des intérêts de chacun et des principes fixés par la loi et par la jurisprudence.

D’ailleurs, en application du principe de mutabilité du service public, une commune peut aussi mettre fin à ce service ou bien choisir d’en restreindre l’accès, pourvu que les critères retenus ne portent pas atteinte au principe d’égal accès au service. De même, les communes sont libres d’exiger une participation financière des usagers, qui peut être modulée en fonction du revenu de la famille, pourvu bien sûr qu’elle n’excède pas le montant du coût par usager supporté par l’autorité organisatrice.

Je précise que, s’il est mis en œuvre, le service de restauration scolaire est astreint au respect des grands principes du service public, notamment celui d’égalité, cher à notre collègue Jacques-Bernard Magner, ainsi qu’au respect des dispositions législatives et réglementaires qui y ont trait.

En ce qui concerne l’égalité, cela signifie que les usagers ne peuvent faire l’objet d’une différence de traitement pour un même service rendu que s’il existe entre ces usagers des différences de situation appréciables, objectives et proportionnées ou si cette différence de traitement est justifiée par un motif d’intérêt général en rapport avec l’objet du service. La jurisprudence administrative sur ce point est claire et constante, mes chers collègues. La pertinence juridique de cette proposition de loi est donc largement remise en cause.

En second lieu, le texte crée une discrimination – oui, une discrimination ! – supplémentaire. En effet, puisque le service public de la restauration scolaire est toujours facultatif, le droit d’accès ne pourra être opposé aux communes qui n’offrent pas ce service. En revanche, l’instauration d’un droit général à l’inscription en cantine, tel qu’il est proposé par cette proposition de loi, aura pour effet d’imposer aux communes dont les cantines ne sont pas aujourd’hui en mesure d’accueillir l’ensemble des enfants de procéder sans délai aux aménagements et aux réorganisations nécessaires.

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