Intervention de Stéphane Le Foll

Réunion du 9 décembre 2015 à 14h30
Compétitivité de l'agriculture et de la filière agroalimentaire — Articles additionnels avant l'article 1er

Stéphane Le Foll, ministre :

M. le rapporteur a rappelé un certain nombre d’éléments. Cet amendement prévoit finalement – c’est tout le problème ! – de revenir à un système de préférence communautaire et de prix. C’est au fond ce que vous demandez, en envisageant plusieurs prix, selon les conditions et lieux de production.

Lorsque la préférence communautaire existait, il y avait bien un seul marché, mais avec six pays, puis neuf. Ensuite, ce système a été supprimé. Les différences entre les vingt-huit États membres actuels nécessiteraient, non pas un prix, mais de multiples, pour qu’ils soient capables de s’adapter aux situations de production et de rémunération du capital de chacun des pays.

Ensuite, si l’on revient à un système où les prix sont soutenus à l’intérieur d’un marché, qu’il soit français ou européen, cela nécessite, vous l’avez affirmé vous-même, monsieur le sénateur, que l’on remette en place la préférence communautaire.

Le sujet n’est pas facile, et je comprends l’intention qui sous-tend cet amendement. Mais quelle a été la conséquence de ce système de préférence ? Avec des prix élevés et une protection à l’importation, si vous souhaitez exporter, vous êtes obligés de compenser la différence de prix entre les marchés intérieur et mondial. C’était le système des restitutions.

Vous le voyez, dès que nous essayons de régler un problème en fermant un marché ou en définissant un prix par nous-mêmes, nous nous retrouvons confrontés à tout ce qui fait un marché et à la difficulté d’en combiner tous les enjeux. Si nous fermions totalement nos frontières, nous n’aurions plus d’importations, mais nous ne pourrions plus non plus exporter !

Prenons simplement l’exemple du lait. Sur un volume de production de 22 milliards de litres environ, la France en exporte entre 8 et 10 milliards, sous une forme ou sous une autre, le lait en poudre, le fromage, etc.

Dès que l’on touche aux prix sur le marché intérieur, il y a un impact à l’extérieur, sur les marchés où nous exportons.

Pour réussir à régler le problème soulevé par M. Le Scouarnec, il faut assurer une stabilité des prix et faire en sorte que des dispositifs permettent de les lisser beaucoup plus. Mais nous y reviendrons à l’occasion de l’examen d’autres amendements. Nous devons ainsi éviter que la pression sur les prix ne se répercute immédiatement sur le producteur. Or c’est ce qui se passe aujourd’hui, dès que survient une baisse de prix sur le marché mondial.

Mesdames, messieurs les sénateurs, ce qu’il faudrait prévoir, c’est l’obligation de transparence sur les résultats des grandes entreprises de transformation. Aujourd’hui, je le dis, certaines grandes entreprises ne publient pas leurs résultats. Elles peuvent donc plus facilement arguer qu’elles rencontrent des difficultés, même si leurs résultats sont positifs ! Je pense d’ailleurs que c’est bien le cas… Dans le même temps – et je le constate ! –, la production rencontre les difficultés que chacun connaît ! Il faut donc équilibrer tous ces éléments.

Telles sont les raisons pour lesquelles je ne suis pas favorable à cet amendement. L’adoption de cet amendement nous conduirait à nous engager dans un processus qui a déjà existé, et nous obligerait à prendre des mesures nous mettant nous-mêmes en difficulté, eu égard au fait que nous sommes un grand pays exportateur, comme cela a été rappelé. Qui plus est, nous exportons des produits de qualité !

Si je prends l’exemple de la viticulture, le Languedoc-Roussillon a connu une véritable révolution depuis une vingtaine d’années. Alors que les vins de cette région étaient destinés à la seule consommation nationale, le choix de la qualité a permis de les exporter tous – je les connais bien ! – sur des marchés à l’international. Dès lors, on ne peut considérer que le coût de production du vin dans le Languedoc-Roussillon n’a pas un impact sur les marchés internationaux.

C’est pourquoi, je le répète, je ne suis pas favorable à cet amendement.

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