Intervention de François-Noël Buffet

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 9 décembre 2015 à 9h20
Nomination de rapporteurs

Photo de François-Noël BuffetFrançois-Noël Buffet, rapporteur :

Cette mission a été créée afin de suivre la mise en place du dispositif dédié aux demandeurs d'asile accueillis dans le cadre du mécanisme de « relocalisation » décidé par l'Union européenne en septembre dernier. Dans un premier temps, il s'agissait de suivre l'accueil des mille demandeurs d'asile que la France s'est engagée à aller chercher en Allemagne pour aider notre partenaire à gérer les flux massifs auxquels il a été confronté depuis la fin de l'été.

Nous avons effectué deux déplacements, à la préfecture de Cergy-Pontoise puis à la base de loisirs « L'Île des loisirs », et à la mairie de Champagne-sur-Seine puis au foyer Armade où s'est déroulée une rencontre avec des réfugiés.

Outre le ministre de l'Intérieur, nous avons auditionné le directeur général des étrangers en France, M. Pierre-Antoine Molina, M. Pascal Brice, directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), et M. Yannick Imbert, directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII).

Entre le 9 et le 16 septembre, 526 demandeurs d'asile ont été conduits en Île-de-France depuis Munich par l'OFII et la protection civile, après un premier entretien par les officiers de protection de l'OFPRA. Des agents de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) étaient présents à Munich. Sur les 526 personnes, mineurs accompagnants inclus, effectivement accueillies, 51 ont souhaité rapidement repartir et indiqué pour la plupart retourner en Allemagne ; 475 sont donc restées sur notre territoire.

Ces personnes ont été accueillies dans sept centres répartis en Île-de-France : trois à Paris, un en Seine-et-Marne, à Champagne-sur-Seine, un dans les Yvelines et deux dans le Val d'Oise, à Cergy et Montmorency. Autant de sites, autant de manière d'accueillir.

Chaque demandeur s'est vu délivrer un document l'autorisant à se maintenir sur le territoire durant l'examen de sa demande d'asile et des agents de l'OFPRA se sont rendus sur site : le délai moyen d'instruction a été de treize jours, la protection étant octroyée en moyenne 19 jours seulement après l'arrivée en France. La préfecture de département a délivré à chacun un récépissé, dans l'attente de la délivrance du titre de séjour par la préfecture dans le ressort duquel les personnes seront durablement hébergées. À ce jour, 114 personnes sont encore en attente de relogement dont une forte proportion de jeunes de moins de 25 ans.

Même mobilisation pour les services sociaux : la caisse primaire d'assurance maladie et la caisse d'allocations familiales ont dépêché des agents dans les centres avec une grande efficacité.

Nous avons pu relever des différences notables. À Cergy, les enfants ont été scolarisés une semaine après leur arrivée ; à Champagne-sur-Seine, aucune scolarisation n'était prévue. À Cergy également, des cours de français ont été mis en place dans les cinq jours. En matière de logement, certaines personnes ont été orientées vers des communes volontaires du département, comme Ermont, chez notre collègue Hugues Portelli, tandis qu'à Champagne-sur-Seine, le coordinateur nous a indiqué interpréter strictement les consignes et ne faire remonter aucune candidature de communes car les réfugiés doivent être dirigés vers des zones qui ne connaissent pas de tensions en matière de logement, hors Île-de-France.

Ces différences s'expliquent par la géographie de la structure d'accueil, par l'organisation mise en place localement : à Champagne-sur-Seine, recours à la Croix Rouge, spécialisée dans l'hébergement d'urgence, pas dans l'accueil de personnes étrangères ; à Cergy, appui sur un collectif associant l'État, les collectivités, les associations et les citoyens. Notons également la présence à Cergy d'établissements d'enseignement supérieur, dont les étudiants se sont mobilisés, et un volontariat plus marqué de la population locale. Enfin, la personnalité du coordinateur local a également probablement joué.

Pour autant, il n'y a pas véritablement de conclusions à en tirer : ce dispositif, monté en urgence, coûteux - 42 euros par jour et par personne, contre 24 euros en centre d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA) - n'est pas appelé à se reproduire. La relocalisation des demandeurs d'asile devrait se faire selon le mode d'accueil habituel : hébergement en CADA, traitement de la demande en quatre mois. Nous visiterons un hot spot début 2016.

Certaines questions en revanche continueront de se poser avec acuité. Quel délai pour la réunification familiale ? Quelle aide sociale pour les moins de 25 ans qui ne peuvent bénéficier du RSA ? Quel accompagnement psychologique de ces personnes particulièrement fragiles, quel accompagnement social en zone rurale ?

Par ailleurs, de notre conversation informelle avec des réfugiés, je retiens des échanges assez durs. Nos services, qui ont accompli un travail exceptionnel dans des délais très courts, sont assez démunis devant le niveau d'exigence très fort de ces réfugiés.

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