Intervention de Maurice Vincent

Réunion du 10 décembre 2015 à 10h30
Loi de finances rectificative pour 2015 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Maurice VincentMaurice Vincent :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, madame la présidente de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, il est vrai que ce projet de loi de finances rectificative se distingue clairement des exercices précédents, pour plusieurs raisons.

D’abord, ce texte modifie positivement, à savoir de 1 milliard d’euros – c’est la première fois, depuis longtemps, que cela arrive –, la prévision de déficit budgétaire pour 2015 par rapport à la loi de finances initiale. Dès que les chiffres seront connus, vous verrez, monsieur le rapporteur général, que ce sera aussi le cas en exécution.

Ensuite, il prend en compte les décisions nécessaires au renforcement de nos moyens de sécurité et de défense, ainsi qu’en faveur du monde agricole, liées aux événements de l’année 2015.

Enfin, il intègre des changements de long terme dans nos politiques environnementales, d’une part, de soutien au développement économique, d’autre part.

Pour rebondir sur les observations qui ont été formulées par nos collègues de la majorité sénatoriale, je reconnais que ce projet de loi de finances rectificative est un peu exceptionnel, mais je pense, contrairement à eux, que ce texte est particulièrement nécessaire et utile pour faire face aux défis de cette année 2015 et de celle qui vient.

Les dépenses de sécurité et de défense ayant été encore renforcées dans le budget de 2016 et abondamment commentées, je me concentrerai sur la nouvelle transparence de la fiscalité « écologique », ainsi que sur les améliorations en faveur du monde agricole et les mesures de soutien au développement économique.

La nouvelle transparence de la fiscalité écologique et son effet dynamique sur la transition énergétique ressortent clairement de ce projet de loi de finances rectificative.

Au moment où la COP 21 s’achemine vers un accord attendu de longue date, je voudrais rappeler que la loi de transition énergétique récemment votée dans notre pays marquait déjà une belle ambition, puisqu’elle prévoyait de multiplier par deux, d’ici à quinze ans, la part des énergies renouvelables dans le modèle énergétique français et de baisser significativement la part des émissions de gaz à effet de serre.

Il fallait donc un dossier fiscal et financier pour accompagner et mettre en œuvre concrètement cette loi. Ce projet de loi de finances rectificative y contribue grandement, sur plusieurs points.

D’abord, à travers la consolidation de la contribution climat-énergie, créée en 2014, ce projet de loi de finances rectificative donne une visibilité triennale aux acteurs économiques sur le prix de la tonne de carbone fixé, pour 2017, à 30, 50 euros. À cet égard, chacun se souvient des déboires des majorités précédentes, en particulier la censure par le Conseil constitutionnel de la taxe carbone dans le projet de loi de finances pour 2010 et l’échec malheureux de l’écotaxe poids lourds.

Il fallait progresser ; c’est exactement le sens de ce projet de loi de finances rectificative.

Ensuite, ce texte prévoit de faire progressivement converger la fiscalité sur l’essence et sur le gazole, au service de la qualité de l’air. Notre collègue Jean-François Husson rappelait les conclusions de la commission d’enquête qu’il a présidée sur le coût économique et financier de la pollution de l’air. Il s’agit d’une application concrète qui nous semble également opportune, car il ne serait pas cohérent de proposer en commission des solutions, et de les rejeter ensuite quand elles sont inscrites dans un projet de loi de finances.

Cette orientation particulièrement logique est accompagnée d’une modulation supplémentaire en faveur des biocarburants. Ces réformes étaient d’ailleurs réclamées de longue date.

Enfin, ce texte met un terme à une anomalie démocratique et institutionnelle concernant la CSPE.

Cette question, vous le savez, avait beaucoup mobilisé, au sein de la commission des finances, notre collègue Jean Germain, pour lequel nous avons une pensée particulière au moment où ses idées sur la transparence de la CSPE et des tarifs de rachat pratiqués sur les énergies renouvelables trouvent une concrétisation essentielle.

La CSPE a été créée en 2003, mais le système a aujourd’hui atteint ses limites, ne serait-ce qu’en termes financiers, puisqu’il manque près de 5 milliards d’euros au détriment d’EDF.

Alors qu’elle représente 15 % de la facture d’électricité pour les consommateurs, cette contribution constituait jusqu’ici un dispositif extrabudgétaire anormal qui est enfin corrigé.

Sur le plan financier, et en réponse à M. Husson, je souligne que, dans ce cas précis, un avantage sera accordé en faveur des ménages qui étaient jusqu’à présent ponctionnés automatiquement et sans débat chaque année de 3 euros par mégawattheure. Cette ponction s’interrompra.

Toutes ces dispositions seront mises en œuvre, en vertu de ce projet de loi de finances rectificative, par la création du compte d’affectation spéciale « Transition énergétique ». La transparence y gagne et c’est tout à fait positif.

Enfin, et c’est tout aussi fondamental, l’assiette du financement des charges de service public, qui était auparavant concentrée sur l’électricité, sera progressivement élargie aux énergies carbonées, ce qui, là encore, va dans le sens du financement de la transition énergétique.

Je ne doute pas qu’un accord général se dégagera sur la CSPE, puisque, si je reprends les mots du président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, il s’agit d’« une bonne réforme allant dans le bon sens », et tout le monde devrait la voter.

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