Intervention de Alain de La Bretesche

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 16 décembre 2015 à 10h20
Liberté de la création architecture et patrimoine — Table ronde sur les dispositions relatives au patrimoine

Alain de La Bretesche, président délégué de Patrimoine-Environnement, coordinateur du Groupe national d'information et de concertation sur le patrimoine « G8Patrimoine » :

Quel nouveau nom autre que celui de « cités historiques » donner à ces nouveaux périmètres ? Si le Sénat en trouve un, tant mieux. La commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale a cherché mais n'y est pas parvenue. Nous avions pensé à la notion de « secteur historique », mais nous ne sommes pas fixés, car le terme de secteur peut s'avérer plurivoque. Sur les commissions, je souhaiterais insister sur l'avancée pour les associations que représente la nouvelle composition des commissions. En effet, nous préconisions que soit institué un collège des représentants du monde associatif dans les commissions nationale, régionales et locales. Finalement, nous l'avons obtenu grâce à la ministre à l'Assemblée nationale dans des conditions qui, je l'espère, seront reprises par le Sénat. Ainsi, il devrait y avoir un collège issu des associations, au-delà des personnalités qualifiées, dans les commissions nationale et régionales. Il nous reste un amendement que nous avions proposé avec les villes et pays d'art et d'histoire et qui proposait que ces commissions soient présidées par les parlementaires. Nous y tenons, forts du bon bilan de la commission nationale des secteurs sauvegardées, qui a été présidée par MM. Yves Dauge puis Jean-Pierre Leleux. Nous pensons que sur le plan régional, c'est une bonne idée, car placer à sa tête un parlementaire permettrait d'éviter les difficultés constatées lorsque des pressions sont exercées sur les représentants de l'administration. La présidence d'un parlementaire permettrait de donner un peu de distance entre des débats si possible démocratiques et le rôle de l'État, qui doit demeurer important.

Pour ce qui est du passage devant les commissions, à l'instar de la commission supérieure des sites, perspectives et paysages, il faut éviter les embouteillages des commissions nationales qui en obèrent le fonctionnement, faute de conditions opérationnelles satisfaisantes. Il faut penser ainsi à cet aspect technique.

S'agissant du rôle éventuel des commissions régionales, ce que nous voyons dans les nouvelles régions avec des préfets préfigurateurs, comme dans la nouvelle région Aquitaine où le préfet sera à Bordeaux et la DRAC à Poitiers, nous donne à penser que les architectes des bâtiments de France sont ainsi voués à redevenir des personnages départementaux autonomes. Nous privilégions plutôt la distance entre le lieu de la décision et les personnes qui délibèrent, afin de réduire les éventuelles pressions qui pourraient se faire jour.

Sur la zone tampon, j'ai sous les yeux un petit opuscule réalisé par la commission de classification au patrimoine mondial de l'UNESCO. Il est ainsi intéressant de noter que Fontainebleau ne dispose pas de zone tampon, malgré ses 144 hectares inscrits à l'UNESCO, tandis que Saint-Savin-sur-Gartempe, qui m'est chère car il nous a fallu lutter pour éviter l'implantation d'éoliennes, dispose quant à elle d'une zone tampon de 149 hectares pour un patrimoine de 0,16 hectare, c'est une véritable catastrophe ! S'il y avait une véritable zone tampon, il n'y aurait pas d'éolienne autour de Saint-Savin-sur-Gartempe. Je prendrai comme dernier exemple le Mont-Saint-Michel dont la zone tampon a été élargie à trois reprises. Créer une zone forfaitaire qui s'applique indéfiniment à deux sites distincts n'a aucun sens ! Cette idée de la zone tampon de l'UNESCO peut s'avérer très bénéfique.

Il est évident que si les AVAP sont maintenues, on règle une grande partie des problèmes. Mais quelle est donc la définition juridique du PLU ? L'article L. 121-1 du code de l'urbanisme précise qu'une municipalité peut, dans son PLU, définir un quartier comme remarquable. C'est tout. Dans certaines villes, comme à Paris et à Bordeaux, on a créé petit à petit un régime juridique municipal pour les immeubles remarquables. Lorsque la Ville de Paris en a classé d'un coup cinq mille, le préfet avait reçu l'ordre du ministère de la culture d'attaquer la décision. L'État a perdu, mais à l'occasion de la révision ultérieure du PLU, on s'est aperçu de l'absence de réglementation claire en matière de classement. C'est pourquoi la direction de l'urbanisme de la Ville de Paris a créé progressivement un régime spécifique. On est allé plus vite à Bordeaux en créant immédiatement un régime qui allait jusqu'aux fiches individuelles d'immeubles dans le système municipal ! Mais, à côté de cela, dans des communes à faible nombre d'habitants, que pouvez-vous faire ? Le PLU patrimonial tel qu'il est défini aujourd'hui n'est pas adapté à l'ensemble du territoire et ne peut faire l'économie d'une co-construction des protections patrimoniales avec l'État et les collectivités. Le mûrissement de la position des parlementaires, qui n'auraient pas défendu ce point il y a quelques années encore, est ici manifeste. En outre, la co-construction préserve la libre administration des collectivités territoriales. Néanmoins, l'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement permettant le financement des PSMV pour partie pour l'État. Nous demandons au Sénat de prendre position sur ce point et de soutenir que les PSMV sont établis conjointement entre l'État et les collectivités territoriales. Cette démarche nous paraît, dans la pratique, une évidence.

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