Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi qu’il nous est demandé d’examiner ce soir est une bonne initiative, que je soutiendrai, à la suite de mes collègues Alain Milon et Philippe Mouiller, à la condition de la voir amender par un certain nombre de précisions.
C’est une bonne initiative en ce qu’elle est porteuse d’un paradigme nouveau : elle vise à faire émerger de nouveaux emplois partiellement solvables pour accomplir des tâches utiles à la société, mais non réalisées actuellement, alors que les besoins sont pourtant nombreux, notamment dans un contexte de vieillissement de la population, comme nous l’avons mis en exergue, dans ce même hémicycle, voilà quelques semaines, au moment de l’examen du projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement. Les besoins en termes d’aides à la personne sont notamment très importants, et la question du financement de ces prestations reste entière. Et ce sont bien souvent les structures associatives locales aux faibles moyens qui réalisent un immense travail au sein des territoires, notamment auprès des populations les plus vulnérables.
Imaginer de redonner des perspectives aux chômeurs de longue durée, tout en développant des activités répondant à des besoins économiques et sociaux locaux non satisfaits semble donc une bonne opportunité de valoriser et de mettre en œuvre les compétences des personnes privées d’emploi et de parier sur la volonté collective des acteurs territoriaux de développer localement des activités nouvelles en se plaçant au plus près des besoins exprimés. L’idée est louable… Néanmoins, cette proposition de loi élude un certain nombre de réponses structurelles, sans lesquelles nous ne pourrons renouer avec le plein-emploi et la croissance.
Il demeure tout d’abord fondamental de s’attaquer aux racines du mal : le chômage de longue durée, ce fléau qui concerne aujourd’hui 4, 2 % de l’ensemble de la population active. Cette situation de privation d’emploi a des effets graves sur les personnes qui en sont victimes. Il s’agit au demeurant d’un cercle vicieux, puisque ces personnes sont également celles qui ont le moins de chance de retrouver un emploi en cas de reprise de la croissance.
En parallèle, ce sont plus de 2 millions d’emplois industriels que la France a perdus depuis les années quatre-vingt. Au regard de ces chiffres, l’établissement d’une corrélation entre désindustrialisation et permanence du chômage de masse se fait naturellement et doit nous interpeller, aujourd’hui plus encore qu’hier.
Le secteur tertiaire, porté notamment par les entreprises de l’économie sociale et solidaire dont il est question dans ce débat, joue un rôle clé dans la vitalité de nos territoires et le développement économique. Mais, j’en suis convaincu, la France doit également pouvoir compter sur le secteur secondaire, à travers la réindustrialisation de notre pays, même si les emplois directs sont moins nombreux qu’auparavant dans le secteur productif avec l’augmentation de la productivité.
Notre pays doit renouer avec la compétitivité en stimulant l’activité industrielle et la recherche. Cette approche est à mener de front avec le développement de l’activité économique sur le territoire et avec l’idée qu’aucune personne en âge d’exercer une activité professionnelle n’est inemployable. La création de richesses est un préalable au bon fonctionnement des mécanismes de solidarité et aux initiatives locales. En cela, cette proposition de loi est insuffisante.
Nous devons ensuite répondre à la question de la formation. La crise n’a fait qu’exacerber ce problème historique, de nature structurelle : il existe une inadéquation flagrante entre la formation et les besoins des entreprises. Ce sont environ 300 000 emplois qui ne trouvent pas preneurs actuellement.
Le reflux du chômage appelle une rénovation de nos systèmes de formation pour entretenir nos compétences industrielles à travers la réhabilitation des filières professionnelles. Il convient aussi de rapprocher les systèmes de formation, les salariés et les entreprises, pour développer dès le plus jeune âge un « habitus » de travail commun chez les ingénieurs, les techniciens, les ouvriers, et permettre une meilleure insertion de chacun, notamment des plus vulnérables.
Certains secteurs de notre économie sont amenés à disparaître, d’autres sont en voie d’émergence, comme les énergies vertes, les biotechnologies, les nouveaux matériaux... D’autres métiers vont perdurer, mais devront répondre à de nouvelles exigences.
Dans le cas de l’expérimentation qui nous est proposée à travers cette proposition de loi, quelles mesures sont-elles envisagées pour former les demandeurs d’emploi de longue durée ? Quels dispositifs sont-ils prévus pour permettre un retour à l’emploi « choisi » ? Quelle cohérence est-elle assurée avec les autres dispositifs de retour à l’emploi ?
Il faudra veiller à accompagner les bénéficiaires de l’expérimentation pour garantir leur insertion pérenne dans l’emploi, afin que le dispositif ne s’apparente pas in fine à un énième contrat aidé du secteur non marchand. Il conviendra donc de veiller à ce que ces derniers aient accès aux droits à la formation professionnelle acquis au titre des périodes de chômage pour valider leurs compétences acquises au sein de l’entreprise qui les embauche ou pour leur permettre d’en acquérir de nouvelles. De même, il faudra veiller à ne pas cloisonner ces salariés dans un type d’emploi ou un échelon de rémunération et à évaluer les dispositifs d’aides au retour à l’emploi déjà en vigueur dans ces territoires avant de les compléter par cette expérimentation. En ce sens, la préservation du caractère strictement volontaire de la participation des collectivités est indispensable.
Madame la ministre, il nous faut absolument apporter la garantie des financements et nous attaquer à la source du chômage de longue durée, ce qui passe par la reconquête de l’activité industrielle. À travers tous ces éléments, cette expérimentation peut avoir un sens.
Le 16/01/2016 à 17:00, Daniel Blivet a dit :
Monsieur,
Pour remédier au problème du chômage, commencez par décider le l'augmentation de notre productivité....ce sera plus éfficace que votre mesure expérimentale qui n'est qu'une ènième solution de traitement social du chômage.....
Décidez d'augmenter la compétitivité de 16,67% de toutes nos entreprises et de 20% du pouvoir d'achat de tous les salariés......et vous verrez les carnets de commandes de nos entreprises se regarnir, nos citoyens concrétiser des projets, notre commerce extérieur se rétablir.....
C'est simple à faire et immédiat. Les entreprises baissent leurs prix, toutes de 16,67% et les salariés, tous travaillent 42h00 payées 35h00...,accrochez vos ceintures pour une croissance à plus de deux chiffres.....pas besoin de sortir de l'euro ni d'obtenir des dérogations de Bruxelles !!!
C'est gagnant - gagnant, pour les citoyens, les acteurs économiques, l'Etat.
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