Intervention de Raymond Vall

Réunion du 19 janvier 2016 à 14h30
Reconquête de la biodiversité de la nature et des paysages — Suite de la discussion d'un projet de loi et d'une proposition de loi organique dans les textes de la commission

Photo de Raymond VallRaymond Vall :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens moi aussi à remercier Jérôme Bignon de son rapport remarquable ; il a beaucoup travaillé sur ce sujet.

Bien sûr, il y a urgence pour la biodiversité et urgence pour l’homme, car nos sociétés se sont construites et subsistent grâce aux services rendus par la nature, une nature que nous menaçons.

Selon une étude récente de la revue britannique Nature, modifier plus de 50 % de la surface du globe provoquerait un effondrement des écosystèmes dont les conséquences sont incalculables pour nos conditions de vie. Or le taux actuel s’élève à 43 %. Il faut donc agir !

À ce stade du débat, beaucoup de choses ont déjà été dites, et bien dites. Mais je ne peux m’empêcher de revenir sur un point qui a été souligné précédemment. Il y a encore actuellement des discussions un peu trop politiques, et nous n’avons certainement pas, il est vrai, suffisamment tenu compte des avis exprimés depuis de nombreuses années par les scientifiques.

Voilà vingt-cinq ans que Hubert Reeves – il apparaît dans le petit fascicule qui nous a été remis en tant que parrain de la mission de préfiguration et de la future Agence française pour la biodiversité – parcourt le monde entier, la France – et le Gers ! §– pour essayer sans relâche de nous faire prendre conscience de la situation. Comment concevoir que cette prise de conscience ait été aussi difficile, alors que les hommes ne pourront pas quitter cette planète demain matin ou en trouver une autre dans un temps compatible avec l’état de celle-ci ? Aussi, il est nécessaire de prendre conscience que nous sommes interdépendants pour y sauvegarder la vie.

Mais j’en reviens au texte qui nous est soumis.

Je veux le souligner, le renforcement des principes de solidarité écologique et de compensation est un point positif.

Par ailleurs, l’introduction du préjudice écologique par la commission du développement durable et son inscription dans le code civil fondent le principe de la responsabilité pour atteinte à l’environnement et la réparation des dommages qui lui sont causés.

La création de l’obligation réelle environnementale constitue une réponse pragmatique aux contraintes financières qui s’imposent à toute personne publique ou privée souhaitant agir en faveur de la biodiversité sur un terrain qui ne lui appartiendrait pas.

Certes, je pourrais vous faire part d’un certain nombre de points sur lesquels les membres du groupe du RDSE ont débattu ce matin en commission, mais la majeure partie d’entre eux suivra l’examen de ce texte avec attention et, j’en suis certain, le votera.

En effet, ce projet de loi, qui comporte un train de mesures, est indispensable. À cet égard, permettez-moi, madame la ministre, de revenir sur vos propos concernant l’engagement des territoires au travers de l’expérimentation dans les territoires à énergie positive pour la croissance verte.

Il faut que la future Agence française pour la biodiversité fonctionne au plus près du terrain. Comme vous l’avez souligné, c’est sur le terrain qu’auront lieu les actes concrets, auxquels nos concitoyens participeront. C’est ainsi que nous avancerons sur ce sujet essentiel.

Il importe aussi de traiter la question préoccupante des pesticides néonicotinoïdes, dont l’incidence sur les abeilles est scientifiquement avérée. Pouvons-nous encore invoquer notre incompétence juridique pour ne pas agir, alors que le principe d’action préventive figure dans le titre Ier du projet de loi ? Madame la ministre, il faut intervenir auprès de nos partenaires européens pour obtenir une interdiction ou, à tout le moins, un moratoire.

Enfin, le titre VI de ce texte renforce la prise en compte des paysages dans les politiques d’aménagement du territoire et introduit des objectifs de qualité paysagère dans les SCOT, les schémas de cohérence territoriale. C’est un encouragement pour les territoires, comme le mien, qui se sont volontairement engagés dans la réalisation d’un plan de paysage.

Mes chers collègues, notre responsabilité est grande. Dans le prolongement du Grenelle de l’environnement, de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte et de la COP21, la future loi constituera une étape décisive et indispensable en vue de réduire les pressions que nous exerçons sur la biosphère qui héberge notre vie.

À cet égard, permettez-moi de citer l’une des phrases que répète souvent Hubert Reeves, président d’honneur de l’association Humanité et Biodiversité, que j’ai eu l’honneur d’accueillir à de nombreuses reprises dans ma ville dans le cadre d’un festival qui a pris, grâce à lui, une dimension européenne : « La biodiversité nous concerne au premier chef, car la biodiversité c’est nous, nous et tout ce qui vit sur Terre. » Soyons-en conscients, nous sommes dépendants de la biodiversité !

C’est avec beaucoup d’attention que nous suivrons le sort réservé à la centaine d’amendements que nous présenterons. Mais, comme je l’ai souligné dans mon propos introductif, nous ne pouvons pas ne pas parvenir à un consensus : la politique doit aujourd'hui laisser place à la responsabilité. Nous devons faire en sorte que perdure la vie de notre espèce sur Terre.

Enfin, je salue le travail de tous les scientifiques qui se battent depuis de nombreuses années pour l’humanité et qui se sont largement fait les porte-parole de votre initiative, madame la ministre.

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