Intervention de Marwan Lahoud

Commission des affaires économiques — Réunion du 20 janvier 2016 à 9h00
Audition de M. Marwan Lahoud président d'airbus group sas et directeur général délégué d'airbus group

Marwan Lahoud, président d'Airbus Group SAS :

La formation et le recrutement ont été évoqués à de nombreuses reprises et je m'en réjouis car s'il y a un sujet qui m'empêche de dormir, c'est bien lorsque je pense à nos successeurs et à ceux qui feront l'entreprise dans vingt ans. Pour maintenir une formation scientifique et technique de grande qualité, Airbus et le GIFAS ne ménagent pas leurs efforts pour soutenir la filière et tout particulièrement les écoles d'ingénieurs. Certains de nos cadres y donnent bénévolement des cours, nous finançons des projets et le GIFAS a décidé d'attribuer une dotation d'1,5 million d'euros par an aux écoles d'ingénieurs en aéronautique.

Concernant la place des femmes, le déficit de recrutement féminin dans les filières techniques et scientifiques est grand. Il serait très facile de remplacer l'un de nos directeurs hommes par une femme mais la problématique n'est pas celle-là : alors qu'à treize ou quatorze ans, les jeunes filles sont excellentes en science, elles ne s'engagent pas dans des études scientifiques en considérant que « ce n'est pas pour elles ». Pour remédier à cette situation, nous allons dans les collèges pour expliquer l'intérêt de ces métiers et dire qu'il y a des débouchés. Chez Turkish Aerospace Industries, la majorité des ingénieurs sont des femmes car c'est pour elles une voie d'émancipation.

Au-delà des ingénieurs, nous avons aussi besoin d'opérateurs, c'est-à-dire des techniciens supérieurs qui ont souvent un bac technologique, et pas seulement dans le domaine informatique - des chaudronniers, des soudeurs, etc. Pour les recruter, nous organisons des formations, nous avons un très bon lycée à Toulouse par exemple ou de très bons accords dans la Somme avec l'Éducation nationale et les collectivités territoriales. Il faudrait généraliser ces partenariats et permettre à une filière qui le souhaite de s'organiser pour former, sans multiplier les autorisations. C'est parfois un parcours administratif semé d'embuches et je crois beaucoup à la coopération avec les collectivités.

Vous m'avez interrogé sur les ruptures technologiques de l'avion de demain. Il s'agit là d'une question complexe et j'ai l'habitude de dire que le seul qui ait le droit de se tromper dans une entreprise, c'est le patron de la stratégie, tant la prévision est difficile ! L'avion commercial à l'horizon 2030 ressemblera sans doute encore à l'avion actuel : une cabine, un cockpit, un gouvernail, une paire d'ailes et des moteurs sous les ailes. Mais l'on voit bien que l'on atteint les limites de ce modèle et qu'au-delà de 2030, l'avion de ligne changera de forme. Parmi les axes de recherche figure la poursuite de la réduction des émissions et des consommations et l'on peut à cet égard se réjouir qu'en matière d'aviation, l'écologie et l'économie aillent de pair. Il faudra sans doute radicalement changer les formules de moteurs et même si la recherche en la matière n'est pas mûre, on peut citer par exemple les travaux sur l'« open rotor », c'est-à-dire un turboréacteur non enfermé dans une nacelle et qui ressemblerait en quelque sorte à un moteur à hélices. Il existe d'autres approches prometteuses telles que l'utilisation d'une boîte de vitesse dans la motorisation Pratt & Whitney de la version Neo de l'A 320, qui est en fait un jeu de réducteurs permettant d'optimiser la puissance.

Nous sommes très mobilisés autour de l'ONERA, qui est un établissement public très utile, même si ses crédits sont en train d'être coupés. Nous travaillons avec son président au renouvellement des équipes.

S'agissant de la chaine de production, les seuils sociaux, et plus encore fiscaux, constituent un obstacle à son développement, contrairement à un pays comme l'Allemagne. Fort heureusement, nous bénéficions d'un bon climat social dans notre filière, du fait de sa bonne santé économique. Nous pouvons ainsi traiter nos problèmes en interne.

Le CIR permet de conserver un avantage compétitif au profit du chercheur français par rapport à son homologue allemand. Sans cette dépense fiscale, l'effort de recherche serait naturellement attiré vers d'autres partenaires européens, notamment l'Allemagne.

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