Intervention de Ségolène Royal

Réunion du 22 janvier 2016 à 14h30
Reconquête de la biodiversité de la nature et des paysages — Article 56

Ségolène Royal, ministre :

J’ai rencontré les associations de la plateforme Océan et Climat et j’ai réussi, non sans mal, à faire intégrer cette question à la veille de la COP 21.

Pourquoi une telle résistance ? Parce que les océans ne sont pas habités. Il n’y a personne, pas de maisons, pas de villages, pas de mairies, pas d’élections. Pas vu, pas pris ! L’océan est considéré comme la poubelle du monde.

Or, aujourd’hui, avec la fonte des glaces, des terres apparaissent qui vont permettre l’exploitation de ressources naturelles qui, jusqu’à présent, n’étaient pas accessibles. Si nous ne définissons pas certaines règles sur les usages de l’océan, nous courons à des catastrophes économiques considérables.

Des règles sont absolument indispensables. Il serait catastrophique de donner le signal d’un refus de l’interdiction du chalutage en eaux profondes par un vote supprimant un dispositif somme toute très prudent, puisqu’il ne précise pas la profondeur et requiert encore un texte d’application.

La France doit avancer et montrer l’exemple. Nous sommes la deuxième puissance maritime du monde et nous rechignerions à adopter des règles qui paraîtront pourtant évidentes dans quelques mois, tant les consciences évoluent rapidement ?

Ces règles protègeront les pêcheurs. J’en ai assez de m’entendre répondre, à chaque action contre la pollution de la mer, que les pécheurs s’y opposent, dans tel ou tel port de pêche. J’ai présidé une région où se trouvaient des ports de pêche. Chaque fois que nous luttions contre la pollution en établissant des règles, les pêcheurs en étaient les premiers bénéficiaires !

À défaut, le moment arrivera où il n’y aura plus de poissons à l’échelle mondiale. Beaucoup de peuples sur la planète vivent des ressources de la mer. C’est extravagant, pourtant la famine la plus rapide va se déclencher dans les pays limitrophes de l’océan, à cause de la surpêche et des différentes pollutions.

Nous devrions ne rien faire sous prétexte qu’il existerait un ou deux bateaux concernés en France ? Mais il n’y en a aucun ! On m’a parlé d’un bateau d’Intermarché. J’ai appelé les représentants de cette entreprise, je les ai interrogés, ils m’ont répondu que l’image commerciale de la pêche en eaux profondes était si mauvaise qu’ils avaient cessé de la pratiquer ! On m’a donc raconté des salades, même sur la pêche française !

Aujourd’hui, aucun bateau français ne pêche en dessous de 800 mètres. Nous refuserions pourtant de définir des règles, au risque d’avantager les entreprises étrangères aux dépens des entreprises françaises, sous prétexte que certains bateaux pêcheraient encore en eaux profondes en France, alors que c’est faux et qu’il n’en reste plus ? Et quand bien même il en resterait un, il faudrait lui dire d’arrêter !

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