Intervention de Mireille Schurch

Réunion du 29 mai 2010 à 9h30
Modernisation de l'agriculture et de la pêche — Article 15

Photo de Mireille SchurchMireille Schurch :

Cet amendement vise à supprimer dans le texte l’un des objectifs poursuivis par les stratégies locales de développement forestier, à savoir le renforcement de la compétitivité de la filière de production, de récolte, de transformation et de valorisation des produits forestiers.

Nous jugeons en effet que ce vocabulaire productiviste, illustrant le dogme du « produire plus, produire mieux », n’est pas adapté à une vision durable de la gestion de la forêt.

Le postulat de départ sur lequel s’appuie ce projet de loi relève d’une interprétation discutable des chiffres fournis par l’Inventaire forestier national, l’IFN, qui justifie un discours selon lequel les forêts françaises seraient sous-exploitées depuis vingt-cinq ans.

Les vingt millions de mètres cubes disponibles à l’horizon 2020 sont théoriques, car une grande partie de la forêt privée ne dispose pas de desserte, et les chiffres prennent en compte certaines espèces qui sont exploitables, mais non commercialisables.

En réalité, le capital sur pied actuel de la forêt française, suivant les chiffres de l’IFN, est en moyenne de 161 mètres cubes par hectare, contre 333 mètres cubes par hectare en Suisse, 278 mètres cubes par hectare en Allemagne, 250 mètres cubes par hectare au Luxembourg et 219 mètres cubes par hectare en Belgique.

Pis, toujours selon l’IFN, seuls 22 % des bois inventoriés présentent un diamètre supérieur à cinquante centimètres.

La forêt française est donc loin d’être surcapitalisée et sous-exploitée.

La hausse des récoltes atteint d’ailleurs un tel point qu’elle remet en cause l’équilibre même des écosystèmes forestiers dans leur globalité, en prenant en compte uniquement le souci financier et en faisant totalement abstraction de l’état réel des peuplements.

Aujourd'hui, on marque le bois à abattre en fonction de la demande et non plus selon les principes de la sylviculture.

La recherche de l’exploitation de l’intégralité de l’accroissement biologique, alors que 22 % seulement des bois sont des gros bois, risque de conduire à d’énormes sacrifices d’exploitabilité, ce qui aura à notre avis comme conséquence d’affaiblir le capital sur pied.

Toute la noblesse du métier de forestier est de parvenir à trouver le point d’équilibre parfait entre possibilités et récoltes, de même qu’entre les différents services que la société demande aux forêts de lui procurer.

A contrario, au travers du présent projet de loi, le législateur perçoit la forêt comme une simple marchandise devant répondre à la loi de l’offre et de la demande.

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