Intervention de Alain Richard

Réunion du 2 février 2016 à 14h30
Lutte antiterroriste — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Alain RichardAlain Richard :

Monsieur le président, monsieur le ministre, cher Jean-Jacques Urvoas, mes chers collègues, la France, ces dernières semaines, ces derniers mois, se sentait en état de choc. L’adoption quasi unanime de la loi prorogeant l’état d’urgence a été au fond la traduction de ce choc. Mais nous devons nous garder de ressentir cette situation comme celle d’un moment ; il faut, en portant un regard plus large, nous persuader que la menace terroriste sur notre nation est installée.

Je ne développerai pas de longue théorie. Le terreau existe dans notre société pour des gens qui basculent vers le fanatisme, mais l’impulsion, nous le savons tous, nous est extérieure, elle est le produit d’une série de tensions – et même de convulsions, irai-je jusqu’à dire – politiques qui traversent depuis longtemps le Moyen-Orient et dont nous ressentirons encore longtemps les répercussions – pas seulement nous d’ailleurs, d’autres régions du monde aussi.

La paix dans notre République est devant un défi durable. Cela crée des devoirs pour l’État ; c’est de cela que nous parlons cet après-midi.

J’ajoute une observation à ce tableau d’ensemble. Nous le constatons à bien des égards, la France est plus exposée à ce risque que nombre de ses amis et alliés. D’où la difficulté pour le chef de l’État et le Gouvernement à convaincre nos partenaires de l’Union européenne qui n’ont pas encore été frappés que leur intérêt est d’être aussi vigilants et proactifs que nous. C’est un effort permanent qui doit être malheureusement poursuivi.

Quelles que soient les familles de pensée qui partagent cet hémicycle, nous avons voté ensemble la loi du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme, la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement, qui doit beaucoup à M. le garde des sceaux, ainsi que, comme je le rappelais à l’instant, la loi prorogeant l’état d’urgence, et ce massivement.

Nous nous retrouvons maintenant face à nos responsabilités : améliorer, consolider et renforcer les outils de l’État, et d’abord ceux de l’autorité judiciaire, pour prévenir les menées terroristes sur notre sol et y réagir plus efficacement encore.

Le projet de loi tendant à renforcer l’action pénale, qui sera présenté demain en même temps que celui qui est destiné à proroger l’état d’urgence, sera le véritable outil marquant cette nouvelle étape. Tant Philippe Bas que Michel Mercier ont bien résumé ce qu’est l’objectif premier de ce texte – et sur ce point, nous sommes en accord – : renforcer les moyens d’enquête et d’information approfondie sur les préparatifs terroristes, avec la capacité de surprendre. C’est ce qui fait la différence avec les procédures de droit commun que nous connaissons aujourd’hui.

Le cœur du dispositif prévu aussi bien dans la présente proposition de loi que dans le projet de loi évoqué à l’instant, c’est le renforcement des pouvoirs d’enquête immédiats confiés au procureur de la République, sous le contrôle et avec l’assentiment d’un magistrat du siège.

Sur ce point, nous avons la même approche. Dans cet état de danger permanent auquel nous devons nous habituer, je souligne que c’est l’outil nécessaire pour atteindre l’objectif visant à prévenir et à empêcher, même à la dernière minute, le passage à l’acte meurtrier.

Dans cette situation politique, l’opposition a bien entendu tout son rôle. Le Gouvernement est certes à l’initiative, mais je me plaisais à rappeler que nous avions voté ensemble, majorité et opposition, un certain nombre de textes. Cette fois-ci, nos collègues constituant la majorité de cette assemblée – et représentant l’opposition nationale – ont voulu apporter leur contribution à cette législation. Ils le font sous la forme d’une proposition de loi, élaborée avec soin.

Pour notre part, nous pensions à d’autres formes de contribution au débat, à d’autres apports pour améliorer la loi pénale. D’ailleurs, et cela a été souligné, l’état d’esprit qui règne au sein du comité de suivi de l’état d’urgence nous permet de penser que c’est bien vers cette mise en commun des idées que nous irons. Simplement, cette proposition de loi telle qu’elle résulte des travaux de la commission traduit des différences d’approche –M. le garde des sceaux en a déjà cité deux. Nous le voyons bien, dans la diversité des sujets abordés par ce texte, nous ne pourrons pas rejoindre certaines des propositions qui y sont faites, très typées selon l’orientation politique de l’opposition.

En espérant avoir l’écoute de Philippe Bas et de Michel Mercier…

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