Intervention de Philippe Bonnecarrere

Réunion du 4 février 2016 à 14h30
Autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes — Adoption d'une proposition de loi et d'une proposition de loi organique dans les textes de la commission modifiés

Photo de Philippe BonnecarrerePhilippe Bonnecarrere, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi organique relative aux autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes et la proposition de loi portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes représentent la traduction législative des conclusions d’une récente commission d’enquête sénatoriale, dont nous venons d’entendre deux des prestigieux animateurs.

Ces conclusions ont livré une analyse sévère de ces structures, jugées trop nombreuses, insuffisamment contrôlées et propices à un recrutement endogamique, à une sorte d’« entre soi », pour reprendre les termes employés dans le rapport. Ces éléments ont été excellemment développés par les deux précédents orateurs.

Les textes que nous examinons aujourd’hui encadrent et clarifient, à juste titre, les autorités administratives indépendantes. Ils identifient celles pour lesquelles ce statut apparaît légitime, supprimant en conséquence cette qualité aux autres.

Plusieurs de ces autorités interviennent dans les secteurs de compétence de notre commission de la culture, de l’éducation et de la communication, qui s’est en conséquence saisie pour avis, dans le respect des prérogatives de la commission des lois, de plusieurs articles traitant respectivement de l’Autorité de régulation de la distribution de la presse, l’ARDP, de la Commission nationale d’aménagement cinématographique, la CNAC, de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet, la HADOPI, de l’Agence française de lutte contre le dopage, l’AFLD, du Conseil supérieur de l’audiovisuel, le CSA, et du Haut Conseil d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur, le HCERES.

La commission de la culture a suivi les coauteurs des deux textes que nous examinons, en admettant la pertinence du retrait de la liste annexée à l’article 1er de quatre des institutions concernées.

Nos propositions ayant été retenues ou satisfaites par la commission des lois, lors de sa réunion du 27 janvier dernier, pour ce qui concerne le CSA, le HCERES et les conditions de l’indépendance des médiateurs du cinéma, du livre – en attendant celui de la musique, dont nous parlerons la semaine prochaine à l’occasion de l’examen du projet de loi relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine –, je limiterai mon intervention aux difficultés que pose le présent texte s’agissant de l’ARDP et de la HADOPI. Je précise que la commission des lois a souhaité que les amendements déposés sur ces deux questions soient examinés en séance.

La commission de la culture a jugé qu’il était essentiel que l’ARDP, autorité de régulation de la presse écrite, demeure libre à l’égard des éditeurs de presse et qu’elle continue à être une AAI, statut qui lui a été conféré récemment, et à l’unanimité, par la loi du 17 avril 2015.

Son coût est limité pour le budget de l’État et sa nouvelle mission, fort délicate, d’homologation des barèmes des messageries de presse et de régulation des conventions régissant les réseaux et différents niveaux de distribution de la presse écrite, nécessite une indépendance accrue vis-à-vis des acteurs de la distribution. Le renforcement de son rôle a d’ailleurs été accepté par tous les acteurs concernés. Vous pouvez lire le rapport de 2015 qui a été publié à cet égard.

La Cour d’appel de Paris en 2013, puis en 2015, et surtout le Conseil constitutionnel dans une décision du 7 janvier 2016 se sont d’ailleurs fait l’écho de cette indispensable indépendance. Le Conseil constitutionnel a, par ailleurs, retenu la qualification d’AAI.

J’ajoute, pour gagner du temps sur le débat d’amendements, qu’en arrière-plan de l’ARDP il y a la loi Bichet du 2 avril 1947, qui a organisé la solidarité entre les différents formats de presse écrite et qui garantit la pérennité de la presse d’information politique et générale, dite IPG. Nous touchons donc là à des sujets d’importance en termes d’exercice des libertés publiques.

Quant à la HADOPI, notre commission estime que son indépendance constitue la condition indispensable à l’établissement d’un équilibre entre les intérêts antagonistes des ayants droit et des consommateurs d’œuvres culturelles sur internet et à la garantie de la sécurité juridique nécessaire à la mise en œuvre de la réponse graduée, notamment pour ce qui concerne la protection des données personnelles des internautes et la régulation des mesures techniques de protection, les MTP. Sur ce point, la HADOPI dispose de pouvoirs précontentieux, ce qui nécessite de recourir au statut d’AAI, y compris dans le cadre fixé par la proposition de loi et par la proposition de loi organique.

Au travers de trois amendements, la commission de la culture souhaite donc rétablir ces deux autorités, l’ARDP et la HADOPI, dans leur statut existant, en les intégrant à la liste annexée à l’article 1er et en modifiant en conséquence l’article 25 de la proposition de loi.

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