Intervention de Antoine Lefèvre

Réunion du 3 février 2016 à 14h30
Droit individuel à la formation pour les élus locaux — Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Antoine LefèvreAntoine Lefèvre :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, tout arrive !

Je veux remercier Jean-Pierre Sueur de son initiative, car l’adoption de cette proposition de loi permettra effectivement aux élus locaux de bénéficier, enfin, du droit individuel à la formation.

Le texte a été déposé dans le prolongement de l’adoption de l’article 15 de la loi visant à faciliter l’exercice, par les élus locaux, de leur mandat, article lui-même issu des conclusions et recommandations que j’avais énoncées dans le cadre de mon rapport d’information, fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales, sur la formation des responsables locaux, que ces derniers soient élus ou agents publics. Ce rapport avait été publié en octobre 2012… Plutôt avant-hier qu’hier ! C’était aussi trente ans après les premières lois de décentralisation et vingt ans après la loi du 3 février 1992 relative aux conditions d’exercice des mandats locaux.

Il était donc temps de s’inquiéter, enfin, des droits à la formation des élus locaux.

Dès le mois de novembre 2012, certaines de ces conclusions avaient été intégrées à la proposition de loi dont résulte la loi visant à faciliter l’exercice, par les élus locaux, de leur mandat que je viens d’évoquer. Ce texte regroupait tout un tas de dispositions issues, pour certaines, des états généraux de la démocratie territoriale, pour d’autres, des réflexions menées par la délégation aux collectivités territoriales.

Mais c’était sans compter sur une certaine lenteur de nos collègues de l’Assemblée nationale : une fois le texte transmis, au mois de janvier 2013, ils mettront pratiquement un an avant de l’inscrire à leur ordre jour, soit au mois de décembre suivant !

À la suite du retour du texte au Sénat, certainement parce que nous sommes les représentants de ces centaines d’élus locaux, le temps s’est de nouveau accéléré : la nouvelle lecture s’est déroulée en un petit mois.

Las, l’Assemblée nationale a, une nouvelle fois, fait preuve d’une lenteur de gastéropode, en inscrivant le texte à l’ordre du jour une année plus tard, soit au mois de janvier 2015 – le 22 pour être exact –, un an jour pour jour après la seconde lecture au Sénat.

Vous-même, madame la ministre, aviez souligné cette certaine lenteur à l’époque.

Le temps d’une commission mixte paritaire, au cours de laquelle se dégagea un accord entre nos deux chambres, et la disposition pour laquelle nous sommes réunis ce jour, à savoir l’article 15 de la loi de 2015, était enfin adoptée, promulguée… et applicable, me dira-t-on. Eh bien non ! Alors même qu’elle devrait l’être depuis le 1er janvier 2016, la mesure n’est pas appliquée, faute de dispositions pratiques, à savoir la mise en place de l’organisme chargé de collecter les cotisations des élus.

Ces mêmes élus, depuis l’évocation de ce droit à formation et de son effectivité, sont passés par la moulinette des scrutins locaux, qu’ils soient municipaux, départementaux ou, plus récemment, régionaux. Pour autant, ils n’ont pu bénéficier de ce droit, nécessaire à la fois à une bonne administration de leur mandat et à une éventuelle reconversion à l’issue de celui-ci.

Il n’est donc que temps d’une part, que le Gouvernement prenne les décrets d’application et, d’autre part, comme il existe manifestement une lacune quant à l’organisation de la collecte, de la gestion et de la répartition des fonds, que nous votions cette proposition de loi.

Le constat, en effet, est posé depuis plus de trois ans et nous en sommes encore à des ajustements !

Force est de constater, une fois de plus, notre lenteur, soit législative, soit exécutive, soit administrative, cocktail dont souffrent nos administrations, nos élus et, par là même, nos concitoyens.

Vous le remarquez tous les jours dans vos territoires, mes chers collègues, la gestion d’une collectivité territoriale ne s’improvise pas. Le mandat local s’est extrêmement complexifié.

Or une démocratie représentative implique que chaque citoyen puisse, à travers des élections libres, être élu. En compensant les inégalités en matière de formation initiale, la formation permet de ne pas laisser aux seuls « sachants » des affaires publiques le monopole des mandats électifs. En outre, elle permettra aussi de remédier à une représentation souffrant d’un manque de diversité.

Si nous voulons que tout un chacun puisse s’intéresser, se passionner pour la chose publique et, enfin, se présenter à des mandats locaux sans craindre de faillir à ses fonctions, puis, éventuellement, de les perdre, donc sans s’inquiéter, à juste titre, de son devenir, nous devons adopter cette proposition de loi, qui est l’évidence même.

D’ailleurs, je juge tout à fait nécessaire de développer la culture de la formation, pour les élus comme pour tout un chacun.

Cela étant, je note que la procédure accélérée a été engagée. Nous sommes par conséquent tous bien conscients de l’urgence de ce texte !

Venons-en à cette mesure concrète, consistant à demander à la Caisse des dépôts et consignations de collecter, gérer et instruire toutes les étapes de cette formation, maintenant ouverte à nos élus locaux.

La « Caisse », comme on l’appelle familièrement, exécute des activités d’intérêt général confiées par l’État ou les collectivités locales, et ne rend compte qu’au Parlement. Le choix paraît quasi évident, puisque, comme exposé dans les motifs de la proposition de loi de Jean-Pierre Sueur, elle est, depuis la loi instaurant le compte personnel de formation entrée en vigueur le 1er janvier 2015, chargée de la gestion de celui-ci. De ce fait, son expertise, en quelque sorte, est ainsi reconnue. Je pourrais ajouter, pour reprendre une expression populaire, que cela tombe sous le sens !

Enfin, je constate avec plaisir que le Gouvernement a profité du présent véhicule législatif pour déposer un amendement correctif relatif au régime indemnitaire applicable aux élus des syndicats de communes, syndicats mixtes fermés et syndicats mixtes ouverts restreints. Je ne reviendrai pas sur la saga constitutionnelle, fort bien évoquée par Jean-Pierre Sueur, ainsi que par Mme la ministre, mais je me réjouis de cette issue positive.

Pour toutes ces raisons, comme l’ensemble des collègues de mon groupe, je voterai cette proposition de loi.

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