Non, monsieur le président de la commission des lois, vous ne pouvez pas discuter avec M. le secrétaire d’État et m’écouter en même temps ! C’est assez agaçant !
Pour mon groupe et la sensibilité politique qu’il représente, le Parlement doit être au centre du système législatif. Nous sommes depuis longtemps partisans de la mise en place d’un régime parlementaire d’un nouveau type, alliant une participation accrue du citoyen aux décisions à la maîtrise par les représentants du peuple du processus législatif.
Dans ce cadre, le concept même de ces missions effectuées par des parlementaires auprès et au service du Gouvernement n’a plus lieu d’être, car il constitue en fait un aveu de l’impuissance des deux assemblées.
Le rythme intensif des débats, l’inflation législative, la maîtrise budgétaire exercée par les autorités de Bruxelles, l’encadrement par le Conseil constitutionnel et, maintenant, les questions prioritaires de constitutionnalité ont, parmi d’autres éléments, réduit à bien peu de choses les pouvoirs du Parlement.
Un autre élément nous encourage à défendre la suppression de ces missions : l’utilisation, par le pouvoir exécutif et la majorité en place, d’une étrange spécificité des modalités de remplacement des parlementaires en mission lorsque cette dernière est prolongée au-delà de six mois.
En effet, contrairement à ce que prévoit le droit commun, le parlementaire dont la mission s’est poursuivie au-delà de six mois est remplacé soit par le suivant de liste, en cas d’élection par scrutin à la proportionnelle, soit par son suppléant dans le cas d’une élection au scrutin majoritaire. C’est dans ce second cas que les modalités prévues sont assez surprenantes. En effet, seules les circonstances de décès ou de nomination au Gouvernement permettent ce type de remplacement.
Ces derniers temps, le recours à la prolongation de la mission confiée à des parlementaires a permis d’organiser la succession de ceux-ci au Parlement sans qu’une élection partielle soit nécessaire. Ce fut le cas pour le remplacement du député François Brottes et la démarche a été tentée lors de la nomination de Pierre Moscovici en tant que commissaire européen.
De telles pratiques sont évidemment inacceptables sur le plan démocratique. Mon groupe votera donc cette proposition de loi organique, qui vise à empêcher toute dérogation au principe de séparation entre mandat parlementaire et fonction publique non élective.
Il faut rappeler que ces missions ne se limitent pas à la seule participation à la rédaction de rapports. Elles peuvent relever de l’exercice plein et entier de fonctions telles que celles de préfet ou même, cela a été rappelé, de haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie. Sachant que les prérogatives des parlementaires, y compris le droit de vote, sont intégralement conservées durant l’exercice de ces missions, il s’agit là d’une curiosité constitutionnelle qui ne peut plus être acceptée.
À l’heure où la transparence est de mise, il serait de bon aloi de revenir sur ces dispositions. Nous estimons d’ailleurs qu’un sujet voisin sera un jour remis en débat : celui du droit des ministres à retrouver automatiquement leur siège de député ou de sénateur quand ils quittent le Gouvernement, conformément au nouvel article 25 de la Constitution, introduit lors de la révision constitutionnelle de 2008. Cette mesure, nous semble-t-il, crée également une confusion regrettable entre fonction exécutive et fonction législative.