Intervention de Aline Archimbaud

Réunion du 3 février 2016 à 22h20
Suppression des missions temporaires confiées par le gouvernement aux parlementaires — Adoption d'une proposition de loi organique dans le texte de la commission

Photo de Aline ArchimbaudAline Archimbaud :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, chers collègues, les membres du Rassemblement démocratique et social européen nous proposent aujourd’hui de supprimer les missions temporaires confiées par le Gouvernement aux parlementaires, pour plusieurs raisons, que l’auteur de la proposition de loi et le rapporteur ont exposées.

Nous entendons bien les critiques de deux ordres qui peuvent être adressées à ces missions.

Tout d’abord, elles remettraient en cause la séparation des pouvoirs, car elles lieraient législatif et exécutif.

Les écologistes sont très attachés au principe de séparation des pouvoirs, et nous comprenons bien que certaines missions confiées à des parlementaires peuvent semer le doute à cet égard, notamment lorsqu’elles prennent la forme de l’exercice d’un haut-commissariat.

Cependant, beaucoup de missions consistent en des travaux d’enquête donnant lieu à des auditions et à la rédaction d’un rapport apportant des éléments précis sur des problématiques bien particulières. Ils peuvent permettre aux parlementaires d’interpeller le Gouvernement de façon plus précise, plus argumentée, et déboucher sur des propositions législatives nouvelles.

Par expérience, je peux vous assurer que les missions confiées à des membres de notre groupe ont pu être conduites par eux en toute liberté. Nous avons pu approfondir des sujets peu travaillés comme nous l’entendions. Nous avons été totalement libres d’auditionner qui nous souhaitions, de procéder à des analyses et de formuler des propositions comme nous le voulions, sans subir aucune pression de la part du Gouvernement.

Les rapports produits sont en général, nous semble-t-il, utiles pour défricher des sujets peu traités par ailleurs, affiner les connaissances sur des problèmes concrets et élaborer des solutions réalistes, précises, introduites dans des véhicules législatifs appropriés.

Ces missions sont parfois proposées à la suite d’interpellations du Gouvernement par les parlementaires eux-mêmes, sur tel ou tel sujet. Je pense ainsi à la mission sur l’accès aux soins pour les plus démunis, que j’ai menée en 2013 et qui a débouché sur la présentation de nombreux amendements finalement intégrés aux lois de financement de la sécurité sociale ou à la loi de modernisation de notre système de santé, par exemple. Certaines propositions ont abouti, ce dont nous nous réjouissons.

Les rapports de mission parlementaire peuvent permettre, par ailleurs, de croiser les disciplines. Je prendrai l’exemple d’une autre mission récente, sur le taux de suicide des jeunes Amérindiens de Guyane, problème très préoccupant à la croisée des questions de santé, de culture, d’éducation, d’économie, d’écologie, qui concerne transversalement de nombreux ministères, au-delà de celui des outre-mer.

Cette mission a permis de multiplier les contacts avec les populations et l’ensemble des acteurs concernés, ainsi que de formuler des préconisations pouvant servir de base de travail et de réflexion.

De telles missions peuvent également être l’occasion, lorsqu’elles sont réalisées par des parlementaires des deux assemblées, d’une collaboration entre le Sénat et l’Assemblée nationale, ce qui peut permettre d’ouvrir des horizons, de confronter les façons de travailler.

Ces missions peuvent être considérées comme complémentaires des moyens mis à la disposition des parlementaires par le Sénat et l’Assemblée nationale pour leur permettre d’exercer leur mission de contrôle et d’évaluation de l’action publique, mais aussi leur droit d’initiative. Il ne nous paraîtrait pas pertinent de les supprimer totalement.

Une seconde critique forte porte sur les modalités peu démocratiques de remplacement des parlementaires n’achevant pas leur mission dans le délai imparti.

Nous nous associons à cette critique. La proposition de réintroduire des élections partielles dans ces situations nous paraît juste. Nous voterons l’amendement qui a été déposé en ce sens : on ne peut pas, par une sorte de ruse, contourner le suffrage universel, la démocratie.

Mes chers collègues, vous l’aurez compris : nous ne pouvons soutenir cette proposition de loi organique en l’état, même si nous sommes d’accord pour considérer que le dispositif actuel mériterait des ajustements. Nous voterons donc contre ce texte.

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