Intervention de Catherine Morin-Desailly

Réunion du 9 février 2016 à 14h30
Liberté de création architecture et patrimoine — Discussion d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Catherine Morin-DesaillyCatherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, grand millésime ou petite année ? À l’évidence, ni l’un ni l’autre !

Comme l’ont souligné plusieurs membres de notre commission lors de l’examen du texte, il s’agit plutôt d’une bouteille à moitié vide, ou à moitié pleine. Tel apparaît en effet le projet de loi qui nous est aujourd’hui soumis, un projet de loi maintes fois annoncé, qui, à force d’être différé, est devenu un peu un texte à tiroirs et dont on a peine à voir le fil conducteur.

À titre personnel, et j’ai eu l’occasion de le dire dans mon rapport pour avis sur la loi NOTRe, j’aurais aimé que celle-ci soit une vraie loi de décentralisation, qui, dans le domaine qui nous concerne, précise de nouveau les missions de l’État et celles des collectivités territoriales, puis qu’elle soit suivie de lois-cadres définies sur la création, d’une part, et sur le patrimoine et l’architecture, d’autre part. Je pense que nous y aurions gagné en lisibilité et en cohérence.

C’est peu dire que ce projet de loi suscite un sentiment mitigé, entre mesures bienvenues ou nécessaires, traduisant souvent des accords interprofessionnels – je pense notamment aux dispositions relatives à la musique – et modifications plus contestables – par exemple la réforme en profondeur de l’archéologie préventive – ou notoirement insuffisantes.

Je n’oublie pas l’ouverture par l’Assemblée nationale de nombreux nouveaux chantiers, ce dont je remercie nos collègues députés, au moins pour certains d’entre eux, en particulier celui sur les enseignements artistiques spécialisés. Cet oubli dans le texte initial était d’autant plus regrettable que les établissements concernés vivent depuis 2004 une crise institutionnelle, doublée ces dernières années d’une crise financière, qui est loin, hélas, d’être terminée.

Depuis la loi de 1977, le Parlement n’avait pas eu à examiner les questions relatives à l’architecture. Près de quarante ans plus tard, il était donc utile de réfléchir au rôle de l’architecte dans la cité. Certains ajouts dus à l’Assemblée nationale, notamment à son rapporteur, et relatifs à l’architecture font l’unanimité, tandis que d’autres, qui font davantage débat, seront sans doute très discutés dans les jours à venir.

Il est difficile, dans ces conditions, de porter un jugement sur ce texte. Beaucoup d’acteurs s’en sont perçus comme les grands oubliés, parfois injustement, dans la mesure où tout ne passe pas par la loi.

C’est pourquoi, sans esprit polémique, madame la ministre, notre commission, sur l’initiative de nos deux rapporteurs, François Férat et Jean-Pierre Leleux, dont je tiens à saluer le travail très approfondi, mais également de ses autres membres, s’est efforcée de clarifier le texte. Elle a adopté 34 articles sans modification et plusieurs autres ont été modifiés pour de simples questions de coordination ou des corrections mineures.

Pour une fois, nous ne sommes pas exposés à la brutalité de la procédure accélérée, ce dont nous nous réjouissons, car cela devrait nous permettre de rapprocher les points de vue, notamment en matière de protection du patrimoine, où nous avons réussi à bâtir, je crois pouvoir le dire ici, un système équilibré entre liberté des collectivités territoriales et protection efficace et simplifiée. Nous avons ainsi levé les légitimes inquiétudes qui s’étaient exprimées, et pas seulement celles des associations de défense du patrimoine.

Notre commission a également estimé utile d’enrichir le texte, afin, en particulier, de soutenir la création. Le nombre des amendements déposés montre combien notre rapporteur a eu raison de proposer que le droit de suite puisse être dévolu aux musées et fondations.

Les dispositions que nous avons adoptées afin de clarifier les relations entre producteurs et distributeurs sont plus controversées et pourraient évoluer au fil de la navette parlementaire. Elles ont le mérite de lancer un débat plus que nécessaire : le monde bouge et la mutation numérique entraîne des recompositions ; il faut y réfléchir.

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