Intervention de Fleur Pellerin

Réunion du 10 février 2016 à 14h30
Liberté de création architecture et patrimoine — Articles additionnels après l'article 2 bis

Fleur Pellerin, ministre :

Monsieur le sénateur, vous proposez d’exclure du champ des négociations commerciales européennes et internationales les secteurs de la création, de la production et de la commercialisation des biens et services culturels protégés par le droit d’auteur et le droit voisin.

Vous connaissez, je l’espère, mon attachement à la défense de l’exception culturelle et notre énergie commune à en défendre les principes, que ce soit à l’échelon européen ou au plan international.

Néanmoins, comme vous le savez, la loi nationale ne peut pas, à elle seule, restreindre le champ du droit international. Il me semblerait de surcroît dommageable, paradoxalement, d’exclure le sujet culturel de tout débat avec nos partenaires : un tel débat permettrait justement d’inscrire l’exception culturelle dans ces négociations.

Par ailleurs, vous proposez de faire reconnaître les entreprises du secteur culturel comme services d’intérêt général au sens du droit communautaire. Or si le droit de l’Union européenne renvoie au droit national le soin de définir ce type de services, les critères qui ont été fixés par le « paquet Almunia » et rappelés par la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne limitent les marges d’appréciation des autorités nationales en la matière.

Ainsi, pour qu’une activité puisse être qualifiée de « service d’intérêt économique général », elle doit avoir un caractère économique, être confiée à une entreprise par un acte exprès de la puissance publique et pouvoir être qualifiée d’« intérêt général ». Certes, de nombreuses entreprises du secteur culturel peuvent répondre à ces critères communautaires ; on ne peut néanmoins en généraliser l’application à l’ensemble des acteurs du secteur.

Il me semble donc préférable, pour éviter toute contradiction avec le droit de l’Union européenne, que cet amendement ne soit pas adopté. Nous avons eu à l’Assemblée nationale un débat extrêmement intéressant sur ce point, notamment avec Mme Buffet, qui a bien voulu retirer l’amendement qu’elle avait défendu à ce propos. Je vous incite donc, monsieur le sénateur, à bien vouloir en faire de même ; à défaut, le Gouvernement sera défavorable à votre amendement.

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