Intervention de Claude Nougein

Réunion du 11 février 2016 à 10h30
Traité de coopération en matière de défense avec le mali — Adoption d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Claude NougeinClaude Nougein, rapporteur :

Aujourd’hui, la situation au Mali s’est améliorée, même si elle reste fragile, comme les événements récents de Bamako l’ont tristement rappelé.

Sur le plan sécuritaire, l’opération Barkhane, qui a pris la relève de l’opération Serval, peut s’appuyer sur le G5 Sahel, c’est-à-dire une coopération étroite entre cinq pays du Sahel : Mauritanie, Mali, Niger, Tchad et Burkina Faso. L’opération Barkhane est ainsi totalement transfrontière, ce qui est la seule manière de lutter efficacement contre les groupes djihadistes.

Toutefois, cette opération ne peut à elle seule venir à bout des terroristes, comme l’a encore démontré la récente attaque contre un camp de la MINUSMA, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali, à Tombouctou. Elle n’emploie en effet que 3 000 à 3 500 hommes pour un territoire plus grand que l’Europe, et il est impossible de poursuivre les djihadistes dans les pays limitrophes du nord du Sahel. La situation en Libye est ainsi particulièrement préoccupante.

En outre, la MINUSMA, force de l’ONU établie par la résolution 2100 du Conseil de sécurité, est un acteur important dans la stabilisation du pays, avec plus de 8 000 militaires essentiellement africains et 1 050 policiers. Toutefois, on peut regretter qu’elle ne joue pas un rôle opérationnel fort, lequel est toujours assumé par les troupes françaises.

Enfin, les quelques centaines d’hommes de la Mission de formation de l’Union européenne au Mali, ou EUTM Mali, apportent également un soutien utile à la reconstruction des forces armées maliennes.

Si l’ensemble de ces forces militaires permet ainsi à l’État malien de subsister et de fonctionner, elles ne peuvent prétendre apporter une réponse à long terme aux problèmes qui touchent ce pays.

Le premier problème est d’ordre politique. Les accords d’Alger, signés entre la République du Mali et la Coordination des mouvements de l’Azawad, la CMA, le 20 juin 2015 à Bamako grâce à la médiation algérienne, commencent certes à se concrétiser avec la création effective de patrouilles mixtes et le début d’une fusion des cantonnements des soldats. Mais la faiblesse des avancées politiques depuis la signature de l’accord révèle sa grande fragilité et les ambiguïtés sur lesquelles il repose.

Le second problème réside dans la situation agricole et économique précaire d’une grande partie du Sahel, qui favorise le recrutement de jeunes par les groupes terroristes.

Une partie de la solution tient évidemment à l’efficacité de l’aide au développement. Lors de la conférence de Paris du 22 octobre 2015, 3, 2 milliards de dollars ont été annoncés par les bailleurs du Mali pour les années 2015-2017. La France a promis 360 millions d’euros. Malheureusement, cet effort significatif n’est pas une garantie de réussite si ces crédits ne vont pas au bon endroit au bon moment, et, pourrait-on ajouter, dans de bonnes mains.

J’en viens maintenant au traité de défense lui-même.

Premier élément, ce traité n’a rien d’original dans son contenu. Inspiré du modèle des Status of Forces Agreement, ou SOFA, de l’OTAN, il est quasiment identique aux huit autres accords signés au cours des années 2008-2012 avec le Togo, le Cameroun, le Gabon, la République centrafricaine, l’Union des Comores, Djibouti, la Côte d’Ivoire et le Sénégal. Ces accords mettent en place une coopération de défense fondée sur le respect mutuel de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États. En particulier, ils ne comportent pas de clause publique ou secrète d’assistance automatique contre les menaces intérieures ou extérieures.

Dans le cas du Mali, le nouveau traité remplace un accord de coopération militaire du 6 mai 1985, dont l’objet est essentiellement limité à la mise à disposition de coopérants militaires techniques français. Cet accord est aujourd’hui obsolète, dans la mesure où il est rédigé de manière unilatérale et reflète ainsi un état des relations entre la France et les pays africains désormais révolu.

Deuxième élément, le nouveau traité ne se substitue pas à l’accord par échange de lettres des 7 et 8 mars 2013, conclu pour assurer la sécurité juridique de l’intervention française au Mali, dans le cadre de l’opération Serval. En vertu de l’article 25 du nouveau traité, les actions menées dans le cadre de l’opération Barkhane continueront ainsi à relever de l’accord de 2013, plus favorable aux troupes françaises sur le plan de la sécurité juridique.

Pour le reste, le nouveau traité précise les principes généraux sur lesquels se fonde le partenariat de défense et de sécurité, en prenant en considération deux dimensions nouvelles : la dimension régionale africaine de la mission de coopération militaire confiée aux forces françaises et la dimension européenne.

Les domaines de la coopération mise en œuvre dans ce cadre sont ensuite énumérés. Ils couvrent notamment les échanges d’informations entre les forces et la formation des soldats maliens dans des écoles françaises ou des écoles soutenues par la France. Je rappelle que la coopération de défense conduite au Mali par la direction de la coopération de sécurité et de défense du ministère des affaires étrangères et du développement international se décline actuellement en sept projets, dont une école à statut international à Bamako, et représente un budget de 4, 6 millions d’euros. Je ne peux ici que souligner l’importance cruciale de cette coopération militaire structurelle et regretter la réduction continue des moyens qui lui sont affectés au sein du budget.

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