Intervention de Leila Aïchi

Réunion du 11 février 2016 à 15h00
Questions d'actualité au gouvernement — Situation à alep

Photo de Leila AïchiLeila Aïchi :

Ma question s’adresse à M. le ministre des affaires étrangères.

À l’heure où nous parlons, plus d’un million de Syriens subissent un état de siège. Ces hommes, ces femmes et ces enfants vivent l’enfer : l’enfer des bombardements, l’enfer des pénuries, l’enfer de la guerre. Il s’agit là d’une preuve de plus – d’une preuve douloureuse et cruelle – de l’impuissance de la communauté internationale à répondre à la crise syrienne.

Nous avons déjà perdu trop de temps. M. Fabius a parlé hier de la complicité de la Russie et de l’Iran envers le régime syrien, mais, une fois cela dit, que faisons-nous ? Quid de Daech ? Quid du front Al-Nosra ? Quid de la déliquescence du front démocratique ? Quid des pays du Golfe ? Quid de l’Iran ? Quid d’Israël ? Contrairement à vos objectifs affichés, force est de constater que nous nous retrouvons aujourd’hui face à un régime syrien en position de supériorité politique et militaire sur le terrain. Votre stratégie a-t-elle réduit à néant toute opportunité d’une résolution politique du conflit ?

Plus grave encore, en l’absence de relais solides et crédibles sur le terrain, à l’instar de la France, les États-Unis opèrent aujourd’hui un net recul. Il se murmure même qu’un accord américano-russe tacite ou secret serait en discussion. La Russie, intervenue bien des mois après nous, est en train d’imposer ses termes. La France est dépassée, décalée, débordée. C’est parce que nous avons d’emblée refusé de dialoguer avec l’ensemble des acteurs de la région que nous sommes aujourd’hui hors-jeu.

Monsieur le ministre, l’obsession française à l’égard de la personne de Bachar al-Assad nous a fait perdre de précieux mois et a décrédibilisé toute notre politique. À titre personnel, cela fait plus de trois mois que j’attire votre attention sur l’impérieuse nécessité d’entamer un dialogue élargi et de gérer la question libyenne. Or la diplomatie française s’est obstinée dans son aveuglement en Syrie. Pour qui ? Pour quoi ? Et pour quel résultat ? Un pays détruit, une région embrasée, une OTAN déboussolée, une Europe et des pays membres déstabilisés et fragilisés. Tout ça pour ça !

Alors, face aux centaines de milliers de victimes de Bachar al-Assad et de son régime totalitaire, face aux millions de réfugiés qui fuient l’horreur et les massacres de Daech, face aux centaines de vies détruites par le terrorisme en France et en Europe, que faisons-nous ? Ne sommes-nous pas revenus au point de départ ? Notre politique étrangère en Syrie n’est-elle pas un échec ?

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