Monsieur le président, madame la secrétaire d’État chargée de la formation professionnelle et de l’apprentissage, mes chers collègues, la proposition de loi d’expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée arrive aujourd’hui au terme de son parcours législatif, qui, je le crois, fut exemplaire à bien des égards.
Alors que le texte a été élaboré sur l’initiative du monde associatif, à l’issue d’une vaste concertation qui a permis d’en étudier la faisabilité et d’en consolider l’assise juridique, son examen parlementaire a été l’occasion pour chacune des deux chambres d’en enrichir le dispositif, afin d’en préciser le ciblage et de tenir compte des besoins des territoires et de leur capacité d’innovation.
Déposée à l’Assemblée nationale le 22 juillet 2015 par les membres du groupe socialiste, républicain et citoyen, et plus particulièrement par notre collègue député Laurent Grandguillaume, dont je tiens à saluer l’implication, le sens de l’écoute et du dialogue, cette proposition de loi a été adoptée par les députés le 9 décembre 2015.
Confrontée à un calendrier quelque peu contraint en fin d’année dernière, notre commission des affaires sociales a travaillé avec diligence, adoptant son texte dès la semaine suivante, avant que la suspension des travaux parlementaires n’entraîne le report de l’examen en séance publique au 13 janvier dernier. C’est à l’issue de cet examen et après avoir adopté vingt-cinq amendements que le Sénat s’est prononcé à la quasi-unanimité en sa faveur.
Je tiens à rendre hommage à la qualité et à la richesse de nos débats en commission des affaires sociales, puis en séance publique. Ceux-ci montrent que nous partageons le souci de faire une loi utile et de faire en sorte que l’expérimentation se déroule dans les meilleures conditions.
La commission mixte paritaire, qui s’est réunie le 2 février dernier, a été préparée en plein accord avec le rapporteur de l’Assemblée nationale sur ce texte. Elle s’est déroulée sous les meilleurs auspices, si bien que le texte final a été adopté à l’unanimité de ses membres, puis a été adopté par l’Assemblée nationale le 10 février.
Comme vous le savez, mes chers collègues, la proposition de loi autorise des entreprises relevant de l’économie sociale et solidaire, conventionnées par un fonds national spécifique, à embaucher des demandeurs d’emploi de longue durée en contrat à durée indéterminée. Ces demandeurs d’emploi seront rémunérés au moins au SMIC pour réaliser des activités pérennes répondant à des besoins sociaux locaux non satisfaits, et ce dans l’objectif de les rendre solvables grâce à une réallocation totale ou partielle des dépenses publiques d’indemnisation ou de solidarité dont les personnes ainsi recrutées auraient bénéficié. Cette activation des dépenses dites « passives », qui a été souvent évoquée mais qui n’avait jamais pu se concrétiser jusqu’à présent, résume à elle seule le caractère innovant de la proposition de loi.
Je constate avec satisfaction que la commission mixte paritaire a confirmé l’ensemble des modifications apportées par le Sénat. Pour mémoire, notre assemblée avait jugé dans un souci d’égalité et de justice entre les demandeurs d’emploi que le motif pour lequel ils avaient mis fin à leur dernière activité salariée ne devait pas constituer un obstacle à leur entrée dans le dispositif. En conséquence, nous l’avions ouvert aux personnes démissionnaires et à celles ayant conclu une rupture conventionnelle, dont on sait aujourd’hui qu’elle remplace souvent un licenciement économique.
Nous avions également tenu à renforcer le volet relatif à l’évaluation de l’expérimentation, afin qu’elle soit confiée à un comité scientifique indépendant et non au fonds chargé du pilotage de l’expérimentation, cette évaluation conditionnant l’éventuelle généralisation du dispositif.
Enfin, nous avions apporté plusieurs modifications de cohérence pour améliorer la lisibilité du texte.
Outre divers ajustements techniques, la commission mixte paritaire a également apporté quelques avancées.
Elle a tout d’abord été l’occasion de faire entrer dans le champ de l’expérimentation les personnes au chômage depuis plus de douze mois à la suite d’une formation ou à la fin d’une activité non salariée.
Elle a ensuite confirmé que l’aide versée par le fonds aux entreprises conventionnées dans le cadre de l’expérimentation pourrait être dégressive si l’évolution favorable de la situation économique de ces entreprises le justifiait.
Enfin, la commission mixte paritaire a prévu que le bilan de l’expérimentation réalisé par le fonds aurait lieu au plus tard dix-huit mois avant son terme, afin d’éclairer le comité scientifique chargé de l’évaluation.
Surtout, elle a confirmé le caractère volontaire de la participation financière des collectivités territoriales, qui avait fait l’objet d’un long débat dans cet hémicycle. Cette expérimentation se déroulera dans dix territoires, et je n’ai aucun doute sur le fait qu’il y aura bien plus de candidats que d’élus.
Chaque collectivité territoriale concernée contribuera au financement de l’expérimentation à hauteur de l’engagement initial auquel elle aura librement consenti par la voie contractuelle avec le fonds d’expérimentation contre le chômage de longue durée. Par ailleurs, il appartiendra à l’État, comme la ministre du travail s’y est d’ailleurs engagée, d’assurer l’amorçage de ce dispositif.
Mes chers collègues, la proposition de loi porte en son sein une initiative en rupture avec les politiques de l’emploi menées depuis maintenant quarante ans par les gouvernements successifs, qui ont cherché à enrayer l’inexorable hausse du chômage. Je vous invite donc à approuver définitivement ce texte, afin que les mesures d’application qu’il prévoit soient publiées dans les meilleurs délais et que puisse débuter dès le 1er juillet prochain cette nouvelle étape de la lutte contre le chômage de longue durée.