Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, c’est donc le 1er février 2007 que la France et la Roumanie ont signé l’accord prévoyant une coopération visant à une meilleure prise en charge des mineurs roumains isolés en France, en les identifiant, en menant des enquêtes sociales pour déterminer les raisons de leur isolement et, au besoin, en les rapatriant afin de les réintégrer dans leur pays. Je connais ce problème de plus longue date, pour vivre à Vienne depuis trente-sept ans et avoir beaucoup voyagé en Europe.
Comme l’a indiqué Mme Garriaud-Maylam dans son excellent rapport, cet accord s’inscrit dans une continuité, puisqu’il reprend pour l’essentiel celui de 2002, en renforçant tout de même le volet relatif à la lutte contre la criminalité et en aménageant la procédure de rapatriement des mineurs, afin de la rendre plus efficace.
En effet, le bilan des retours reste pour l’heure très peu satisfaisant : par exemple, six mineurs seulement ont été rapatriés en 2006, et soixante-trois depuis le 1er février 2003, date de l’entrée en vigueur de l’accord de 2002. Sur ce point, le bilan de l’application de ce dernier n’est donc pas bon et il était important, à notre avis, de revoir la procédure pour améliorer son efficacité.
En revanche, il faut insister sur la grande qualité de la coopération bilatérale – ce n’était pas le cas dans le passé – et la réelle volonté de la Roumanie de résoudre cette question très difficile. Membre de l’Union européenne depuis le 1er janvier 2007, ce pays a fait des efforts, certes insuffisants, mais néanmoins considérables, en matière de protection de l’enfance. Le contexte a donc beaucoup changé par rapport à 2002. À nos yeux, cela justifie la relance d’une dynamique de coopération avec ce pays.
Le nouvel accord vise principalement à reconduire sur des bases améliorées la coopération bilatérale, tant juridique qu’opérationnelle, dans le domaine de la protection de l’enfance.
Les deux principaux axes de travail visés par cet accord sont, d’une part, l’amélioration du nombre et de la qualité des rapatriements de mineurs en Roumanie, et, d’autre part, le développement de la coopération judiciaire ainsi que la mise en place d’une action commune contre la criminalité organisée et la délinquance itinérante, en vue du démantèlement des réseaux d’exploitation des mineurs isolés.
Les dispositions nouvelles de l’accord, auxquelles nous souscrivons pleinement, doivent ainsi nous permettre de mieux identifier et de mieux protéger les mineurs roumains isolés, victimes ou auteurs d’infractions pénales, en difficulté sur le territoire de la République. Le texte doit également mieux assurer leur protection et leur réintégration en Roumanie par un échange d’informations sur leur état civil et un suivi de leur réintégration sociale durant une période de six mois après leur retour.
Enfin, l’accord doit permettre de mieux prévenir les risques d’exploitation ou de représailles contre les mineurs lorsque ceux-ci sont remis à leurs parents en Roumanie, par l’échange d’informations sur les réseaux et les organisations criminelles qui les exploitent tant en Roumanie qu’en France.
Pour le groupe UMP, ce nouvel accord est très important, car il va dans le sens d’une véritable amélioration de la coopération bilatérale opérationnelle engagée dans ce domaine. Je rappelle ici que celle-ci est nécessaire en l’absence d’une véritable politique de l’Union européenne sur la question des mineurs étrangers isolés. Sur ce point, je suis d’accord avec Mme Tasca : il faudra que l’Union parvienne à élaborer une politique commune dans ce domaine.
À l’instar de Mme le rapporteur, nous jugeons indispensable que l’Union européenne engage une véritable action sur ce point, qui concerne, au-delà de la seule Roumanie, l’ensemble des pays balkaniques. Un constat sérieux doit être établi et l’élaboration d’une réponse européenne efficace s’impose ou s’imposera. Cependant, en l’absence actuelle de politique européenne, les accords bilatéraux sont les seuls outils à notre disposition, et nous devons les rendre opérationnels. J’ajoute qu’il nous paraît urgent de mettre en place un plan européen de réflexion et d’action concernant les Roms, notamment les mineurs, dont la situation est spécifique.
J’en viens maintenant au point qui fait débat, à savoir la procédure de raccompagnement des mineurs et la place du juge des enfants, c'est-à-dire la nature et l’efficacité de la réponse opérationnelle que nous pouvons apporter à un phénomène en recrudescence ces derniers mois, qui préoccupe fortement nos concitoyens.
Je le rappelle, selon le ministère de l’intérieur, le nombre de mineurs roumains mis en cause dans des infractions pénales sur le territoire français a fortement augmenté. Il s’agit d’un problème de délinquance sur la voie publique qui doit recevoir une réponse appropriée et efficace tout en préservant la protection du mineur.
Je comprends les interrogations, voire les critiques, de certains, mais nous sommes face à un problème de mineurs délinquants d’une réelle ampleur, et il est de notre devoir d’y apporter une réponse efficace, dans le respect de nos valeurs et de nos engagements internationaux. Encore une fois, nos concitoyens nous le demandent instamment.
Mes chers collègues, il ne s’agit en aucun cas d’expulsions de mineurs ou de reconduites à la frontière. Nous le savons, le point faible de l’accord de 2002 était le rapatriement des mineurs. Ce nouvel accord l’améliore, en le rendant plus rapide. L’intervention du parquet dans la procédure, notamment, est à l’origine de cette amélioration. L’exécution immédiate sera ordonnée si le parquet des mineurs estime que les garanties sont réunies pour assurer la protection du mineur et si le gouvernement roumain le demande. À cet égard, je précise que le parquet est une autorité non pas administrative, comme j’ai pu l’entendre dire, mais judiciaire. Elle est composée de magistrats soucieux d’appliquer la loi et compétents pour estimer si les garanties minimales de protection des mineurs sont réunies.
Je ne conteste pas que le juge des enfants soit compétent pour prendre les décisions judiciaires concernant les mineurs délinquants, mais il ne faut pas caricaturer la procédure mise en place par l’accord de 2007. À cet égard, les remarques de notre rapporteur me semblent opportunes et leur prise en compte doit permettre une application équilibrée du texte.
Selon nous, cet accord permet d’apporter de meilleures garanties juridiques et judiciaires, notamment grâce à l’attribution de la présidence du groupe de liaison opérationnel au ministère de la justice et au renforcement de l’obligation d’information de la partie française par les autorités roumaines. Il garantit une meilleure protection de l’enfance et une lutte plus efficace contre les réseaux criminels impliqués. De plus, rappelons-le, il est très attendu par la Roumanie, qui est soucieuse de régler ce problème.
En réaffirmant la nécessité de mettre en place une réponse européenne au phénomène des mineurs isolés, surtout d’origine rom, errant sur tout le territoire, dans le respect du principe fondamental de protection de l’enfance, le groupe UMP apportera son soutien unanime à ce projet de loi, qui permettra la relance de la coopération entre la France et la Roumanie.
Je terminerai en formant le vœu que des solutions à ce grave problème des mineurs isolés en situation irrégulière en France soient trouvées par notre collègue Isabelle Debré, qui a été chargée par Mme Alliot-Marie d’une mission temporaire sur ce sujet et doit rendre ses conclusions dans les jours à venir.