Intervention de Valérie Létard

Réunion du 1er mars 2016 à 21h00
Dispositif exceptionnel d'accueil des réfugiés

Photo de Valérie LétardValérie Létard :

Bien sûr, cher collègue.

Pouvez-vous également, monsieur le ministre, nous confirmer les derniers chiffres disponibles sur l’opération d’évacuation de la zone sud du camp qui a eu lieu précédemment, et nous informer des résultats du travail que vous menez depuis ces derniers jours pour procéder au démantèlement de la « jungle » de Calais ?

Un article du Figaro paru le 23 février dernier relatait que 15 % des 2 691 migrants de Calais délocalisés n’effectuaient aucune démarche en vue d’une demande d’asile et qu’environ 20 % d’entre eux repartaient des centres sans laisser de trace. Est-ce exact ou non ? Si je vous interroge sur ce point, c’est que je crains que, faute d’une maîtrise suffisante, les migrants ne soient encouragés à retourner vers la « jungle ».

De ce point de vue, nous sommes satisfaits du travail que vous menez actuellement à Calais. La question que je pose est la suivante : comment les collectivités et l’État peuvent-ils œuvrer au mieux ensemble, en amont ? En effet, nous sommes loin d’être au bout du processus et nous ne pourrons pas poursuivre durablement de cette façon avec l’assentiment des territoires.

Les informations remontant de ces communes volontaires nous interpellent également quant aux moyens que l’État est décidé à leur octroyer.

À l’heure actuelle, l’État assure une aide de 1 000 euros par logement et propose un fonds de 50 millions d’euros permettant de financer des travaux de réhabilitation. Mais les autres coûts, en particulier les frais relatifs à la scolarisation des enfants ou à l’apprentissage du français comme langue étrangère, restent à la charge des communes. Pour faire face aux besoins constatés, les préfets inciteraient les élus à s’appuyer sur les associations, sur les bénévoles, sur les bibliothèques municipales ou encore sur les structures culturelles existantes…

Ces initiatives sont bien maigres, en comparaison de l’aide de 5 000 euros par réfugié versée en Allemagne.

Pourtant, de son côté, l’Union européenne accorde, par réfugié accueilli, un montant de 6 000 euros aux pays membres. Le Conseil des communes et régions d’Europe, le CCRE, ainsi que plusieurs associations d’élus demandent que ce soutien financier européen puisse être ouvert directement aux communes, notamment via le fonds « Asile, migration et intégration ». Monsieur le ministre, avez-vous l’intention de prendre en compte cette requête ?

Enfin, comme je l’ai souligné en septembre 2015 lors de l’annonce du plan de relocalisation, l’accueil de populations traumatisées par la guerre et l’exil ne saurait relever d’un seul mouvement compassionnel, dont on a observé les limites depuis les attentats du 13 novembre. Ce travail impose une solide réflexion, une planification étroite en lien avec les collectivités, pour ne pas ajouter de la pauvreté à la pauvreté. Il exige un accompagnement dans la durée et un effort financier adéquat.

À cet égard, je me joins une nouvelle fois à Jean-François Rapin : vous le savez, dans ce domaine, Calais constitue un exemple significatif. L’économie de ce territoire, qui n’avait franchement pas besoin de cela, a été très violemment frappée par la réalité dans laquelle elle se trouve. Le travail étroit que je viens d’évoquer n’en sera que plus nécessaire pour assurer un véritable maillage territorial, une anticipation des situations, une structuration de notre capacité à répondre, collectivement, à ces enjeux.

En concentrant la douleur et la misère sur quelques points, on ne pourra que susciter le rejet de la part des populations locales. À l’inverse, il nous faut opérer un mouvement d’ensemble auquel nous prenons toute notre part, mais une part maîtrisée et responsable. Ainsi, l’État et les territoires prouveront qu’ils maîtrisent la situation, qu’ils sont à même d’honorer les engagements de la convention de Genève. Parallèlement, on évitera d’opposer la souffrance de Français en difficulté à celle de réfugiés qui arrivent en France.

En procédant de cette manière, ces diverses populations pourront vivre convenablement et, à l’avenir, les collectivités territoriales comme le Gouvernement, que vous représentez, pourront mener une politique claire d’accueil maîtrisé. Je le répète : en la matière, l’État doit prendre toute sa responsabilité, aux côtés de collectivités qui ne seront pas mises devant le fait accompli !

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