Intervention de Bernard Cazeneuve

Réunion du 1er mars 2016 à 21h00
Dispositif exceptionnel d'accueil des réfugiés

Bernard Cazeneuve, ministre :

pour dire que la boue, le froid et la précarité sont indignes et, de l’autre, lorsque nous voulons extraire les migrants de cette précarité et de cette indignité, à venir expliquer qu’il faut les laisser là où ils sont !

Pour bien matérialiser qu’il faut les laisser là où ils sont, lorsque nous mobilisons nos travailleurs sociaux pour aller dans les maraudes au contact des migrants et les convaincre, nos troupes se font insulter et « caillasser », et lorsque je mobilise des forces de l’ordre pour les protéger dans l’exercice de leurs missions, on crie aux violences policières… La ficelle est un peu grosse, et la manipulation, compte tenu du destin de ces femmes et de ces hommes en détresse, assez peu convenable.

C’est la raison pour laquelle je veux aussi, devant le Sénat, rappeler cette réalité avec force. Le ministère de l’intérieur, les collaborateurs de l’OFII et de l’OFPRA, les travailleurs sociaux de la cohésion sociale et les volontaires des associations qui se mobilisent avec nous pour atteindre cet objectif ne sont pas des individus brutaux qui sont indifférents au sort des migrants. Ils sont au contraire soucieux de leur assurer une protection, et c’est pourquoi ils n’entendent pas les laisser dans la boue et le cloaque de ce qu’est la « jungle » de Calais.

Dans un pays qui décide d’accorder généreusement l’asile à ceux qui relèvent du statut de réfugié, il n’y a pas de raisons non plus que l’on concentre toute la précarité et la difficulté dans une seule ville, sans se préoccuper des difficultés auxquelles ce territoire peut se trouver confronté seul dès lors que l’effort n’est pas partagé entre toutes les parties du territoire national.

Quand on prétend, monsieur Rapin, madame Létard, que les villes sont seules, je m’inscris en faux. Non, la ville de Calais n’est pas seule !

Lorsque nous mettons en place un centre d’accueil de jour à Calais en très étroite liaison avec la municipalité, lorsque nous mettons en place le centre d’accueil provisoire, c’est-à-dire les bungalows où nous accueillons 1 500 personnes, c’est l’État qui passe les marchés, c’est l’État qui finance, c’est l’État qui mobilise ses travailleurs sociaux pour les maraudes !

C’est aussi l’État qui est présent lorsqu’il s’agit, au terme d’un audit réalisé par les inspections générales, de mettre en place un dispositif de soins minimal permettant aux migrants d’éviter les épidémies et les difficultés sanitaires les plus importantes !

Et, lorsque nous négocions avec le Royaume-Uni des dispositifs qui conduisent les Britanniques à investir près de 60 millions d’euros à Calais, y compris sur les aspects humanitaires à nos côtés, c’est encore nous qui sommes à la manœuvre, et personne d’autre !

Je veux bien entendre que l’État pourrait en faire plus, mais je ne peux pas entendre que l’État laisserait les collectivités seules, alors que l’État agit comme je viens de l’indiquer. Dans les années 2000, lorsqu’on a vidé Sangatte et qu’on a réparti, sans les loger, les migrants sur la côte septentrionale, j’étais à l’époque maire de Cherbourg. Je n’ai pas eu une visite ministérielle ni le début d’un euro pour aider ma ville à faire face à cette situation !

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