Intervention de Jean-Jacques Filleul

Réunion du 2 mars 2016 à 14h30
Incivilités et terrorisme dans les transports collectifs de voyageurs — Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Photo de Jean-Jacques FilleulJean-Jacques Filleul :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, la proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs entame donc la dernière étape de son parcours législatif.

La commission mixte paritaire, dont nous examinons les conclusions aujourd’hui, s’est accordée sur un texte commun, alors que les deux chambres s’étaient prononcées en faveur de textes sensiblement différents.

Les contours de la proposition de loi ont varié à chaque étape de la discussion parlementaire. Sans parler des dispositions adoptées conformes en première lecture, l’Assemblée nationale et le Sénat n’ont pas eu de difficulté à se retrouver sur plusieurs articles. Par ailleurs, de nombreux articles ont vu leur rédaction améliorée au cours de la navette, et les garanties prévues ont été renforcées. Enfin, la commission mixte paritaire est parvenue à un équilibre s’agissant des articles cristallisant les points de divergence majeurs entre l’Assemblée et le Sénat, ce qui a permis d’aboutir à la rédaction d’un texte commun.

Cette proposition de loi était attendue. D’abord préparée par notre collègue député Gilles Savary et relative à la lutte contre la fraude, elle a été transformée et complétée après les tristes événements du 13 novembre dernier. Il fallait apporter de multiples sécurisations dans les transports publics. Nous avons pu le lire dans la presse et l’entendre à l’occasion de diverses rencontres, l’esprit de ce texte concorde avec de multiples attentes. La fraude conduisant souvent à commettre de graves incivilités, il était nécessaire de compléter l’arsenal législatif permettant de lutter contre.

Je me réjouis que l’article 14, qui a connu une vie mouvementée entre l’Assemblée nationale, le Sénat et la commission mixte paritaire, ait en définitive été intégré dans la version finale. Avec d’autres, j’avais plaidé, en première lecture, pour que l’on traite de la lutte contre le harcèlement sexiste dans les transports. Le Sénat avait supprimé, contre notre avis, cet article, au motif qu’une telle disposition n’était pas de nature normative ou relevait, à tout le moins, du pouvoir réglementaire. Notre amendement visant au rétablissement de cet article avait alors été rejeté au titre de l’article 41 de la Constitution.

La suppression de l’article 14 présentait l’inconvénient d’écarter le sujet des harcèlements sexistes sans proposer d’alternative. Par ailleurs, cela constituait un paradoxe, au moment où le Gouvernement se mobilise fortement sur ce sujet, jusqu’alors ignoré. Il a en effet lancé, au mois de juillet 2015, un plan national de lutte contre le harcèlement sexiste et les violences sexuelles dans les transports en commun, sur la base d’un rapport du Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes.

La position initiale du Sénat a été très mal perçue et a suscité une très forte réprobation publique, alors même que 100 % des femmes ont été victimes de violences ou de harcèlement dans les transports publics.

J’ai en mémoire un mail qui m’interpellait en ces termes : « Par votre fonction, vous représentez ces femmes et vous avez le devoir de les protéger. Refuser une mesure qui pourrait améliorer cette situation, c’est refuser de protéger les femmes et donner un sentiment d’impunité aux hommes qui commettent ce type de violence. Ignorer ces femmes, c’est aussi se détourner de la moitié de la population que vous représentez. C’est une honte ! »

Je me félicite bien entendu que les débats en commission mixte paritaire aient permis d’aboutir au rétablissement de l’article, en définissant deux axes d’action.

Premièrement, le dispositif se fonde sur l’article L. 1632-1 du code des transports, qui dispose que les autorités organisatrices de transports et le STIF concourent, chacun pour ce qui le concerne, aux actions de prévention de la délinquance et de sécurisation des personnels et des usagers dans les transports.

Deuxièmement, il complète l’article L. 2251-1 du code des transports, qui définit le rôle de la surveillance générale, la SUGE, et du groupe de protection et de sécurisation des réseaux, le GPSR, en matière de sécurité des personnes et des biens, afin de prévoir que la prévention des violences et des atteintes à caractère sexiste dans les transports publics est un axe prioritaire de leur action.

Je ne reviendrai pas sur l’ensemble des articles. Cela a été très bien fait par notre rapporteur.

Toutefois, je me dois de souligner l’importance du rétablissement de l’article 6 ter, supprimé par le Sénat, puisqu’il introduit une obligation pour tous les opérateurs de transports urbains d’assurer la sûreté de leur réseau, où qu’il se situe sur le territoire national. Il ressort des travaux de la commission mixte paritaire une rédaction de l’article 6 ter « millimétrée », qui donne la possibilité à tous les réseaux de transports en commun de se doter d’un service de sécurité interne, tout en prenant en compte les interrogations du Sénat sur la portée de la convention liant le préfet, les autorités organisatrices de transports et les exploitants.

Au final, on peut considérer que le Parlement est parvenu à élaborer un texte équilibré, qui ajoute sa pierre à la sécurité des Français après la seconde prorogation de l’état d’urgence par la représentation nationale et avant l’examen par le Sénat du projet de loi constitutionnelle de protection de la nation, la réforme pénale en cours d’examen à l’Assemblée nationale et le projet de loi en cours de préparation qui viendra parachever la loi de 1955 sur l’état d’urgence.

Comme l’a indiqué mon collègue Jean-Claude Leroy, le groupe socialiste votera donc en faveur de l’adoption de cette proposition de loi.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion