Cette révision constitutionnelle est l'arbre qui cache la forêt. Nous savons ce qu'est l'état d'urgence : l'extension des pouvoirs de police de l'exécutif. Le Gouvernement ajoute la déchéance de nationalité, peine accessoire qui devient de plein exercice. Derrière, la législation pénale en préparation durcit le régime pénal de façon permanente. La déchéance de nationalité n'est que la cerise sur le gâteau de cette évolution du droit pénal et administratif. Entre 1961 et 1963, l'état d'urgence est resté en vigueur pendant 25 mois ! Le Général de Gaulle a fait usage de l'article 16 pour le proroger et faire voter des lois dérogatoires au système pénal et administratif en vigueur - dont certaines sont demeurées dans le droit positif pendant des décennies ! L'enjeu majeur est, par conséquent, ce qui se profile derrière cette révision constitutionnelle, à savoir une évolution durable de notre droit pénal.
Je conviens avec Olivier Beaud qu'il vaut mieux ne pas introduire de turpitudes dans la Constitution ; mais en Allemagne, en 1933, on a réglé le problème en supprimant la Constitution, avec les conséquences que l'on sait ! En créant deux régimes - un régime constitutionnel et un régime non constitutionnel qui pourrait durer - on prend un risque aussi grave qu'en constitutionnalisant l'état d'urgence.