Intervention de Jean-Yves Leconte

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 8 mars 2016 à 9h05
Protection de la nation — Audition de M. Manuel Valls premier ministre et de M. Jean-Jacques Urvoas garde des sceaux ministre de la justice

Photo de Jean-Yves LeconteJean-Yves Leconte :

Dans la mesure où la menace contre la Nation est urgente et importante, nous ne pouvons pas nous disperser. Comment, dans ces conditions, l'article 2 nous protège-t-il ? Comment sert-il la coopération internationale en matière de terrorisme ? Il s'inscrit en complète contradiction avec les principes et fondements du droit que nous avons construit en Europe et dans le monde depuis la deuxième guerre mondiale, pour ne plus avoir d'apatrides et pour constituer des droits pour tous. Comment appeler à la coopération internationale en matière de terrorisme si nous renvoyons aux pays avec lesquels nous coopérons les binationaux que nous aurons déchus ? Bref, comment coopérer si le reste du monde devient la poubelle de la France ? La force d'une nation est d'assumer ses criminels plutôt que de les renvoyer dans la nature.

Vous présentez la déchéance de nationalité comme une peine complémentaire. Or l'article 2 ne prévoit que la possibilité de cette déchéance. La manière dont la peine s'appliquera sera fixée par la loi ordinaire : rien ne garantit qu'elle sera prononcée par le juge judiciaire. En ajoutant les délits - champ bien plus large que les actes de terrorisme, et qui dépendra, qui plus est, du législateur ordinaire ! -, l'Assemblée nationale a affaibli le lien entre les citoyens et la Nation. C'est dangereux dans les circonstances actuelles.

Le Conseil constitutionnel n'a pas considéré comme une inégalité la différence de statut entre les Français naturalisés et les autres : une naturalisation n'est pas un constat d'assimilation, mais un pari sur l'intégration. Enfin, l'article 23-7 du code civil rend déjà possible la déchéance de nationalité : vous ne l'avez pas évoqué.

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