Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la proposition de loi pour l’économie bleue que nous examinons aujourd’hui est le résultat d’un travail important réalisé par le député Arnaud Leroy depuis plusieurs mois, travail qui s’inscrit dans une dynamique plus générale impulsée par le Gouvernement pour une politique maritime ambitieuse au service de notre pays.
Cette proposition de loi, vous le savez, est le troisième texte consacré aux activités maritimes depuis 2012. Elle vient en effet après l’adoption de la loi du 1er juillet 2014 relative aux activités privées de protection de navires et après l’adoption de la loi du 8 décembre 2015 tendant à consolider et clarifier l’organisation de la manutention dans les ports maritimes.
Cette réponse législative est attendue par les acteurs et vient s’insérer dans une démarche globale couvrant des initiatives variées, budgétaires, fiscales, contractuelles, au service de l’économie maritime de notre pays.
Dans ce contexte, il importe en effet de dépasser les déclarations de principes, les postures incantatoires, et de donner corps à des actions concrètes et utiles pour notre pays.
Il s’agit donc d’accompagner ce formidable potentiel, tout en veillant à ne pas affaiblir le modèle social auquel nos marins sont légitimement attachés et à assurer la nécessaire protection de notre environnement.
Il importe surtout d’agir vite – d’où l’engagement de la procédure accélérée –, tout en étant animé par le souci d’une démarche pragmatique et efficace.
Certaines de ces dispositions sont effectivement attendues depuis longtemps par les acteurs du monde maritime. Que n’ont-elles été mises en place plus tôt, serait-on tenté de dire !
C’est donc dans cet esprit d’équilibre que le Gouvernement conduit, en associant la représentation nationale, une politique maritime ambitieuse et intégrée, prenant en compte toutes les composantes de l’économie maritime.
Concrètement, le dernier comité interministériel de la mer, ou CIMER, qui s’est tenu le 22 octobre sous la présidence du Premier ministre, a permis d’avancer et de tracer une feuille de route sur un certain nombre de sujets importants : le renforcement de la compétitivité des grands ports maritimes ; le renouvellement de la flotte de commerce pour s’adapter aux conditions du marché mondial ; un soutien renouvelé au secteur de la pêche maritime, pour préparer l’avenir et installer des jeunes ; l’affirmation d’une ambition aquacole pour la France ; une ambition réaffirmée s’agissant des grands fonds marins ; le renforcement de nos capacités de contrôle pour protéger l’environnement marin de manière effective ; ou encore – c’est un point majeur – des dispositions permettant de valoriser le potentiel considérable des espaces maritimes ultramarins, qui forment, ne l’oublions pas, l’essentiel des espaces placés sous souveraineté ou sous juridiction françaises.
Plus récemment, des missions parlementaires associant certains sénateurs ont été mises en place. Elles visent à développer le potentiel des axes situés dans l’hinterland de nos principaux ports maritimes. Dans le prolongement des projets stratégiques adoptés par nos principales places portuaires, il s’agit en effet de poursuivre le développement de la massification des flux, nécessaire pour que nos ports trouvent une place de premier plan dans le commerce mondial.
Comme l’a réaffirmé le Président de la République lors de son déplacement au Havre à l’automne dernier, notre espace maritime représente une force considérable si nous savons le mettre au service de l’emploi, de l’activité, du développement durable, du respect de l’environnement et des énergies nouvelles. La mer, dans cette perspective de croissance bleue, est donc à la fois une ressource, un investissement et un domaine qu’il convient de protéger.
Nombre de ces éléments trouvent logiquement une déclinaison législative dans le texte proposé par Arnaud Leroy, dont je veux saluer, une nouvelle fois ici, l’engagement et la maîtrise, au service des sujets relatifs à l’économie bleue, qui intéressent, de plus en plus, nos concitoyens.
La proposition de loi ambitieuse et réaliste soumise aujourd'hui, mesdames, messieurs les sénateurs, à votre examen couvre un large champ. Son auteur s’est efforcé de n’oublier aucun des secteurs fondant notre potentiel dans ce domaine. Les thématiques qu’elle aborde portent ainsi sur les gens de mer, les ports, la flotte de commerce, mais également sur la pêche maritime, l’aquaculture, les énergies marines renouvelables, la plaisance ou encore la modernisation de nos services.
Le texte s’est considérablement enrichi par rapport aux versions initiales ; c’est à mon sens la marque d’un vrai intérêt des parlementaires pour ces sujets.
Une véritable dynamique d’initiative parlementaire s’est en effet mise en place au cours de ces derniers mois, dans laquelle je veux croire que votre assemblée s’inscrira également.
Des avancées importantes figurent notamment dans la proposition de loi qui vous est soumise concernant la francisation et le jaugeage des navires ou encore le rôle d’équipage, outil remontant au début de notre histoire maritime et bien connu des gens de mer, mais qui, au fil du temps, avait perdu en cohérence et en efficacité. Derrière ces sujets, ce sont d’importantes modernisations administratives qui sont à l’œuvre et que je vous demande d’appuyer.
Cette proposition de loi comporte aussi des dispositions visant à poursuivre la modernisation de la gouvernance de nos ports, sans bouleverser – c’est un point essentiel à mes yeux – les équilibres issus de la dernière réforme portuaire de 2008.
Certaines dispositions visent également à moderniser le régime d’emplois de nos marins et gens de mer. J’y suis, par principe, favorable, si elles permettent de donner un signal positif en termes d’emplois. Cela ne doit toutefois pas conduire à dégrader le modèle social dont bénéficient nos marins. Ce point requiert, du point de vue du Gouvernement, une grande vigilance.
Je tiens à relever, également, toutes les dispositions visant à moderniser notre droit à la lumière des nouveaux usages et des nouvelles pratiques. Il s’agit souvent d’évolutions nécessaires sur lesquelles le législateur est légitimement interpellé.
Des dispositions relatives au secteur des pêches maritimes figurent également dans cette proposition de loi.
Toutefois, le niveau adéquat pour la prise de décision est le niveau européen. C’est le sens même de la politique commune de la pêche. Des réformes importantes ont eu lieu depuis 2012 et nous sommes actuellement dans une phase de mise en œuvre opérationnelle de cette réforme de la politique commune de la pêche dans toutes ses composantes : la mise en œuvre de l’interdiction des rejets, la nouvelle organisation commune des marchés, l’adoption du programme opérationnel du Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, le FEAMP, qui fixe la stratégie d’intervention des fonds publics jusqu’en 2020.
J’ai mesuré les fortes attentes du secteur concernant le FEAMP. Nous avons, avec les régions, lesquelles sont autorités de gestion déléguées, une obligation de résultat pour que ce FEAMP soit opérationnel dans les prochaines semaines. C’est une priorité du Gouvernement.
Les chiffres des criées pour 2015 confirment une embellie du secteur, avec une valorisation en hausse des productions, en lien avec une amélioration globale de l’état des stocks dans les eaux européennes de l’Atlantique.
Les échanges que j’ai pu avoir avec les représentants du secteur lors du salon de l’agriculture ont confirmé cette conjoncture positive. C’est le moment de poursuivre les adaptations structurelles du secteur, d’avancer sur le renouvellement de la flotte de pêche, alors que – c’est une bonne nouvelle ! – les projets de construction de navires neufs se confirment dans nos ports.
La profession a démontré qu’elle savait faire preuve de responsabilité et s’impliquer dans la mise en œuvre de mesures de gestion pour reconstituer les stocks de pêche. J’en ai été le témoin lorsqu’il a fallu prendre certaines décisions difficiles, comme ce fut le cas récemment pour le bar ou la sole.
Je crois également au développement d’une aquaculture durable dans notre pays ; c’est d’ailleurs une piste forte exprimée par le Premier ministre durant le CIMER du 22 octobre 2015.
La proposition de loi comporte un certain nombre de dispositions favorables. Il faut désormais mettre en œuvre ces engagements de manière concrète, dans le respect de l’environnement, pour une aquaculture de qualité.
Les nombreux amendements qui ont été déposés à l’occasion de ce débat, dans un délai nécessairement contraint, sont le signe d’un profond intérêt de la représentation nationale pour l’économie bleue, dont votre rapporteur Didier Mandelli s’est fait l’écho, et je m’en félicite.