Intervention de Yves Pozzo di Borgo

Réunion du 15 mars 2016 à 14h30
Otan : protocole sur le statut des quartiers généraux militaires internationaux — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Yves Pozzo di BorgoYves Pozzo di Borgo :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le présent texte est une mesure de conséquence du retour de la France au sein du commandement intégré de l’OTAN, que j’avais approuvé. En tant que tel, il appelle en réalité peu de développements. C’est pourtant bien dommage, car nous ne pouvons plus faire l’économie d’une réflexion globale sur le rôle de l’OTAN en Europe et dans le monde contemporain.

L’OTAN a été créée pendant la guerre froide, pour la guerre froide. C’était un outil de lutte et de dissuasion contre l’URSS et, maintenant que celle-ci a disparu, l’OTAN demeure comme une alliance privée d’adversaire et a tendance à s’en créer d’artificiels. À ce titre, il est insuffisant de dire que, à l’heure actuelle, l’OTAN est un outil privilégié de sécurité collective dans la société internationale.

Son fonctionnement n’est pas satisfaisant, quoi qu’en disent M. le secrétaire d'État et M. le rapporteur. Il demeure encore resserré autour de quatre pays anglo-saxons, ceux qu’on appelle les « four eyes » : le Canada, l’Australie, la Grande-Bretagne et, bien évidemment, les États-Unis. Autant le dire, l’OTAN repose principalement sur le commandement américain et, par voie de conséquence, sur le complexe militaro-industriel qui le sous-tend. Que pèsent la France et les autres pays européens dans cette architecture ? Bien peu de chose en fait.

Dans ces conditions, cette alliance est dotée dans son génome même d’un programme stratégique qui fait la part belle à des intérêts économiques bien compris outre-Atlantique, cela parfois au mépris de l’apaisement que demande la sécurité collective européenne.

À ce titre, l’Europe s’est signalée depuis deux ans comme l’un des nœuds les plus sensibles de l’arc de crise global. Le fonctionnement actuel de l’OTAN ne permet pas –au contraire même, dirais-je – d’apaiser la situation en Ukraine, au-delà du compromis, toujours fragile, de Minsk. Il ne permet pas non plus de déterminer une solution à la crise irako-syrienne, dans laquelle la Turquie, pourtant membre de l’Alliance, a pu jouer un rôle très ambigu.

Aussi avons-nous plus que jamais besoin de recentrer l’OTAN sur les problématiques européennes qui ont présidé à sa conception dès le traité de Bruxelles. L’OTAN ne saurait demeurer le véhicule d’une nostalgie de la guerre froide, mais doit devenir enfin le vecteur de sécurité en Europe qu’elle devrait être.

Nous devons avoir une véritable ambition, celle d’une OTAN européanisée. L’Alliance doit devenir l’une des deux jambes de la défense du continent européen avec, à ses côtés, une véritable défense européenne intégrée et autonome.

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