Intervention de Daniel Reiner

Réunion du 15 mars 2016 à 14h30
Otan : protocole sur le statut des quartiers généraux militaires internationaux — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Daniel ReinerDaniel Reiner :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous ratifions aujourd’hui une convention qui est, comme l’a dit Yves Pozzo di Borgo, la conséquence du retour de la France au sein de la structure intégrée de l’OTAN, c'est-à-dire du pilier militaire de l’Alliance atlantique.

C’est au cours du sommet de Strasbourg de 2009, à l’occasion du soixantième anniversaire de l’Alliance atlantique, que la France, par la voix de son Président, a annoncé sa volonté de réintégrer le commandement intégré de l’OTAN, qu’elle avait quitté le 30 mars 1966, sur la décision du général de Gaulle.

Faut-il rappeler ici que cette sortie s’inscrivait dans le contexte de l’époque, celle d’une France, nouvelle et jeune puissance nucléaire, qui souhaitait asseoir une certaine forme d’autonomie stratégique ? Cet acte d’affirmation politique à l’endroit des États-Unis a eu pour conséquence le retour de la pleine souveraineté française sur les installations militaires de l’Alliance sises sur son territoire national – on le sait bien en Lorraine, où ces installations étaient nombreuses –, ainsi que le transfert à Mons, en Belgique, du siège, installé d’abord au palais de Chaillot puis au palais de l’OTAN porte Dauphine, et du quartier général, alors à Rocquencourt.

Cependant, si la France s’est désengagée de la structure militaire, elle est restée solidaire de l’Alliance sur le plan politique, notamment à l’occasion de la crise des euromissiles. Quelque 200 officiers continuaient d’assurer la liaison entre les forces de l’Alliance et les forces françaises, notamment nos forces en Allemagne, sur le fondement de l’accord Ailleret-Lemnitzer de 1967. De même, elle a activement participé plus tard aux opérations de l’OTAN dans les Balkans, en Bosnie puis au Kosovo, dans le cadre des forces IFOR et KFOR. Elle était même le premier contributeur européen.

L’une des raisons avancées pour le retour de la France dans le commandement militaire intégré tenait au souci de peser au sein de l’OTAN d’un poids au moins équivalent à sa contribution financière, qui représente 11 % du budget total de cette organisation. Ainsi, et ce résultat n’est pas négligeable, elle a obtenu, à l’issue du sommet de Strasbourg, en 2009, l’un des deux commandements majeurs, celui de la transformation, sis à Norfolk.

De fait, ce sont 825 officiers français qui devraient évoluer aujourd’hui au sein des structures otaniennes. Assez paradoxalement, le rapport de 2012 de la Cour des comptes souligne l’incapacité de notre pays à pouvoir l’ensemble des postes qui lui sont réservés : ainsi, 150 ne sont pas pourvus.

Sur la demande du Président de la République, en 2012, après l’élection présidentielle, Hubert Védrine a fait un bilan de ce retour de la France et conclu qu’une « (re)sortie française du commandement intégré n’était pas une option ». Outre son coût politique, une telle démarche nous affaiblirait stratégiquement. Le débat est donc clos, quoi qu’en pensent certains.

Venons-en au texte qui nous est soumis aujourd’hui.

En quittant les structures intégrées en 1966, la France dénonçait par la même occasion le protocole de Paris, lequel « définit le cadre juridique du stationnement des organismes de l’OTAN et de leurs personnels au sein des pays de l’Alliance, en traitant particulièrement le cas des quartiers généraux » et assure, dans les « quartiers généraux militaires interalliés créés en vertu du traité de l’Atlantique Nord, une couverture juridique aux personnels militaires et civils stationnés ainsi qu’à leurs personnes à charge, et précise les garanties et privilèges dont ils bénéficieront – exonérations, protection juridictionnelle, règlement des dommages ».

En réintégrant la structure intégrée de l’Alliance, la France a naturellement recommencé à accueillir au sein de ses états-majors des personnels de l’OTAN sans qu’ils bénéficient d’un statut spécifique. Cette situation a d’ailleurs nécessité des arrangements juridiques, parfois bilatéraux, de circonstance et eu pour effet, il faut le dire, une attractivité moindre de la France sur ce plan, alors que l’interopérabilité avec nos partenaires est cruciale, puisque nous sommes engagés avec eux sur plusieurs théâtres.

De fait, la France a introduit devant le Conseil de l’Atlantique Nord une demande de réadhésion au protocole de Paris, approuvée à l’unanimité le 21 janvier 2015. Je m’étonne d’ailleurs, avec d’autres, que nous procédions aussi tardivement à cette démarche de normalisation.

Outre l’application du SOFA OTAN, le texte définit la qualification de quartier général international et de quartier général suprême, ainsi que le périmètre d’application des dispositions qui découlent du texte pour les forces armées, les éléments civils et les personnes à charge.

Les quartiers généraux bénéficieront de la personnalité juridique et de l’inviolabilité des documents et archives. Les personnels disposeront d’exonérations fiscales semblables à celles dont bénéficient les fonctionnaires des institutions internationales.

À titre d’exemple, le quartier général du corps de réaction rapide de Lille, certifié OTAN, et celui du corps de réaction rapide européen de Strasbourg, également certifié OTAN, pourraient bénéficier du présent accord.

Il en va de même du quartier général de l’état-major de la force aéromaritime française de réaction rapide, situé à Toulon, du Centre d’analyse et de simulation pour la préparation aux opérations aériennes de Lyon-Mont Verdun et de quelques autres structures françaises qui participent largement au maillage de l’Alliance.

Cet accord vise donc à harmoniser les statuts des personnels évoluant au sein des structures de l’Alliance et à assurer une cohérence juridique d’ensemble à l’échelle des États membres. Bien évidemment, le groupe socialiste votera en faveur de sa ratification.

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